[Récit + liste] GTA juillet/août 2020 Bebacksoon

Bebacksoon · 14-10-2020 11:00:36

mardi 25 août J22:

Départ 5h58. Un des seuls avantages à avoir froid la nuit, c’est qu’on démarre tôt le matin! J’attaque la montée au pas des Ladres à la lampe frontale. Après les orages d’hier, je ressens ce matin le calme et une atmosphère apaisée dans la montagne. Je passe le pas des Ladres (2432m) puis je redescends en direction de la vallée de la Vésubie.
Je vois une jeune femme qui monte en sens inverse, sans sac à dos, avec seulement une petite bouteille à la main: je pense qu’elle doit rejoindre un refuge dans le coin ou une vacherie pour son travail. Au même moment, mon regard se porte sur un groupe de chamois qui surveillent la progression de la jeune femme. Quand je vais arriver moi même à ce niveau du chemin, 2 chamois vont traverser devant moi à moins de 10m. Après les bouquetins des Alpes du nord, c’est la première fois dans ma GTA que je peux observer cette fois, des chamois d’aussi près. Je vais d’ailleurs croisé beaucoup de chamois (peu farouches) dans le secteur de la vallée des Merveilles.
Je décide d’aller jusqu’au refuge de la Madone de Fenestre pour me restaurer un peu (tarte au myrtille et soda). Les prix sont raisonnables (il faut dire qu’il y a un accès par la route ou plutôt il y avait). J'apprends que la route qui mène au refuge est coupée car après les orages d’hier, il y a eu plusieurs glissements de terrain et des ponts sont tombés, des campings car se trouvent notamment bloqués. Avec les récentes intempéries, ce secteur de la Vésubie aura été durement touché cette année par les orages et la pluie.
Depuis le refuge, je repars dans la montée en direction du pas du Mont Colomb (2548m).
De loin je vois des plaques blanches de neige mais en fait il s’avère que ce sont des plaques de petits grêlons formant parfois des minis névés: preuve de la violence des orages de grêle de la veille. La montée au pas est à la fois belle et assez engagée pour mon niveau: il faut rester concentré pour ne pas glisser dans certaines parties de terrain mouillées par la pluie. Je n’ose même pas pensé aux randonneurs qui ont pu se faire surprendre par l’orage dans une telle montée! Le pas est étroit et les premiers mètres de descente de l’autre côté sont impressionnants mais avec précaution tout se passe bien, même pas une petite glissade!
Maintenant, direction le refuge de Nice (2232m). De ce côté ci, en me retournant, la montée au pas est aussi impressionnante que de l’autre côté.
J’arrive au lac de la Fous avec son barrage, je suis impressionné par une maman chamois et son petit car ce dernier se trouve dans la pente du barrage et il lèche ce que je pense être des infiltrations? J’arrive enfin au refuge de Nice où je vais me poser pour une pause omelette et bière! Il y a un vélo pour pédaler et recharger son téléphone ou sa batterie externe mais pas pour moi, ça me suffit de marcher 10h par jour!
Je repars en direction de la baisse du Basto. Cette partie là est très belle avec un environnement minéral, le lac Niré, les chamois… La montée à la baisse du Basto (2693m) se mérite! C’est dans des montées comme celle-ci que j’apprécie d’avoir allégé mon sac à 8kg total (merci RL!). De l’autre côté de la baisse, je vais entamer une descente en direction du lac du Basto. Il y a beaucoup d’amas de gros cailloux à passer, je fais attention car depuis la descente du pas du Mt Colomb, les chevilles et le dessous des pieds sont soumis à rude épreuve!
Je passerai à côté du lac du Basto qui est magnifique vu d’en haut et je “remets le couvert” pour la montée à la baisse de Valmasque (2552m) qui se fait elle sans difficulté. Au col, je rencontre un jeune couple avec le jeune homme qui se trimbale un impressionnant appareil photo + téléobjectif. Nous parlerons de photos animalières. A plusieurs reprises dans la descente, il verra des animaux (marmottes, oiseaux, bouquetins…) que je n’aurai jamais vu seul: il a l’oeil! En plus, nous marquons des pauses et cela me va bien! En parlant photo, j’aimerai un jour faire un catalogue des photos des fleurs des Alpes car je les trouve magnifiques et j’aime cataloguer.
Je vais arriver dans la zone protégée de la vallée des Merveilles. Il y a une jeune femme qui est agent du parc, elle s’assure que j’ai rangé mes bâtons (on peut les utiliser si on met des embouts plastiques) et que je connais les règles du bivouac autour du refuge des Merveilles. Cette zone est protégée et classée au monuments historiques pour ces gravures rupestres. Il y a des panneaux interdisants de sortir du GR… C’est compréhensible pour éviter le vandalisme et la bêtise humaine mais en même temps c’est un peu dommage car je ne verrai quasiment pas ces gravures (il est conseillé de faire des visites guidées depuis le refuge des Merveilles). De toute façon, c’est la fin de journée et je vais arriver à la zone du bivouac du refuge vers 19h. Nous marchons ensemble avec l’agent. Elle avait repéré un peu plutôt une brebis égaré et elle va essayer de la localiser de nouveau depuis une butte, le berger étant prévenu. Vu les loups autours, je n’aimerai pas être la brebis cette nuit…
J’arrive au refuge des Merveilles vers les 19h. Il y a du monde et de l’agitation car c’est l’heure de servir le repas du soir. J’ai juste le temps d’acheter un Perrier, faire le plein d’eau et je vais chercher mon emplacement de bivouac (l’agent m’avait conseillé de monter un peu en haut et sur la gauche, il y a moins de monde). La nuit va bien se passer cette fois, je suis au sec, certes un peu de vent souffle mais ça va se calmer dans la nuit. En m’endormant, je songe que je vais peut être apercevoir la mer demain et que je vais vivre les 2 dernières journées de ma GTA si j’avance bien…

