Aller au contenu

Annonce

#126 12-11-2015 02:33:52

bruno7864
partir, partir et découvrir
Lieu : toujours dans la Lune
Inscription : 11-10-2012

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

déjà au bout..il manque quelque chose non?
Merci pour ce récit vraiment intéressant et ces images qui nous plongent littéralement dans l'ambiance de ta rando...un peu casse cou le Mknod non? smile

quelques réflexions qui pour certaines ont déjà été développées par d'autres:

- l'erreur du 2ème jour a été de ne pas envisager de faire demi tour en alternative principale, surtout que tu n'avais ni la connaissance du passage ni la visibilité du terrain. Ton option de continuer devenait à ce moment plus qu'hypothétique. Après on peut discuter du moyen de contourner telle ou telle difficulté mais l'erreur à ne pas commettre est de ne pas envisager le demi tour.

- concernant les "crampons" si on peu appeler les instruments présentés ainsi, il faudrait que tu rajoutes une légende en dessous de la photo "déconseillé pour ce genre de terrain" ou une formule plus sympa "à conseiller à votre pire ennemi" wink

A ce propos, sur cette rando tu étais plus dans l'évolution sur des terrains délicats, la recherche de passages etc, et pas dans la marche stakhanoviste qui étale des km et D+/D- usantes qui sollicitent plus l'organisme et pour lesquels le poids contenu marcheur+sac au delà du confort est primordial pour éviter les blessures. Il aurait peut être été intéressant dans ton cas de rajouter un peu de poids à ta liste et prendre un matériel plus approprié Alpi et par exemple, des crampons 6 ou mieux 12 pointes. Ces derniers aidés du piolet coté amont t’auraient donné confiance pour la traversée du fameux névé et peut être ailleurs.

- Tu parlais il y a quelques temps d'un smartphone il me semble. Avec un abonnement iphigénie tu aurais pu avoir les cartes topographiques Espagnoles de la zone, et rencontrer moins de difficultés pour t’orienter qu'avec des cartes A4. En plus, tu aurais pu te passer de ton GPS de ta montre qui est tombée en panne... En tout cas sur la fameuse crête au dessus du lac nègre tu aurais su où tu étais précisément.

- Pour le thru-hicker, il me parait bien gras, un peu pâlichon, et bien trop proprement équipé pour un thru-hicker. La barbe à la ZZtop ne suffit pas tongue . En tous cas une chose est certaine ça ferait longtemps qu'il aurait abandonné son couvre sac doggy-bag si tel était le cas. Quand à son utilisation des bâtons rien de bien exceptionnel il me semble, peut être même fait-il une erreur car c'est pas mal de laisser un bâton derrière en descente pour redresser le tir. Les deux devant si tu glisses, tu es sur le cul. lol Alors ne te prends pas la tête, ne change rien, fais avec les bâtons comme cela te semble logique et tout ira pour le mieux. wink

- au début de ton récit je pensais c'est trop long, des images bordel des images........ mais j'ai été captivé et ai tout lu. Bravo!!! cool cool

Dernière modification par bruno7864 (12-11-2015 02:35:17)

Hors ligne

#127 12-11-2015 09:17:19

Magne2
Membre
Lieu : Vitry sur Seine
Inscription : 23-09-2013
Site Web

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

Bonjour

les crampons classiques se marient difficilement avec des chaussures de trails sur le long terme ,il me semble que Salomon pour Killian Jornet cherchait à développer un modéle de chaussures  légères pour la haute montagne enneigée  ET acceptant les crampons classiques .


kalo taxidi alias bon voyage en Grec bien sur

Hors ligne

#128 12-11-2015 09:57:32

bruno7864
partir, partir et découvrir
Lieu : toujours dans la Lune
Inscription : 11-10-2012

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

Salut Magne, est-ce du vécu ou une suposition?
.....parce que de mon coté sur des chaussures à semelle souple ça fonctionne sans problème.

Il faut juste prendre des crampons qui se fixent avec des sangles, et pas des semi auto.

Dernière modification par bruno7864 (12-11-2015 10:01:12)

Hors ligne

#129 12-11-2015 10:48:51

Magne2
Membre
Lieu : Vitry sur Seine
Inscription : 23-09-2013
Site Web

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

J ai dit sur le long terme  smile
Je pense aussi que le piolet est moins dangereux à utiliser que les crampons


kalo taxidi alias bon voyage en Grec bien sur

Hors ligne

#130 12-11-2015 11:25:04

bruno7864
partir, partir et découvrir
Lieu : toujours dans la Lune
Inscription : 11-10-2012

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

Le piolet pourra te permettre de t'arrêter certe, mais sur ce genre de neige dure (estivale) avec une bonne pente, seulement équipé d'un piolet, de chaussures souples, et sans vrais crampons, il te suffira de poser le pied sur la neige pour t'apercevoir que tu n'as rien à faire là et qu'il vaudrait mieux que tu passes ailleurs.
C'est d'ailleurs ce qui est arrivé à Mknod, non? wink

Dernière modification par bruno7864 (12-11-2015 11:25:50)

Hors ligne

#131 12-11-2015 12:00:00

Magne2
Membre
Lieu : Vitry sur Seine
Inscription : 23-09-2013
Site Web

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

Entièrement d accord, le choix de l itinéraire est capital  smile après on peut aussi savoir tailler des marches avec le piolet,à la montée de préférence

Dernière modification par Magne2 (12-11-2015 12:00:25)


kalo taxidi alias bon voyage en Grec bien sur

Hors ligne

#132 12-11-2015 14:36:17

Jobig
Membre
Lieu : Breizh
Inscription : 01-07-2014

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

Salut mknod, smile

Bruno7864 a écrit :

Il aurait peut être été intéressant dans ton cas de rajouter un peu de poids à ta liste et prendre un matériel plus approprié Alpi et par exemple, des crampons 6 ou mieux 12 pointes. Ces derniers aidés du piolet coté amont t’auraient donné confiance pour la traversée du fameux névé et peut être ailleurs.

Pôvre mknod, on en remet une couche ! J'ajoute mon grain de sel : l'utilisation des crampons n'est pas seulement affaire de poids ; il faut également consentir à l'effort de les harnacher puis de les enlever et de les ranger (et c'est chiant toutes ces pointes à ramasser...) tongue . De la patience, de la constance tout ça... Que dis-je ? du flegme !...  wink  lol

Jobig


From each according to their ability, to each according to their needs.

Hors ligne

#133 12-11-2015 15:43:55

Herdubreid
Membre
Inscription : 15-06-2008

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

mknod a écrit :
bruno7864 a écrit :

Y'a pas de doute certains randonnent sans bâtons mais ils randonnent où et comment!!

