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#201 05-01-2014 22:20:05

guichen
Membre
Inscription : 06-05-2013

Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

Est-ce cela René94: une Personal Locator Beacon = Balise de localisation personnelle, ou balise de détresse personnelle?

Pour les chaussures KAM, le D4 le plus proche est au Brésil!!! sad

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#202 05-01-2014 22:45:15

Kam
Membre
Inscription : 19-01-2011

Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

@ OTR: Oh, faut pas psychologiser tout ca a outrance. Je ne pense d'ailleurs pas etre si different d'un grand nombre des gens, a ceci pres que j'ai peut-etre un peu plus de recul sur moi-meme. L'equilibre? Je ne sais pas, je prends les choses comme elles viennent. Effectivement, il y a des fois ou tu en as marre et ou tu as envie d'autre chose... faut juste etre patient.

Rene, j'imagine que je te repondrai indirectement un jour dans le recit, ca sera plus marrant. wink

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#203 05-01-2014 22:55:36

Ontheroad33
Pandabruti
Lieu : Bordeaux
Inscription : 15-08-2011

Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

Si ça c'est de la psycho, faudrait que j'en parle à ma psy... lol Je n'ai pas bien compris la réponse mais apparemment y'a pas l'air d'en avoir... wink
Bonne route smile


"Je ne sais pas où je vais. Ouh ça je ne l'ai jamais bien su. Mais si jamais je le savais, je crois bien que je n'irais plus." La Rue Kétanou, Où Je vais, Album En Attendant Les Caravanes, 2000.

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#204 06-01-2014 05:15:35

Yno
Suseïa
Inscription : 20-05-2009

Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

Salut Kam,
Tes posts sont vraiment sympas à lire, je trouve que ta façon de rédiger colle bien à ce que tu exprimes ...
Et puis cette manière assez détachée que tu as d'aborder la relation humaine est intéréssante : c'aurait été marrant que tu fasses la même chose pour les "rencontres alpes" RL ... lol

Bonne continuation à toi !
Je reviendrai lire la suite du récit de tes pérégrinations lorsqu'il sera en ligne ...
Et surtout : Vive la Vie !
Yno.


Je lève les yeux vers les hauteurs ...
Débarrassons nous de tout ce qui n'est pas nécessaire. Voyageons légers. [Grand-Pas]

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#205 07-01-2014 20:19:33

MonsieurHenri
Pessimiste
Lieu : 74
Inscription : 10-03-2010

Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

Salut à toi Kam

Je viens de rattraper mon retard dans ma lecture, sans regrets j'ai échappé au massacre général de la fin décembre. tongue
Bref, je ne pensais pas poster mais je voulais te dire que moi j'aime toujours bien.

Tu me fais beaucoup rire en fait. tongue

Même quand tu racontes des trucs pas drôles du tout.

Reste toi même, c'est mortel.  smile


PS : coucou Yno !  wink

Dernière modification par MonsieurHenri (07-01-2014 20:20:06)

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#206 11-01-2014 20:57:40

Kam
Membre
Inscription : 19-01-2011

Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

Merci.

@ Yno: t'as envie que je me fasse blacklister de toutes les sorties Alpes a venir? wink

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#207 15-01-2014 22:38:35

Kam
Membre
Inscription : 19-01-2011

Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

Recit a venir un autre jour, mais un petit spoiler en attendant: j'ai decide de zapper le  Nord de l'Argentine et de reprendre la marche en Bolivie, ou je devrais etre dans quelques jours. Pas mal de changement de matos ces derniers temps, donc j'en profite pour faire un petit bilan:

- Pompes mortes, remplacees par des sandales. J'ai profite d'etre en Argentine pour racheter une paire avec laquelle je peux esperer marcher (des Merrell, aucune idee du modele). J'ai aussi vire les chaussettes du coup.

- Frontale perdue, pas remplacee. J'attends de voir comment ca se passe sans.

- Lunettes petees, meme chose.

- Cheche oublie dans un hotel, remplace par une casquette. So far so good, hormis le fait que je n'ai plus de serviette du coup. Pas dramatique.

- Pantalon troque contre un truc en toile legere, type pantalon de pecheur thailandais. Ca devenait intenable. Je me suis aussi rachete une petite sacoche en toile du coup pour transporter ce que j'avais dans les poches.

- T-shirt mort, plein de trous en bas du dos a cause des frottements avec le sac. J'en ai rachete un nouveau, mais je le garde quand meme dans le sac pour avoir un truc propre quand j'arrive en ville. L'inverse serait plus logique, mais si je continue a porter le merinos avec le sac, il deviendra immettable. C'est deja limite. Je vais voir si je continue avec deux t-shirts ou si je balance le vieux.

Je crois que c'est tout. Meme avec un t-shirt de plus dans le sac, vu le poids gagne par ailleurs, je suis toujours sous les trois kg dans le sac, et je suis a bien moins pour ce qui est du poids sur soi.

PS: meme si je les compte dans le sac, l'apn, le mp3 et la boussole sont en fait sur moi donc je suis a bien moins.

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#208 16-01-2014 00:56:18

Ontheroad33
Pandabruti
Lieu : Bordeaux
Inscription : 15-08-2011

Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

kam a écrit :

Recit a venir un autre jour, mais un petit spoiler en attendant: j'ai decide de zapper le  Nord de l'Argentine et de reprendre la marche en Bolivie...

