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#26 21-11-2017 15:22:48

enrico
Membre
Lieu : Rhône-Alpes
Inscription : 13-08-2013

Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J15 – lundi 17/07 - en partie sur le Tour de la Bessanèse
Balme, passo delle Mangioire, refuge Cibriaro,
Dénivelé : D+ 1687, D- 503

Le parcours

Au matin, je quitte mes amis allemands qui repartent dans un autre sens pour aller récupérer leur véhicule. Mais j’ai rendez-vous dans deux jours avec l’un d’entre eux au refuge Tazzetti, au pieds de Rochemelon où il voudrait aller.

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Montée dans le vieux balme

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Balme

L’année dernière, j’avais galéré pour trouver le départ depuis Balme, les indications étant inexistantes pour le sentier indiqué avec le no 217 sur la carte IGC. Donc, cette année, je n’ai pas ce souci pour retrouver ce départ et je monte tranquillement par le-dit sentier qui coupe une route d’alpage non présente sur la carte.

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Vieil alpage

Il a plu pendant la nuit et j’enfile mon pantalon de pluie à la place de mon pantalon de rando pour ne pas me faire tremper au niveau des jambes. A l’alpage Alpe Pian Gioé, je retrouve facilement le départ du sentier n° 219 qui permet de rejoindre, en balcon sur la vallée principale, le vallon qui permet d’accéder au Colle delle Mangioire.

Voilà pour l’itinéraire, mais la difficulté de ce parcours est qu’une fois de plus, il n’y a pratiquement pas de chemin, juste une vague trace dans une végétation très dense et très humide, parfois à hauteur d’homme voire plus, ce qui m’oblige à un certain moment à mettre mon haut de pluie en plus de mon pantalon.

Ce qui me sauve, c’est que les marquages de ce soi-disant sentier, eux, existent bel et bien, en rouge et blanc, à chercher sous la végétation pour vérifier que je suis toujours sur le bon itinéraire.

Je passe par deux alpages abandonnés, Fontana et Losasset. A ces dernières ruines, l’itinéraire bifurque un peu et je perds du temps à le retrouver.

Enfin, après un col vers 2300m, je redescends dans un terrain plus civilisé jusqu’à 2100 mètres pour rejoindre le vallon qui monte au Colle delle Mangioire. La montée au-dit Colle est efficace, bien indiquée sur un bon sentier. L’arrivée au col est très minérale et sauvage.

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Vue de côté en montant au Passo delle Mangioire

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Un peu plus haut

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Le sentier monte vers la droite

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Le Passo delle Mangioire

De l’autre côté du col, une large vue sur un espace en pente douce avec, en ligne de mire, le lac de barrage Lago della Rossa, au pied d’une chaîne rocheuse dont le plus haut sommet est l’Ouille d’Arbéron (appelée Punta d’Arnas en Italie), qui culmine à 3560m. J’accède à ce lac de barrage par un raide sentier qui remonte sur 100 mètres de dénivelé.

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Vue sur l'autre côté, où l'on distingue le lago della Rossa, sous l'Ouille d'Arbéron et la Croix Rousse

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Premier petit lac avec l'Ouille d'Arbéron

Je ne suis souvent pas très fan des lacs de barrage, mais celui-ci est assez impressionnant, avec ses restes de glace, des parois qui tombent dedans, certaines recouvertes avec des pans de névé.

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Le lago della Rossa

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Effet de lumière sur le lago della Rossa

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Autre vue du lago della Rossa

J’ai donc maintenant rejoint le Tour de la Bessanèse, un circuit de randonnée alpine de 4 jours entre la France et l’Italie.

Je continue sur cet itinéraire, ce qui me donne l’occasion de mettre mes crampons pour monter plus rapidement et confortablement au Colle Altare, à 2901m. L’endroit est très minéral, dans des tons de roche brune.

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C'est par là, pour monter au colle Altare (2901m)

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Plus pratique de passer par la neige avec les crampons

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Croce Rossa (Croix Rousse)

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En descendant vers le refuge Cibrario

Je redescends au refuge Cibrario, où je m’arrête pour faire étape. C’est un refuge CAI gardé par des volontaires qui se relaient. Ils sont trois, un vieux monsieur, un autre qui a une gouaille pas possible, et une femme qui dirige le tout d’une voix stridente. Ils n’arrêtent pas de se chipoter.

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Le refuge Cibrario

Nous ne sommes que 4 visiteurs, un couple d’italiens, un jeune romain et moi. Il y a une pièce chauffée à l’entrée, très pratique pour sécher rapidement la lessive et les chaussures. Chacun a droit à une chambrée particulière. (En Italie, ce n’est pas comme dans certains refuges où on entasse les gens dans une seule chambrée, même s’il y en a trois de libre à côté).

Nous dînons tous les quatre ensembles, le repas est bon et copieux. En principe, en Italie, ça commence avec une assiette d’antipasti. Puis il y a des pâtes, servies selon une spécialité italienne locale. Déjà là, c’est très copieux. Mais un plat de viande arrive encore avec son accompagnement de légumes. Puis il y a du fromage et un dessert.

Là, au moment du plat de viande, ils ont absolument voulu nous faire goûter une autre spécialité de viande qu’ils avaient préparée en plus ! On peut tout demander à nos hôtes, ils sont adorables.

Le soir, à 200 mètres devant le refuge, une harde de bouquetins vient faire le spectacle sur des rochers plats, à grands coups de corne entre les mâles pour épater les étagnes. Les bouquetins sont devenus tellement habituels sur mon parcours que je n’ai pas fait de photo à ce moment-là.

Je commande un sandwich pour emporter le lendemain. Comme je m’y attendais, c’est un énorme sandwich qui m’attendra le lendemain matin, il me fera deux jours.

