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#51 29-11-2014 12:59:44

Ultra
Banni(e)
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Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

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Dernière modification par Ultra (24-02-2016 18:04:06)

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#52 30-11-2014 12:03:05

andre1980
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Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

Après le récit de JJ, ton récit me donne encore plus envie de la faire.

Question :
1/ Pas trop dur de trouver des emplacements pour la tente/tarp avec tous ces buissons plein d'épines ?

2/ Combien estimes-tu le coût du voyages sur place (sans les billet d'avion) pour l'intégralité du trail ?

3/ Tu n'as pas eu trop de regard interrogatif lors de la demande de visa (soupçon de voyage pour immigration clandestine) ?

Dernière modification par andre1980 (30-11-2014 12:08:16)

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#53 30-11-2014 20:31:41

Nolok
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Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

>philip
L'APN est un Panasonic Lumix LX3, et c'est effectivement le même pour les 2 ballades.

>andre1980
1/ C'est une des particularités des sentiers américains : ils sont parcourus en majorité par des randonneurs qui bivouaquent ou campent aux abords du trail. Du coup, il y a beaucoup de petits espaces aménagés. Certains sites de bivouac sont même marqués sur les cartes.
2/ Ça dépend de pas mal de facteurs : la durée de la randonnée, le nombre de nuits passées à l'hotel, le nombre de repas au restaurant, les extras et les frais postaux. Dans mon cas (85 jours de marche effective, peu de nuits en dur, et moyennement d'extras) environ 3000$.
3/ Non, aucun. J'avais un peu peur en me présentant à l'ambassade, mais au final rien...

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#54 30-11-2014 21:11:06

Shanx
Sanglier MUL
Lieu : Probablement au boulot :(
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Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

Nolok a écrit :

2/ Ça dépend de pas mal de facteurs : la durée de la randonnée, le nombre de nuits passées à l'hotel, le nombre de repas au restaurant, les extras et les frais postaux. Dans mon cas (85 jours de marche effective, peu de nuits en dur, et moyennement d'extras) environ 3000$.

Ça me parait énorme. yikes
Par un immense hasard, tu aurais une idée de la répartition de cette somme ?

En gros, je finis mes études dans peu de temps, et j’envisage de prendre un petit moment pour voyager/randonner avant d’entrer dans le boulot. Et le PCT (avec le CDT, le sentier des Appalaches, le GDT, le Te Araroa, et plein d’autres trucs big_smile ), ça me tente vachement, donc je me renseigne.


← Mon blog : traversées à pied des Alpes, de l'Islande, de la Corse, des États-Unis - Japon en vélo
Mon trombi
"Heureusement qu'il y a RL pour m'éviter les genoux qui craquent et le dos en compote" - C. Norris
"La liberté est fille des forêts. C'est là qu'elle est née, c'est là qu'elle revient se cacher, quand ça va mal." - Romain Gary

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#55 30-11-2014 21:37:58

Nolok
Membre
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Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

Effectivement, ça fait beaucoup!
Je viens de regarder plus précisemment (que solde initial - solde final) et il y a au moins 600$ provenant d'achats de tissus et de fournitures chez Thru-hiker/Gossamer Gear/Zpacks.
Je pense que je vais ajouter une sixième partie au retour en incluant quelques trucs annexes, comme le budget, où je pourrais te répondre plus en détail, si ça te va d'attendre jusque-là wink

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#56 30-11-2014 21:39:38

Shanx
Sanglier MUL
Lieu : Probablement au boulot :(
Inscription : 22-04-2012
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Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

Quand je dis « dans peu de temps », ça veut dire dans environ 2 ans, donc je pense que je peux attendre un peu. big_smile

En tout cas merci beaucoup pour toutes tes précisions et ton retour détaillé, ça me fait rêver. (Toi aussi tu as du remarquer que le PCT est plus vendeur que les Alpes suisses big_smile ).

Dernière modification par Shanx (30-11-2014 21:40:33)


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#57 01-12-2014 09:13:25

marcheur75
Membre
Inscription : 22-02-2009

Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

Merci beaucoup pour ce compte rendu particulièrement bien écrit et illustré, qui donne effectivement envie de parcourir ce sentier.

Quelques interrogations :

1.    Il se dégage souvent des retours des francophones qu’il y a des moments difficiles, voire de galère, dus notamment aux blessures. J’ai compris que ces blessures venaient essentiellement de trop longues journées de marche. Qu’est-ce qui empêche de limiter la journée de marche à 6 ou 7 heures (soit une trentaine de km en terrain sans trop de dénivelés) ? La distance entre les points d’eau et de ravitaillement ?

En supprimant ou limitant les blessures de par une distance journalière raisonnable, on restreint le nombre de jours de rétablissement, et on progresse globalement vite, sans souffrances. Est-ce possible sur le PCT ?

2.    Question liée : quelle est la distance maximum entre deux points d’eau ? Deux ravitaillements ?

3.    Le bivouac est-il autorisé partout sur le PCT, quelque soit l’état, ou est-il autorisé uniquement sur les aires prévues ?

Un point à souligner : les États-uniens sont particulièrement amicaux, ce qui peut être une des motivations à parcourir le PCT.

Dernière modification par marcheur75 (01-12-2014 09:14:02)


Je n'ai pas lu tous les livres, hélas ! Mais la chair est réjouissante...

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#58 01-12-2014 10:29:45

Nolok
Membre
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Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

1/

marcheur75 a écrit :

J’ai compris que ces blessures venaient essentiellement de trop longues journées de marche

Pas forcément. Dans mon cas, les moments difficiles étaient concentré uniquement sur les 2 premières semaines, alors que mon corps s'adaptait aux conditions. Je préfère personnellement envoyer un signal fort à mon corps et une adaptation brutale "Je m'arrête seulement quand je n'ai pas le choix" à une réduction du temps de marche, qui a de toute façon des conséquences négatives :
- plus d'eau et de nourriture à porter
- tu le paies de toute manière à la fin avec des conditions climatiques plus difficiles en septembre et octobre
- incitation à rester avec la plupart des autres marcheurs et prendre plein de jours de repos en leur compagnie (et on en revient au point précédent)

2/ La distance maximale entre les points d'eau est de l'ordre de 30 miles. Dans les cas où cette distance est supérieure, il y aura à coup sûr une ou plusieurs caches sur le tronçon.
Difficile de répondre pour la distance max entre 2 ravitaillements (2665 miles étant une réponse possible wink ). Théoriquement, la distance maximale entre 2 points de ravitaillement est de 100 miles (voir ici). Après, il faut tenir compte des caractéristiques des endroits (proche du chemin? Si non, quel est la difficulté pour y aller? Quel genre de magasin? Est-ce seulement un bureau de poste, une boîte postale? etc...). Pour la plupart des thru-hikers, la plus longue section fait 174 miles entre Kennedy Meadows et Vermillion Valley Resort.