Tout est dit, c'est d'ailleurs cette question que je posais implicitement dans mon récit. Concernant ta dernière phrase, on pensera ce que l'on veut de la forme (perso ça me va très bien) mais sur le fond je suis tout à fait d'accord avec toi. Au même titre qu'une liste ne vaut rien sans son contexte d'utilisation, ce genre d'affirmations ne devraient pas être lâché sans informations complémentaires.

Vous êtes mignons tout de même tous les deux, mais vous êtes si sûrs de vous (jusqu'à suspecter les autres de s'arranger avec la vérité) que j'ai hésité jusqu'à présent à commenter.

Enfin bref : je randonne sans bâtons, dans des terrains parfois "difficiles" (pour répondre à : "où"), et sans prendre de risques inconsidérés (pour répondre à : "comment"). C'est juste que j'ai l'habitude, que je vais lentement quand il le faut, et qu'avec mon piolet (pour les randos montagnes) je suis bien mieux armé qu'avec une paire de bâtons, y compris dans les pentes d'herbe raides et glissantes. Chacun choisit la solution qui lui convient le mieux ...


Sinon, sympa le CR ... et la musique aussi  big_smile

Hors ligne

#134 12-11-2015 15:48:50

kodiak
Pas assez léger, mon fils!
Inscription : 09-06-2014

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

bruno7864 a écrit :

Le piolet pourra te permettre de t'arrêter certe, mais sur ce genre de neige dure (estivale) avec une bonne pente, seulement équipé d'un piolet, de chaussures souples, et sans vrais crampons, il te suffira de poser le pied sur la neige pour t'apercevoir que tu n'as rien à faire là et qu'il vaudrait mieux que tu passes ailleurs.

J'aime bien l'expression, qui résume assez le débat trail-crampons-piolet. Je la garde.

-K, qui randonne sans bâtons mais trouve cela normal.


Lâche ce clavier, attrape ton sac et pars marcher!
Il y a toujours un objet plus léger que celui que tu portes dans ton sac : celui que tu as eu le courage de laisser chez toi.
« Strong, light, cheap, pick two » (*)

| k

Hors ligne

#135 12-11-2015 16:54:26

bruno7864
partir, partir et découvrir
Lieu : toujours dans la Lune
Inscription : 11-10-2012

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

effectivement Herdubreid tout est dit. Tu te déplaces sans bâtons mais de temps à autre tu sors le piolet.... affaire de dénomination c'est tout. lol

Dernière modification par bruno7864 (12-11-2015 16:54:54)

Hors ligne

#136 12-11-2015 17:05:24

Jobig
Membre
Lieu : Breizh
Inscription : 01-07-2014

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

Je serais assez d'accord avec Herdubreid, sauf que le piolet ne remplace pas un bâton télescopique pour monter l'abri... D'où l'idée d'un piolet/bâton laquelle est débattue plus haut sur le fil. smile

Jobig


From each according to their ability, to each according to their needs.

Hors ligne

#137 12-11-2015 21:54:57

mknod
Banni(e)
Lieu : Paris
Inscription : 08-01-2015

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

@ zorey

Merci pour ta confirmation. Je connaissais cette odeur, mais je ne savais plus d'où exactement. Ton message devrait me rassurer, mais maintenant je me souviens : ça sent le DesTop ce truc yikes ! À lire les avertissements inscrits derrière la boite, devrais-je m'interroger sur des précautions d'usage particulière ? Bon, il n'y a aucun symbole de toxicité ou autre... j'imagine que c'est juste une manière de dire "Ne pas manger".

@ bruno

Pour le camembert patience... je n'ai pas encore posté la liste de matériel big_smile. Je plaisante... quoi que. La première journée ne m'a pas paru excessive, j'avais pas mal d'énergie à revendre.

J'essaye de répondre dans l'ordre.

- Casse cou ? non, c'est du flegme. tongue

- L'erreur du 2ème jour : tu as tout à fait raison, et oli_v_ier avait bien décrit le phénomène en parlant de "faiblesse psychologique". C'est à ce jour la seule chose qui me fait réellement peur en rando (= moi-même). M'enfin, je préfère parler de "jusqu'au boutisme", c'est plus classe roll. Concernant la nature du terrain, disons que j'apprenais encore à dompter la carte que j'utilisais.... j'y reviendrai.

- Les crampons : le sujet a déjà bien été traité effectivement (le fil dédié a été réanimé suite à cet épisode d'ailleurs). L'alpi je n'y connais rien, donc la pertinence d'un matériel dédié aurait été très limitée. Je compte bien me soigner, mais si c'était à refaire je partirais avec le même matériel. Pour rappel je n'avais pas (plus) mon piolet lorsque j'évoluais sur le fameux névé. Et puis Jobig a très bien résumé la chose : je suis un gros flemmard en rando et je passe mon temps à essayer de me simplifier la vie, alors si je peux éviter de m’arnacher péniblement pour quelques mètres... Je ne connaissais pas le concept de "marche stakhanoviste", mais je réserve effectivement cela à des terrains moins techniques. J'adore enquiller du D et des km, mais en montagne les aléas peuvent être nombreux... quitte à être plus fatigué mentalement que physiquement en fin de journée !

- Le smartphone : oui j'en ai parlé il y a quelque temps suite à l'acquisition d'un iPhone 4S. J'étais d'ailleurs très mitigé et méfiant si tu te souviens bien. Depuis je me suis totalement radicalisé : Pas. De. Smartphone. En. Rando. C'est une volonté immuable et un choix définitif en ce qui me concerne. Je préfère 1000 fois utiliser une carte et une boussole, quitte à me perdre ou même à me retrouver sérieusement dans la merde. On pourrait en parler des heures car j'ai plein de raisons à cela, mais voici la plus importante : ce n'est juste pas ma vision de la randonnée que de compter sur une cellule GPS et un écran de 4" pour m'orienter. En règle générale, je suis pour la non-utilisation de l'électronique en rando, ou une utilisation très raisonnée. Entre "extrémistes" des deux écoles, je suis sûr qu'on peut se comprendre tongue. D'ailleurs je respecte totalement ta méthode et j'ai beaucoup appris de tes bricolages. Je compte les mettre en application, mais plus dans le cadre d'un voyage au long cours, qui se fera essentiellement à pied et/ou à vélo (pas de moyens motorisés), à l'étranger et dans des conditions très variées. Là, j'aurai un peu d'électronique. Pour revenir rapidement au GPS, il me servait uniquement à l'enregistrement de trace, pas sûr qu'un smartphone aurait pu rivaliser.