- Pompes mortes, remplacees par des sandales. J'ai profite d'etre en Argentine pour racheter une paire avec laquelle je peux esperer marcher (des Merrell, aucune idee du modele). J'ai aussi vire les chaussettes du coup...

Ah moins que tu restes dans la jungle ou sur la côte, tu vas te cailler les miches en sandales mon vieux... En Bolivie, je ne suis pas descendu en dessous de 3000-3500 m je pense. T'as prévu quelquechose ou "on verra bien" ? wink Par contre, j'ai voyagé en sandales et c'était vraiment l'extase. Respirabilité à fond, pas de chaussettes à gérer, minimalisme absolu... A son pépère ! tongue Il faisait chaud donc c'était facile mais j'aimerais bien essayer dans des climats plus tempérés.

Kam a écrit :

- Pantalon troque contre un truc en toile legere, type pantalon de pecheur thailandais. Ca devenait intenable. Je me suis aussi rachete une petite sacoche en toile du coup pour transporter ce que j'avais dans les poches.

Une idée de pantalon léger (246 g en XL) et pas cher (environ 6$). T'as dû en voir partout je pense sur les "marchés" ou sur les touristes, enfin dans l'ouest de l'Amérique du sud (Equateur, Pérou, Bolivie, Nord Chili...) en tout cas. J'ai fini mon voyage avec ça, en moins coloré. C'est assez costaud et ça respire bien. C'est un truc à touriste mais très fonctionnel je trouve, pour une fois. tongue Ca peut être une idée pour ceux qui veulent se ravitailler sur place... wink
6049_pantalons-occasionnels-colors-au-march-d-otavalo-22842778_15-01-14.jpg
Marché d'Otavalo en Equateur (photo internet)

Kam a écrit :

- T-shirt mort, plein de trous en bas du dos a cause des frottements avec le sac. J'en ai rachete un nouveau, mais je le garde quand meme dans le sac pour avoir un truc propre quand j'arrive en ville. L'inverse serait plus logique, mais si je continue a porter le merinos avec le sac, il deviendra immettable. C'est deja limite. Je vais voir si je continue avec deux t-shirts ou si je balance le vieux.

Est-ce que t'as pensé aux chemises pour changer ?


"Je ne sais pas où je vais. Ouh ça je ne l'ai jamais bien su. Mais si jamais je le savais, je crois bien que je n'irais plus." La Rue Kétanou, Où Je vais, Album En Attendant Les Caravanes, 2000.

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#209 16-01-2014 01:31:55

wilf
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Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

En sommes, c'est des pantalons de pyjama que tu nous présentes Ontheroad33  wink

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#210 16-01-2014 01:33:27

Ontheroad33
Pandabruti
Lieu : Bordeaux
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Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

lol Je ne sais pas je porte pas de pijama ! tongue


"Je ne sais pas où je vais. Ouh ça je ne l'ai jamais bien su. Mais si jamais je le savais, je crois bien que je n'irais plus." La Rue Kétanou, Où Je vais, Album En Attendant Les Caravanes, 2000.

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#211 16-01-2014 01:37:34

Kam
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Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

Je pense surtout a marcher a moitie a poil.  smile

Sinon pour les sandales, j'ai experimente enxore plus haut a l'automne au Tibet et c'etait juste MAIS uniquement la nuit, et la on est en ete, donc... ouais on verra.

Pour le futal, c'est ce que j'ai. Un jour j'ouvrirqi un sujet la-dessus. Je commence a en avoir essaye pas mal, les plus merdiques etant ceux de Bangkok, les meilleurs ceux en soie sauvage d'un petit artisan de Varanasi. Ceux-la par contre ont l'avantage d'avoir un cordon en bas pour remonter les jambes.

- Kam, sirotant une Quilmes, histoire de digerer le lama d'hier.

PS: la Bolivie n'a plus de cote depuis le 19eme apres une guerre perdue contre le Chili. wink

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#212 16-01-2014 01:46:39

Ontheroad33
Pandabruti
Lieu : Bordeaux
Inscription : 15-08-2011

Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

Kam a écrit :

PS: la Bolivie n'a plus de cote depuis le 19eme apres une guerre perdue contre le Chili. wink

Ils sont en train d'essayer de racheter quelques km de côte au Chili. Enfin, dans les faits, c'était à la Bolivie il y a longtemps, le Chili l'avait gagné ensuite et maintenant les Boliviens la réclame de droit pour faire du business. Normal... Comme ils n'ont pas de tunes et que le Chili ne va pas leur faire cadeau, ça va finir en catch dans le gallo pinto... hmm

J'ai suputé ("non j'ai pas dit pute" Dany Boon) que tu continuerais ta route, tu l'auras compris, puisque je dois t'emmener plonger au Nicaragua l'année prochaine... cool

Kam a écrit :

- Kam, sirotant une Quilmes, histoire de digerer le lama d'hier.

Tout en rédigeant son récit de voyage avant que la fréquence de postage devienne tellement faible qu'il sera rentré pour nous le raconter de vive voix... wink

EDIT : futal coloré, sandales, barbe de quelques jours, marche pour se déplacer... Heureusement que t'as une liseuse sinon tu passerais pour un vrai bitnik hippy des 60... big_smile

Dernière modification par Ontheroad33 (16-01-2014 01:48:34)


"Je ne sais pas où je vais. Ouh ça je ne l'ai jamais bien su. Mais si jamais je le savais, je crois bien que je n'irais plus." La Rue Kétanou, Où Je vais, Album En Attendant Les Caravanes, 2000.