3/

Pacific Crest Trail Association a écrit :

Permits are required for overnight travel in all wilderness areas, National Parks, CA State Parks and other restricted areas along the trail

Le bivouac est possible n'importe où, à condition d'avoir le PCT Wilderness Pemit.


Un point à souligner : les États-uniens sont particulièrement amicaux, ce qui peut être une des motivations à parcourir le PCT.

Effectivement, ils ont une gentillesse et un sens du partage assez surprenant smile

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#59 01-12-2014 10:35:23

M1ms
Atchoum
Lieu : Héro!!
Inscription : 01-11-2014

Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

Lu'

Shanx a écrit :

(Toi aussi tu as du remarquer que le PCT est plus vendeur que les Alpes suisses big_smile ).

Ah? Mouais, jsais pô... Ca doit dépendre...

Nolok a écrit :

J'augmente progressivement les heures de marche quotidiennes jusqu'à atteindre 42 miles (67 km) en une seule journée!

Ouch, ça doit pas mal piquer le soir au bivouac!

Sinon, ça me fascine l'histoire de Trail angel & les trail magics. Quand on lit ici

sqfp a écrit :

Des riverains un peu paranos avaient repéré le jeu nocturne du faisceau de ma frontale plusieurs nuits de suite dans un même coin, et fort logiquement appelé les schtroumpfs à la rescousse hmm

Ou les aventures d'Ester qui se fait un peu emm... sur un terrain de foot, on se dit que c'est quand même intriguant de prendre sa journée pour filer un plein de bouffe à des tout barbus sac-au-dos wink Je trouve que ça dit un truc assez intéressant sur une partie de la mentalité américaine par ailleurs souvent déroutante... Genre ça:

Nolok a écrit :

qui a eu la gentillesse de garder mon colis pour un prix seulement 4 fois supérieur (20$) à ce qui est mentionné dans la littérature.

C'est quoi leur motivation? C'est du hippie ancien hiker qui revit la sensation de la route ou bien?

Bien beau CR en tout cas, on attend la suite!

Dernière modification par M1ms (01-12-2014 10:36:25)


- ... T'es lourd!
- Oh, de moins en moins!

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#60 01-12-2014 11:13:12

Nolok
Membre
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Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

M1ms a écrit :

C'est quoi leur motivation? C'est du hippie ancien hiker qui revit la sensation de la route ou bien?

Ce sont souvent des anciens ou des futurs thru-hikers qui "paient" leur utilisation des services de trail angels en jouant à leur tour ce rôle pour d'autres hikers. C'est une stratégie donnant-donnant. Moi-même, je prends beaucoup plus d'auto-stoppeurs qu'avant.

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#61 01-12-2014 11:16:19

Nolok
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Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

