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#26 19-12-2021 12:20:47

Mélicorne
Membre
Inscription : 02-06-2021

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Je suis plutôt d'accord avec Manolin. En tant que concerné.e, je trouve ça risqué de prendre des accompagnants non formés. Les changements, les inconnus (tant environnements, que situation, que personnes), le fait d'être entourés de personnes inconnues peut être très stressant et déclancher des crises. Si les accompagnants ne sont pas formés, iels pourront faire plus de mal que de bien. Entre la maltraitance des soignants envers les concernés, et le stress que ça produira sur le reste du groupe...
Avoir une personne concernée dans votre entourage ne fait pas de vous un.e concerné.e...

Marcheur75: non le handicap physique n'est pas bien accepté, je peux te le certifié.

De plus, ton ami avec qui tu pars en randonnée arrive peut être a bien gérer (déjà il est avec des gens qu'il connait, en petit comité etc...) mais comme tu le dis si bien, ça ne représente pas la majorité des cas.

Bref, comme toujours, pour répondre à la question de base : demandez aux concernés et ne pensez pas que en tant que proche vous serez assez formé. Je rabâche mais: demandez aux concernés


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#27 19-12-2021 12:46:18

Oscar
Membre
Inscription : 01-02-2005

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Merci à tous pour vos témoignages et conseils.

Qui confirment et complètent les conclusions auxquelles je suis arrivé.

Le projet de rando itinérante début mai prend forme.

Les proches et les personnes concernées sont bien entendu dans la boucle, et les encadrants - dont moi même - auront des connaissances sur les troubles psy sévères.

Je retiens bien entendu qu'il y a des risques à ne pas négliger, et je note aussi - témoignages reçus hors rando léger que :

  • pour ceux qui ont déjà réalisé une rando dans des conditions analogues - il y a en a eu 2 via l'association par laquelle je vais passer - les retours ont été très très positifs et les bienfaits apportés par cette expérience ont largement dépassé le strict cadre de la semaine partagée

  • témoignage d'un psychiatre largement investi dans les démarches de rétablissement en santé mentale : il vaut mieux que le jeune se motive et essaie - même si cela le sort de sa zone de confort et n'est pas sans risque aucun - que de ne rien proposer et viser une vie sans relief et sans envie afin d'éviter tout stress et tout changement d'environnement

Merci encore à vous, j'avance sur ce projet, qui démarrera avec les personnes concernées bien avant la rando, et se poursuivra après celle ci.

Dernière modification par Oscar (20-12-2021 18:35:48)

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#28 19-12-2021 13:01:06

marcheur75
Membre
Inscription : 22-02-2009

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

J'ai bien conscience que mon proche est un cas particulier "stabilisé", que je peux traiter "normalement". Lorsqu'il m'arrive de l'accompagner aux consultations psychiatriques je constate bien que d'autres personnes sont beaucoup plus affectées que lui. Et je ne parle pas des hôpitaux, ou des personnes à la rue.

Concernant le handicap physique je pensais surtout aux handicapés physiques que j'ai côtoyé au travail et qui ne souffraient pas de discrimination. Mais c'est aussi bien entendu encore une expérience particulière.

Dans la vie courante la vie des handicapés physiques est difficile, sinon impossible. Accès aux transports et aux bâtiments, ascenseurs en panne quand ils existent, trottoirs transformés en parking ou encombrés de terrasses de bistrot, entre autre.


Je n'ai pas lu tous les livres, hélas ! Mais la chair est réjouissante...

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#29 19-12-2021 16:15:25

manolin
Rando-pêcheur
Inscription : 24-04-2015

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

@oscar : je partage le fait qu'il faut construire une vie avec des activités enrichissantes, maintenant le "il vaut mieux risquer une décompensation" me fait halluciner (lol) et ne peut provenir que d'un dangereux malade (beaucoup de psys le sont, double lol).

Le ticket pour une décompensation, c'est pas le psy, l'encadrant, le proche qui paye. C'est le patient.
Comme on dit, les conseillers ne sont pas les payeurs et en l'espèce, c'est parfois bien dommage...

Pour ma part, une décompensation, c'est au minimum, un mois d'HP suivi d'une dépression modérément sèvère de plusieurs mois, et évidemment des neuroleptiques pendant plusieurs mois pour éteindre le feu neurochimique provoqué par la crise.

Rien que ce ticket là, c'est cher et dangereux car la dépression, en plus d'être extrêmement dur à vivre, d'isoler socialement, et d'empêcher d'avoir une vie plus agréable, ben le risque c'est le suicide. Ordre d'idée ; les bipolaires tentent de se suicider douze à quinze fois plus que la population générale et réussissent six fois plus. ? On prend le risque ?

Ensuite, le type de ticket que j'ai le plus souvent payé (en neuf ans, j'ai fait neuf crises hautes, autant de crises basses, logique pendulaire du bipolaire) : terreur psychique, camisole, chambre d'isolement, pelleté de neuroleptique, tabassage, blessures plus ou moins graves m'empêchant ensuite de faire du sport pendant des mois, perte d'emploi, perte de conjoint,  d'amis, dépressions très sévères virant à la mélancolie (inanition), etc.... Mieux vaut une décompensation ?

J'ai souvent dit à des médecins qu'il serait en fait bien qu'on les enferme une semaine dans un HP au régime patient, juste pour qu'il comprenne ce que c'est. Eux, il arrivent le matin, font leur petite tournée, écoute parfois à moitié les patients car ils sont fatigués et les patients, et c'est vrai, fatigants. Au café, ils râlent sur le manque de moyens justifiant leur comportement dilettante, drague un peu les collègues, puis rentre chez eux tandis que les patients restent dans un environnement où tu attends des heures pour tout, où il n'y a aucune activité (manque de moyens c'est vrai), où les chambres ne sont pas ventilées contrairement à leur bureau (tu ne peux pas ouvrir les fenêtre en HP, logique), et où la nuit tu es réveillé par des hurlements ou des patients agités qui veulent une cigarette et font toutes les chambres une à une avant de résister aux infirmiers de nuit voulant les ramener en chambre. Je passe sur les comportements condescendants des médecins (jamais du personnel infirmier) et l'agressivité de certains patients, ainsi que la misère sociale que tu prends dans la gueule à longueur de journée.