- Le thru-hiker : t'es dur smile. En attendant il m'a semblé particulièrement à l'aise tout au long de cette descente (j'avais l'impression d'avoir un pas un peu plus "lourd" que le sien, je sais pas si c'est très clair)... mais il n'avait peut-être pas enquillé les mêmes D et km que moi juste avant et les jours précédents. Sinon respect.

- Le format du récit : je sais, ce n'est pas très engageant. Mais j'assume smile. En tout cas un grand merci d'avoir tout lu, et un grand merci pour ton retour encourageant. J'imagine que ça a du te prendre un peu de temps.

@ Herdubreid

Tu as bien fait de commenter. Il est bien évident que je ne "suspecte" personne de quoi que ce soit, et la notion de "vérité" est un peu exagérée. Il s'agit juste de s'assurer de la bonne interprétation des affirmations qui peuvent être faites sur ce forum. C'est vrai pour les bâtons mais aussi pour tout le reste. "Randonner" est un terme qui recouvre un nombre de pratiques bien vaste, d'où l'intérêt d'enrober ces affirmations de détails utiles à leur interprétation (d'autant que ce qui est évident pour celui qui écrit ne le sera pas forcément pour le débutant ou le randonneur lambda qui passe par là). Nous somme entièrement d'accord sur ta dernière phrase. Et merci du retour. Pour la musique, la porte de mes MP est grande ouverte smile.

Dernière modification par mknod (12-11-2015 22:01:12)


A vegan, an atheist and an ultra-light backpacker walk into a bar - I only know because they told everyone within the first three minutes.

Hors ligne

#138 16-11-2015 08:16:42

kodiak
Pas assez léger, mon fils!
Inscription : 09-06-2014

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

Cité sur bivouak.net, ce texte de Jean-Marie Faure, fondateur du CAF de l'Obiou: Une fois à la Tête de la Plainie.


Lâche ce clavier, attrape ton sac et pars marcher!
Il y a toujours un objet plus léger que celui que tu portes dans ton sac : celui que tu as eu le courage de laisser chez toi.
« Strong, light, cheap, pick two » (*)

| k

Hors ligne

#139 17-11-2015 01:45:46

bruno7864
partir, partir et découvrir
Lieu : toujours dans la Lune
Inscription : 11-10-2012

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

Salut Mknod,

tu fais des erreurs mais qui n'en fait pas et c'est comme cela que l'on apprend. En tu cas tu as eu le culot de faire un sacré parcours avec des hors sentiers coton ou les débouchés n'étaient pas gagnés d'avance, Chapeau. cool cool
D'ailleurs à ce propos, en suivant ton récit j'ai regardé un peu les cartes topo espagnoles numériques de la zone autour de l'Aneto et n'ai pas vu beaucoup de sentiers (jours 5 et 6). Où as tu eu vent de ces passages?

Pour ce qui est des bricolages je fais aussi quelques erreurs, alors attention il y en a prendre et à laisser tongue.  Mais si je peux te donner un conseil n'hésite pas, lance toi dans un projet un peu complexe en apparence, ça ne t’apportera que de la satisfaction wink

Dernière modification par bruno7864 (17-11-2015 01:55:17)

Hors ligne

#140 20-11-2015 16:56:11

mknod
Banni(e)
Lieu : Paris
Inscription : 08-01-2015

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

@ kodiak

J'ai beau avoir lu le texte, je ne suis pas sûr de bien comprendre le fond de ton message. Est-ce en rapport avec les quelques analogies là et là ?

@ bruno7864

Merci. C'était une part importante de mon cahier des charges, d'ailleurs le plus gros reste à venir (je poste la suite tout à l'heure ou demain si je me motive à la mettre au propre). Pour ta question, il faut quand même savoir que les cartes numériques en ligne sont très pauvres en sentiers et ne traduisent pas toujours la réalité du terrain. Pour le reste j'y reviens bientôt dans la partie dédiée smile.

Si tu constates des erreurs que je n'ai pas relevé moi-même, n'hésite pas à m'en faire part. C'est précisément pour en faire que je suis parti !

Dernière modification par mknod (20-11-2015 16:56:24)


A vegan, an atheist and an ultra-light backpacker walk into a bar - I only know because they told everyone within the first three minutes.

Hors ligne

#141 20-11-2015 21:53:20

kodiak
Pas assez léger, mon fils!
Inscription : 09-06-2014

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

Je suis tombé sur cet article et j'y ai vu un contrepoint a ton récit du J2. Visiblement une impression personnelle non partagée, sorry.
La suite de ta rando? On en est resté au J6 a l'Ibón de Barrancs...


Lâche ce clavier, attrape ton sac et pars marcher!
Il y a toujours un objet plus léger que celui que tu portes dans ton sac : celui que tu as eu le courage de laisser chez toi.
« Strong, light, cheap, pick two » (*)

| k

Hors ligne

#142 21-11-2015 04:48:43

mknod
Banni(e)
Lieu : Paris
Inscription : 08-01-2015

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

Impression partagée (pas seulement pour le J2), mais je n'étais pas sûr justement. Il faut dire que le style de l'auteur est assez technique, pour rester dans les analogies.

kodiak a écrit :

La suite de ta rando? On en est resté au J6 a l'Ibón de Barrancs...

Je reprends un peu mon souffle avant d'attaquer l'Aneto, et ce dernier défi infiniment plus impressionnant qu'est le retour à la vie quotidienne (un proche m'ayant récemment reproché mon cynisme dans ma lecture des événements récents et de leur traitement, je me garderai d'employer le terme "vraie vie" roll).

Dernière modification par mknod (21-11-2015 08:33:56)


A vegan, an atheist and an ultra-light backpacker walk into a bar - I only know because they told everyone within the first three minutes.

Hors ligne

#143 22-11-2015 12:25:50

mknod
Banni(e)
Lieu : Paris
Inscription : 08-01-2015

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

Jour 7 - 5 sept. 2015

Distance parcourue : 12,7km
Durée totale avec pauses (à ± 10min) : 10h33

Liens vers la cartographie.

Profil altimétrique :

9369_pyr8j2015_10j7_profiles_elevation_21-11-15.jpg

Altitude min/max : 2033 / 3021m
Altitude moyenne : 2542m
Dénivelé positif : 1078m
Dénivelé négatif : 1414m

Répartition temps de marche :

9369_pyr8j2015_10j7_profiles_time_21-11-15.jpg

Vitesse moyenne : 2,1km/h
Vitesse ascensionnelle moyenne : 398m/h
Vitesse de descente moyenne : 437m/h

Récit

04h00 du matin. Je me réveille. Et c'est non négociable.