Partie 4 - Oregon

Je maintiens un gros rythme sur les crêtes pour tenter d'arriver à Ashland avant la nuit.
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Et voilà que je me retrouve une nouvelle fois à faire du stop sur une sortie d'autoroute paumée de la I-5 à la nuit tombante... Heureusement, celle-ci donne sur une route qui est frequentée par plusieurs véhicules par heure. Je suis pris par un minibus transportant des personnes âgées très sympathiques qui me posent plein de questions sur mon périple. Comme ils continuent vers le nord, ils me déposent à la sortie d'autoroute de Ashland.
Je demande mon chemin dans une station-service. On m'indique que le centre-ville est à environ 4 miles... Argh! En effet, comme beaucoup de villes aux USA, Ashland est articulée le long d'une seule et unique rue (généralement appelée Main Street). Aucun problème lorsque l'on est motorisé, par contre à pied c'est une autre histoire. Il me faut traverser la zone industrielle, puis la zone commerciale, les voies de chemin de fer et enfin le centre-ville avant de parvenir à l'auberge de jeunesse située tout à l'autre bout... Je n'envisage même pas l'option du stop. Après tout, je ne suis plus à ça près. Je me mets en route et entre dans un état second, comme déconnecté de la réalité, dans une véritable transe. La sensation de fatigue intense y laisse sa place à un sentiment d'invincibilité. Maintenant que je suis lancé, la dernière chose dont j'ai envie est de m'arrêter, ne serait-ce qu'une seule seconde, et je me moque totalement de la couleur des feux de signalisation. Je me marre bien car toutes les voitures s'arrêtent pour me laisser passer.
Finalement, j'arrive vers 22h, totalement épuisé, au hostel et j'y retrouve Lorax ainsi que deux autres randonneurs.
Après une nuit reposante et une grasse matinée bien méritée, nous nous dirigeons vers un restaurant indien dont on nous a vanté les mérites puisque c'est un buffet "All you can eat" (self-service sans limite), pour un prix dérisoire (10$). Nous nous envoyons plusieurs énormes assiettes de plats en sauce et autres spécialités en plus du dessert et sommes étonnés de la qualité raffinée des mets.
Je me sépare de mes 3 compères pour faire des courses au supermarché et suis à mi-chemin lorsque je commence à me sentir très mal. C'était à prévoir, j'ai mangé trop et trop vite. Je passe deux heures à me tortiller sur les bancs du centre-ville, ne sachant pas dans quelle position me mettre. Les gens s'arrêtent pour me demander si j'ai besoin d'aide. Je réponds que je vais très bien et change d'endroit à chaque fois. Les maux d'estomac s'estompent enfin et je peux finalement remplir la mission de l'après-midi : acheter la l'intégralité de mes provisions pour l'état d'Oregon et ramener à bout de bras les 18 kilos de bouffe à l'auberge. Au moins, j'aurai respecté à la lettre le conseil "Ne jamais faire ses courses le ventre vide"!
Le lendemain, je me rends à la poste pour envoyer deux colis de nourriture, un à Crater Lake et l'autre à la colonie de vacances de Big Lake. Mais surtout, j'y récupère un colis contenant de nouvelles (enfin plutôt des anciennes) bretelles pour mon sac à dos. L'hostel dispose d'une machine à coudre et je peux enfin dire adieu aux soucis de cisaillement de mes épaules. Je repars sur le PCT en fin de journée.
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Quand il s'agit de l'état d'Oregon, les randonneurs ne parlent que d'une chose : l'absence de dénivellé. Pour le moment, je n'ai remarqué absolument aucune différence avec la Californie. Ça monte et ça descend toute la journée, exactement comme lors des 1'600 premiers miles. Par contre, le fait que je sois passé dans l'état d'Oregon a en quelque sorte mis un terme à une relative solitude, car je rencontre un bon nombre de randonneurs qui effectuent la section Oregon du PCT ou un enchaînement des sections Oregon et Washington, appelés ci-après section-hikers.
Je ne tarde pas à découvrir que le sentier est initialement une gigantesque piste de ski nordique. Et comme dans les pays scandinaves, elle est parsemée de cabanes en bois. Je décide de passer la nuit à celle de Brown Mountain et y suis accueilli par une biche et ses faons.
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Le lendemain, je traverse les fameuses coulées de lave de Brown Mountain (photo). Le travail pour y construire un chemin est tout simplement hallucinant et je me demande d'où vient la couleur rouge des roches composant le sentier, contrastant avec la noirceur des blocs de lave. Cela m'a l'air d'être de la roche volcanique et donc je suppose qu'il s'agit de la couleur interne des blocs, fendus en petits morceaux, mais je n'exclus pas la possibilité que ces cailloux aient été apportés là.
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Une vue dégagée me permet d'admirer la pyramide quasi-parfaite du Mount McLoughlin (photo), premier volcan d'une longue série. Alors que je passe au pied de celui-ci, je rencontre Beeman, un section-hiker, ambassadeur de Gossamer Gear. Il est littéralement fasciné par mon sac à dos (fait maison) et me dit que je devrais travailler chez eux, à la conception du matériel. Il m'explique une foule de concepts qui ont dictés l'évolution des sacs à dos de cette marque ces dernières années, et il est impressionné de tous les retrouver sur ma création. Il devient dingue quand je lui dis que ce n'est pas la seule pièce d'équipement que j'ai fabriqué moi-même. Nous échangeons beaucoup jusqu'à ce qu'il soit trop fatigué pour continuer.
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Vers 18 heures, je suis à une centaine de mètre du point marquant les 1'800 miles de sentier, lorsque j'ai la surprise d'entendre une jeune randonneuse qui chante à tue-tête. Alors que je lui dis bonsoir, elle est évidemment très gênée car elle ne s'attendait pas à voir débarquer quelqu'un. Elle m'explique que cette crête est le seul endroit où elle a réussi à capter le réseau pour se remémorer les paroles d'une chanson qu'elle cherchait depuis plusieurs jours! Je fais la connaissance de son chien, qui semble impatient de repartir. Il porte lui-même ses croquettes et sa boisson et c'est lui qui décide quand le tandem s'arrête. Nous marchons ensemble jusque tard dans la soirée, sur des crêtes dégagées d'où nous pouvons admirer le coucher du soleil.
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Au passage d'un ruisseau, le chien commence à racler le sol, exactement comme elle me l'avait décrit, signe qu'il est l'heure de poser le bivouac. Je m'éxecute.
Le lendemain est la journée que j'attendais depuis plusieurs semaines. En début d'après-midi, j'arrive à Mazama Village, une petite station touristique située au pied du Mount Mazama, le volcan dont la caldeira est connue sous le nom de Crater Lake. J'y récupère mon colis contenant mes provisions de nourriture pour les 5 jours à venir et je fais la rencontre de deux autres thru-hikers : Hikes-a-While et Lorax (pas le même que précédemment, c'est d'ailleurs très peu courant de rencontrer 2 trail names identiques). L'ambiance est à la détente. Nous passons l'après-midi à nous sustenter et à boire des bières. En effet, nous attendons le timing parfait pour repartir, car nous avons un projet en tête. Ce projet a beau être interdit par les rangers, j'imagine que c'est un rêve réalisé par beaucoup de thru-hikers.
Pour le moment, l'heure est à la rigolade, surtout lorsque Hikes-a-While s'exclame "Hey, look at this little guy with his gigantic piece of poptart!" (Hé, regardez-moi ce petit gaillard avec son énorme bout de poptart!) en pointant du doigt un chipmunk dressé sur ses pattes arrières en train de grignoter un morceau de poptart à la fraise (une sorte de biscotte enduite de sucre glace, de couleur rose bonbon) qui mesure environ la moitié de sa taille! L'une des anecdotes les plus comiques de mon aventure.