Aux internes, je leur filerai aussi quelques jours de neuroleptiques, pour qu'une fois grands ils arrêtent de dire que cela ne touche pas la cognition, que c'est la maladie, le patient quoi, qui fait que tu baves, que tu n'as plus de mémoire, plus de capacité de concentration etc.... alors qu'un psy honnête dit à son patient que oui, il va être cogner et que baver, c'est le prix à payer pour pas délirer. Mais si on les cognait tous un peu avec quand ils sont jeunes, peut-être qu'ils comprendraient tous.

Quant à ton psy, si il pense vraiment ce que tu as cité, je lui filerai bien un cocktail de LSD, de Datura, et autres substances hallucinogènes en le balançant ensuite dans Paris. Il se retrouverait, espérons le pour l'expérience, sans doute en isolement, terrorisé avant d'en sortir zombie de chez zombie, puis de finir en dépression pendant des mois. Il pourrait aussi manquer crever comme cela m'est arrivé quatre fois sur neuf (j'ai été traité pour stress post-traumatique complexe pour mes crises et suis considéré comme un "survivant" par mes soignants, à l'instar des victimes d'actes de violence grave réitérés).

Bon je m'arrête là là desssus et conclut en disant qu'on peut avoir une jolie vie en tant que patient, avec des activités enrichissantes, sans risquer la décompensation. Il faut pour cela être accompagné par un bon psy conscient de la souffrance et des risques que peuvent représenter une décompensation et avoir une bonne connaissance de sa maladie et de soi-même (mais tous les patients ne peuvent y parvenir malheureusement). Ainsi, comme je l'ai dit, moi, je vis à flanc de montagne, en bord de rivière, je sors en forêt, de nuit, seul, hors sentier, en mode sanglier et je ne vrille pas. Je nage aussi en rivière et ai une belle vie dans un centre bouddhiste où je médite chaque jour, travaille en forêt, en cuisine, avec d'autres, etc... Je suis heureux.

Et je suis convaincu que de très nombreux patients, y compris avec des formes assez sévères au quotidien, peuvent faire de la randonnée moins engagée, y compris en itinérance, si c'est bien préparé et encadré.

Mais il m'a fallut des années pour parvenir à ma vie actuelle, et je suis dit "patient expert". Chaque fois par contre que j'ai pris des risques trop importants, comme reprendre le travail sur les "bons" conseils de ma première psy, j'ai payé le ticket fort.

Faut pas trop écouter les psys en fait. Comme dit Didier Super, y en a des biens... mais ma stat, c'est 1 sur 7.
Mieux vaut écouter les patients expérimentés de type pair-aidants.
Eux c'est dans leur chair qu'ils ont appris.... Mais je suis biaisé smile
Les infirmiers et les para-médicaux qui cotoient les patients au quotidien sont aussi plus à même de les évaluer souvent.

***

@marcheur75 : il n'y a pas de vies, de gens normaux et en face, de vies, de gens .... anormaux ? Il y a des personnes ordinaires et des patients que l'on peut dire extraordinaires (c'est ainsi que les maîtresses et maîtres dans certaines écoles appellent les enfants handicapés).C'est quand même plus joli et moins stigmatisant smile

***

Dernière modification par manolin (19-12-2021 16:28:14)


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#30 19-12-2021 18:50:23

Oscar
Membre
Inscription : 01-02-2005

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

manolin a écrit :

#636832@oscar : je partage le fait qu'il faut construire une vie avec des activités enrichissantes, maintenant le "il vaut mieux risquer une décompensation" me fait halluciner (lol) et ne peut provenir que d'un dangereux malade (beaucoup de psys le sont, double lol).

Ce ne sont peut être pas les bons termes(2), et il ne faut pas en faire une interprétation : "envoyons les au casse pipe".

Mais plutôt d'être conscient d'une approche très répandue de surprotection des personnes atteintes de troubles psychiques auxquelles on évite finalement toute émotion pour éviter tout stress et qui finalement conduit à faire à leur place, décider à leur place, éviter qu’elles fassent leurs course car ce peut être stressant, éviter qu’elles aient des loisirs car ce peut être stressant, éviter qu’elles puissent avoir des relations amoureuses car la rupture peut amener à une décompensation, éviter le travail, d'aller dans des associations, de rencontrer des gens, d'aller au restaurant, d'aller voir la famille, d'aller à un enterrement ou à un mariage, les fêtes, etc. J'exagère à peine.

L'idée est de positionner le curseur avec des activités qui ne mette pas la personne en danger (même si forcément il peut toujours y avoir un risque faible de compensation), et qui sont stimulantes pour elle.

Comme tu le précises pour ton cas : "on peut avoir une jolie vie en tant que patient(1), avec des activités enrichissantes, sans risquer la décompensation".

Je suis entièrement d'accord avec toi sur :
Et je suis convaincu que de très nombreux patients(1), y compris avec des formes assez sévères au quotidien, peuvent faire de la randonnée moins engagée, y compris en itinérance, si c'est bien préparé et encadré.
et
Mieux vaut écouter les patients(1) expérimentés de type pair-aidants.

(1) je n'aime pas vraiment le terme "patient", qui me parait définir la personne par sa maladie.
(2) j'ai modifié le propos initial pour mieux refléter ce que j'en avais compris, et ne pas donner lieu à malentendu

Dernière modification par Oscar (20-12-2021 18:39:04)

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#31 19-12-2021 20:17:58

Etimul
Membre
Inscription : 13-03-2013

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Salut.

Manolin a écrit :

Il y a des personnes ordinaires et des patients que l'on peut dire extraordinaires (c'est ainsi que les maîtresses et maîtres dans certaines écoles appellent les enfants handicapés).C'est quand même plus joli et moins stigmatisant smile
**

Oui et en plus quand on est ordinaire avec des extraordinaires, on peut vivre vraiment d'extraordinaires "trucs" ordinaires   cool

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#32 19-12-2021 21:02:42

manolin
Rando-pêcheur
Inscription : 24-04-2015

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

On s'éloigne de la randonnée légère mais comme l'a dit marcheur75, si cela peut un peu aider à mieux comprendre le trouble psy et les troublés dans le milieu de la randonnée, my 2 cents sur cette question de comment nommer les fous.