Bilan J22: Une bien belle étape que cette journée, avec le pas du Mt Colomb et la baisse du Basto qui sont assez physiques et techniques à monter pour moi. Cette partie du parc regorge de chamois. J’ai commencé à avoir mal sous le pied, la faute je pense à tous ces pierriers dans les descente, j’ai des chaussures basse d’approche la sportiva tx4 assez rigides et protectrice mais sur cette journée, j’aurais apprécié avoir mes lowa pinto montantes avec une bonne grosse semelle. Spéciale dédicace à mes bâtons qui m’ont bien aidé et j’étais un peu “perdu et gauche” quand j’ai dû les ranger dans la zone protégée. Le refuge des Merveilles est très fréquenté. Je suis un peu déçu de n’avoir pas eu le temps de voir ou mieux de visiter ces fameuses gravures rupestres.

dans la descendre du pas des Ladres aux aurores

un passage "avec les mains" pour le pas du Mt Colomb (entrainement pour le GR20?)

va falloir monter tout là-haut: pas du Mont Colomb (2548m)

pas du Mont Colomb (2548m)

vue en bas de la descente du pas du Mr Colomb

refuge de Nice (2232m)

en direction de la baisse du Basto

le lac du Basto (2341m)

GR52, chamois, gravures rupestres

fin de journée: le lac Long Supérieur et le refuge des Merveilles (2111m)

Ytreza · 14-10-2020 11:56:12

Ah, le refuge des Merveilles -> la Madone de Fenestre, une de mes sections préférées !
J'avais bivouaqué sous la baisse de Basto, en bonne compagnie : un papy bouquetin le soir, et les chamois curieux tournaient autour de la tente le matin

Et une descente mémorable dans la neige au-dessus du refuge de Nice, première fois que je sortais le piolet !

Le Mercantour, c'est vraiment formidable : sauvage, minéral, escarpé, peu de monde et une faune abondante

Bebacksoon · 14-10-2020 12:06:19

Salut Ytreza
Merci pour ton message et tes photos
On me l'avait dit, et je confirme que pour moi aussi le parc du Mercantour (et je n'en ai vu qu'une partie) est une belle découverte et un vrai coup de coeur de ma traversée des Alpes

Bebacksoon · 14-10-2020 17:14:23

mercredi 26 août J23:

Départ 6h27. Avec mes bâtons de marche toujours accrochés au sac, je quitte l’aire de bivouac du refuge des Merveilles. Hervé27 m’avait prévenu, je ne croiserai guère de points d’eau jusqu’à Sospel. Je me charge à 4l en conséquence et je le sens dans le portage du sac. L’aube se dessine à l’horizon dans un ciel pur. Comme pour beaucoup de début de marche, je suis seul et j’écoute ma musique en montant au pas du Diable (2430m). Je suis bien, apaisé et l’émotion monte parfois quand je me perds dans mes pensées tout en avançant… Arrivé au pas, je devine la mer au loin dans la brume. Ca y est, c’est bien la dernière ligne droite. J’ai un sentiment partagé entre l’envie d’arriver à la mer et l’appréhension que l’aventure s’arrête.
Bordé par un troupeau de chamois juste après le pas, je me dirige vers le col de Raus (1999m). Alors que je marche, je croise 2 randonneurs dont l’un s’arrête en me disant “Je vous reconnais! On s’est croisé du côté du pas de la Cavale dans le Lauzanier il y a 6 jours!”. J’avoue ne plus me souvenir de son visage mais nous échangeons un peu sur le Mercantour. Il me recommande d’aller un jour découvrir la région des lacs de Vens qui est très belle me dit il: c’est bien noté.
Je vais arriver à la pointe des Trois Communes pour me poser dans les vestiges d’un bâtiment militaire, manger un lyophi et faire prendre le soleil à mes affaires. Je ne passerai pas par la baisse de Camp d’Argent (j’ai suffisamment d’eau) et je coupe le GR52 pour me diriger plein sud vers Sospel. Je me souviens d’un splendide panorama à Mangiabo sur les crêtes. Ce sont des zones de pâturages à moutons et je vais croiser une bergère qui lit un livre tout en avançant avec son troupeau. Comme d’habitude, je vais trouver la descente bien longue dans la chaleur jusqu’à Sospel.
J’ai faim mais à 18h il est trop tôt pour trouver une pizzeria ouverte. Je me pose à la terrasse d’un café pour boire un Monaco bien mérité. Autour de moi, des habitués achètent des jeux de grattage, ça discutaille et ça parle fort avec l’accent du sud. Je me souviens que l’un deux chantonne en italien, visiblement heureux de vivre… A 10 mètres, il y a la supérette où je vais me ravitailler une dernière fois sur la GTA. Il y a un camping à Sospel et la douche/pizza seraient les bienvenues mais je dois me rapprocher de Menton pour arriver au plus tard à midi le lendemain à Menton pour prendre un train. 19h passé, je reprends la marche sur le GR52 en direction du col du Razet. Je croise un jeune couple qui s’est posé dans un replat, ils m’apprendront que le camping de Sospel était fermé, donc finalement aucun regret d’avoir poursuivi.
Pour l’instant, ce n’est que de la forêt et aucun endroit plat, je me fais la réflexion, pour la deuxième fois au cours de cette GTA, qu’un hamac m’aurait permis de me poser n’importe où dans ces bois, surtout que je ne suis qu’à 800m et proche de la mer. Je vais arriver à une stèle commémorant le martyr de maquisards franco-italiens fusillés par les allemands. Il y a une source qui coule, premier bon point. Je songe un instant à me poser avec le matelas sur le rebord de la stèle puis un peu plus haut, je vois une dalle de béton qui est en fait le toit d’un réservoir d’eau en cas d’incendie je suppose. C’est décidé, je dormirai ce soir à la belle étoile sur cette dalle. C’est une première pour moi de dormir à la cow-boy. Si j’avais eu une tente autoportante, j’aurais pu la poser sur la dalle sans les sardines, il n’y a pas vraiment de vent.
Je vais avoir de la peine à m’endormir. Il y a un peu de lune mais je me sens bizarrement exposé à être ainsi au sol, sans abri dans la nuit. J’entends des chiens de troupeaux aboyer dans la direction du Mont Razet. Les loups rôdent ils dans la nuit en quête d’une proie? Normalement, je n’ai pas peur des loups car je considère qu’ils sont très craintifs et qu’ils fuient les hommes. Pourtant, allongé là au sol, j’ai l’impression que si je m’endors, je peux devenir une proie vulnérable et tentante pour des loups affamés qui ont dû me repérer à des km à la ronde. Bien entendu, rien de tout cela n’arrivera mais je ne dormirais que quelques heures avant de me lever. Je pense aussi que la perspective d’aboutir à la fin de cette GTA ne m’a pas aidé à trouver le sommeil…