Dernière modification par enrico (12-12-2017 17:42:17)


"De côtes en vallons, de plaines en plateaux, marcher en silence, le regard en paix"

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#27 21-11-2017 15:35:29

NikoJorj
Oeil émerveillé
Inscription : 10-09-2008
Site Web

Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

enrico a écrit :

Le mot « abri » n’est pas celui qu’ils employaient, ils utilisaient un autre mot, un peu rare, que j’ai oublié.

A Vallorcine, ils désignent les petites granges (celles perchées sur leurs quatre dalles, pour les rongeurs, comme sur ta photo à Champex) sous le nom de Regat, et j'ai aussi entendu Raccard en Suisse. C'est peut-être ça?

Et sinon, pour le matos photo, ton 14/2.5 peut aussi se remplacer sans perdre grand-chose (sauf un peu d'argent...) par le petit zoom 12-32 que j'apprécie vraiment beaucoup, tu y gagnes l'équivalent 50 sans perdre le grand-angle.
Ou alors, il y a aussi le 20/1.7, juste un peu plus grand-angle que eq. 50mm, très très bon optiquement.

Merci pour tes beaux récits, surtout!
Je range quelques itinéraires dans un coin de ma tête...


Quotation, n: The act of repeating erroneously the words of another.”
― Ambrose Bierce, The Unabridged Devil's Dictionary

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#28 21-11-2017 15:57:10

enrico
Membre
Lieu : Rhône-Alpes
Inscription : 13-08-2013

Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J16 – mardi 18/07 - Petite étape de jonction
Refuge Cibrario, refuge Tazzetti
D+ 865m, D- 845m en 5h30

Le parcours

Petite étape pour rejoindre le refuge Tazzetti, situé au pied de Rochemelon. Petite étape parce que, pour une question de timing, il aurait été trop long de faire la traversée de Rochemelon le même jour.

Un peu de cramponnage pour commencer la journée, pas obligatoire, mais bien plus pratique pour monter sur un névé une partie de l’itinéraire vers le colle Sulé à 3073m. Neige et rochers. Le sentier n’est pas visible sous la neige, mais assez évident.

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Départ le matin, en montant au fond à gauche par le névé

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Dans la montée au col Sulé (3073m)

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Un peu de nebbia en montant

Puis je redescend sur la neige pendant un bon moment jusqu’à un verrou au dessous duquel je rejoint, sur terrain sec, le sentier qui mène au col de l’Autaret. Je descends ce sentier jusqu’à l’approche du Colle di Spoil.

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De l'autre côté du Col Sulé, avec, en face et à droite de mon itinéraire de descente, les lacs d'Autaret que l'on devine, et la punta Costan

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Le début de la descente sur un bon névé

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Plus bas, des fleurs

Là, il y en a un autre sentier très bien signalé pour aller au refuge Tazzetti. Il fait une grande traversée circulaire d’une immense vallée, au bout de laquelle, après avoir traversé le torrent Cavalla Nera, il remonte dans une pente herbeuse qui devient très raide pour accéder au refuge Tazzetti.

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Bifurcation vers le refuge Tazzetti

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Un grand vallon à traverser, avant de remonter à Tazzetti

Grosse ambiance dans cette montée, parce que c’est vraiment raide. A plusieurs moments, je me demande où est la sortie.

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Dans la montée au refuge Tazzetti

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Vue vers le bas

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Dans la montée

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Ambiance

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Un oiseau, l'air de rien sur son caillou

Le refuge Tazzetti apparaît comme un nid d’aigle perché sur une petit selle au pied de la montée, assez raide elle-aussi, qui mène au Colle della Resta. Accueil excellent là-aussi par une équipe tournante. On est vraiment en montagne avec des montagnards.

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Rochemelon

Trois français débarquent, ils viennent de faire la traversée de Rochemelon en sens inverses de l’itinéraire que je vais prendre le lendemain. Ils me reconnaissent immédiatement. On s’était vu au refuge Quintino Sella l’année dernière, et on avait un peu échangé dans la montée au col Sauzon. Le monde est petit.

Ils sont en chaussures de trail, me disent qu’on peut se passer de crampons parce que le glacier de Rochemelon est très plat. Ils m’avouent cependant avoir eu de la difficulté en montant au col de Novalèse, à un endroit où le sentier est effondré et nécessite de talonner des marches dans une pente terreuse compacte. Effectivement pas vraiment pratique en trails.

Plus tard, arrive Tobbias, l’un de mes trois amis allemands. C’est un photographe, un vrai de vrai, passionné. La différence entre lui, vrai photographe et moi, mauvais photographe, c’est qu’il fait passer la photo avant tout.

Ainsi, il décide et m’invite à monter à Rochemelon de nuit pour pouvoir assister au lever de soleil. Décision totalement évidente pour un vrai photographe. Cependant, il n’a qu’une frontale assez basique et moi, un petit tube Nitecore. Pour cette raison et parce que, aussi, je veux profiter de cette montée en plein jour, et que je ne suis pas un vrai photographe dans l’âme, je décline l’invitation et il partira donc seul à 3 heures du matin en pleine nuit pour être prêt au lever de soleil au sommet de Rochemelon avec son reflex à la main.

En plus, je dois dire qu’il va bien plus vite que moi et que je n’ai pas envie de courir essoufflé derrière lui. On a quand même 15 ans d’écart en ma défaveur et, à mon âge (67), ça compte. C’est un type qui fait l’unanimité partout où il passe. Les gardiens du refuge, mari et femme, sont subjugués. Il est prof de math en Allemagne.

Le soir, on fait des photos depuis le balcon du refuge où, malgré la fraîcheur et les averses, on reste un bon moment à observer les lumières qui jouent avec les nuages dans le ciel.