Le problème s'est évidemment posé ailleurs et il y a longtemps, dans les groupes de parole par exemple. Et bien on parle de groupes de patients et de groupes de proches ou de groupes proches/patients quand ils sont mixtes (parfois très rock'n roll).

Toutefois, au début où je participais aux groupes de parole, on me disait de dire "je m'appelle X et je suis atteint de bipolarité" au lieu de "je suis bipolaire'", pour cette raison, ne pas se définir uniquement par la maladie. Mais un moment, avec d'autres, on a eu marre de cette phrase et surtout de l'obsession de certains animateurs sur ce sujet (souvent les proches  qui sont parfois les plus gênés). Donc on disait : je m'appelle x et je suis nageur, pêcheur, randonneur, grand, blanc, châtain et bipolaire." . Et chacun s'y mettait, cela faisait des présentations à rallonge qu'on renouvelait et on rigolait bien (enfin, nous les fous smile

Au fond, on ne voulait pas que d'autres décident à notre place de où mettre la maladie dans nos vies, surtout en groupe de parole, espace de libre expression. Si j'ai envie de dire je suis bipolaire, car à cet instant la maladie envahit ma vie à un point tel que le reste n'existe plus, ou même juste parce que j'en ai envie, c'est pas à un proche, ni à un pair d'ailleurs, de me reprendre.

Par ailleurs, patient, c'est quelqu'un qui se soigne, et cela c'est positif car beaucoup de patients psy ont du mal à accepter le fait qu'ils sont malades (phénomène du déni, très important dans les maladies psychiatriques). C'est notamment pour cela que le terme est choisi en groupe et je n'ai jamais entendu une remarque de patient remettant en cause le terme, contrairement aux autres termes qui sont parfois employés par les ordinaires pour tenter de pas stigmatiser (ce qui est louable).

Pour les autres termes courants, voici mon avis : un malade il se soigne pas forcément et là tu pointes juste la maladie. Ce n'est pas positif. Handicapé, tu pointes juste l'incapacité (je suis RQTH, handicapé aux yeux de l'administration). Or je suis pas incapable moi. Hier j'ai encore élaguer des branches pendant deux heures dans le froid avant d'aller courir. Tout le monde n'en est pas capable. Invalide, c'est le pire pour moi et je touche une pension d'invalidité, j'en suis donc un aussi, administrativement parlant. Or je ne suis certes plus capable de travailler car le milieu du travail est un lieu de tension/pression trop important pour moi. Mais la vie ne se définit pas uniquement par ce type de travail. "N'est pas valide"... En quoi ? Pour quoi ?

La plupart de mes anciens collègues seraient fortement invalides et handicapés dans la forêt de nuit par-5° où j'évolue moi joyeux en écoutant parfois un peu de hip hop pour garder le rythme, avant de brandir au sommet mon bâton vers le ciel car je suis à cet instant, c'est une évidence, le roi du monde. Eux finiraient en fait surtout malades, voire morts, si personne ne leur indique la sortie et leur offre de quoi se réchauffer. Donc handicapés, invalides et malades, ces ordinaires dans mon environnement.  Mais bon, s'ils viennent souvent ensuite sur RL pour éviter la rechute, je veux bien les appeler patients, et s'ils veulent faire une petite sortie encadrée pour être soutenu dans leur craquage après fort dénivelé, pluie froide, erreur de topo et sangliers bruyants, je les accompagnerai sans souci, moi le patient handicapé invalide malade et fou. tongue

Dernière modification par manolin (19-12-2021 21:34:59)


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#33 20-12-2021 11:47:15

marcheur75
Membre
Inscription : 22-02-2009

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Puisque nous sommes sur un magnifique forum consacré à la balade légère, il faut parler poids des équipements et du sac.

Dans le cadre de mes promenades avec ce proche handicapé il n'y a pas de sur-poids par rapport à une personne ne souffrant pas de handicap, hormis les médicaments. Les médicaments ne sont pas lourds (je ne les ai jamais pesés), mais volumineux car nous les gardons dans leur emballage d'origine. Nous hésitons à les mettre en vrac dans un sac plastique.

Et de toute façon le compagnon de balade porte aussi ses propres médicaments, nous sommes donc à égalité sur cet aspect, bien que j'en absorbe beaucoup moins.

Bien entendu, cela n'est qu'une expérience particulière.

Il serait instructif, je pense, d'avoir des retours d'oscar sur la préparation matérielle de sa balade et son déroulement, de même pour manolin.


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#34 20-12-2021 11:51:06

frneko
Marcheur aveugle
Lieu : 81600 GAILLAC
Inscription : 14-01-2021

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Bonjour,
je suis d'accord avec le point de vue de Manolin ; la normalité n'étant que les comportements visibles du plus grand nombre. L'humain, comme beaucoup d'animaux, rejette ce qui lui est différend (un fauve albinos a une espérance de vie très réduite).
D'ailleurs lorsque l'on parle d'handicap physique ou de Personne à Mobilité Réduite, on pense de suite à un fauteuil roulant.
Et les autres ?
Beaucoup de toilettes réservées aux handicapés sont très bien équipées pour un fauteuil roulant, avec des peintures sombres, sol sombre, pas de contr    aste pour les divers équipements.
Le passage piétons a un petit homme rouge ou vert, mais pas de bip...
Perso, je pense que pour ouvrir la rando à des personnes différentes, il faut commencer très progressivement pour que ce nouvel environnement et les situations, prévues ou non, qui en découlent soient, presque, habituelles. Nous avons tous une capacité d'adaptation, plus ou moins rapide et plus ou moins importante, mais elle est liée à des changements progressifs.


Jeune de 68 ans, aveugle à 99%, je randonne guidé, pas à pas par Rose ma compagne.

Mon trombi, nos récits de rando, mes listes...
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#35 20-12-2021 15:06:16

manolin
Rando-pêcheur
Inscription : 24-04-2015

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Pour répondre sur le sujet du poids soulevé par marcheur75, pour ma part, il n'y a aucune variation particulière dû à la maladie par rapport à quelqu'un d'ordinaire.