Nous nous mettons en route vers 17h afin de parcourir les quelques miles qui nous séparent de l'endroit magique où nous prévoyons de bivouaquer. Ça monte... Tout à coup, la vue se dégage et là, le spectacle s'offre à nous. Nous y sommes! La caldeira de Crater Lake est à nos pieds! Nous avons le sourire jusqu'au oreilles pendant plusieurs minutes. L'instant est inoubliable.
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Nous restons sans voix pendant un sacré moment, jusqu'à ce qu'arrive un couple de hippies d'une soixantaine d'années. La femme plane à un niveau... Stratosphérique. Elle est incapable de dire ou même de comprendre quoi que ce soit. Nous engageons alors la conversation avec l'homme. Très vite, il s'exclame d'une voix rauque "Ohh, you guys are on the trail?! You must need supplies, then! One moment, I've got something for you." (Ahh, vous êtes des marcheurs?! Vous devez avoir besoin de ravitaillement, alors! Une seconde, j'ai quelque chose pour vous.) avant de sortir différentes substances illicites de son sac, dont il nous fait cadeau. Nous refusons dans un premier temps, mais il insiste. Nous finissons par accepter et le remercions vivement. N'en consommant pas, je refile ma part à mes deux compères, qui du coup sont encore plus contents, d'autant plus que ça a l'air "d'être de la bonne", au vu de l'état de la madame!
Nous faisons quelques centaines de mètres et posons le bivouac à la belle étoile avec une vue imprenable sur le lac. De notre emplacement, nous pouvons admirer de plus près "l'île" en forme de cône qui n'est autre que la cheminée du volcan. Le fait d'imaginer que ce cratère était autrefois une chambre magmatique qui s'est écroulée sur elle-même nous donne froid dans le dos. Le spectacle se poursuit tout au long de la nuit, alors que la lune vient se refléter dans l'eau.
Cette eau est d'ailleurs, paraît-il, d'une pureté exceptionnelle puisqu'elle provient uniquement et directement du ciel, sous forme de pluie ou de neige. Aucun cours d'eau n'entre ni ne sort de ce cratère. Et cela représente bien tout le paradoxe de la situation que nous vivons le lendemain : une quantité incroyable d'eau pure se trouve en contrebas à quelque centaines de mètres de nous, inaccessible, alors qu'aucune source ni cours d'eau ne se trouve à proximité du chemin sur une section de 40 miles entamée depuis la veille à 18h. Le désert californien n'est effectivement pas le seul endroit avec peu de points d'eau sur le PCT.
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Nous rejoignons "Rim Drive", la route qui longe le bord du cratère et admirons "The Watchman" (photo).
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La section qui suit est des plus droite et plate, mais est rendue pénible par les arbres tombés sur le chemin. Le sentier passe au pied du Mount Thielsen (photo) juste avant d'arriver au ruisseau Thielsen Creek. J'y fais la connaissance de Bobcat, le premier thru-hiker qui parcourt le chemin dans le sens inverse. Il a eu droit à un parcours relativement tranquille au niveau de l'enneigement, beaucoup moins important par exemple que l'année précédente. En effet, la vallée où nous nous trouvons était sous un bon mètre de neige à la même date en 2012.
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Au moment de mettre fin à la journée, il m'est impossible de trouver un coin qui n'est pas infesté de moustiques! Je m'arrête finalement dans une clairière et le bruit que font ces bestioles m'empêche de m'endormir.
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Le lendemain, je prévois de faire le plein d'eau dans un lac repéré sur la carte. Tout est tranquille dans la forêt jusqu'au moment où j'arrive à ce maudit lac (Summit Lake), où je me fais à nouveau assaillir par un nombre alarmant de moustiques. Problème : le remplissage des bouteilles requiert de rester immobile pendant plusieurs dizaines de secondes dans une position accroupie ; position dans laquelle mes pantalons ne protègent pas mes chevilles (sachant qu'ils n'hésitent pas à piquer à travers les chaussettes). J'abandonne après avoir failli passer au lac en ayant voulu éclaffer quelques audacieux. Moi qui ai marché toute la journée en pensant faire une pause ici... C'est râpé. Je suis contraint de continuer.
Le sentier passe ensuite parmi un nombre incalculable d'étangs de couleur indéfinissable allant du noirâtre au rougeâtre, signe d'une très forte concentration de matières organiques en décomposition. Je comprends maintenant pourquoi les moustiques aiment cet endroit! Je m'arrête enfin pour manger et suis sur le point de repartir quand je suis rattrapé par Lint.
Cela fait déjà plus d'un mois (37 jours) que nous nous sommes vus pour la première et unique fois, à Red's Meadow. Le plus dingue est qu'entre-temps, il m'ait dépassé et que je lui sois repassé devant, sans que jamais l'on ne se croise.
Je suis directement fasciné par le personnage. Lorsqu'il dépose son sac à terre, je suis stupéfait par la taille de celui-ci. En fait, c'est plutôt le rapport entre la carrure du mec, taillé comme une armoire (1m85, 90kg, bien musclé) et la taille ridicule de son sac qui est étonnant, si bien que j'ai l'impression d'avoir en face de moi un gorille qui trimballe un sac pour enfant! Je l'observe ensuite prendre son repas alors que je range quelques affaires. À ma grande stupéfaction, il est prêt à repartir en 5 minutes chrono en ayant ingurgité sa nourriture, fait sa vaisselle et préparé son prochain repas. C'est à ce moment-là que je mesure l'expérience du bonhomme, qui parcourt les sentiers américains de longue distance chaque été depuis 10 ans et qui totalise plus de 16'000 miles. En effet, rien dans son matériel ni dans l'éxecution des tâches quotidiennes ne comporte quoi que ce soit de superflu.
Alors que nous nous mettons en route, j'ai du mal à le suivre et il me distance rapidement. Je le rattrape alors qu'il déplace un tronc d'arbre tombé au milieu du chemin. Il m'explique que le nombre de randonneurs parcourant les sentiers serait quasiment suffisant à leur auto-entretien, à condition que chacun effectue des "bonnes actions" telles que déplacer quelques troncs d'arbres ou couper quelques branches gênantes. Ce raisonnement est d'une logique tellement évidente que j'ai honte de ne jamais y avoir pensé avant.
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Sans même nous en rendre compte, nous prenons un peu de hauteur sur les flancs de Diamond Peak. Une des choses qui m'a le plus frappé en Oregon est la rapidité avec laquelle on saute de l'étage montagnard, couvert de forêts de pins interminables, à l'étage subalpin où l'on rencontre des prairies parsemées de fleurs et de buissons. Lorsque l'on se trouve à une altitude comprise entre 6'000 et 7'000 pieds (1'800-2'100 mètres), il suffit parfois de s'élever de 100 pieds (30 mètres) pour émerger de la forêt et la dominer complétement. Nous nous retrouvons donc au dessus de la limite des arbres pour le bivouac.
Le lendemain, petit suspense au moment de regarder quel jour de la semaine nous sommes... Dimanche! Quelle chance, nous allons pouvoir profiter du restaurant de Willamette Pass, ouvert seulement le week-end. Lint m'y rejoint après avoir fait un détour de 2 miles pour aller chercher son ravitaillement à Shelter Cove Resort. Je le laisse recharger son téléphone et repars devant.