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#213 16-01-2014 02:02:47

Kam
Membre
Inscription : 19-01-2011

Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

T'as raison en plus. Je me fais une soiree antisociale pour ecrire, avec quelques pauses pour lire tes conneries de temps en temps. wink

Et pour la barbe, je suppose que tu voulais dire mois...


EDIT - Rate pour le cote antisocial... Oh m*****.

Dernière modification par Kam (16-01-2014 05:43:36)

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#214 16-01-2014 02:22:38

guichen
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Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

wilf a écrit :

En sommes, c'est des pantalons de pyjama que tu nous présentes Ontheroad33  wink

C'est normal, c'est la nuit...
A moins qu'après l'opération cheche marocain à vendre, de l'année dernière, OTR est désormais dans le bizness pyjama, style tonnes de rayés boliviens à couper, enfin à écouler...du bon bolivien quoi... smile

Hello Kam, tu vas terminer par ressembler à notre bon Jésus...quelques miracles et tu rassembles les foules...

Bon, on peut te dire qu'a part randonner-léger, tu loupes pas grand chose en ce moment ici...

Y'a aussi cette tenue, costume breton, pas mal pour voyager (hors sabots)...certes pas trop mul mais polyvalente... smile

TENUE

Kenavo aotrou Kam.

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#215 18-01-2014 16:31:58

Kam
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Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

Je voulais attendre d'avoir repris la marche pour poster, mais... autant le faire maintenant. J'ajouterai des photos un autre jour.

-------------------------------------------

T., quelque part en Argentine

Tout est ferme en ce dimanche a Talca. Ce n'est pas encore aujourd'hui que je vais pourvoir me racheter des pompes. Je reflechis toute la journee. Je me rends compte que je n'ai pas envie de marcher en Argentine. Le peu que j'ai vu du pays m'a vraiment laisse une bonne impression, mais je n'ai pas envie d'y passer deux mois. J'ai envie de changement, d'exotisme, de tropiques. Et puis j'ai regarde mes comptes... J'ai deja depense un max au Chili, ca serait la meme en Argentine... Je me decide a prendre le bus. Mon seul regret est que je ne traverserai pas les Andes a pied - pas ici en tous cas - mais il n'y a pas grand-chose a y faire. J'ai juste envie de rejoindre la Bolivie au plus vite.

Je prends le premier bus pour Santiago le matin, ou j'arrive quelques heures plus tard. Un petit vieux racolle des clients de derniere minute.

- Mendoza?
- Mendoza, papa.

Je n'ai pas le temps de souffler que je me retrouve dans un minibus bringuebalant en direction de la cordiliere. Les  paysages sont indescriptibles. J'en oublie meme les odeurs de pieds et papi en face qui crache son cancer du poumon a chaque virage. Une route perdue au royaume du mineral... Des roches jaunies par les derniers rayons du soleil ouvrant sur l'immensite de la haute montagne... Et au milieu de tout cela, une frontiere.

Les douaniers chiliens et argentins partagent la meme cabine. Quelques coups de tampons et une poignee de pesos tendue a Mr Rayons X plus tard, et je suis de nouveau berce par les grognements du moteur au fil des virages. Et puis les lumieres de Mendoza finissent enfin par percer l'obscurite. Mendoza... Si j'avais su ce qui m'attendait la-bas...

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Je prends une chambre pour la nuit pres de la gare routiere avant de m'installer le lendemain dans une rue branchee de la ville. Je n'ai pas  le temps de me poser qu'Ignacio me saute dessus. Un bourlingueur chilien parcourrant l'Amerique du Sud en stop. Il doit etre midi, il est deja completement torche. On parle de l'Europe, de la France, de son amour perdu la-bas, des voyages,  des 'autres' voyages, ceux que tu vis et non ceux que tu consommes, ceux qui te font voir l'invisible, l'innommable...

- On va se prendre un verre?
- Ca roule papa.

Et c'est comme ca que tout a commence... Un verre avec Ignacio sur des chaises en plastique devant un kiosco. On se met a inviter tout le monde. Ignacio postillone sur toute l'assemblee. Je m'initie a l'argot argentin - ce que ca fait du bien de pouvoir tenir une conversation en espagnol... Merci a toi, Jaime, c'est grace a toi, mon arriero introverti qui n'osait pas parler anglais bien que comprenant tout... Pinocho, un gros chevelu adorablement crasseux me tend le joint. A combien de tournees en est-on? Ignacio va s'effrondrer...

- Desole les bo... (quelques postillons) ... les bol... (seconde tournee pour tout le monde) ... les boludos mais il faut que je retourne a l'au... l'auberge sinon...

- Je viens avec toi, pepere, je ne vais pas tenir sinon.

Arrive la-bas, il s'effrondre a cote d'une anglaise avec l'accent le plus british qu'il m'ait ete donne d'entendre.

- You're spitting on me!

Imaginez l'accent du 16eme pour la VF... Ignacio n'ecoute meme pas.

- You're doing it again!