Les médicaments, je n'en prends plus qu'un au quotidien, du Lithium, et j'emporte toujours en plus quelques exemplaires de deux autres médicaments que je peux prendre au besoin pour calmer un peu la machine si elle s'emballe et faciliter l'endormissement. Au total, je viens de peser trois plaquettes, et on est à peine 10 grammes, sachant qu'en fait j'emporte moins car juste le nécessaire pour la sortie, plus du rab de un ou deux jours si je traîne ou ai un gros pépin. 5g disons pour 48H. Mais moi, c'est moi maintenant. Il fut un temps où je prenais six médicaments chaque jour dont certains en goutte.

Je dois boire plus d'eau qu'un autre car le Lithium attaque les reins et je dois donc les aider en m'hydratant d'avantage, mais j'ai un filtre à eau donc RAS de ce côté là. Mais pareil, c'est pour moi, maintenant dans mon environnement. Un autre patient prenant du Lithium devra porter plus d'eau, ou un camarade devra le faire pour lui, si filtrer n'est pas envisageable.

Le Lithium rend également plus sensible au soleil, mais là, ben on se protège comme n'importe quel personne sensible.

Cela c'est pour les médicaments et la protection contre leurs effets, et pour ce qui me concerne.

Ensuite, pour certains patients, il faudra selon moi prendre en compte leur style de vie, souvent en environnement surchauffé et sans activité physique. Donc confronté au froid, pas la même résistance, nécessité de couches supplémentaires ou plus épaisses. Difficulté par ailleurs au port de charges, et au delà à la marche, sachant que la maladie et les medocs peuvent induire des fluctuations énergétiques qui font qu'on se sent tout à coup vidé. Mieux vaut alors pas être trop chargé.

Il faudra donc trouver l'équilibre, comme pour nous tous.

Enfin, certains patients peuvent avoir des demandes pouvant paraître absurdes, par exemple, emmener une doudoune de 1 kilo en plein été, éventuellement portée au départ. J'ai souvent vu cela en HP des gens qui ne quittaient jamais leur blouson tout en se plaignant d'avoir chaud ou qui trimballe un sac contenant des objets hétéroclites et qui parte en vrille dès qu'ils pensent l'avoir perdu. Il peut s'agir d'un objet auquel le patient tient énormément ou qui rassure face à des peurs qui n'ont objectivement pas lieu d'être du moins dans le monde ordinaire. Mais dans le monde du patient, c'est très différent.

J'ai lu un jour dans une thèse une histoire qui illustre bien ce dernier point, en plus de revenir sur l'importance de la formation des encadrants : une femme refusait de s'entretenir avec son psychiatre si il ne la laissait pas ouvrir la fenêtre en début d'entretien, puis la refermer. En l'interrogeant, il comprend à mots couverts, et pour cause, qu'il y a un démon dans la pièce. Or, c'est évident qu'on ne parle pas de choses sensibles devant un démon (je connais ces bestioles là et clairement la dame avait raison, sachant que moi, j'ai un style plus martial quand ils se pointent wink. Le psychiatre, au lieu de faire ce que beaucoup de personnes non formées auraient tenté, lui expliquer que non, il n'y a pas de démons et patatati et patatata, l'a laissé faire et a alors pu commencer à la soigner car elle s'est calmée. Le manège s'est répété un temps, puis le démon s'est envolé...


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#36 20-12-2021 16:19:18

marcheur75
Membre
Inscription : 22-02-2009

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Je ne sais pas si tous les patients peuvent déterminer d'eux mêmes quand cela part en vrille, et tout de suite faire quelque chose pour y remédier. Peut-être est-ce là le bénéfice d'être patient expert, après 9 ans de maladie et d'expérience.

Cela suppose déjà de reconnaître sa maladie et d'accepter de la traiter, et de trouver les structures qui vont bien pour les soins. Ce n'est pas forcément le cas de tous.

Mon proche prend beaucoup plus de médicaments, et les prends régulièrement. J'ai compris qu'il partirait en mode zombie si il ne les prenait pas pendant 2 ou 3 jours, et qu'alors la reprise des médicaments ne serait pas suffisantes, que l'hospitalisation serait nécessaire. Ce qui lui est déjà arrivé plusieurs fois. Je ne souhaite à personne un séjour en hôpital psychiatrique.

Tout cela dépend des personnes, mais il peut être dans l'attribution d'un accompagnateur de rando de vérifier que tout le monde à suffisamment de médicaments avant le départ et les prend régulièrement.

Cela ne représente qu'une expérience limitée à une seule personne, complétement incompétente sur le sujet.

Édition : conjugaison.

Dernière modification par marcheur75 (20-12-2021 16:52:47)


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#37 20-12-2021 18:11:10

Mélicorne
Membre
Inscription : 02-06-2021

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Tout d'abord, merci Manolin de toutes ces informations, je n'ai malheureusement pas l'énergie en ce moment de faire des longues explications comme tu le fais si bien. La phrase du psy disant qu'il faut risquer la decompensation.... ça  me desespère mais m'etonne pas (les psychiatres sont vraiment des brêles par moment....)

est ce que je pourrais te mp concernant ton rôle de patient expert? (mon ex compagnon l'est également mais pour le SED)


Pour faire simple Oscar: arrêtez d'écouter les psychiatres qui en ont rien à faire de notre sécurité et qui sont psychophobes au possible... tournez vous vers les concernés (patients experts, pair aidance etc...) j'arrête pas de le répeter mais à croire que je dois continuer à le dire... Marre que nous payons le prix de vos petits plaisir de "valides qui veulent sauver les pauvres petits handi"

Non, risquer une decompensation pour une rando c'est pas Ok, non risquer une crise autistique parce que les accompagnants savent pas gérer c'est pas ok (on a failli me tuer 3 fois comme ça alors non merci), non vous ne pourrez jamais comprendre ce qu'on vit tant que vous y serez pas confrontés personnellement.

Bref, laissez nous tranquilles.


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#38 20-12-2021 18:30:16

Oscar
Membre
Inscription : 01-02-2005

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Comme indiqué ci avant, j'ai exagéré l'interprétation du psy et l'ai précisé plus haut. J'ai modifié le phrase initiale pour refléter au mieux le propos.

Je ne l'ai peut être pas assez indiqué, mais ma base d'information, ce sont les pair aidants, les proches, et ceux (peu nombreux) qui ont déjà encadrés de telles randos.