L'après-midi, je fais une pause au bord de Charlton Lake, qui, à ma grande surprise, n'est pas infesté de moustiques. J'assiste avec étonnement à la création d'une colonne de fumée de l'autre côté du lac, à moins d'un kilomètre de ma position. Cette colonne devient rapidement beaucoup trop volumineuse pour qu'il s'agisse d'un simple feu de camp et il est probable que cela soit un début d'incendie. J'alerte immédiatement une famille de campeurs située non loin pour qu'ils appellent le service des forêts.
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À voir la section qui suit, ce n'est pas la première fois qu'un incendie se déclare dans le coin. Avec le temps, les pins calcinés perdent leur écorce carbonisée et cela donne parfois des effets d'optique étonnants, comme lorsque je passe à côté de cette butte (photo), où je ne voit qu'une sorte de mur blanchâtre dans ma vision péripérique.
Je repère une clairière sur la carte (Cougar Flat) pour mon bivouac du soir. Je devrais théoriquement être tout proche. Les minutes défilent, la luminosité diminue. 21h30. Il fait nuit et toujours aucune trace de cette maudite clairière. Je continue en me demandant si je ne me suis pas égaré. Impossible de trouver un seul endroit convenable pour dormir tellement la forêt est dense. Comme d'habitude dans ces cas-là, je finis par me poser directement sur le sentier. Je ne reste que très rarement éveillé si tard et j'assiste à l'endormissement de la forêt. L'ambiance est des plus étranges : il n'y a aucun vent, aucun bruit. Pendant des minutes entières, le silence est absolument total, comme dans une boîte qu'on aurait insonorisée. Flippant...
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Les forêts interminables cèdent leur place à des paysages montagnards et glacières alors que je m'approche des Three Sisters, une chaîne constituée de trois volcans de plus de 10'000 pieds.
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South Sister.
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Middle Sister.
En fin de journée, je m'arrête à proximité de Obsidian Creek. Le coin est truffé d'obsidienne, un verre volcanique translucide et coupant dont les peuples amérindiens se servaient pour fabriquer des outils.
Au matin, je suis réveillé par une biche venant s'abreuver au ruisseau et, alors que je finis mon petit-déjeûner, surgit Lint qui a bivouaqué à quelques centaines de mètres de là. Nous repartons ensemble et nous rendons à la source du torrent, située non loin. L'eau qui jaillit du sol à cet endroit est sans aucun doute la plus froide que j'ai jamais bue. Quelques gorgées suffisent à m'anésthésier la bouche et la gorge.
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Nous nous dirigeons ensuite en direction de Mackenzie Pass à travers des paysages volcaniques incroyables. Après une courte montée, s'offre à nous une magnifique vision de la suite de la chaîne des Cascades (photo) avec dans l'ordre, le Mount Washington, le Three-Fingered Jack, le Mount Jefferson (enneigé) et le Mount Hood (enneigé, tout au fond). Le PCT passe évidemment au pied de chacun de ces colosses.
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La couverture nuageuse du matin se dissipe et nous traversons les champs de lave de Mackenzie Pass (photo) sous le cagnard. Programme de la fin de journée : ravitaillement à la colonie de vacances de Big Lake puis une petite surprise-party organisée par Lint. Est également invité, Bear-Cow, un autre thru-hiker que nous dépassons en chemin. Celui-ci m'indique qu'il randonnait il y a quelques jours avec le couple de suisse-allemands dont j'ai déjà entendu parler plus tôt et donc qu'ils sont "juste" devant nous.
Nous arrivons à la colonie de vacances religieuse et sommes accueillis par quelques membres du staff très sympathiques qui nous proposent immédiatement lessive et douches. Lint m'avait décrit l'endroit comme un endroit à ne pas rater, et c'est effectivement le cas : un accueil chaleureux et un service totalement gratuit en font sans aucun doute un des meilleurs points de ravitaillement du PCT. Alors que nous attendons la fin de la lessive, nous discutons avec quelques moniteurs et aussi Wasabi, une section-hiker autrichienne dont je me rappelle avoir consulté la liste prévisionnelle sur RL (coucou Wasabi big_smile) pour sa tentative de thru-hike en 2012. Le camp est quasiment désert jusqu'au retentissement d'une cloche qui provoque le déferlement d'une bonne centaine de gamins. Certains commencent à nous poser une foule de questions et Lint entame alors son show en montrant ses tatouages. En effet, il est couvert de tatouages représentant les sentiers de grandes randonnées qu'il a parcourus. Le PCT y est bien sûr représenté et remonte tout le long de sa jambe droite. Il est obligé de remonter son short pour montrer la section la plus au nord, geste qu'il accompagne toujours d'un suave "Wanna go to Canada?" (Ça te dit d'aller au Canada?)... Indépendamment du sexe de son interlocuteur! lol
Trève de plaisanterie, nous devons nous remettre en route pour être à Santiam Pass sur le coup des 20h. Lint y a organisé un rendez-vous avec des amis à lui qui habitent à Sisters. Il sont sensés apporter un festin. Lorsque nous arrivons, un carton à pizza est posé sur une table de pique-nique. Seulement, ce n'est pas un carton à pizza ordinaire puisque celui-ci dépasse la largeur de la table! Nous explosons de rire à la vue de ce monstre. Le reste de la soirée est dans la même veine et je suis littéralement plié tout du long, spécialement quand Lint et Bear-Cow se lancent dans un concours d'immitation de l'accent d'Arnold Schwarzenegger (un délire purement américain).
Le réveil est difficile et nous décollons assez tard. J'ai des courbatures aux abdominaux à cause des rires de la veille.
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Le matin, nous passons à côté du Three-Fingered Jack (photo), puis nous sommes cueillis par une averse à proximité du Mount Jefferson. Mince, c'est encore raté pour les 1'000 miles sans aucune goutte de pluie (seulement 980 cette fois-ci)! La traversée de quelques rivières, notamment Milk Creek et Russell Creek, devient un peu plus périlleuse.
Cette petite pluie me permet de mettre au jour une coïncidence assez énorme : je découvre avec étonnement que Lint est en possession de mon rouleau de Leukotape, que j'avais oublié à la source de Big Springs, 270 miles auparavant! J'étais justement très inquiet au sujet de mon petit orteil, dont la peau ramollie par l'humidité commençait sérieusement à s'arracher et risquait de s'infecter depuis que j'avais perdu mon rouleau de "scotch magique".
L'averse purge également le sentier de ses empreintes de pas et nous indique que deux personnes aux chaussures identiques (des Salomon pour être plus précis. En effet, après plus de 2 mois sur le PCT, je suis capable de reconnaître les empreintes laissées par plusieurs marques et/ou gammes et/ou modèles de chaussures différentes) sont passées par là il y a peu de temps. Nous en concluons que sommes sur les traces du couple de suisses.
Le lendemain matin, nous aperçevons au loin deux individus, au sommet d'une crête. Et devinez quelle date nous sommes? Le 1er août, jour de la fête nationale suisse! Alors que je m'approche d'eux, je prends le risque d'entamer l'hymne national. Petit moment d'incompréhension, me serai-je trompé sur leur identité? Ouf, ce sont bien eux! Après les salutations et quelques explications, ils nous avouent ne pas avoir connaissance de la date et ne pas avoir reconnu immédiatement l'hymne à cause des paroles en français.
Nous descendons ensemble la face nord du col, totalement couverte de neige, en glissant sur plusieurs centaines de mètres. Ils initient Lint aux joies du Schwizerdütsch (suisse-allemand), et quant à moi, cela me fait presque plaisir d'entendre à nouveau cette magnifique langue. Malheureusement, Lint et moi les distançons rapidement. Je lui explique brièvement que nous avons eu affaire à deux purs suisses, qui font honneur aux réputations traditionnelles de ponctualité (nous les avons rencontrés précisement le 1er août, pas un autre jour)... Et de lenteur!