J'essaie de me rendormir mais je sais bien qu'au fond, je ne fais que repousser l'échéance. Cela s'annonce d'autant plus désagréable que tout mon matériel ainsi que l'abri et le sol herbeux sur lequel ils reposent, sont totalement détrempés des pluies de la veille. C'est en tout cas ce que je crois. Pour la première fois de cette randonnée, je ressens une légère sensation de froid dans mon duvet. Elle ne m'empêchera pas de retrouver le sommeil, mais elle est suffisante pour être désagréable. J'en veux bien sûr immédiatement à Valandré, n'ayant pas encore réalisé que les gouttelettes formées sur la surface intérieure de ma toile sont gelées.

Finalement, cela sera toujours mieux que de l'eau liquide par 1°C lorsque j'ouvrirai ce qui s'est temporairement transformé en une porte semi-rigide. Il est bien sûr hors de question de renfiler des chaussures trempées dans ces conditions, je n'ai donc d'autre choix que d'évoluer pieds nus sur cette herbe gelée, et donc brûlante. Quitte à se retrouver dehors dans cette quasi-obscurité, j'en profite pour tester les limites de mon appareil photo.

Résultat de cette mission autant douloureuse pour mes pieds que pour mes mains : un joli rectangle noir de 4000x3000 pixels.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1590_ls_22-11-15.jpg

Ou pas ! Je parviendrai une fois chez moi à récupérer une lumière totalement insoupçonnée dans le fichier destiné au développement. Ce qui devait être des étoiles sera finalement mon abri, un nuage de brume s'étant subitement interposé entre le vide spatial et mon bivouac.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1595_ls_22-11-15.jpg

07h36, 2482m, bivouac de la veille. J'ai l'excellente surprise de pouvoir jouir d'une visibilité extrêmement prometteuse dès mon réveil. L'occasion de faire l'Aneto se présente pour la deuxième et dernière fois, autant dire que c'est mon jour de chance. Je peux même l'apercevoir depuis mon duvet, ce qui n'avait plus été possible depuis la brève apparition du Jour 4 à cause de la météo.

Le programme de la journée est donc le suivant : faire l'ascension de l'Aneto par le glacier de Barrancs, puis le redescendre par la voie normale — soit le glacier de l'Aneto — pour rejoindre le Refugio de la Renclusa.

Il gèle encore ce matin, et la vitesse à laquelle le fond de ma popote se cristallisera après le petit déjeuné m'indique que la température est probablement descendue de quelques degrés en dessous de zéro pendant la nuit.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1599_ls_22-11-15.jpg

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1596_ls_22-11-15.jpg

08h20, même endroit. Le soleil n'est pas encore assez haut et ma micropolaire est à peine suffisante pour me garder au chaud le temps de faire mon sac. Après avoir soigneusement décollé le tissu froissé et gelé de ma veste rigidifiée, je l'enfile en couche supplémentaire. Elle fond rapidement et assurera son rôle dans la foulée.

Ma trace prévisionnelle prévoit dans un premier temps de continuer via le GR11 sur environ 700 mètres, puis de commencer à monter en revenant sur mes pas tout en attaquant le flanc de montagne latéralement. À la fois impatient et curieux, je décide d'attaquer la montée directement depuis mon lieu de bivouac, en hors-sentier et perpendiculairement au flanc de montagne (partie ensoleillée sur la photo ci-dessus). Je ne suis pas sûr de mon coup, mais j'ai vu des Isards sur ces hauteurs hier soir. Réflexion du moment : "si les Isards passent, je passe". Autre avantage : je ne sens quasiment plus mes pieds à cause du froid, et l'effort brutal combiné au soleil devraient les réchauffer rapidement.

La difficulté sera d'identifier et de rattraper le cheminement prévu lorsque j'arriverai à son niveau. J'espère secrètement pouvoir compter sur des cairns pour me repérer, mais je n'ai absolument aucune confirmation d'un éventuel balisage.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1605_ls_22-11-15.jpg

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1608_ls_22-11-15.jpg

10h36, 2718m. Derrière moi, une vue impressionnante sur une mer de nuage littéralement "contenue" par la ligne de crête. Je dois continuer à prendre de la hauteur et je ne suis qu'à moitié rassuré à l'idée de voir cette marmite géante déborder.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1610_ls_22-11-15.jpg

Devant moi, ce que je pense être l'Aneto, ainsi qu'une vue partielle sur un glacier que je n'arrive par conséquence pas à identifier formellement sur ma carte. La montée est éprouvante mentalement : je suis à l'affût du moindre indice permettant de rattraper ma trace prévisionnelle et je découvre le terrain très progressivement, n'ayant donc jamais l'assurance de pouvoir continuer sans encombre.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1614_ls_22-11-15.jpg

10h49, 2784m. Toujours cette magnifique mer de nuages, avec en second plan le Tuca d’Aiguallut.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1615_ls_22-11-15.jpg

La configuration du terrain se dévoile peu à peu, mais je n'arrive toujours pas à identifier définitivement ce qui est bel et bien le glacier de Barrancs, c'est à dire celui que je dois emprunter. Je ne me trouve qu'à une petite trentaine de mètres de ma trace prévisionnelle quand je prends cette photo, mais je l'ignore bien sûr totalement sur le moment. Je commence même à douter que le sommet qui se trouve devant moi est bien l'Aneto. Il faut dire que plusieurs facteurs convergent et seront plus tard à l'origine d'une désorientation pure et simple :

1. Très régulièrement depuis le début de l'ascension, mes repères visuels apparaissent, disparaissent et réapparaissent différemment au grès du relief. Mon champs de vision et la perspective changent rapidement avec la proximité grandissante de mon objectif, ce qui fausse toujours un peu plus l'idée que je me fais des lieux. Je m'en rapproche en fait tellement que je ne parviens plus à le discerner. Là où j'aurais besoin d'une belle vision panoramique et dégagée, je me retrouve devant un mur trop haut et trop large pour être appréhendé dans son ensemble.

2. À cause de cette même perspective faussée, certains pics alentour semblent beaucoup plus hauts que l'Aneto lui-même.

3. Je suis en hors-sentier total depuis que j'ai quitté mon bivouac, et je ne trouve pas les cairns tant espérées. Existent-elles seulement ? Je ne le sais toujours pas à l'heure où j'écris ces lignes. Ce manque de repère m'empêche d'affirmer ou d'infirmer ma position.

4. Plus grave que ces trois premiers points réunis : ma carte est partiellement illisible car je n'ai pas réussi à la protéger correctement de l'humidité accumulée les jours précédents. Je suis donc incapable de décrypter avec précision le relief qui se trouve devant moi.