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Devant le refuge Tazzetti

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Depuis le refuge Tazzetti

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Belle lumière du soir

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On était un peu sans voix

Dernière modification par enrico (12-12-2017 17:49:23)


"De côtes en vallons, de plaines en plateaux, marcher en silence, le regard en paix"

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#29 21-11-2017 16:16:39

enrico
Membre
Lieu : Rhône-Alpes
Inscription : 13-08-2013

Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

NikoJorj a écrit :
enrico a écrit :

Le mot « abri » n’est pas celui qu’ils employaient, ils utilisaient un autre mot, un peu rare, que j’ai oublié.

A Vallorcine, ils désignent les petites granges (celles perchées sur leurs quatre dalles, pour les rongeurs, comme sur ta photo à Champex) sous le nom de Regat, et j'ai aussi entendu Raccard en Suisse. C'est peut-être ça?

Et sinon, pour le matos photo, ton 14/2.5 peut aussi se remplacer sans perdre grand-chose (sauf un peu d'argent...) par le petit zoom 12-32 que j'apprécie vraiment beaucoup, tu y gagnes l'équivalent 50 sans perdre le grand-angle.
Ou alors, il y a aussi le 20/1.7, juste un peu plus grand-angle que eq. 50mm, très très bon optiquement.

Merci pour tes beaux récits, surtout!
Je range quelques itinéraires dans un coin de ma tête...

Salut NikoJorg,

C'est peut-être "Raccard", mais je ne m'en souviens pas suffisamment.

Pour l'aspect photo, en fait, j'ai le 25mm f1.8 Olympus (équivalent 50mm), plutôt très lumineux, c'est pourquoi je parlais d'un 50mm. Il paraît effectivement que ce 12-32 est pas mal. Dire que j'avais revendu le mien ! Le 20mm f1.7 effectivement a une super cote, bien que son AF serait assez lent... Au final, je pense que ce 12-32 est The bon plan en rando !

Question itinéraire, pour aller du Léman à la Méditerranée, je trouve que, sauf si on a un impératif de temps, il faut tout faire pour ne pas prendre le GR5. Il y a beaucoup d'autres possibilités, et cette descente par l'italie m'a vraiment beaucoup plu. De belles découvertes, et les italiens sont vraiment très accueillants en montagne.


"De côtes en vallons, de plaines en plateaux, marcher en silence, le regard en paix"

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#30 21-11-2017 16:30:43

René94
Membre
Lieu : Mont Griffon (du 9-4)
Inscription : 30-12-2009

Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

un beau périple et un super récit !
Merci enrico smile

(et j'espère en faire autant que toi dans 10 ans)


"Je ne suis pas ce qui brille..." (F. Marchet)
Mon trombi

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#31 21-11-2017 17:08:45

enrico
Membre
Lieu : Rhône-Alpes
Inscription : 13-08-2013

Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J17 – mercredi 19/07 - Rochemelon en traversée
Refuge Tazzetti, 2642m, Rochemelon 3528m, col di Novalesa, refuge Stellina, 2610m, puis près col du Mont Cenis → refuge Gran Scala, 1870m.
D+ 1120, D- 1605m (une fois retirés les 250m de D- pour environ 5km en fiat panda)
Nebbia et pluie l’après-midi

Le parcours


Départ tranquille au petit jour pour monter à Rochemelon.

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C'est toujours beau au petit matin

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Encore

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Zoom sur Rochemelon

Je mettrai 2h30, ce qui est le timing moyen pour cette ascension depuis le refuge Tazzetti. Pas de difficulté particulière, il faut un peu mettre les mains au début, c’est là que la pente est la plus forte, mais il faut surtout bien suivre l’itinéraire, qui est signalé par des marques de peinture.

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Le sentier monte sur la droite

Plus haut, la pente se radoucit alors que l’on chemine sur une large arête.

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Après une première montée un peu raide, on chemine sur une arête

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Vue vers le bas, sur l'itinéraire emprunté

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Sur le sentier

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Vers le bas

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Rocce Rosse (3253m)

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Le refuge Tazzetti, d'où je suis parti

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Rochemelon

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Ca passe là-dedans


Puis c’est le Colle della Resta et le glacier. Je mets mes crampons pour traverser une zone en glace grise mais très peu pentue. J’aurai pu la contourner et éviter cette manip.

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Arrivée au colle della Resta

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Passo et punta di Novalesa

Les crampons ne me serviront pas longtemps, je les retire pour franchir des zones rocheuses sèches, sur d’anciennes moraines. Il y a des cairns, il faut bien regarder où passer pour arriver au pied de l’arête NW de Rochemelon, au SE de la pointe à 3353m. Je monte sur cette arête, d’abord par un névé, puis par un sentier. De là, l’accès est évident jusqu’au sommet par un sentier qui suit l’arête.

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Glacier de Rochemelon

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Sommet de Rochemelon

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Pointe de Charbonnel (3752m)

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Toujours la même ambiance vers l'est

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Le glacier de Rochemelon

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Vue générale de ce qui reste du glacier

Je n’ai encore vu personne ce matin, mais tout à coup, un bruit de moteur vient déranger le calme et la sérénité des lieux. Au début, je me dis : Tiens un ULM ! », mais non, c’est un drone qui tourne comme un frelon autour du sommet. Le bruit s’arrête avant que je termine ; sans doute la batterie s’est-elle déchargée.

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On voit où je suis arrivé au Colle della Resta, en montant du refuge Tazzetti. C'est à droite du gros bloc rocheux au sommet arrondi

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La chapelle à gauche, et le refuge à droite, très bien isolé par une double porte

Il y a deux italiens sur la plateforme devant la chapelle et le refuge, apparemment un père et son fils. Pas de drone, il a dû être rangé dans un sac à dos. Je les sens un peu tendus à mon égard. Comme ils n’arrivent pas à se prendre en selfie avec un smartphone un peu déficient, je leur propose mon aide. Çà détend l’atmosphère, ils font la pose et je les prends en photo avec leur engin.