Nous arrivons à la station d'Olallie Lake sur le coup des 11h. Lint connait la tenancière du magasin et donc nous nous y éternisons un peu, surtout que nous nous éloignons du timing parfait pour rejoindre Timberline Lodge. Ah, Timberline Lodge et son buffet gastonomique, un autre truc absolument incontournable sur le PCT. C'est bien simple, cela fait plusieurs semaines que j'en entends parler presque quotidiennement, et nous sommes sur le point de le rater. Rapide calcul : l'objectif est à une distance de 54 miles (87km) et le buffet ferme à 14h. Il faudrait idéalement y arriver vers 13h pour avoir le temps de manger. Cela représente donc 18 heures de marche dans les 24 prochaines heures, pauses exclues. Un jeu d'enfant pour deux thru-hikers aggerris! Nous décidons de tenter le coup.
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Nous cheminons à 3.5 miles par heure pendant toute l'après-midi, sur cette section réputée comme étant la plus plate du PCT.
En chemin, nous rencontrons une famille de section-hikers MUL et sommes surpris de constater que les enfants portent eux-même l'intégralité de leur matériel. La fillette agée de 7 ans s'exclame d'ailleurs "I'm even carrying some food!" (Je porte même un peu de nourriture!), ce à quoi rétorque son frère de 9 ans "Come on, you're only carrying rice cakes!" (C'est ça, tu ne portes que des galettes de riz!)! lol Explosion de rire générale. Avant de repartir, Lint prend la pose avec les gamins. Le monde entier aura désormais la preuve irréfutable que son sac de rando est véritablement plus petit qu'un sac pour enfant!
Il est passé 23h lorsque nous nous arrêtons sur la berge de Timothy Lake, après une journée de 45 miles. Le ciel est assez menaçant et Lint commence à monter son abri sous un léger crachin. Je lui sors "I tell you, it is NOT gonna rain." (Je peux t'assurer qu'il ne va PAS pleuvoir.). Je choisis même de ne pas monter mon abri et de m'installer à l'endroit le plus exposé au ruissellement pour lui prouver mes talents de devin. Par un phénomène inexplicable (1'000 miles sans pluie ajouté à la flemme de monter l'abri lol), je savais qu'il n'allait pas pleuvoir... Et j'avais raison!
Départ à 6h du matin, nous sommes dans les temps pour le buffet. En fin de matinée, nous tombons sur un couple de randonneurs à la journée qui nous reconnaissent immédiatement comme des thru-hikers, et pour cause. Cela ne s'invente pas: ils se sont rencontrés sur le PCT en 2009 alors qu'ils effectuaient leurs thru-hikes respectifs... Et il se marient aujourd'hui... À Timberline Lodge! Nous sommes invités à l'apéro.
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Timberline Lodge est en vue, sur les flancs du Mount Hood (photo). On me l'avait décrit comme une énorme chalet en bois et donc je m'imaginais plutôt une construction en hauteur, de style chalet valaisan. Première surprise : de très (très) loin, la bâtisse ressemble plutôt à une vieille ferme gruyérienne d'alpage, de forme très allongée. Au fur et à mesure que nous nous approchons, je commence à mesurer la taille gigantesque de ce bâtiment. Il s'agit en fait d'un immense château. Celui-ci renferme un complexe hôtelier, véritable palace d'altitude, avec plusieurs restaurants, salles de réception, suites, boutiques de luxe, spa et j'en passe. L'intérieur en pierres taillées et bois massif est orné de sculptures et de d'œuvres d'art.
Le contraste est saisissant entre nos deux carcasses sales et puantes de thru-hikers et cet environnement fasteux. Et pourtant, nous sommes accueillis comme des rois par les majordomes en costumes de pinguins, là ou un autre établissement de standing similaire nous aurait jeté à la porte. Ici, les marcheurs et autres alpinistes font partie intégrante de la clientèle, au titre de patrimoine vivant du lieu et de son histoire. Et c'est ainsi que nous sommes conduits à une table nappée avec des couverts en argent. Le concept de ce restaurant est le suivant : proposer des mets populaires typiquement américains revisités de manière gastronomique, disponibles en buffet self-service et sans aucune limite de quantité (All You Can Eat). Le choix de salades, féculents, viandes et desserts est gigantesque, et nous avons la chance d'être les seuls à être capables de goûter absolument TOUS les mets (Bah oui, 110 bornes en 30 heures, ça creuse!). Le raffinement des mets est très appréciable. À titre d'exemple, les Mac'N'Cheese (macaronis au fromage), plat bien lourd et bourratif par excellence, sont ici légers, croustillants, bien assaisonnés, presque aériens!
Nous passons le reste de l'après-midi à digérer sur des transats, puis au bar à goûter différentes IPA (India Pale Ale, des bières à forte concentration de houblon). La région de Portland est en effet connue pour ses microbrasseries. Nous faisons encore quelques photos avec les futurs mariés rencontrés le matin avant de nous remettre en route.
Nous ne sommes plus qu'à un jour de marche de Cascade Locks au bord de la Columbia River, fleuve qui marque la séparation entre les états d'Oregon et de Washington. Lint prévoit de passer chez lui à Portland et m'y invite également.
Le chemin descend progressivement de la limite supérieure des arbres jusqu'au niveau de la mer. Au fur et à mesure de la descente, nous observons le changement entre les forêts de pins et les forêts humides voire pluviales des plus basses altitudes. Apparemment, Lint est pressé de se retrouver chez lui et il court comme un lapin aujourd'hui.
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Le tracé du PCT est assez incompréhensible dans cette zone, puisqu'il évite plusieurs endroits pittoresques tels que les Ramona Falls (photo) et surtout le Eagle Creek Trail.
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Nous nous écartons donc du tracé officiel, comme la plupart des randonneurs, pour découvrir les merveilles du Eagle Creek. Ce cours d'eau est parsemé de cascades spectaculaires, et de vasques paradisiaques. Nous passons par Tunnel Falls (photo), une chute d'une cinquantaine de mètres de haut. Cet endroit est rendu encore plus insolite par le fait que le sentier forme un tunnel passant directement derrière la cascade!
La perte d'altitude et le rapprochement de la côte s'accompagne naturellement d'une hausse de la température et de l'humidité ambiante. Nous sommes sur le point de suffoquer lorsque nous parvenons à Cascade Locks, au bord de la Columbia River. Après une petite demi-heure d'attente, arrive la copine de Lint qui nous ramène en voiture à Portland. Ils me déposent chez des amis à eux, connus sous le nom de "The 20'000 miles house". C'est en fait une colocation constituée de Freefall, So Far et Cat, qui sont tous marcheurs au long cours et qui totalisent à eux trois plus de 20'000 miles. Après une bonne douche, nous allons tous ensemble au restaurant.
Comme à Ashland, j'achète l'intégralité de mon ravitaillement en nourriture que j'envoie directement par la poste pour la fin du trajet, puis Lint me fait visiter rapidement la ville.
De retour à Cascade Locks, c'est en passant devant le bureau de poste que je me souviens que ma boîte postale m'y attend! Il s'en est fallu de peu pour que je l'oublie totalement. C'est le dernier endroit où je suis sensé la récupérer et j'ai du coup carrément oublié de réfléchir à ce que j'allais faire avec. Je décide de remettre à plus tard la réflexion et la renvoie un peu plus loin, à Snoqualmie Pass, ce qui s'avérera être un choix peu judicieux.