Bilan J23: C’est bien de savoir à l’avance que l’on ne va pas trouver beaucoup d’eau pour aviser en conséquence sinon on peut vite se trouver piégé en été dans la chaleur. Même si je n’ai fait que passer, j’ai bien aimé Sospel. Je projette d’acheter un hamac ul pour d’autres sorties estivales. Dans des milieux très caillouteux ou sec, voire une dalle, une tente autoportante pourrait me servir d’abri. Il faut que je renouvelle une expérience de dormir à la belle étoile mais de préférence dans un environnement de verdure. Même si peu fondées, les peurs ancestrales resurgissent quand vient la nuit: je n’aurais jamais pensé avoir peur du loup et pourtant cette nuit là, j’ai douté et cela me parait ridicule avec le recul maintenant.

aube et lever de soleil au refuge des Merveilles

pas du Diable (2430m)

en allant sur l'Authion

bivouac à la cow-boy sous le col de Razet

Bebacksoon · 14-10-2020 18:15:26

jeudi 27 août J24:

Départ 5h15. Ce matin je monte au col du Razet (1032m) à la lampe frontale. A Colla-Bassa (1108m) je vais descendre en direction de Mourga et du col du Berceau (1090m) dernière hauteur avant de glisser vers Menton et la mer méditerranée. La descente dure plus de 3 heures et je vais prudemment, ça serait trop bête d’échouer maintenant à cause d’une stupide chute! La vue sur la côte d'azur et Monaco au loin est très belle dans ce début de matinée. Je vais finir cette GTA avec le beau temps. Sur les hauteurs de la ville de Menton, je trouve bizarrement et régulièrement des affaires et des sacs déchirés sur le bas côté, est-ce des affaires jetées suite à un vol, des cochons de marcheurs qui se délaissent de leurs affaires en fin de parcours? Il y a aussi de belles baraques avec vue imprenable sur la mer.
Je vais longer le bord de mer pour arriver aux plages. J’ai de la peine à réaliser que j’arrive à la fin, un sentiment d'irréalité flotte dans l’air comme si je rêvais… Je suis poisseux et aussi fatigué d’avoir mal dormi, la mer et l’eau m’attire irrésistiblement… Quel bonheur de plonger dans la grande bleue!
Voilà… this is the end!
Je vais bientôt prendre le train pour aller à Gap où je passerais la nuit au F1. Ensuite, prendre le car le lendemain matin pour Barcelonnette. Enfin, de l’auto stop pour rejoindre la voiture à Larche et rentrer sur Lyon.

J’espère que ce récit aidera et incitera certains lecteurs à franchir le pas pour partir sur cette traversée des Alpes entre Léman et Méditerranée. Au départ, je ne pensais pas écrire de récit, me sentant incapable de tout me rappeler et puis finalement les souvenirs sont bien présents et perdurent, preuve que cette GTA restera en moi pour la vie… en attendant d’autres aventures!

Merci de m’avoir lu

descente sur Menton

Menton

Stéphane_33 · 14-10-2020 19:01:04

Merci Bebacksoon, elle me fait bien envie cette traversée
Stéphane.

Dernière modification par Stéphane_33 (14-10-2020 19:01:24)

Nayana · 14-10-2020 19:19:59

Bebacksoon a écrit :

#587897Sur les hauteurs de la ville de Menton, je trouve bizarrement et régulièrement des affaires et des sacs déchirés sur le bas côté, est-ce des affaires jetées suite à un vol, des cochons de marcheurs qui se délaissent de leurs affaires en fin de parcours?

Des migrants...

Ytreza · 15-10-2020 08:55:20

Bravo

bensbens · 03-01-2021 08:51:15

Merci pour ce superbe récit. Ayant déménagé sur la cote d'Azur depuis quelques mois C'est une rando qui me fait de l'oeil. J'ai dévoré ton aventure d'une traite!

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#51 14-10-2020 11:00:36

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