Gonzalo emerge. La version chilienne du nounours. Le type que tu as tout de suite envie de prendre dans tes bras. Il est maque avec une  hawaienne rencontree en Asie, Sissi, du coup, tous les trois mois ils se prennent quelques jours de vacances  a Mendoza pour remettre a zero son visa touristique. Il y a des couples qui sont tellement faits l'un pour l'autre que tu as l'impression qu'ils rendent cette terre meilleure, par le simple fait qu'ils soient ensemble. Gonzalo et Sissi font partie de ceux-la.

Avec tellement de chiliens dans les environs, quelqu'un allait forcement offrir sa tournee de Pisco cola... Ca n'a pas manque. Je me retrouve dans la rue quelques heures plus tard. Je ne sais pas ce que j'y fouttais, mais il se passe toujours quelque chose de magique lorsque je marche dans la rue... Je ne me souviens plus bien de ce qui s'est passe. Je me revois juste dans une voiture a un moment donne, et je me retrouve devant l'hospedaje avec un joint et un nouveau paquet de clopes a la main.

Je me reveille dans la matinee. On m'offre une biere. Normal. Je retourne racheter du pisco avec Gonzalo. La journee reprend a l'identique. Je reparle voyages avec mon nounours chilien. Je ressors dans la rue. La magie reopere. Je reviens avec un sachet entier de beuh. Ne pas chercher a comprendre, c'est peine perdue.

Je passe la moitie de la nuit avec Sissi a fumer, assis sur la Pacha Mama. L'eau de la piscine transforme les environs en marecages. Je prends un bain de pieds aux megots de clope qui se mettent a flotter. Sissi entreprend de tout nettoyer. Je rigole.

Gonzalo est encore debout lorsque je me reveille. Il me tend une cruche tiede de Fernet Cola. Meme pour moi, c'est trop. Il a un bus de nuit pour Santiago le jour meme. C'est l'un de ces moments ou continuer a picoler devient une necessite. Il s'ecroulerait sans ca. Il repart dans un etat second. Ce que je donnerais pour avoir les bandes des cameras de securite de la douane...

Un jeune dannois pete l'incruste. Le type meme du gars coince qui veut jouer au type cool. Je trouve ca ridicule et enervant. Il serait surement sympa s'il restait lui-meme - la, c'est juste une casse-couille. Pourtant, allez savoir pourquoi, Jake, un poulpe americain - la version blanche du jamaicain - sympathise avec lui. Je dois me le tapper pour le tour des producteurs de vin le lendemain - fallait bien que j'en fasse un, je suis dans la capitale du pinard argentin. On loue des velos a Maipu pour faire le tour des exploitations. Je ne sais meme pas si c'est la peine que je raconte la suite...

Je taille une bavette avec un petit vieux lorsque l'on rend les tricycles.

- Viens par la, mon gars.

Je deboule dans sa cuisine. Il me tend deux bouteilles de gros rouge sans etiquette. Encore une bonne soiree qui s'annonce...

Ou pas.

Ignacio a repris la route dans la journee. Le groupe s'est desagrege. Je me retrouve avec Jake, mon danois coince et une hollandaise - je n'ai jamais reussi a retenir  son nom. Les expedients sont toujours la, mais il y a de mauvaises ondes. Les piques contre les francais fusent - ca n'arrete pas depuis que je me suis mis a passer du temps avec les gringos. C'est marrant, en toutes mes annees de voyage, c'est la premiere fois que j'ai ce genre d'experience. Mais en meme temps, en Asie, les farangs viennent des quatre coins de la planete. Ici, je ne rencontre que des gusses d'Amerique du Nord ou d'Europe Occidentale, pour les non-hispanophones tout du moins. Je ne peux plus me retenir:

- Tu ne te rends pas compte a quel point ta vision du monde est etriquee. Tu pretends que le reste du monde hait la France, mais ouvre les yeux. De quel monde est-ce que tu parles? Ton monde se reduit au Nord-Ouest de l'Europe et a l'Amerique du Nord. Mais devine quoi? Ton 'monde' n'est qu'un crachat sur la surface de cette planete. Meme la, tu es en Amerique Latine, et tu ne cherches meme pas a apprendre l'espagnol. Putain de gringo.

Je commande une tequila avant de poursuivre. Le danois s'apprete a bafouiller quelque chose, je l'interromps avant qu'il n'ait eu le temps de l'ouvrir.

- Tu veux parler de la France? C'est le meilleur passeport pour voyager. Va en Afrique, va au Moyen Orient, ou simplement discute avec les gens, ici, en Argentine ou au Chili au lieu de faire le tour des hospedajes du Lonely Planet histoire de ne pas avoir a te meler avec la populace locale et demande-leur ce qu'ils pensent de la France... Et puis tant que tu y es, demande-leur ce qu'ils pensent des US, de l'Allemagne ou de la Grande Bretagne. Je t'aurais dit de leur demander ce qu'ils pensent du Danemark, mais personne n'en pense rien. Tout le monde s'en fout.

Je m'enquille un shot avant de poursuivre.

- Et puis tu sais le pire dans tout cela? Je suis berce par la culture anglo-saxone. Mon anglais est meilleur que celui de 99% des francais. La moitie des bouquins que je lis, les trois quarts de la musique que j'ecoute, ou des films et des series que je regarde sont en anglais. Meme en France, il y a des periodes de ma vie ou je parlais autant anglais que francais dans la journee. J'ai des potes partout dans le monde anglo-saxon. Ici, je pense la plupart du temps en anglais. J'en suis meme a faire des fautes des grammaire en espagnol parce que j'ai la structure anglaise en tete, alors que j'aurais tout bon si j'utilisais la structure francaise. Et pourtant, malgre tout cela, a cause de cons comme toi, j'en suis presque a devenir raciste. J'ai maintenant un a priori negatif lorsque je croise un type du Nord-Ouest de l'Europe sur la route. Et ca, franchement, je ne peux pas le pardonner.