Dernière modification par Nolok (02-09-2016 22:00:16)

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#62 01-12-2014 11:44:33

marcheur75
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Inscription : 22-02-2009

Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

Nolok a écrit :

...

La distance maximale entre les points d'eau est de l'ordre de 30 miles. Dans les cas où cette distance est supérieure, il y aura à coup sûr une ou plusieurs caches sur le tronçon.
Difficile de répondre pour la distance max entre 2 ravitaillements (2665 miles étant une réponse possible wink ). Théoriquement, la distance maximale entre 2 points de ravitaillement est de 100 miles (voir ici). Après, il faut tenir compte des caractéristiques des endroits (proche du chemin? Si non, quel est la difficulté pour y aller? Quel genre de magasin? Est-ce seulement un bureau de poste, une boîte postale? etc...). Pour la plupart des thru-hikers, la plus longue section fait 174 miles entre Kennedy Meadows et Vermillion Valley Resort.

...

Merci pour la réponse et le lien (et la suite du récit !).

Bon, comme tu persistes à vouloir nous faire rêver, si un randonneur lambda se lance sur le chemin :

100 miles (160 km) entre deux ravitaillements, à raison d’une moyenne modérée et modeste de 30 km/jour, représentent 5 à 6 jours de marche. Si eau tous les jours grâce aux caches, cela semble jouable pour un randonneur sans capacités physiques particulières, indépendamment des autres conditions, comme le climat et la faune.

174 miles (280 km) entre Kennedy Meadows et Vermillion Valley Resort représentent, toujours à 30 km/jour, 9 à 10 jours de marche. Là, le poids de la nourriture sera pénalisant.

Toujours à 30 km/jour, les 4300 km pourraient se parcourir en 143 jours, soit un peu moins de 5 mois. Si départ début mai, arrivée avant fin septembre.
En 3,5 mois, tu as parcouru une moyenne de 40 km/jour.

Je vois qu'il y a toujours des hippies et de l'herbe sur la côte ouest. Y a-t-il toujours des bodybuildés et de superbes blondes ?


Je n'ai pas lu tous les livres, hélas ! Mais la chair est réjouissante...

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#63 01-12-2014 23:40:54

ThiX
Ermite sociable
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Inscription : 24-07-2012

Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

Salut  smile

les épisodes de Crater Lake et Timberline Lodge sont vraiment sympas  tongue

L'Oregon, finalement, est loin d'être inintéressant. Je trouve les paysages magnifiques.

Encore merci pour ce retour addictif.


En éMULation
Trombi

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#64 02-12-2014 09:27:55

andre1980
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Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

Vivement la liste du matériel.

Ton récit me donne envie. Je vais "travailler" mon patron pour qui me laisse partir 6 mois en congé sabbatique (c'est pas gagné mais alors pas du tout) en 2016.