Je redescends par l’arête sur laquelle je suis venu, et monte sur une partie de cette pointe à 3353m, dont l’accès est facile de ce côté. Mais je me rends vite compte que ça ne passe pas de l’autre côté. Du coup, je descends au pied de l’arête, toujours par le même cheminement par lequel je suis arrivé.

De là, je vois des cairns qui balisent un itinéraire dans la face rocheuse sous la pointe à 3353m, au-dessus du glacier. C’est exactement ce que je cherchais, ça évite de contourner toute cette zone en passant sur le glacier. Je suis précisément ce balisage qui me mène au Col de Novalèse.

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En descendant sur le côté de la rive gauche du glacier

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Itinéraire cairné pour rejoindre le col di Novalesa

De là, je descends de l’autre côté, vers le sud-ouest, au début par un sentier raide mais câblé, puis très vite en m’écartant sur la gauche par un sentier bien balisé par des marquages rouge et blanc. La descente  est assez raide et longue, sur un terrain très mobile. L’impression de descendre en emportant une partie de la montagne.

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Au col di Novalesa, c'est par là qu'on descend

C’est là que je trouve ce passage obligatoire mais effondré, pour traverser un petit ravin. Impossible de faire des marches, la pente est forte et le sol est en terre compactée très dure. J'ai failli sortir mon piolet pour tailler des marches, mais en gratonnant sur des tous petits cailloux pour passer, je vois que çà tient !

Plus bas, le refuge Stellina apparaît sur son épaule. Il est à la limite du brouillard, tantôt dedans, tantôt dehors. J’entends des voix à l’intérieur du refuge. Il y a là cinq italiens et le gardien.

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Arrivée au refuge Stellina

Je demande si je peux manger. Les cinq italiens, qui sont cinq copains du village de Monpantero au-dessous, me proposent de venir à leur table. Ils ont presque fini de déjeuner. Apparemment, le but de leur sortie était juste de venir déjeuner au refuge. Il y a deux jeunes trentenaires, deux seniors, et un ancien de 80 ans. Je mange des pâtes, du fromage et une part de gâteau. Ambiance sympa, ça plaisante, ça rigole. Ils en sont au café et à la grappa, mais avec modération. Je ne les suis quand même pas sur le petit coup de grappa.

Je discute avec le gardien pour recadrer mon itinéraire pour descendre, et pour repartir du bas. L’objectif, bien sur, est de ne pas descendre bien plus bas que le Col du Mont Cenis. Je m’étais un peu fourvoyé dans mes prévisions initiales, en visant le village de Novalèse, mais cela me ferait descendre bien trop bas. Du coup, les cinq italiens me proposent de partir avec eux.

Je demande au gardien combien je dois. Il me répond « Rien du tout ». Je suis étonné, j’insiste, alors il me montre une boîte et me dis de mettre ce que je veux. Je glisse quelques pièces de deux euros. Stellina est un refuge privé un peu spécial. Entendons-nous, il n’est pas gratuit, mais j’ai dû sans doute profiter de ce qui restait du repas des italiens.

On se met donc à descendre sur un sentier à la queue leu leu. Ils avancent bien, ce sont tous des montagnards aguerris. Je discute avec leur ancien de 80 ans. Il fait beaucoup de sorties en montagne, beaucoup de ski de rando l’hiver, de l’escalade. Bien sur, il se fatigue plus vite que les autres, mais quand même, c’est un sacré gaillard, et je sens que les autres ont de l’attention pour lui.

Il se met à pleuvoir, on est dans le brouillard, on s’équipe un peu. L’un d’eux connaît bien la flore, il cueille et me fait goûter une ombellifère au délicieux goût de cumin. Plus loin, ils s’arrêtent à la ferme d’alpage de Alpe Tour pour acheter du fromage qu’ils avaient dû faire mettre de côté en montant.

On continue sur une piste et, bientôt, on tombe sur une voiture avec laquelle ils sont montés. Une Panda 750, premier modèle. Il pleut toujours. Ils me font une place, mais deux d’entre eux continuent à pied jusqu’à une autre voiture garée plus bas.

Le jeune qui conduit la Panda sur cette piste tout de même pas en très bon état mène son affaire comme s’il était sur une route goudronnée. La Panda roule et glisse sur ses pneus d’un virage à l’autre, dans une descente tranquille et apaisée, pendant qu'on discute de choses et d'autres. Un peu l’impression d’être sur des skis. Tous cela se termine au refuge de Gran Scala - en fait c’est plutôt un hôtel - où je fais étape. Je leur offre le café en remerciement. Je me suis senti bien avec ces gars de la montagne, et je crois que c’était réciproque...

Dernière modification par enrico (23-01-2018 15:23:02)


"De côtes en vallons, de plaines en plateaux, marcher en silence, le regard en paix"

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#32 21-11-2017 17:45:30

enrico
Membre
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Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J18 – jdi 20/07 - En France toute la matinée avant de repasser en Italie
Refuge Gran Scala, lac Blanc, lac de Savine, refuge Vaccarone, refuge Levi Molinari (1824m)
D+ 1380, D- 1405

Le parcours

Il a bien plu cette nuit. A peine parti, ça recommence. Je m’arrête et je m’équipe pour la pluie, abrité dans un vieux bâtiment abandonné, datant apparemment de la construction du barrage. Mais finalement, ça ne dure pas, le beau temps revient et je me déshabille un peu plus haut.

Je prends la route qui monte au lac Blanc. Elle monte en diagonale de la pente derrière l’affreuse barre de l’hôtel Malamot. Mais dès le premier lacet, je prend un sentier qui coupe tous les lacets de cette route non goudronnée. Efficace.