9369_pyr8j2015_10j7_extra_mapextract_22-11-15.jpg

Extrait de la carte papier utilisée pour faire l'Aneto, et conservée en l'état. La trace prévisionnelle rouge à l'est, correspond à la fin de la journée précédente (Jour 6). La trace rouge au sud-ouest correspond à l'ascension du Jour 4, qui a dû être reportée à cause de la météo. Enfin, la trace bleue (couleur des sections optionnelles), correspond à l'objectif  du jour. Je me trouve sur le O de MALDITOS lorsque je prends les deux photos ci-dessus mais là encore, difficile de le savoir sur le moment.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1617_ls_22-11-15.jpg

11h53, 2883m. Je me retrouve quasiment au même endroit qu'il y a une heure, 100m plus haut. Que s'est-il passé entre temps ? Je ne le sais plus. Ma trace GPS indique que j'ai fais un crochet par l'ouest (à droite sur la photo), probablement pour essayer de confirmer mes impressions. Il m'est tout bonnement impossible de me remémorer cette heure de marche dont l'existence ne s'articule autour d'aucune référence temporelle ou spatiale. En d'autres termes — et bien que ne l'ayant pas encore formulé —, je suis perdu. À 900 mètres à vol d'oiseau d'un objectif parfaitement visible par ailleurs puisqu'il se trouve juste devant moi.

Il n'y a aucune raison que ce ne soit pas l'Aneto, mais il me manque quelques éléments tangibles pour faire de cette hypothèse une vérité indiscutable. Je pourrais suivre mon instinct et continuer l'ascension, mais je ne suis psychologiquement pas apte à m'engager sur ce glacier et la paroi abrupte qui s'en suit, à plus de 3000m d'altitude et sans être parfaitement sûr d'attaquer le bon sommet.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1621_ls_22-11-15.jpg

12h08, 2889m. Plus je réfléchis, plus je doute. Devant moi, une crête qui m’apparaît de plus en plus inhospitalière. Derrière moi, une vaste étendue de rochers, de neige et de nuages. Réflexion du moment : "si j'étais sur la bonne voie, cela me paraîtrait évident". Je me fais progressivement à l'idée que je me suis trompé, et décide de repartir de plus belle à sa recherche. Peu convaincu par mon crochet précédent, je m'engage cette fois vers l'est (à gauche sur la deuxième photo ci-dessus).

Je ne le sais pas encore, mais je viens de manquer ma dernière occasion de faire l'Aneto.

C'est le début d'une errance de quatre heures, sur ce plateau perché à 3000m d'altitude et sous un soleil de plomb. Loin de m'être avoué vaincu et encore peu conscient d'être désorienté, je continue à utiliser massivement ma boussole et mon reste de carte, comme c'est déjà le cas depuis plus d'une heure. Malgré des éléments contradictoires, je croirai fermement m'être définitivement retrouvé une bonne quinzaine de fois sinon plus, pour finalement toujours me faire désavouer un peu plus loin.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1625_ls_22-11-15.jpg

12h51, 2909m. Après avoir pris le temps de contourner un certain nombre de ces formations glacières, je me décide à les franchir prudemment.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1626_ls_22-11-15.jpg

12h59, 2911m. Ces franchissements se réalisent sans aucune difficulté, mais je veille particulièrement à faire attention lors des passages neige-roche. N'étant pas encore un habitué de ce genre de terrains, je reste très attentif. À quoi ? Je ne le sais pas vraiment.

Le temps passe.

Ici, l'ambiance est très particulière. Comme figée et électrique à la fois. Le buzz n'est pas audible mais il est bien là. Tant qu'il fait beau, il ne se passe rien. Mais ce silence est suspect, je sens que les conditions peuvent très vite changer et qu'il ne faut pas trainer. Une sorte de minuterie interne m'empêche de trop m'éterniser au même endroit dans cet univers minéral hostile et temporairement endormi.

La vie était déjà très discrète un peu plus bas, mais elle semble ici inexistante. Même le lichen n'ose pas s'installer.

L'acoustique est à l'image des lieux : aseptisée. "Sèche", dans le jargon. Le son a toute la liberté de se propager à loisir et de mourir bien avant de rencontrer le moindre obstacle, évitant ainsi tout phénomène de réverbération, par ailleurs très utile pour appréhender l'espace qui nous entoure. Même s'il devait en rencontrer un, il y serait diffusé et piégé jusqu'à épuisement total à cause des propriétés de ce dernier.

Seul le tonnerre semble être capable de rivaliser avec cet environnement grandiose.

La roche et les névés sont recouverts d'une couche de neige immaculée et épaisse d'une dizaine de centimètres par endroit. Elle est probablement tombée la nuit même. J'évolue dedans avec mes bâtons comme en plein hiver, à une différence près : c'est le cagnard. La montagne et ses contradictions.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1627_ls_22-11-15.jpg

13h16, 2978m, côté vallée. Si j'échoue et que je dois redescendre, c'est droit devant. Enfin plus ou moins.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1628_ls_22-11-15.jpg

Même heure, même endroit, côté crête. Devant moi se trouve l'arête nord-est de l'Aneto. Se reporter à l'extrait de carte ci-dessus pour l'identifier... ou tout du moins essayer. L'expression "être dans le flou" n'a jamais porté aussi bien son nom que ce jour là.

Le sommet quant à lui, se trouve derrière et n'est pas du tout visible depuis ce point de vue. Encore une fois, je l'ignore sur le moment.

13h35, 3021m. Je suis au pied du Pico de Tempestades, et accessoirement à l'altitude la plus haute atteinte lors de cette randonnée. Ce crochet a été effectué toujours dans le même but : trouver ma voie.

À m'entendre, on peut éventuellement croire que je suis désespéré. Mais il n'en est rien. D'ici quelques heures d'ailleurs, je serai sur le toit des Pyrénées. En tout cas, j'y crois encore de tout mon être. J'ai à nouveau identifié ce que je considère comme mon objectif, et je mise désormais tout sur un pic sans nom, voisin du Pico de Margalide. Ce n'est pas logique, mais quand on est désorienté, plus rien n'est logique.

Je continue donc à longer la crête en évoluant à la limite du glacier de Tempestades.

Depuis le début, le silence règne en maître sur les lieux. Il sera seulement perturbé par le bruit sourd d'éboulements plus ou moins lointains et dont la fréquence m'inquiète. Ils durent parfois une dizaine de secondes et me rappellent à chaque instant que je dois rester attentif. Quelques très rares vautours survolent la zone et flottent au grès des courants d'air chaud ascendants. Leur résistance à l'air semble quasi-nulle. Un peu à l'image de celle de mon corps si je devais me retrouver sur la trajectoire d'un de ces gros cailloux enragés.