Question :

1/  En France, tu marches combien de kilomètre par jour en montagne sans forcer lors de tes randonnées pour faire une comparaison (pour voir si tu marches moins vite que moi)

2/ Comment tu décrirais la difficulté technique et physique du PCT. Plus, moins ou identique à nos montagne française ?
Le faite que ça soit toujours sur un chemin "fait" me donne l'impression que l'on peu marcher plus vite (déroulement de la marche plus fluide/régulière) que dans les Pyrénées

Dernière modification par andre1980 (02-12-2014 09:28:44)

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#65 02-12-2014 09:39:00

Grands-Pas
Marcheur sous le vent
Lieu : Belgique
Inscription : 25-12-2013

Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

andre1980 a écrit :

1/  En France, tu marches combien de kilomètre par jour en montagne sans forcer lors de tes randonnées pour faire une comparaison (pour voir si tu marches plus vite que moi)

tongue


" J'allumai une cigarette et continuai de descendre la colline. Étais-je donc la seule personne que cet avenir bouché rendait fou ? "

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#66 02-12-2014 09:49:10

andre1980
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Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

Ouais. Dans ma tête, c'était ça.  big_smile
Je pense que Nolok marche plus vite que moi.  tongue

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#67 02-12-2014 10:10:33

Nolok
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Inscription : 31-08-2011

Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

1/ Pour moi, une journée ordinaire en montagne, c'est 25-35 km avec ~2000 D+. Mon retour P'tit Tour des Alpes Suisses devrait te donner une idée plus précise.

2/ La difficulté sur le PCT est bien inférieure pour deux raisons :
- le sentier est très bien marqué et dépourvu d'obstacles.
- le sentier a été construit pour être praticable par des chevaux et sa pente maximale est de 6 à 8% (à part sur le JMT il me semble), ce qui représente un truc très faible à pied. Une différence d'altitude de 1000 mètres s'étale en gros sur 12 à 16km. Du coup, on a jamais l'impression de monter ou de descendre vraiment. C'est un des aspects vraiment frustrant du PCT, car souvent, on a vraiment envie de descendre tout droit dans la pente au lieu de faire d'interminables lacets. (voir la vidéo de JJ sur la descente du San Jacinto).
Il est donc facile de maintenir une allure de 5km/h quel que soit le terrain.

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#68 02-12-2014 10:13:57

Shanx
Sanglier MUL
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Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

Justement, cet aspect de facilité et de lenteur, avec un chemin tout tracé et sans difficultés, est ce qui avait rebuté JJ. Ça semble radicalement différent de la solitude et de l'engagement de ton tour des Alpes Suisses. Qu'en as-tu pensé ? Pas trop ennuyant ?


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Mon trombi
"Heureusement qu'il y a RL pour m'éviter les genoux qui craquent et le dos en compote" - C. Norris
"La liberté est fille des forêts. C'est là qu'elle est née, c'est là qu'elle revient se cacher, quand ça va mal." - Romain Gary

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#69 02-12-2014 10:30:28

Nolok
Membre
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Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

Il faut garder à l'esprit qu'avant de commencer le PCT, j'étais encore relativement débutant en rando : je n'avais jamais fait de rando de plus de 3 jours auparavant. Je n'avais donc pas l'expérience de JJ et le fait d'être en quelque sorte "pris par la main" (trail angels, caches d'eau, sentier sans trop de difficulté, ...) m'a mis en sécurité pour ma première vraie expérience au moyen/long cours.
Avec du recul, j'adorerais refaire le PCT pour revoir tous ces endroits magiques, mais je pense que maintenant, ces aspects me rebuteraient comme ce fut le cas de JJ.

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#70 02-12-2014 10:52:21

andre1980
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Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

Nolok a écrit :

1/ Pour moi, une journée ordinaire en montagne, c'est 25-35 km avec ~2000 D+. Mon retour P'tit Tour des Alpes Suisses devrait te donner une idée plus précise.

2/ La difficulté sur le PCT est bien inférieure pour deux raisons :
- le sentier est très bien marqué et dépourvu d'obstacles.
- le sentier a été construit pour être praticable par des chevaux et sa pente maximale est de 6 à 8% (à part sur le JMT il me semble), ce qui représente un truc très faible à pied. Une différence d'altitude de 1000 mètres s'étale en gros sur 12 à 16km. Du coup, on a jamais l'impression de monter ou de descendre vraiment. C'est un des aspects vraiment frustrant du PCT, car souvent, on a vraiment envie de descendre tout droit dans la pente au lieu de faire d'interminables lacets. (voir la vidéo de JJ sur la descente du San Jacinto).
Il est donc facile de maintenir une allure de 5km/h quel que soit le terrain.

Merci. Je pensais ça un peu plus physique en lisant les compte rendu de personne qui râle sur les D+ à faire chaque jour.
30km/jour minimum semble donc assez facile à faire sans forcer sur "la machine".

Question :

Comment se passe la partie "boite à ours". Tu expliques pas le système.
- Il faut la réserver avant ?
- où ?
- combien $$ ?
- il faut la rendre où ?

Si tu te rappels des dimensions, je suis preneur aussi.

Dernière modification par andre1980 (02-12-2014 12:14:20)

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#71 02-12-2014 16:40:57

Ultra
Banni(e)
Inscription : 03-11-2012

Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

.

Dernière modification par Ultra (24-02-2016 18:02:46)

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#72 02-12-2014 18:09:54

CLeC
Membre
Lieu : IdF
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Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

Bonjour,
Merci pour ce super retour dépaysant !
Pour l'instant c'est l'Oregon qui a ma préférence, avec ce beau lac volcanique...


4981875N - 0698785E - 1761m

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#73 02-12-2014 18:39:40

highpictv
dit "Hichpyche"
Lieu : Talence, Bidart ou Aragnouet
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Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

Bon ok, si on distribue de la beuh sur le parcours je veux bien faire un effort lol


- Mieux vaut être mort en vallée d'Aure que vivant en vallée de Campan (proverbe local) -
Mes randos dans mon trombino.

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#74 03-12-2014 01:09:49

Kam
Membre
Inscription : 19-01-2011

Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

J'en suis qu'au début, mais merci pour ce récit; wink

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#75 03-12-2014 18:44:50

highpictv
dit "Hichpyche"
Lieu : Talence, Bidart ou Aragnouet
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Re : [Récit + liste] Pacific Crest Trail

Je viens de croiser ce gif smile

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C'est bien Crater Lake ?


- Mieux vaut être mort en vallée d'Aure que vivant en vallée de Campan (proverbe local) -
Mes randos dans mon trombino.

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