La phrase "petits plaisirs de valides..." n'engage que toi, et je ne m'y reconnais pas du tout.

Peace.

Dernière modification par Oscar (21-12-2021 10:54:31)

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#39 20-12-2021 19:03:04

manolin
Rando-pêcheur
Inscription : 24-04-2015

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Je vais juste répondre sur la question de la vérification des médicaments et sur le patient expert, puis j'arrêterai ma contribution au fil. J'expliquerai à la fin pourquoi.

Clairement, pour moi, seul un soignant ou un proche en lien avec les soignants peut être amené à vérifier les médocs si le patient ne peut pas le faire lui même.

La relation qu'entretient un patient psy avec ses médocs c'est souvent très particulier. Cela peut aller de la haine à l'amour mal placé. Moi, en aucune façon, on se substitue à moi, y compris pour toucher à l'ordonnance; Ma psy elle propose, je dispose et c'est elle qui m'a formé comme cela car l'appropriation par le patient  du traitement c'est fondamental (quand il le peut). En HP après quelques séjours je vérifiais déjà au dessus de l'épaule de l'infirmier, vu que cela arrive qu'à la longue en fin de service, ils se plantent. On a déjà oublié de me filer mon Lithium en hosto et j'ai dû insister pour l'avoir ensuite. Délire, non ? smile

Tous les bipolaires que je connais, même en vrac, enverrai en fait bouler un randonneur prétendant vérifier qu'ils se soignent correctement car il a eu quelques heures de formation. De plus, en HP, les staffs infirmiers peuvent passer un temps long pour faire prendre des médocs à un patient récalcitrant alors qu'ils savent faire et ont de réels moyens de pression et puis, eux, il savent ce qu'ils manipulent, ils suivent des procédures, ils notent tout, etc... c'est un métier, mais comme je l'ai dit ils arrivent encore à se planter. Donc par pitié, pas un randonneur lambda même ayant eu quelques heures d'échange avec des soignants.  On confinerai à un paternalisme vraiment très mal placé et potentiellement dangereux de mon point de vue.

On parle pas de Doliprane hein (et même le Doliprane peut être dangereux au passage).

Pour conclure, je vais donc devoir cesser ma contribution et la raison te donnera une réponse quant à cette question de patient expert, expression de médecins que j'ai utilisé sans préciser je crois que je la trouve pourrie lui préférant patient expérimenté.
Patient expert c'est prétentieux et puis expert par rapport à quoi. Expérimenté, c'est juste un fait.

Hier, quand oscar a parlé d'un psy prêt à prendre le risque d'une décompensation pour mettre un peu de sel dans la triste vie de malades, j'ai évoqué ce que c'est pour moi une décompensation. Cela a suffit a réveillé mon stress post-traumatique car ensuite j'y est repensé. Ou plus exactement couplé à la pleine lune, où je ne dors plus depuis que je suis un loup-garou (comprendre un bipolaire), cela a contribué à faire qu'aujourd'hui, j'ai commencé à avoir de nouveau des flashs de violences et terreurs vécues en crise, associé à des départs en crises de larme soudains. Dans ces cas là, ben j'applique la procédure, je m'éloigne du facteur déclencheur (le fil), je fais des choses toutes douces (bain chaud, porridge au chocolat, joint de CBD), j'adopte une attitude mentale particulière par ailleurs, et ce soir un médoc précis et on espère dodo.

Ceci étant, il y a un an, après deux ans de stabilité, je me suis fait agresser physiquement violemment. Sur le coup, je me suis dit, t'as bien géré car c'était vraiment violent et je me sentais calme après l'agression. 48H après j'étais dissocié (voix, hallus) sans avoir rien capté et j'ai fait la crise la plus longue et la plus violente de ma vie. La différence avec quand j'étais pas expérimenté, c'est que mon expérience joue aussi quand je suis dans mon monde, je parviens ainsi à aller de moi même à l'hosto quand mon délire devient absolument insupportable, j'évite ainsi ce qui se passe quand je passe l'altération de conscience à l'abolition, mais je paye quand même le prix fort en sortie d'HP (dépression sévère, six mois et double entorse à un pied qui m'a empêché de profiter de ma nouvelle vie ici en Ardèche comme je voulais le faire et le fait maintenant).

Donc la réponse à ta question - est-ce qu'un patient expérimenté voit toujours quand il part en vrille , pour moi, c'est non.
Tu peux aussi repenser à l'histoire de ce patient très expérimenté qui voulait faire Compostelle et que j'ai raconté. Boum...

Dernier mot, le fil évoque de nombreuses maladies, or chaque maladie est différente. Chaque patient l'est aussi, par rapport à un autre patient atteint de la même maladie, par rapport au malade qu'il était hier et qu'il sera demain. J'ai coutume de dire que chaque bipolaire a sa forme qui se développe au fil du temps pour en faire vraiment une maladie unique. Il n'y a pas de généralités. On emmène pas un bipolaire "débutant" en sortie d'HP en balade comme on sort avec un type comme moi. On ne peut comparer un schizophrène qui alterne rue-foyer-hp avec un patient autiste asperger inséré dans la société. C'est sans doute la grande limite de notre discussion. On ne sait pas qui oscar veut emmener donc moi, comme d'autres, ben on a parlé de nous et fait des généralités. Cela a pu aider mais au final, c'est au cas par cas, qu'on décide qui, quoi, quand, comment.

Enfin, c'était mon point de vue.

Belles fêtes à tous, et Oscar, je te souhaite de belles randonnées avec les personnes que tu accompagneras. C'est essentiel que des gens s'investissent comme tu le fais, d'autant plus vu le manque de moyens des structures hospitalières et des assos.  Merci pour eux, merci pour nous !

Simplement prudence et comme le dit Mélicorne et comme je l'ai dit, attention aux psys. Ils sortent trop vite de l'HP...