Je garde malgré tout un souvenir relativement bruyant de cette errance. La machine à penser est en pleine ébullition et vient combler le vide laissé par l'absence de toute pollution sonore ou visuelle. Cela ne ferait pas les affaires de Patrick Le Lay.

14h26, 2921m. J'arrive à l'extrémité est du glacier de Tempestades. Une ascension semble envisageable mais elle s'annonce plutôt technique. J'aimerais qu'une évidence se dégage parmi les différentes voies qui se dessinent, mais ça ne sera encore pas le cas. Je commence à réaliser que je suis bel et bien perdu, mais je m'obstine tellement à comprendre la situation que je n'ai pas vraiment le temps de me l'admettre réellement.

Je fais un énième détour en boucle, toujours à la recherche de certitudes. J'en aurai au moins une en retrouvant mon point de départ : une heure supplémentaire vient de s'écouler.

15h28, 2918m. Il est temps de prendre mon unique pause de la journée.

Après avoir finalement admis l'inadmissible, je dois accepter l'idée que je ne ferai peut-être pas cette ascension tant espérée. Réflexion du moment : "je suis à environ 400m de D+ de mon objectif, je peux donc y être à 17h30 avec beaucoup de marge - si je veux finir cette ascension, c'est maintenant ou jamais". Il ne me manque toujours qu'une seule chose : la conviction d'être au bon endroit. Avec un peu de gymnastique mentale et au regard de la fatigue nerveuse accumulée pendant ces heures d'errances et de tentatives infructueuses, j'y parviendrai plutôt facilement. Je dois bien admettre qu'à ce moment là, mépriser la réalité de ma situation m'arrange tout particulièrement.

D'ici pourtant, j'aperçois pour la première fois ce qui devrait me permettre de me localiser précisément, à savoir ce repère visuel et indiscutable qui m'a tant manqué jusqu'à présent. Il s'agit de l'extrémité sud de l'Ibón de Barrancs.

Je dégaine dans la foulée ma palette de techniques d'orientation et l'emploie à la hauteur de mes compétences :

Première étape : orienter la carte avec la boussole et confirmer le résultat obtenu à l'aide du fameux repère visuel. C'est plutôt cohérent, mais mon axe de vision par rapport au repère empêche de garantir la grande précision dont j'ai besoin.

Deuxième étape : calculer l'azimut du repère via le miroir de visée de ma boussole, et le reporter sur ma carte. Là encore, un résultat cohérent mais qui ne m'arrange pas du tout.

Troisième étape : confirmer la deuxième étape en tentant une triangulation à l'aide d'autres repères potentiels. Même résultat. Même frustration.

Réflexion du moment : "cette boussole est probablement démagnétisée".

Obstination diront certains, mais je préfère penser que je commence simplement à subir les frais de la désorientation et de la fatigue mentale accumulée, plus vécus sur le moment comme une véritable perte de logique.

En ultime recours, je ferai même entorse à une des règles fondamentales que je m'étais fixée et qui avait toujours été respectée : l'utilisation du pseudo-altimètre du GPS comme outil complémentaire pour l'orientation.

La dernière fois que j'avais ressenti un tel désarroi, je marchais depuis trois jours dans un brouillard épais et statique, et je me trouvais en plein milieu des prés salés du Mont Saint Michel après avoir quitté un GR22 impraticable à cause des marrées exceptionnelles des semaines précédentes. J'étais littéralement pris au piège entre des sillons toujours plus nombreux, profonds et sinueux, creusés et inondées par ces même marrées. Fatalement, j'avais fini par me désorienter à force de devoir les contourner... et je refusais de croire mes instruments. Mais c'est une autre histoire.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1631_ls_22-11-15.jpg

15h44, toujours à 2918m. Après un magnifique début de journée, la météo se dégrade brutalement. La surprise est d'autant plus marquée que cette dégradation arrive du sud, totalement occulté par la crête. Réflexion du moment : "soit ces nuages disparaissent aussi vite qu'ils sont apparus, soit je disparais sous ces nuages aussi vite qu'ils sont apparus". Deuxième réflexion du moment : "la journée est plus qu'entamée, redescendre signifierait que j'ai pour l'instant parcouru un nombre négatif de kilomètres sur mon itinéraire final". Troisième réflexion du moment : "si je ne suis pas à la Rencluse ce soir, je ne serai pas à la Gare à temps demain". Quatrième réflexion du moment : "en dernier recours, je pourrai faire du stop à l'Hospice de France pour rentrer plus vite". Cinquième réflexion du moment : "ces nuages sont quand même vachement bas et rapides, et je suis quand même vachement haut et lent". Sixième réflexion du moment : "hors de question de faire du stop, je préfère encore manquer mon train et être en retard au boulot".

Je me bats depuis plus de dix minutes contre des instruments qui de toute évidence ont décidé de se liguer contre moi. Armé de ma mauvaise foi, je reste convaincu qu'une ascension est toujours possible. Les voies potentielles se situent à gauche du cadre de la photo ci-dessus. Aussi, l'endroit où j'ai pris ma pause est loin d'être idéal : la pente est raide, les pierres sont instables et ma marge de mouvement est largement réduite par la neige qui se trouve autour de moi. Pendant une dizaine de minutes encore et contre toute règle de bon sens, mon indécision sera à son paroxysme.

Les minutes passent, les nuages s'épaississent, une ultime chute de pierres se déclenche plus haut et m'évite à plusieurs dizaines de mètres. Après m'avoir laissé ma chance, la montagne vient de m'ordonner de quitter les lieux. Je m'y applique dans la foulée.

C'est désormais officiel, j'ai raté l'Aneto.

Dans ma tête, cette occasion manquée résonne comme un échec cuisant. Pendant l'espace d'un instant, je suis déçu, dépité, en colère contre moi-même. Mon orgueil est touché.

Désaveu ultime : je me vois contraint de redescendre dans le même vallon qu'hier, rattraper la même portion de GR11, repasser par mon lieu de bivouac, et enfin tracer ma route jusqu'à la Renclusa. Il est bientôt 16h00, une deuxième journée commence. Et celle là, je n'ai pas intérêt à la rater.

Les nuages perdent en altitude et galopent derrière moi. Je me vois donc dans l'obligation de galoper sur les rochers de ce terrain particulièrement accidenté. Toujours en hors-sentier mais dans la mesure du possible, en ligne droite. Il s'agit maintenant d'être efficace, tout en restant concentré pour ne pas se blesser. Je n'échapperai quand même pas à quelques égratignures sans gravité. J'espère en fait — pour ne pas perdre trop de temps — pouvoir atteindre le GR11 avant d'avoir perdu toute visibilité.