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Le fort de Variselle, au-dessus du lac de Mont-Cenis

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Le lac de Mont-Cenis

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Rochemelon, auréolé d'un petit nuage blanc

Je passe au lac Blanc, qui vaut le coup d’oeil, surplombé par la Cime du Bard (3159m) et le Signal du Cléry (3107m). Il y a beaucoup de lacs dans ce coin. Peu après, je redescends sur les lacs de Giaset. Depuis le plus grand de ces lacs, je recherche et trouve le sentier qui mène directement au lac de Savine. Il est bien marqué, en bleu.

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Belles dalles rocheuses

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Le lac Blanc, sous le Signal du Cléry

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Les lacs Giaset

Pendant tout ce parcours, mon regard est captivé par la vue sur les Tre Denti d’Ambin, qui se découpent nettement dans le ciel. Je mange un morceau au lac de Savine, où je retrouve 4 Vététistes en balade, et continue dans ce grand espace ouvert en direction du col Clapier.

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Tre Denti d'Ambin

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Le lac de Savine

Des panneaux rappellent qu’Hannibal aurait fait étape ici avec 40000 hommes et 37 éléphants lorsqu’il a franchi les Alpes. Il nous est d’ailleurs suggéré d’imaginer où ils auraient pu stationner autour de ce lac et de ce col. A bien regarder, je me suis dit que ce n’était pas impossible, en se serrant un peu. Mais les historiens ne sont pas tous d’accord avec cette théorie, loin de là.

Après le col Clapier, je poursuis sur un itinéraire très sauvage en direction du refuge de Vaccarone (2741m). En fait, il y a deux itinéraires pour y aller, je choisis le sentier attrezzato, à priori plus difficile mais un peu plus court.

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Etage à monter par la gauche pour accéder au refuge Vaccarone (2743m)

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Laghi Clapier et Tre Denti d'Ambin

Je suis d’abord un torrent que je traverse plus haut sur un névé. Puis le sentier monte très rudement, mais il est bien tracé, et le recours aux câbles qui le bordent à certains endroits n’est pas indispensable. Tout le long, la vue vers le bas est magnifique.

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En montant au refuge Vaccarone

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Vue vers le bas dans la montée

Je m’arrête un moment sur un banc devant le refuge Vaccarone, pour faire un point carto. En effet, j’avais initialement prévu de passer par Exilles pour me ravitailler, considérant qu’il n’y avait pas d’épicerie à Salbertrand. Mais renseignements pris, c’est une erreur, et je décide de passer par Salbertrand, sur un itinéraire somme toute plus logique. Seule difficulté, il me manque un morceau de carte pour ce parcours, mais dans ce coin, les différentes destinations sont bien indiquées sur les panneaux aux carrefours de sentier.

Je continue sur un long chemin en balcon. Le temps devient orageux lorsque j’arrive vers le col Clopacà, où m’attend de pied ferme un stambecco (bouquetin). Je passe rapidement ce col et descends vers le refuge Molinari.

Juste avant d’arriver à ce refuge, je passe en forêt à côté d’un alpage de moutons gardés par des chiens qui sont tout sauf des patous. Ils sont dans des cages individuelles, sauf un qui m’attend l’oeil mauvais en aboyant comme un malade au milieu du sentier. Plutôt du genre chien d’attaque. Pas envie de tester ce qui est dit sur un écriteau, du genre « restez calme, avancer lentement, etc ».Je n’insiste pas et me fais une petite séance de contournement forestier avant d’arriver au refuge.

Le refuge Molinari, c’est un refuge de bord de route. L’été, il accueille des groupes d’enfants en stage. Ils occupent le 2ème étage, mais il n’y a personne au premier, où j’ai même droit à une chambre particulière dans laquelle il y a quatre couchages (deux lits superposés en vis à vie). Bien sur, c’est un peu plus bruyant qu’à l’habitude.

Je dîne avec un jeune couple de français et leur enfant. Ils sont de Sisteron, très sympas, on passe une bonne soirée. Ils dorment dans leur van VW à côté. Je craignais le bruit des enfants faisant la fête à l’étage au-dessus de moi pour m’endormir, mais je n’ai absolument rien entendu.

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#33 21-11-2017 18:02:57

enrico
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Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J19 – vendredi 21/07 - Journée pluvieuse, sans carte
7h30 à 17h30 (10h)
Refuge Levi Molinari (1824m), Salbertrand (1032m), refuge Arlaud, Monfol, col Costa Piana, Allevé 1828m (au-dessus Granges de Pragelato)
D+ 1542 ; D- 1563

Le parcours

Je descends par un chemin en forêt en aval de la route, route qu’on ne voit jamais. Passage au vieil hameau de Combes, puis je remonte à Eclause avant de prendre un chemin de traverse jusqu’à l’aplomb de Salbertrand. Je suis arrosé par des averses.

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Souvenir d'un autre temps, à Eclause

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Soustet, à Eclause

J’enlève mes vêtements de pluie à l’entrée de Salbertrand. Il y a un jardin de fleurs magnifique à l’entrée du village.

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Rose débordant d'un vieux jardin

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Salbertrand

Je vais boire un bon café et déguste un croissant dans un vieux bistrot face à l’épicerie. La dame du bistrot regarde Euronews en boucle sur grand écran. Apparemment, elle aime discuter politique avec les hommes du village qui passent le pas de sa porte. Vu deux cas pendant que j’étais là.

La dame de l’épicerie est très sympa. Je m’achète des abricots que je vais déguster sur un banc à l’autre bout de la grande rue, du côté où je vais repartir.

La montée vers le refuge Arlaud se passe majoritairement dans des sous-bois. Le refuge Arlaud – je ne le saurai que plus tard – a une solide réputation pour sa cuisine et son accueil. Quand je passe devant, c’est une vraie ruche à l’intérieur. Je ne m’y arrête pas et vais pique-niquer un peu plus loin.