[Modification ; ajout de l'appel à la prudence]

Dernière modification par manolin (20-12-2021 19:17:55)


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#40 20-12-2021 19:16:13

Redfish
Chat schizophrène...
Lieu : Marseille
Inscription : 16-11-2017
Site Web

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Manolin, si jamais tu repasses, plus tard, sur le topic... je tenais à te remercier très chaleureusement pour ton partage (en particulier sachant qu'il t'en coute).
Et merci aussi autre pour leur partage et leur discours bienveillant.
smile

Dernière modification par Redfish (20-12-2021 19:16:36)

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#41 20-12-2021 20:22:40

Oscar
Membre
Inscription : 01-02-2005

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Je vais également d'arrêter de nourrir ce fil de discussion, en partie parce qu'il a pu perturber Manolin suite à un propos maladroit de ma part, mais pas seulement.

Quelques précisions tout de même avant la sortie :

  • sur la médicamentation, je n'avais pas relevé le propos, mais évidement il est hors de question de gérer les médicaments de quiconque, et encore moins de les adminstrer. En pharmacologie, je n'emporterais qu'une trousse à pharmacie pour de la bobologie, et une boite de boules quiess pour ceux qui les auraient oubliées.

  • les personnes concernées par cette première expérience en mai sont des patients stabilisés, accompagnés chacun d'au moins un proche

  • lorsque je mentionne un cadre associatif dans lequel sont proposées ces randos, il s'agit d'associations de patients ou de proches, pas d'associations de randonnées pédestre

Enfin, bien évidement un questionnement me taraude : ai je bien fait d'ouvrir ce fil de discussion ? Je n'ai pas de réponse toute trouvée et absolue. Je relève que, sauf erreur de ma part, il s'agit du seul fil de discussion où le handicap est abordé comme sujet, sur un total actuel de plus de 30 000 fils de discussion, avec un forum existant depuis plus de 15 ans.

Nécessaire ?

Utile ?

De trop ?

Inapproprié ?

Merci à tous ceux qui y ont participé, se sont livrés, et je pense ont permis de mieux faire comprendre les difficultés induites par le handicap et, par là même je l'espère participer quelque peu à sa déstigmatisation.

Je vous souhaite à tous et toutes de bonnes fêtes de fin d'année, et bien entendu de belles randos

Dernière modification par Oscar (20-12-2021 20:31:48)

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#42 20-12-2021 20:31:05

Tib
Membre
Lieu : Houston ? on a un problème !
Inscription : 02-10-2020

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

D'un point de vue externe, je pense individuellement que tu as très bien fait. J'en ai plus appris sur les troubles évoqués ici que durant les 41 années de ma petite vie.


Bike lives matter.

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#43 20-12-2021 20:47:44

saule
Membre
Inscription : 21-06-2008

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Oscar wink
tu as bien fait d'ouvrir ce fil.

j'en ai organisé des randos avec des personnes en situation de handicap.
à plus en mp


Bravo pour la richesse du débat


marche et t'es toi !

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#44 21-12-2021 01:05:49

Redfish
Chat schizophrène...
Lieu : Marseille
Inscription : 16-11-2017
Site Web

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Oscar a écrit :

#636902Enfin, bien évidement un questionnement me taraude : ai je bien fait d'ouvrir ce fil de discussion ?

De mon point de vue... oui, sans hésitation.
wink

Oscar a écrit :

#636902 Je relève que, sauf erreur de ma part, il s'agit du seul fil de discussion où le handicap est abordé comme sujet, sur un total actuel de plus de 30 000 fils de discussion, avec un forum existant depuis plus de 15 ans.

Il n'y avait pas de fil sur le forum, car tout simplement cela ne relève en rien de la randonnée légère, mais de la randonnée en général.
Bien qu'on aurait pu avoir le sujet abordé sur un trombi...

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#45 21-12-2021 08:14:43

Gunnar
à pieds
Inscription : 11-04-2021

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Redfish et oscar vous vous trompez, le handicap a déjà été abordé sur RL notamment sur un très joli retour de Frneko https://www.randonner-leger.org/forum/v … p?id=40489 .


« Le destin brasse les cartes mais c’est nous qui les jouerons » Bernard Moitessier

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#46 21-12-2021 09:31:58

manolin
Rando-pêcheur
Inscription : 24-04-2015

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Coucou,

Je repasse vite fait après une bonne nuit de sommeil pour dire à Oscar de surtout ne se sentir aucune responsabilité quant à cette résurgence de PTSD. Tu n'y es pour rien au sens où déjà c'est assez courant quand je suis fatigué que cela remonte à la surface. De plus, on parle pas ici décompensation (c'est pas grave) et, comme me le dit ma petite voix intérieure (rien d'anormal ici), c'est bien normal aussi, vu ce que j'ai vécu que cela sorte parfois.

Et puis, cela me fait du bien aussi de pleurer parfois, de sortir encore un peu plus de souffrance ainsi. Je ne souffre pas quand cela se produit et après, je suis fatigué mais délassé. C'est une grande leçon de la maladie pour moi, l'ancien para habitué à serrer les dents. Pleurer soulage aussi. De plus, n'importe quel stimuli peut le produire quand je suis claqué, même positif.

Des fois, je suis en haut de ma montagne, et je regarde devant moi, le plateau du Vercors enneigé par exemple, irisé par le soleil levant, et je me dis que j'ai une chance énorme de vivre ici maintenant. Mécaniquement, une pensée me renvoie à un moment traumatisant, les larmes montent, mais en fait elle se transforme en rire bien vite. Je suis le roi du monde, je l'ai dit, j'ai vaincu, survécu... Fuck off la bipolarité, fuck off l'HP et vivent les sangliers légers !

Quant à fermer le fil, tu as évoqué d'autres raisons pour toi, mais moi, j'invite ceux qui souhaitent s'exprimer à le faire. C'est important je trouve de témoigner, d'échanger, de réfléchir ensemble à comment faire en sorte que des patients qui ont souvent des vies de merde, il faut le dire, puisse aussi profiter de ce que nous vivons quand nous randonnons.

Et puis comme Noël est en fait déjà là, je partage un peu de ce qui est maintenant mon environnement quotidien, avec le message suivant aux éventuels patients, qui peuvent lire RL en silence, en souffrance, comme je l'ai fait pendant des années, car cela me permettait de m'évader.

Accrochez vous, acceptez la maladie quand elle est là car on se bat mieux ainsi, forcez vous aussi, et c'est très important, à demander de l'aide, à aller vers les autres, oubliez le regard sombre que vous pouvez porter sur vous, ne réfléchissez pas aux regards des autres, et souvenez vous toujours, la roue tourne et la résilience de l'être humain est absolument incroyable. On se croît fini, prêt à se tuer, et puis on se retrouve un matin roi du monde, plein de vie.