Je repasse a la biere.

- Non, il y a pire en fait. Tu as reussi a faire faire l'eloge de son pays a un anarchiste. Enfoire.

Je me leve, et je vais passer le reste de la soiree avec les argentins qui sont la. Un gonze arrive a moment donne.

- De donde vienes?
- Del pais basco.
- Frances o español?
- El pais basco.

Putain, je suis encore tombe sur un cas.

- Sur ton passeport, il y a ecrit quoi? Francais ou espagnol?
- Francais, mais je ne suis pas francais, je suis basque.

Mouais, on va peut-etre changer de conversation... Comme si j'en avais quelque chose a carer des basques en plus... Je me marre de ce que raconte un autre gonze autour de la table.

- Ca te fait rire ce que je dis? Il y a des gens qui sont morts pour la cause, tu sais?

La vache... un psychopathe de plus. Je me retiens de lui parler des morts dans les attentats... Et puis ce n'est pas le jour. Heureusement, il finit par se tirer, et je reussis a passer une fin de soiree a peu pres potable.

Je ne peux pas raconter la journee du lendemain. Meme selon mes criteres, qui sont pourtant sont particulierement eleves. Vraiment, je ne peux pas. C'est juste parti en vrille. Pas la peine de chercher comment, vous ne trouveriez pas.

J'ai un ticket de bus pour le soir; je me planque a l'hospedaje pendant un temps, mais il y a trop d'ondes negatives. Autant aller directement a la gare routiere... Je fais une sieste dans l'herbe avant de prendre le bus. C'est parti pour un trajet de 20 heures en direction de Salta.

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La ville est beaucoup plus belle que Mendoza. Le centre est peuple de batiments coloniaux. Une eglise retient particulierement mon attention. On dirait une eglise byzantine ornee de faiences  persanes.

J'ai ete trop loin, a Mendoza. Je decide de passer une soiree sans histoires, sans excentricites. Je m'enfile une brochette de lama, et je vais au pieu. Je comptais refaire la meme chose le lendemain, mais... on ne se refait pas. Cinq argentines m'invitent a les rejoindre - difficile de refuser. On discute de tout et de rien. Elles vont dans une toute petite ville du nord le lendemain, et me proposent de les accompagner. Je comptais aller directement a la frontiere, mais j'ai aussi appris a ne jamais rater une occasion.

- Ca roule, mamasa.

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On embarque le lendemain avec Cristian, un autre argentin qui s'est joint a nous, sur les routes de montagne. On  arrive a T. en quelques heures. Oui, juste T. - il y a des endroit tellement magiques qu'il faut les garder pour soi. Une toute petite ville indigene perchee a 2500m, faite de maisons de briques et de terre aux tuiles ocres, entouree de montagnes multicolores parsemees de cactus.

On s'enfile quelques empenadas le midi, et on part pour une balade dans les montagnes. Je suis le seul a avoir l'habitude de marcher, alors forcement, ca souffle derriere, mais c'est bien sympa. On rejoint une cascade perdue au fond d'un canyon au bout de quelques heures. Le temps est tres changeant. On se prend la flotte au retour, ce qui nous fait manquer le croisement  avec le sentier le plus direct. On se retrouve sur un chemin en lacets deux fois plus long. J'initie les argentines a la technique du sanglier. Avec des citadins purs et durs, c'est pas gagne. J'accompagne tout le monde. Je gere le vertige de certaines. Je suis dans mon element. Il faut vraiment que je repasse mon brevet d'accompagnateur quand je reviendrai en France...

On se retrouve le soir pour aller manger. Je decouvre les peñas argentines. Une guitare, un feu, quelques bouteilles de vin, et tout le monde qui se met a danser. On va d'un endroit a l'autre, a mesure que les concerts se terminent, parfois apres que la police ait debarque. La danse... ca a toujours ete un truc qui m'echappait. Ce soir la, j'ai appris. J'ai compris. Il suffit de se laisser porter. Et puis c'est facile avec la musique latino, elle respire la vie. C'est d'ailleurs plus que de la musique ou de la danse, c'est une partie de la culture, du mode de vie.

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Dernière modification par Kam (30-01-2014 18:49:14)

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#216 18-01-2014 18:59:51

jeanjacques
.
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Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

Kam a écrit :

Je ne peux pas raconter la journee du lendemain. Meme selon mes criteres, qui sont pourtant sont particulierement eleves. Vraiment, je ne peux pas. C'est juste parti en vrille. Pas la peine de chercher comment, vous ne trouveriez pas.

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big_smile

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#217 18-01-2014 20:40:26

Magne2
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Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

j'aime bien T c'est un bel endroit   si c'est bien le T que je connais  big_smile


kalo taxidi alias bon voyage en Grec bien sur

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#218 18-01-2014 20:47:03

guichen
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Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

Kam a écrit :

J'initie les argentines a la technique du sanglier. Avec des citadins purs et durs, c'est pas gagne. J'accompagne tout le monde. Je gere le vertige de certaines. Je suis dans mon element. Il faut vraiment que je repasse mon brevet d'accompagnateur quand je reviendrai en France...