Naturellement, je troque mon costume de randonneur pour celui de sanglier. Je choisis cette fois le modèle aux poils hérissés, beaucoup plus en adéquation avec mon humeur du moment. Cette descente sera énergique, traumatisante, et dictée par une certaine forme d'insouciance dont je ne suis pas très fier mais qui m’apparaît pourtant nécessaire.

Rapidement, les bénéfices d'un tel relâchement se font ressentir : la frustration laisse place à la satisfaction, l'échec se transforme en fierté. Je réalise déjà que cette expérience sera extrêmement riche en apprentissage : manque de repérage, stratégie d'orientation à améliorer, confrontation à la désorientation, importance de l'autodiscipline... En outre, je préfère mille fois échouer de peu dans ces conditions que de réussir d'emblée via la voie normale — qui a dit autoroute ? —. Échouer dans l'adversité plutôt que réussir dans la facilité. Le challenge avant la médaille. Et toujours cette notion de mérite qui façonne définitivement mon approche de la montagne.

Et puis c'est une excellente raison de revenir.

16h50, 2482m. Me revoilà sur les lieux du bivouac quitté le matin même, sept heures plus tôt. À partir de maintenant, tous les kilomètres engrangés seront effectivement comptés positivement.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1635_ls_22-11-15.jpg

17h16, 2348m. Je me laisse porter par les balises du GR11, qui redescend la vallée de Barrancs. Comme hier, la section ne figure aucunement sur ma carte mais j'ai toutes les raisons de penser qu'elle me mènera jusqu'au Refugio de la Renclusa, dernière étape de cette randonnée. Après plus de six heures de hors-sentier, je ne suis pas mécontent de retrouver le confort des balises. Quant à ce brouillard, il m'est désormais familier et ce n'est pas lui qui m'empêchera de me rapprocher de la frontière. Il ne me quittera plus jusqu'au Plan d’Aigualluts, magnifique petit coin de paradis semi-marécageux se situant plein nord, à une heure de marche.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1637_ls_22-11-15.jpg

18h08, 2066m. Je m'extirpe finalement de la vallée de Barrancs, et par la même occasion de la masse nuageuse qui y est encore emprisonnée. La dernière centaine de mètres s'est effectuée dans une végétation luxuriante aux couleurs saturées et lumineuses, parfois plus évocatrice d'un décors de cinéma que d'un décors naturel. Mais nous ne sommes malheureusement pas au cinéma. En atteste les quelques détritus abandonnés par des humains, que je me garderai de qualifier de porcs tant ce serait insultant pour ces animaux. Il n'y a pas de doute, je me rapproche bel et bien du refuge de la Rencluse.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1640_ls_22-11-15.jpg

18h18, 2045m, au nord du Plan d’Aigualluts. Ce panneau me le confirme, et j’ai tout intérêt à suivre ses indications si je ne veux pas emprunter une mauvaise section du GR11, dont le réseau de variantes est d’autant plus dense que les infrastructures humaines se rapprochent. D'ici, j'aperçois quelques tentes puis peu à peu, leurs occupants. Je n'ai pas encore réalisé que nous étions samedi et que je vais nécessairement croiser un certain nombre de randonneurs venus pour le week-end sur cette portion très accessible du GR11.

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1647_ls_22-11-15.jpg

18h37, 2077m, au sud du Plan d’Aigualluts. Cette tourbière pleine de sillons ravive à nouveau mon souvenir des prés salés du Mont Saint Michel. Je ne manquerai d'ailleurs pas non plus de m'y mouiller les pieds. J'ai croisé entre temps quelques groupes de randonneurs, avec leur traditionnel retardataire. Comme sur cette image, qui sera la dernière de la journée.

Encore 260m de D+ me séparent du refuge. Je croise deux Espagnols alors que je reviens sur mes pas après avoir perdu les balises et m'être trop engagé vers le nord. Le cheminement est plat alors qu'il devrait monter, cela me permettra de comprendre rapidement mon erreur. L'un d'eux insiste pour me donner sa carte. Je refuse d'abord poliment mais serai forcé d'accepter devant son insistance. Finalement, cela me fera un beau souvenir, et déjà une documentation précieuse qui me permettra de commencer à faire le bilan du parcours le soir même.

J'arrive un peu avant 20h00, très surpris par les nombreux abris et campeurs qui occupent la zone dédiée au bivouac. Je ne comprends pas bien tout ce que ces humains font là, alors que je n'ai croisé quasiment personne depuis une semaine. Réflexion du moment : "cool, des réchauds sur pattes".

Je trouve un coin, plante mon abri, et vaque à mes occupations. Soudain, deux Espagnols d'environ mon âge se détachent de leur groupe suréquipé et viennent à ma rencontre, interloqués par mon abri minimaliste. Réflexion du moment : "toi, tu vas me prêter ton réchaud". Je pourrais m'en passer pour cette dernière soirée de bivouac, mais les températures chutent brutalement avec la lumière et il se mettra à geler le soir même. Un repas chaud ne sera donc pas un luxe. Je prolonge la discussion avec l'un d'eux pendant quelques dizaines de minutes, l'occasion d'apprendre que ce sont des étudiants de Barcelone et qu'ils sont venus pour faire l'Aneto sur le week-end. Ils partiront demain matin vers 05h30, à la frontale et via la voie normale, c'est à dire celle par laquelle j'étais censé redescendre pour arriver jusque ici. La question des cartes espagnoles m'obsédant légèrement, je demande à voir la sienne. Il l'a oublié, mais c'est un habitué des lieux et cela ne lui causera pas de problème. Il me signale aussi et sans grande surprise, que la voie est extrêmement bien cairnée.

Après un excellent repas chauffé à la force du Jetboil, je me décide un peu malgré moi à faire un tour au refuge. Je n'aime pas trop cet endroit, et encore moins son moteur à hydrocarbure (groupe électrogène ?). Accessoirement, il m'apparait comme le symbole d'une opulence qui me met bien mal à l'aise en ces lieux. J'espère au moins y trouver de la documentation intéressante, et bien sûr des cartes. J'ai réussi à faire parler les miennes jusqu'à maintenant, mais il est clair que quelques références ou noms d'éditeurs sérieux ne seront pas de trop pour la prochaine fois.

Je pénètre dans l'édifice, la chaleur artificielle de ce lieu surchauffé me brûle la peau. Je demande s'ils ont des cartes, on me signale qu'il y en a deux affichées dans le réfectoire. À peine ai-je ouvert ses battants de porte que je me fais souffler par la pression acoustique générée par une centaine d'humains s'adonnant en cœur au plaisir de la suralimentation. J'ai l'impression d'être dans une brasserie de Montparnasse en pleine heure d'affluence. Ça fait bizarre. J'en oubliais presque que la montagne était aussi un business.