Je n’ai toujours pas la carte et suis donc dans l’obligation de suivre les indications qui me sont fournies sur les petits panneaux aux carrefours des sentiers, pour aller aux Granges de Pragelato. Je passe donc par une longue piste en courbe de niveau jusqu’au village de Monfol, un joli village richement rénové. De là, toujours par les indications des panneaux, je vais au col de Costa Piana.

Mais un gros orage se déclenche peu avant ce col. Badaboum ! Il y a là toute une zone où les arbres sont cassés, étêtés, déracinés. Le coin est maltraité par la nature. Ça m’incite à la prudence. Je passe le col rapidement et descends de l’autre côté.

J’arrive à un hameau quand un nouveau gros orage se prépare. C’est Allevé, juste au-dessus des Granges de Pragelato. Le ciel est noir. Il y a là une auberge. Je m’arrête pour y faire étape. Une pluie torrentielle tombe pendant toute la soirée. L’auberge en question est du genre vieille ferme rénovée, avec des chambres aux meubles rustiques, des belles salles de bains.

Mais c’est très cher, trop cher pour ce que c’est. Je n’avais pas fait attention aux prix en y entrant. De toute façon, avec ce qui tombait dehors, je n’avais pas trop le choix. Ce qui est fait est fait, mais cette vallée de Pragelato pue un peu (Club Med, golf, etc). Ceci explique peut-être un peu cela. En tous les cas, ne pas s’arrêter à l’auberge d’Allevé !

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#34 21-11-2017 18:37:20

enrico
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Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J20 – Samedi 22/07 - Col Clapis
de 7h30 à 16h
De Allevé, descente aux Granges de Pragelato, puis remontée de la vallée de Troncéa, en passant au refuge de Troncea, puis le col Clapis (2851m), et la descente au refuge agro-touriste à 2012m à Alpe Piane.
D+ 1435m, D- 1175m

Le parcours

Je descends en fond de cette vallée de Pragelato, à Travers, d’où je remonte dans le Val Troncéa. C’est le Parco Naturale Val Troncea. Là-aussi, c’est un peu surfait. En guise de Parc, c’est une vallée qui n’a rien de plus que beaucoup de vallées alpines. Mais ils en font tout un fromage ! Fromage touristique.

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Le Val Troncea part à gauche, dominé par la Punta Rognosa (3280m), les Rocce del Rouit (3134m) et le Monte Platasse (3149m)

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Le val Troncea au soleil dans la brume matinale, après la pluie soutenue de la nuit

Garde à l’entrée, maison du Parc, etc. Il y a aussi une route en terre battue qui remonte cette vallée « sauvage », où défilent les voitures pour accéder à des départs de randonnée. Il y a même un taxi qui fait la navette avec le refuge Troncea. Je n’ai pas été subjugué par ce coin, du coup je n’arrive pas à le décrire avec des choses positives.

A cause de cette météo chaotique, je n’ai pas suivi mon projet initial qui prévoyait un circuit d’altitude : Mont Albergian, descente par son arête sud, colle dell’Albergian, colle del Pis, Mont Ruetas, colle dell’Arcano, refuge Troncea. 

Je fais quand même un détour par le refuge Troncea mais j’aurai pu m’en passer en restant près du lit du torrent Ghisone. Le fond de la vallée, à partir du moment où il n’y a plus de route, est un peu plus sauvage.

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Le torrent Chisone, dans le Val Troncea

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Vue dans le Val Troncea

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Val Troncea

La montée au col Clapis me redonne le sourire, même si le ciel parfois noir m’inquiète un peu. Je crois que je suis phobique avec les orages. Mais il y a un petit refuge placé très intelligemment  juste au-dessous du col, où je pourrais m’abriter si ça pète, et ça me rassure dans la montée.

Je discute avec un couple de gens du coin qui casse la croûte assis contre ce petit refuge. Ils sont allés faire un sommet à côté du col, peut-être bien le Monte Appenna. Ca me fait plaisir de discuter avec ces montagnards. Ils me confirment que la météo annonce du mauvais temps.

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Montée au col Clapis

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Plus haut dans la montée au col Clapis

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Le monte Appenna

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Le bivouac "casotto col Clapis", au-dessous du col éponyme

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Au col Clapis

Je passe le col et redescends de l’autre côté, sur des grandes pentes schisteuses, jusqu’au refuge agrituristico Alpe Piane, où je m’arrête pour faire étape. Ça suffit pour aujourd’hui. La pluie s’invite de temps en temps.

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Descente sur des pentes schisteuses de l'autre côté du col Clapis

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Le refuge agro-touriste Alpe Piane, et la vallée del Gran Miôl (à remonter le lendemain)

Le soir, il y a un groupe de français, ils sont une bonne dizaine, ça fait 30 ans qu’ils font chaque été une randonnée ensembles. Ils sont vieux maintenant, et ils font des plus petites étapes que du temps de leur jeunesse. L’un d’entre eux m’explique cela. Mais ils sont toujours jeunes dans l’âme. Certains se débrouillent même pour suivre la rando en partie en voiture. Ces derniers avaient monté quelques bouteilles de clairette, et ils m’invitent à partager le verre de l’amitié.

Le soir, on assiste au retour du troupeau de vaches pour la traite. Elles sont fatiguées de leur journée en alpage, ça se voit, elles avancent d’une démarche chaotique. C’est impressionnant, une centaine de vaches absolument silencieuses qui défilent devant vous, avec leurs gros yeux qui vous regardent, et dans le regard desquelles on peut lire leur résignation à cette implacable destinée morbide, l’abattoir. 

Les chiens aussi sont fatigués, mais eux, ils ont le réconfort du travail accompli, et des petites caresses de récompense, notamment par la fille des fermiers.