C'est quoi la technique du sanglier??? smile

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#219 18-01-2014 20:55:50

zorey
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Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

guichen a écrit :
Kam a écrit :

J'initie les argentines a la technique du sanglier. Avec des citadins purs et durs, c'est pas gagne. J'accompagne tout le monde. Je gere le vertige de certaines. Je suis dans mon element. Il faut vraiment que je repasse mon brevet d'accompagnateur quand je reviendrai en France...

C'est quoi la technique du sanglier??? smile

Droit dedans ! big_smile


La nature nous a donné deux oreilles et une bouche pour écouter le double de ce que l'on dit.

Ourson Power

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#220 18-01-2014 23:16:18

Kam
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Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

Magne2 a écrit :

j'aime bien T c'est un bel endroit   si c'est bien le T que je connais  big_smile

C'est possible. Il y a plein de touristes argentins mais les etrangers se comptent sur les doigts de la main, et tous ceux que j'ai croises etaient francais. J'imagine que c'est dans le routard...

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#221 19-01-2014 00:40:13

Magne2
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Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

je ne sais pas je ne lis pas le routard  mais j'aime encore plus I  smile


kalo taxidi alias bon voyage en Grec bien sur

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#222 19-01-2014 18:21:15

Kam
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Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

Photos ajoutees.

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#223 19-01-2014 19:33:11

Archimboldi
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Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

Superbe.  smile

Merci beaucoup pour ce récit, c'est rare d'en lire de ce genre, et avec ce style sans détour.


Ton parapluie tient toujours le coup ? Je n'en ai pas vu mention.


"Life is full of wonders for someone who is prepared to accept them." Moominpappa

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#224 23-01-2014 18:04:22

Kam
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Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

Salut. Je ne me suis pas servi de mon parapluie depuis la region des lacs au Chili je crois, le soleil est de plomb depuis des mois, donc oui il tient le coup, meme si j'avais renforce avec du scotch la toile, la ou les frottements l'avaient usee. Je reprends la marche demain a (tres) haute altitude - je vais voir du coup ce qu'il donne utilise comme ombrelle.

@ JJ: Au passage, pas besoin d'aller chercher des images de films, j'en ai plein mon APN...  big_smile

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Dernière modification par Kam (23-01-2014 18:06:45)

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#225 24-01-2014 00:53:51

Kam
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Re : [Récit + liste] Petite virée aux Amériques

Tupiza, Bolivie

Je change de chambre le lendemain, et je me retrouve avec deux francais et une suissesse. Des joueurs et eleveurs de chevaux de polo venus bosser pendant un temps dans un campo argentin. L'un d'eux me vouvoie quand je le rencontre. Ca me perfore la parachuteuse.

- Bon, il va falloir faire quelque chose.

Je deboule dans la premiere epicerie que je trouve et j'en ressors avec un rasoir. C'etait un signe, je crois.

Je suis tombe sur aussi fetards que moi, du coup, on decide de mettre l'ambiance le soir venu. On va acheter une quinzaine de kilos de bidoche, et on invite tout le monde a un asado. Vincent s'occupe du barbeuque, Edouard de la verdure, et moi du bar - je suis devenu un expert en matiere de Fernet Cola. C'est soiree francaise - ca fait marrer les argentins, tout le monde passe un bon moment.

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Je suis a cote de Marisol, l'une des chicas avec qui je suis arrive en colectivo. Je l'adore. Elle parle super fort, et n'a aucun complexe. Quand tu la voies, tu as l'impression qu'il y a ecrit 'va te faire fouttre' sur sa tronche - on etait faits pour s'entendre.

- Apprendre l'anglais? Qu'est-ce que j'en ai a carrer de l'anglais? Je suis nee a Cordoba, je creverai a Cordoba!

- Bon, on bouge, boluda?

Tout le monde prend la direction du rio, ou il devrait y avoir une peña. Une dizaine de flics font office de portiers a l'entree... Marrant a voir. A part pour Vincent qui avait la machette dont il s'etait servi pour l'asado dans le sac. J'aurais du prendre une photo de la gueule du flic quand il l'a ouvert...

Des couples se forment rapidement - je sens que ca va encore partir en vrille. Vincent part assez tot -  il finira la nuit sous l'asado avec sa chere et tendre pour un soir. Philipe passera devant eux sans les voir pour s'installer sur le toit. Edouard? Je ne sais meme pas avec qui il est parti. Je rencontre une madrilene avec qui je passe une partie de la nuit. Au contraire des autres, je ne suis pas un grand dragueur en general, et puis j'ai des criteres assez particuliers. Mae, par exemple - la nana avec qui Vincent est parti - est un canon de beaute. Physiquement, elle est parfaite. Je ne suis pas une seconde attire par elle. Et ce n'est pas juste du au fait que j'aurais l'impression d'etre un pedophile si jamais il se passait quelque chose entre nous. Je recherche plus le charme que la beaute, la difference, dans la facon de se tenir, de bouger, d'etre au monde. C'est ce que je venais de trouver.

Je rentre a l'hospedaje tot le matin. Les flics sont descendus dans toutes les peñas pour les fermer. Une foule impressionnante parcourt les rues. La place principale est cerclee par les cognes, fusils a la main.