Je m'échappe rapidement des lieux, non sans céder à la tentation de me rincer rapidement les mains, les jambes et le visage avec l'eau chaude qui coule des robinets et ce qui reste des douches. L'eau chaude, cet élément de confort dont je me passe toujours avec une facilité déconcertante, mais qui me procure tout de même tant de plaisir après plusieurs jours d'abstinence. Elle redeviendra une banalité parmi tant d'autres dès le retour à la civilisation.

Je pars me coucher, bien partagé sur mes émotions. Une chose est sûre, ça ne m'empêchera pas de dormir. En tout cas pas ce soir. Bien conscient de vivre les dernières heures de ce périple, mon corps commence à se relâcher et ne se fera pas prier pour un peu de répit.

Morceau du jour, "Errance au pied de l'Aneto" :

9369_pyr8j2015_10j7_soundtrackthumb_21-11-15.jpg
Aphex Twin - Untitled #2 (infos)

Dernière modification par mknod (20-01-2016 17:24:41)


A vegan, an atheist and an ultra-light backpacker walk into a bar - I only know because they told everyone within the first three minutes.

Hors ligne

#144 22-11-2015 19:28:07

Magne2
Membre
Lieu : Vitry sur Seine
Inscription : 23-09-2013
Site Web

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

bonsoir

tu avais au préalable une expérience d'un glacier ?    si non tu a peut être eu beaucoup de chance  smile


kalo taxidi alias bon voyage en Grec bien sur

Hors ligne

#145 22-11-2015 19:58:49

enrico
Membre
Lieu : Rhône-Alpes
Inscription : 13-08-2013

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

Magne2 a écrit :

bonsoir

tu avais au préalable une expérience d'un glacier ?    si non tu a peut être eu beaucoup de chance  smile

Plutôt l'expérience de l'orientation en terrain rocheux paumatoire, et un peu d'habitude pour s'y engager. La partie glaciaire n'étant à priori que la descente par la VN, donc assez safe.

En tous les cas, un périple autour de l'Aneto certainement plein d'enseignements pour mknod.


"De côtes en vallons, de plaines en plateaux, marcher en silence, le regard en paix"

Hors ligne

#146 22-11-2015 20:12:57

Magne2
Membre
Lieu : Vitry sur Seine
Inscription : 23-09-2013
Site Web

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

une crevasse c'est un crevasse ( j'ai un ancien collègue qui est tombé  décordé dans une crevasse sur le glacier d'Ossoue il y a quelques années , heureusement il n'était pas seul , juste quelques cotes cassée et un œdème pulmonaire )


kalo taxidi alias bon voyage en Grec bien sur

Hors ligne

#147 22-11-2015 20:28:43

enrico
Membre
Lieu : Rhône-Alpes
Inscription : 13-08-2013

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

Magne2 a écrit :

une crevasse c'est un crevasse ( j'ai un ancien collègue qui est tombé  décordé dans une crevasse sur le glacier d'Ossoue il y a quelques années , heureusement il n'était pas seul , juste quelques cotes cassée et un œdème pulmonaire )

Oui, une crevasse est une crevasse, mais sauf erreur, l'IT envisagé par mknod était du type rocheux jusqu'au sommet de l'Aneto. Puis effectivement glaciaire sur la VN, mais dans des conditions relativement sures, selon mes souvenirs après avoir emprunté cette VN en juillet dernier.


"De côtes en vallons, de plaines en plateaux, marcher en silence, le regard en paix"

Hors ligne

#148 22-11-2015 20:30:06

Galou83
Life trotter
Lieu : Var
Inscription : 01-12-2014
Site Web

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

mknod a écrit :

L'acoustique est à l'image des lieux : aseptisée. "Sèche", dans le jargon. Le son a toute la liberté de se propager à loisir et de mourir bien avant de rencontrer le moindre obstacle, évitant ainsi tout phénomène de réverbération, par ailleurs très utile pour appréhender l'espace qui nous entoure. Même s'il devait en rencontrer un, il y serait diffusé et piégé jusqu'à épuisement total à cause des propriétés de ce dernier.

Rendons à César ce qui lui appartient, c'est ce dernier point qui est prépondérant (sons "piégés").


---
Je suis mon chemin, un pas devant l'autre.

Hors ligne

#149 22-11-2015 21:04:38

Magne2
Membre
Lieu : Vitry sur Seine
Inscription : 23-09-2013
Site Web

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

enrico a écrit :
Magne2 a écrit :

une crevasse c'est un crevasse ( j'ai un ancien collègue qui est tombé  décordé dans une crevasse sur le glacier d'Ossoue il y a quelques années , heureusement il n'était pas seul , juste quelques cotes cassée et un œdème pulmonaire )

Oui, une crevasse est une crevasse, mais sauf erreur, l'IT envisagé par mknod était du type rocheux jusqu'au sommet de l'Aneto. Puis effectivement glaciaire sur la VN, mais dans des conditions relativement sures, selon mes souvenirs après avoir emprunté cette VN en juillet dernier.

il me semble qu'il envisageait de passer par le petit glacier de Barranes  versant est de l'Aneto puis d'escalader la partie rocheuse ( je n'en connais pas la difficulté )


kalo taxidi alias bon voyage en Grec bien sur

Hors ligne

#150 22-11-2015 21:54:07

florencia
Membre
Lieu : 71
Inscription : 11-11-2011

Re : [Récit + liste] 8 jours autour de l’Aneto au départ de Luchon (J7)

Salut mknod,

Moi ce qui m’interroge, c’est lorsque tu te trouves au point "O"  de MALDITOS, même si tu ne sais qu’il s’agit du point "O", pourquoi tu n’identifies pas l'Arista Nordeste.

C’était, il me semble, le point remarquable principal à identifier et à chercher, dès le départ, depuis la Colladeta de Barrancs.
C’est la première et unique arête avec une orientation NE, plutôt imposante par ailleurs.
En regardant la carte, elle démarre même bien plus bas, qu'au dessus du point "O".
Et d’après tes photos, la visibilité était excellente.

Ajout : Sur cette photo, montrant le glacier de Barrancs

9369_pyr8j2015_10j7_pics_dscf1615_ls_22-11-15.jpg

Il me semble que c'est la seule falaise, avec cette orientation, accidentée dans ce sens-là, qui pouvait se trouver sur ta droite à ce moment-là, quand tu remonte en dessous.

Mes deux cents smile

Flo

Dernière modification par florencia (22-11-2015 23:12:35)


Réalisations DIY
_ _ _ _ _ _ _ _ _

"Si vous pensez que l'aventure est dangereuse, essayez la routine… Elle est mortelle !" -Paulo Coelho.

Hors ligne

Pied de page des forums