Il y aussi un autre couple de français qui a été invité à l’apéro clairette. Ils ont acheté du fromage sur place et ils me le font goûter. Vraiment délicieux ! Je passe à la cave à fromage pour m’en prendre une bonne tranche.

Le couple en question dîne, mais ne dort pas au refuge. Ils ont une tente qu’ils sont allés planter plus loin. Deux jeune femmes ont fait pareil. Ils n’ont pas tort, car les prix, là-aussi, sans atteindre les sommets d’Allevé, ne sont pas très bienveillants. C’est bien plus cher qu’un refuge CAI. Je suis resté parce que j’ai cru qu’il allait faire mauvais, mais peut-être est-ce aussi un prétexte au simple besoin de rompre avec la solitude de mes marches quotidiennes.

Dernière modification par enrico (14-12-2017 19:21:33)


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#35 21-11-2017 18:47:38

enrico
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Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

René94 a écrit :

un beau périple et un super récit !
Merci enrico smile

(et j'espère en faire autant que toi dans 10 ans)

Merci René94 ! smile
(Et t'en fait pas pour le reste ! Faut juste garder toujours la machine en chauffe lol )


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#36 21-11-2017 19:48:44

ester
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Inscription : 24-08-2011

Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

Bonjour Enrico, smile

Enrico a écrit :

@ Ester : Tu es gentille avec moi pour cette photo ratée du coucher de soleil sur le Léman  lol . En plus, figure-toi que j'avais un pied (mini-pied) et que je ne m'en suis même pas servi. J'avais trop sommeil sous mon abri...  smile

J'imagine bien la scène.
La remarque était sans mesquinerie aucune, ce sont des lieux qui me sont chers, tout simplement. smile


Grâce à vous, j'avance ! merci !  smile

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#37 22-11-2017 00:20:52

enrico
Membre
Lieu : Rhône-Alpes
Inscription : 13-08-2013

Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J21 – Dimanche 23/07 - Journée ventée en altitude
de 6h45 à 18h10
de Alpe Piane à 2092m, par les passo di Longia (2817m) et Frappier (2891m), le refuge Lago Verde, puis le colletto della Gran Guglia (2790m), la punta Cerisira (2822m), le colle di Banciet (2690m) et descente sur Villanova (1225m).
D+ 1620m, D- 2430m

Le parcours


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Le refuge agro-touriste d'Alpe Piane, d'où je viens de partir

Personne d’autre que moi ne va au passo di Longia ce matin. La longue vallée qui y mène butte sur la chaîne formée par le Gran Queyron et la Cime Frappier. Je chemine sur la route non goudronnée qui la parcourt jusqu’à l’ultime bergerie Gran Miôl. De l’autre côté du vallon, un randonneur chemine sur un sentier en direction du col Mayt donnant accès au Queyras.

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En face, la chaîne bordant le Queyras est en plein soleil

Le berger auprès duquel je m’informe me dit qu’il n’y a plus de sentier qui va au passo di Longia, qu’il faut se tenir sur la droite en montant, plus deux ou trois autres indications que je ne retiens pas.

Un peu plus loin, je m’arrête un moment sur un monticule pour faire une observation de visu et avec ma carte. Dans certaines situations, il vaut mieux essayer de comprendre avant d’agir. Bref, le passo di Longia est en portefeuille au fond à gauche de la Cime Frappier, laquelle ne se caractérise pas beaucoup par l’émergence de son sommet, ni le Grand Queyron d’ailleurs, vu d’où je suis.

Avant cela, devant moi, une immense zone plate et large, où le berger vient mener ces bêtes de temps en temps, selon la qualité de l’herbe qui y pousse. Du coup, effectivement, toute trace de sentier a disparu.

Je traverse cette zone au mieux et plutôt sur la gauche – bien que le berger m’ait dit de me tenir sur la droite. Oui mais, me dis-je, sur la droite de quoi ?

Plus haut, alors que ça commence à monter, des traces de sentes commencent à apparaître. Ça va, je me dis, je suis sur le bon chemin. Plus haut encore, ça y est, je suis sorti de la zone d’ombre, des vieux marquages rouge et blanc commencent à apparaître sur des pierres.

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Le passo di Longia est en vue

Il y a de plus en plus de vent. J’arrive au passo di Longia, il fait beau mais le vent est fort et froid. Là, il y a toutes les indications nécessaires : directions, numéros de sentier.

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La Valle del Gran Miôl, d'où je viens

Je dois maintenant aller au passo di Frappier, en traversant d’un col à l’autre, au vent. (les marins comprendront). Comme le vent est vraiment froid et fort, je vais dans la casemate présente au col pour m’équiper, pantalon de pluie coupe-vent, haut de pluie coupe-vent, doudoune, buff et bonnet, gants. Comme ça, ça va, et la demi-heure de soufflante pour aller jusqu’au col Frappier se passe fort bien.

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En traversant vers le passo Frappier, la Cima Roudel dans le rétro

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Le passo et la cima Frappier (3003m)

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Le Gran Queyron (3060m)

Je redescends de l’autre côté, tout en retirant progressivement mes protections contre le vent au fur et à mesure que je perds du dénivelé et que le vent faibli.

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Des fleurs partout

Je croise des italiens en short qui montent au Gran Queyron. Tiens, je me dis, c’est vrai, j’aurai pu me faire violence et y aller, tant que j’étais équipé. C’était juste un sentier pour accéder à ce sommet à 3060m, depuis le col Frappier à 2891m où je suis passé. Quel fainéant je suis !

Les italiens sont souvent en short l’été en montagne. « Il y a du vent » disent-ils. Oui, mais ils n’ont encore rien vu.

Plus bas, je coupe par une petite sente pour rejoindre le sentier de la Via Alpina qui mène au refuge de Lago Verde. Le vent est omniprésent. On est dimanche, il y a du monde au refuge, du côté du bâtiment sous le vent (les marins etc.).