- On ne passe pas!

Je croise le patron de l'auberge, encore debout. Il a du bien halluciner cette nuit. Je mets dix minutes a denouer le bas de mes jambes de pantalon dans le noir. C'est tellement ridicule que je finis par me marrer comme un culiado. Edouard etait la, je n'avais pas remarque qu'il n'etait pas seul...

Impossible de retrouver ma madrilene le lendemain. Pas moyen de me rappeler ou elle creche. Je parcours la ville de long en large, j'essaierai meme de faire le tour des peñas le soir, rien. Je m'en veux vraiment. Ca ce serait fini comme ca un jour ou l'autre de toutes facons, c'est ca le voyage, mais c'est juste tres con. J'ai juste ete tres con.

Je monte sur les hauteurs de la ville dans l'apres-midi. La foret de cactus dans les montagnes s'ouvre sur les ruines d'une ancienne cite indigene. Je suis ailleurs. Je ne sais pas ou je suis, mais c'est ailleurs. Je n'arrive pas a en croire mes yeux. Je vais d'une maison de pierre a l'autre. Je m'ecarte du village pour me retrouver seul sous le soleil de plomb au milieu des cactus. J'y reste facilement une heure, a contempler - non, a m'impreigner, a me laisser habiter - par les paysages...

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Mon equipe de polo part pour la Bolivie le lendemain, on decide donc de faire route commune. On prend les choses en main a la gare routiere avec Edouard - on y est encore demain si l'on doit attendre les autres.

- Va voir au guichet, je vais demander aux chauffeurs.

Trente secondes plus tard, on etait dans le bus. C'est toujours simple quand on me laisse faire. Je ne sais pas pourquoi les gens se compliquent la vie en voyage, il suffit de prendre les choses comme elles viennent. Je ne prends jamais de billet a l'avance, je n'ai jamais reserve d'hotel, et je m'en porte d'autant mieux...

On se retrouve a la frontiere quelques heures plus tard. Deux heures et demi de queue a 3000m sous un soleil de plomb a regarder des petites vieilles courbees et tenant a peine debout transportant sur leur dos de gros paniers couverts d'une etoffe et remplis de marchandises qu'elles vont vendre de ce cote-ci de la frontiere. Heureusement, on est encore en Argentine. Rapidement, quelqu'un sort une guitare et des percussions, et on se retrouve a chanter du Manu Chao devant les douaniers. C'est pour ca que j'adore ce pays. Tu demandes l'heure a quelqu'un, et tu te retrouves autour d'un asado avec lui le soir venu.

Je tends mon passeport au douanier. Le visa est normalement de trente jours, mais on peut l'etendre gratuitement a quatre-vingt-dix. Simplement, il faut etre en ville, remplir de la paperasse, bref, si je peux eviter et avoir quatre-vingt-dix jours direct, ca serait le top, histoire de pouvoir prendre mon temps en Bolivie.

- Aaaaah, frances, qu'il me fait avec un grand sourire! Tu restes combien de jours?

Je tente le coup:

- 60.

Il s'engouffre dans un recoin sombre de la piece, et revient trente secondes plus tard avec un petit tampon.

- 60, j'ai pas. Je t'ai mis 90.

- Papa, j'ai envie de passer derriere la vitre et de te rouler une pelle!

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Vincent devient totalement parano une fois la douane passee. Il en est presque a courrir jusqu'a la gare routiere. Une bande de gringos completement flippes avec de gros sacs verts fluo, c'est le meilleur moyen d'attirer les emmerdes. Si tu es cool, le risque existe toujours, mais il est grandement diminue. J'essaie de lui expliquer, il ne comprend pas. On arrive a la gare routiere. Comme d'hab, quelques gonzes viennent nous racoler pour le bus qui va partir - c'est pratique en fait, ca evite de faire le tour des guichets a l'interieur. Ils les envoient chier. Pour moi, c'en est trop. Je ne voyage pas comme ca.

- Bon, vous faites ce que vous voulez les gars, mais j'en ai raz-le-fion. Il y a un bus qui va partir pour Tupiza, la - ils y vont tous de toutes facons - c'est comme vous le sentez, vous venez ou vous restez la, mais moi je le prends.

Vincent pete encore une crise parce qu'il ne veut pas mettre son enorme sac en soute. Les boliviens se fouttent de sa gueule. Je l'aime bien, il est super sympa, mais la, franchement, il commence a serieusement me gonfler. Je ne supporte plus les gens stresses. Ils degagent trop de mauvaises ondes...

Le bus part en imitant le chant des baleines a chaque changement de vitesse. Les paysages sont a couper le souffle. Des canyons ocres ou les lamas gambadent au milieu des cactus. Je suis a far west. J'ai envie de descendre et de reprendre la marche des maintenant...

On arrive a Tupiza deux heures plus tard. Les amigos se sont faits une raison et me laissent les guider dans la ville. C'est con qu'on n'ait pas plus de temps: je suis sur que j'aurais fini par reussir a les initier a l'art du voyage improvise, sans stress, sans prises de tetes...