Comme l'a si bien enseigné le Bouddha, tout phénomène, positif ou négatif, est impermanent. La pire des dépressions s'arrête à un moment. Regardez, moi, qui, je le dis simplement car c'est la vérité, ai traversé un océan de souffrance, moi qui il y a trois ans, en sortie de ma période de crises, pouvait à peine faire 400m sans m'essouffler, maintenant, je  suis heureux et j'ai une forme physique et une assise mentale à presque 50 ans que même à 20 ans en sorti de régiment para je n'avais pas.

J'en profite pour remercier les créateurs, les administrateurs, les contributeurs de RL pour leurs initiatives, leur travail bénévole, leurs récits, leurs retex, leurs trolls. C'était une bouffée d'air de venir ici, de vous lire et de me dire, un jour moi aussi, je posterai de belle photos, je publierai ma liste et raconterai ma dernière sortie.  De plus, si cela se passe bien  avec les sangliers, le froid, le feu, la nuit, je m'en suis rendu compte sur le terrain, c'est parce que j'ai emmagasiné ici sans même m'en rendre compte une masse de connaissance techniques qui ressortent quand je suis confronté à un obstacle, c'est parce que ma liste constituée en vous lisant, et bien elle me va bien, c'est parce que vous avez contribué aussi, par vos partages, à me maintenir en vie, en alimentant la petite flamme de l'espoir, en m'aidant à résister à l'attraction de la mort, me détournant de ma souffrance, me rappelant les belles choses de la vie, me relançant vers mon projet aujourd'hui devenu réalité.

Merci !


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Dernière modification par manolin (21-12-2021 10:19:31)


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#47 21-12-2021 10:03:34

Oscar
Membre
Inscription : 01-02-2005

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

manolin a écrit :

#636926...un jour moi aussi, je posterai de belle photos

Ben voilà, ça c'est fait !

Content de voir que la nuit fut réparatrice.

manolin a écrit :

#636926Quant à fermer le fil, tu as évoqué d'autres raisons pour toi, mais moi, j'invite ceux qui souhaitent s'exprimer à le faire. C'est important je trouve de témoigner, d'échanger, de réfléchir ensemble à comment faire en sorte que des patients qui ont souvent des vies de merde, il faut le dire, puisse aussi profiter de ce que nous vivons quand nous randonnons.

Je ne compte pas fermer ce fil de discussion, mais plutôt à ne plus m'y exprimer pendant quelque temps - 1ère exception ici d'ailleurs. Personnellement, je pense qu'un tel fil a toute sa place sur n'importe quel forum de passionnés bien tenu - et RL l'est. Je me demande même s'il ne faudrait pas en ouvrir un dédié aux témoignages ou expériences de rando et rando légère avec des personnes différentes, c'est à dire moins centré sur ma demande initiale.

Gunnar a écrit :

#636923Redfish et oscar vous vous trompez, le handicap a déjà été abordé sur RL notamment sur un très joli retour de Frneko https://www.randonner-leger.org/forum/v … p?id=40489 .

Je parlais plus d'un fil de discussion spécifique dédié.

Si je ne me trompe pas, sur ce forum doit se trouver un témoignage d'un père qui randonnait avec son fils atteints de troubles psychiques, sur des sorties courtes, et qui soulignait tout le bénéfice de ces sorties. Initialement, j'ai recherché ce témoignage et je n'ai pas réussi à le retrouver. Je souhaitais rebondir sur celui ci plutôt que d'ouvrir le présent fil de discussion en fait. Aussi, si quelqu'un le retrouve ou se retrouve dans ceci, merci de m'indiquer où je peux revoir cet écrit (par mp ou ici).

On trouve aussi quant au choix du matériel des messages qui évoquent des troubles physiques incompatibles avec l'emport de matériel usuel, typiquement une recherche de banane de grande contenance pour remplacer un sac à dos dont le portage dorsal ne convient pas.


Nono, je te contacte dans la semaine. Pour discuter du sujet, et surtout pour relancer une sortie avec la troupe : on n'aura pas ici les superbes paysages du Vercors que montre Manolin, mais le plaisir de vous revoir compensera largement.


Pour finir sur la santé mentale, une petite réflexion :

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Dernière modification par Oscar (21-12-2021 10:13:34)

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#48 21-12-2021 10:11:28

manolin
Rando-pêcheur
Inscription : 24-04-2015

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Je ne suis pas différent. Ou alors tu l'es par rapport à moi wink


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#49 21-12-2021 10:23:58

Oscar
Membre
Inscription : 01-02-2005

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

Au delà de la réflexion sur l'inclusion des personnes souffrant de handicap, je pense que globalement il n'est pas évident de faire bouger les choses en écart d'une référence qui s'est imposée, et représente en fait l'usage majoritaire.

Quelques exemples lorsque je me suis inséré dans un club de rando classique et y ai proposé des sorties spécifiques pour les familles :

- j'ai presque du me battre pour pouvoir conseiller de venir avec des baskets ou des tiges basses, plutôt que des grosses, pour de la rando à plat en région parisienne !

- lorsque je suis allé distribué des flyers à la sortie d'une école, avec et sur proposition d'un parent qui participait à ces randos et avec l'accord de la directrice de l'école, j'ai été interpelé par des policiers - car quelqu'un était aller les voir pour indiquer qu'un pédophile cherchait à attirer des enfants !


Aussi, j'en déduis que toute différence peut être vu comme déstabilisante vis à vis d'une norme (au sens état de fait suivi par le plus grand nombre) qui s'est imposée, fut elle stupide (porter des grosses pour marcher sur un trottoir à Paris, ou dans le bois de Vincennes !).

Je stoppe là sur ce fil pendant quelques jours -  enfin je crois.

Dernière modification par Oscar (21-12-2021 10:24:57)

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#50 21-12-2021 12:00:12

manolin
Rando-pêcheur
Inscription : 24-04-2015

Re : Randonnée et handicap, troubles psychiques et/ou physiques

@oscar : ton dessin est super car c'est exactement cela qu'on vit et c'est, je le dis, compréhensible car c'est très compliqué d'intégrer le fait que, si un patient sans signe extérieur de maladie, est collé au lit toute la journée, ce n'est pas dans sa tête qu'il y a un problème, il n'a pas un petit moral, ce n'est pas un flemmard, ce n'est pas psychologique.

Le problème, il est dans son corps. La dépression est un phénomène physiologique, un dérèglement de la neurochimie provoquant un vide énergétique et induisant une vision sombre de la vie par déficit de certains neurotransmetteurs. A ce problème physio se rajoute ensuite une détresse psychologique aggravée par les remarques comme celles sur le dessin.

Le patient non formé au début ne comprend pas ce qui lui arrive. Il va vouloir forcer les choses. Moi, en bon ex para travaillant dans la sécurité nationale, je me disais "allez sors toi les doigts, va courir, reprends le taf, redeviens ce que tu étais, tu peux le faire", je sortais et j'échouais. Cela aggravait mon cas car je me jugeais après en plus de gaspiller le peu d'énergie que j'avais.

C'est après avoir étudié le zen et le taoïsme et m'être mis à la méditation, non sans grandes difficultés, qu'à un moment, j'ai lâché prise, mais cela a pris des années.

Ainsi, j'étais comme j'étais, incapable de tenir mon appart propre, avec des draps dégueulasses, sans vie sociale, passant ma vie au lit, approchant la fin de droits au travail, mais là j'avais un toit, un bon matelas, l'eau courante, le chauffage, de quoi manger. J'ai ainsi accepté ce qui était sans vouloir être autre chose que ce que la maladie faisait de moi, j'ai accepté l'instant présent tel qu'il se présentait. Demain certes je pouvais me retrouver à la rue car ma situation devenait vraiment précaire, mais demain n'existe pas, comme hier n'existe plus, il n'y a que l'instant présent qui est une réalité tangible. J'ai donc pris ce que la vie me donnait là maintenant, instant après instant et mon fardeau s'est allégé, j'ai été soulagé de ne plus essayé de changer ce qui alors ne pouvait l'être, pour de multiples raisons et j'ai réussi à me réjouir d'avoir juste réussi à descendre acheter du chocolat. Quand je m'en suis rendu compte, j'ai ri comme un fou dans mon lit, puis, me disant que au fond je n'avais plus rien perdre car la chute ne s'arrêtait pas, car ma psy était une incompétente crasse, car les amis qui restaient désemparés ne pouvaient pas m'aider, je me suis traîné jusqu'à l'hosto et j'ai dit à ma psy, en en rajoutant dans les larmes qui coulaient sur mes joues et les tremblements de mes mains, que maintenant, le traitement cela allait être celui là ou sinon tchao bye bye.

Comme j'étais au bord de la mélancolie (je ne me souvenais pas quand j'avais mangé la dernière fois), clairement suicidaire à ses yeux, et comme elle a vu dans mes yeux, que je ne lâcherai pas, quitte à crever dans mon coin, seul mais libre, elle a cédé, non sans se comporter comme une connasse vexée. Elle m'a donné le médoc que je voulais malgré le fait que oui, je faisais une grosse allergie cutanée quand je le prenais.  Mais de mon analyse, de mes lectures, c'était temporaire, mieux valait de toute façon vivre tout rouge que survivre tout blanc comme je le faisais, et ce médoc était le seul qu'on avait pas vraiment essayé. De même je savais que le médoc ne me remonterait pas, c'est un stabilisateur. Il fallait prendre quelque chose qui me fasse repartir vers le haut. Elle m'a proposé un médoc, j'ai refusé, elle m'a dit que si je le prenais pas j'entrais pas à l'hosto (sic), j'ai accepté avec ma petite idée en tête. Le soir même, j'ai pris volontairement de la drogue que j'avais été acheté avant d'entrer à l'hosto pour me faire péter vers le haut, misant sur le fait que j'allais planer un temps, que cela allait se voir, qu'on allait me tapé aux neuroleptiques qui me ferait redescendre avant d'atterir dans le stabilisateur qui aurait eu le temps de faire effet. J'ai failli crever pendant la crise que j'ai moi même déclenché car je me suis cassé de l'hosto en manipulant l'interne de garde, oubliant mon plan (lol), et mon pari revenait en fait à faire un salto arrière en haut d'une falaise en espérant arriver droit dans la mer et pas sur les rochers.  Mais au final, plouf.... ce fut le début de la sortie de crise, l'allergie a duré moins d'une semaine, elle était en fait provoqué par la conjonction de la fatigue, du médoc et de l'eau de l'hosto. Aujourd'hui, je prends toujours ce médicament et c'est grâce à lui que je peux vivre les instants immortalisés sur les photos.

Je raconte cela pour dire une chose très bien résumé par la première phrase de l'hagakure, le dit code d'honneur du samurai :  si vous avez autant de chances de vivre que de mourir, choisissez immédiatement la mort (comprendre, face à un ennemi qui vous charge en hurlant sans possibilité de fuite autre que très incertaine, chargez immédiatement en acceptant la mort, vous avez plus de chance de vivre).

Pour finir, avant d'aller me promener et d'arrêter de raconter ma vie, mais je me dis que cela peut-être utile, et puis aussi car cela me fait du bien, une citation du Tao Te King, ma strophe préférée, rebondissant sur mon propos. Cette strophe a un moment est devenu pour moi un fil guide et le reste aujourd'hui. J'en suis loin du Maître hein, mais c'est un bel idéal je trouve :


Le Maître se donne
à tout ce que l'instant apporte.
Il sait qu'il va mourir,
et rien ne lui reste à quoi s'agripper :
pas d'illusions dans l'esprit,
pas de résistances dans le corps.
Il ne réfléchit pas à ses actions ;
elles jaillissent de la profondeur de son être.
Il ne refuse rien de la vie ;
ainsi est-il prêt pour la mort,
comme un homme est prêt à dormir
après une bonne journée de travail.

- Tao Te King, Lao Tseu
   Traduction : Stephen Mitchell, Synchronique Editions

Belle journée à tous

PS : les modérateurs, je suis clairement très loin de la RL, donc n'hésitez pas à me couper le sifflet si je continue smile

Dernière modification par manolin (21-12-2021 12:17:10)


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