Tupiza... On n'est clairement plus en Argentine. On est au royaume des gueules cassees, des dos courbes, des chicots en moins. Une petite vieille aux rides facon Grand Canyon, couverture de laine multicolore sur le dos et chapeau melon sur la tete, vend des galettes assise par terre dans la rue. J'esquive de justesse le reste de feuilles de coca qu'elle vient de cracher. Un vieillard a cote - il doit avoir quarante ans - en vend dans de gros sacs de jutte. Vincent en achete et partage. Il fait deja nuit - la Bolivie a choisi un fuseau horraire ridicule. Les quelques lampadaires peinent a eclairer les rues. Si le Tibet est le toit du monde, la Bolivie en est la goutiere. J'adore deja ce pays.

On se separe le lendemain. Ils partent pour cinq jours de voyage organise dans le Sud-Ouest bolivien. Je me prepare pour repartir marcher. Je vide enfin mon sac a bouffe. Une nouvelle forme de vie s'y developpait depuis quelques temps. Je fais le bilan de mes affaires. Rien de plus ne semble manquer apres ces quelques semaines au royaume de Bacchus, si ce n'est mon petit stylo et le sac etanche que j'avais fait pour ma liseuse. Rien de dramatique au final, meme si ca fait toujours chier. En fait, je me dis meme que ce n'est pas plus mal. Je vais troquer du Cuben pour un bete sac plastique. Ca ne coute rien, ca se trouve partout, et si je le perds encore, ca m'en touchera l'une sans faire bouger l'autre.

Je vais m'acheter des lunettes de soleil et une chemise au marche. La coupe est immonde. Pas grave, je suis francais. Je sors mes petits ciseaux, et je decoupe les manches. C'est deja mieux. En deformant le col, elle devient meme presque mettable. Je passe a la poste renvoyer le t-shirt que j'avais achete a Mendoza et, surtout, mon ancien futal. Presque trente euros de port, mais il l'a bien merite. Reste plus qu'a faire le plein de bouffe maintenant... Et pour le coup, je ne suis pas rendu.

Au Chili ou en Argentine, il y a des supermarches dans toutes les villes. Je m'y ravitaillais en sifflard, en puant, et autres cochoncetes aperitives. Ici, les supermarches, c'est des petits vieux qui ont un stand dans la rue. Je trouve des fruits secs, des galettes de pain, des gateaux apero artisanaux... je complete avec un enorme salami - grand minimum un kilo. Ca ne me coute presque rien. Je prends aussi un sac de coca, histoire d'avoir un truc a machouiller si jamais je me decidais a arreter de fumer...

J'ai minimum deux cents bornes a faire dans les montagnes avec ca. Ca va faire juste. Je passe dans une epicerie ou l'on trouve quelques produits occidentaux. J'en ressors avec une plaquette de chocolat, un gateau, et deux paquets de Pringles... C'est la derniere fois que je fais ca. Ca m'a coute trois fois plus cher que tout ce que j'ai achete dans la rue. Mais au moins, je devrais etre pare. Far Sur bolivien, a nous deux!

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Je retourne grailler au meme endroit qu'hier, le soir venu. Ils ont change l'annonce sur la vitrine. Ils ont du comprendre que 'Se necesita une chica por la noche' etait pour le moins ambigu. 'Turno tarde' passe beaucoup mieux. Le serveur doit avoir a peine quinze ans. C'est pour lui que j'y retourne en fait...

Un train defonce entre Amritsar et Delhi. Un douanier indien venait de monter - il me demanda de prendre soin de son jeune fils, assis sur la banquette voisine. C'etait la premiere fois qu'il prenait le train. Je lui dis d'accord, bien qu'en etant completement incapable. Le train partait aux aurores, et sans reveil, j'etais sur de le rater. J'avais choisi l'option la plus sure: ne pas dormir de la nuit. Deux femmes etaient assises sur la meme banquette. Ne jamais s'assoir a cote des femmes en Inde. Elles s'assoient en tailleur et prennent deux fois plus de place. J'etais sur le point de m'endormir completement. Ma voisine me poussait inexorablement. J'ouvris les yeux juste avant de toucher terre. Un geant barbu et enturbane se dressait devant moi - un sikh, quoi. Il faisait une campagne anti-tabac dans le train. Je me rendormis apres quelques echanges. Une petite main me secouait le genou. Deux bambins affubles d'une moustache dessinee avec de la suie se tenaient a cote de moi. Le plus vieux devait avoir cinq ans, je ne sais meme pas si le plus jeune en avait trois. Ils se mirent a faire des cabrioles, suivant la musique que l'esclavagiste qui les avait ramasses dans la rue jouait. Ils me tendirent leurs petites mains. Le sikh m'encouragea:

- File-leur cinq roupies...

Cinq roupies... Je leur en aurait file mille si ca avait pu servir a ce qu'ils aillent a l'ecole lorsqu'ils auraient ete en age. Je refusai, par principe. Le plus jeune me lanca une tape sur le bras. J'avais bien sur raison, en theorie. Si tout le monde avait fait comme moi, les gamins auraient arrete d'etre exploites. Mais la theorie... Dans la pratique, j'etais juste un encule qui avait refuse un quignon de pain a un gamin de trois ans. Et puis meme si tout le monde avait fait comme moi, qu'est-ce qui se serait passe? Ils seraient retournes a la rue, sans rien dans le bide... Alors ouais, je retourne dans le meme resto, a Tupiza, me faire servir par un jeune ado. Quoi que tu fasses, ca sera le mauvais choix de toutes facons...

Dernière modification par Kam (30-01-2014 18:44:04)

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