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Jonction avec la Via Alpina dans le haut du Val Germanasca

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Le lago Verde, devant le refuge éponyme

Bref, je continue vers le colletto della Gran Guglia, redescends en passant vers une construction métallique qui est un mausolée en mémoire à des personnes décédées suite à une chute en montagne.

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Vue du colletto della Gran Guglia

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De l'autre côté du colletto della Gran Guglia

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Mausolée pour des alpinistes disparus

Puis je remonte par un bon sentier (ancien sentier militaire) à la Punta Cerisira (2822m). Ca souffle toujours.

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Bon sentier pour la punta di Cerisira

De l’autre côté, ça commence par une descente en traversée pour rejoindre le colle di Banciet. Petite sente bien scabreuse, pleine de gravillons, avec plusieurs petits ressauts à passer. Je comprends pourquoi il n’y a personne ici.

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Le Viso

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Vue de la Punta di Cerisira

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Vieille ruine de casemate à la punta di Cerisira

Puis c’est une très longue descente, avec pas mal de choix d’orientation à faire, puis, après le col Content, ça continue par des anciens sentiers militaires très raides, mais soutenus par des murettes, jusqu’à Villanova (1225m).

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Vers la descente sur Villanova, à l'ombre tout au fond du vallon

Au village, il y a beaucoup d’italiens qui rentrent de leur journée de rando familiale dominicale. Je cherche un coin pour bivouaquer, mais c’est impossible aux abords immédiats du village. Tout est fermé, clôturé. Préservation contre le tourisme sauvage. J’aurai dû remonter sur mon itinéraire du lendemain, car il y avait tout ce qu’il fallait pour bivouaquer plus haut, mais je n’ai pas insisté, pas eu le courage surtout et, une fois de plus, j’ai loué une chambre, à la pizzeria, où j’ai très bien dîné et conversé avec plaisir avec mes voisins, des italiens du coin.

Dernière modification par enrico (14-12-2017 19:30:55)


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#38 22-11-2017 10:04:59

enrico
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Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J22 – Ldi 24/07 - En approche du Viso
Villanova, refuge Granero (2377m), passo Seillierino (2884m), Point bas (-100m), col de la Traversette (2950m, refuge Giacoletti (2741m)
D+ 2115m, D- 635m

Le parcours

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Villanova, que je viens de quitter

Chaque jour, je monte, je descends, je me demande si je commence pas à avoir la tête qui tourne. Ce matin, en montant de Villanova, je découvre quantité de lieux magnifiques pour le bivouac.

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Le temps est incertain, mais avec de belles lumières dans le ciel matinal

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Une cascade sur le bord du chemin

Je suis suivi par une italienne, elle me double et s’arrête au refuge Jervis, moi pas. Un peu timide, pas très causante.

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Un beau torrent, le Pellice

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Le Pellice

Après, il y a une longue et large plaine d’alluvions où l’on peut camper, le Pra Superiore, mais l’eau du torrent est au conditionnel, car il y a tout au bout une ferme et un troupeau.  Ça n’empêche pas des scouts d’y avoir établi leur camp d’été.

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La grande plaine dite du Pra Superiore, avant de monter au refuge Granero

Je m’arrête pour acheter un bout de fromage que j’emporte à la main. Je vais le déguster un peu plus loin, dans un endroit à l’ombre sous des arbres.

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Ferme d'alpage (avec vente de fromage)

Puis, je continue à monter vers le refuge Granero. Au-dessus, c’est une chaîne avec le Mont Granero au plus haut (3121m). Je m’arrête au refuge pour manger un morceau, en fait une grosse assiettée de pâtes sauce bolognaise, et pour discuter de mon itinéraire. J’avais un doute entre deux cols, le Seillière et le Seilliérino, car je ne savais pas si ça passait par ce dernier. Oui, ça passe, me dit-on, c’est même par là qu’il faut aller pour rejoindre le col de la Traversette.

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En montant au-dessus du refuge Granero

Je monte alors qu’une fois de plus, le ciel devient très sombre. Plus haut, il se met à pleuvoir. Je mets mes vêtements de pluie, mais ça ne dure pas, et je fais l’opération inverse. Bientôt, je suis dans un monde minérale total, ça dénivelle peu et l’arrivée au col n’en finit pas.

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Au-dessous de moi, le refuge Granero et le lago lungo d'où je viens

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En approche du passo Seillierino

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Le passo Seillierino

La descente de l’autre côté est bien raide, mais très courte. 100 mètres à descendre pour rejoindre le sentier principal du Tour du Viso (+GTA, + Via Alpina).

Il y a là un petit groupe d’italiens, je discute avec l’un d’eux. Ils veulent rejoindre le refuge Giacoletti, mais certains de leur groupe semblent bien peu aguerris, et n’avancent pas du tout. Ils veulent passer par le Buco del Viso, un tunnel sous le col de la Traversette qui a été creusé au XVè siècle.

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Sommets dans les nuages

Je préfère passer par le col au-dessus à 2950m, où je retrouve quelques stambecchi.

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En approche du col de la Traversette

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Le colle delle Traversette

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Un bouquetin pressé

En redescendant de l’autre côté, je discute un moment avec deux gars en train d’installer leur bivouac sur une terrasse, en vue de partir très tôt le lendemain matin pour faire la traversée Bérhault, une belle course d’arête depuis le col de la Traversette jusqu’au sommet du Viso.

Finalement, quand je passe à hauteur de la sortie du tunnel, le groupe d’italiens n’est pas encore arrivé.

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La sortie du tunnel "Bucco del Viso"

Je poursuis par le fameux Sentiero del Postino, un sentier un peu aérien qui reliait des casernes militaires. Aérien, certes, mais très parcouru, bien balisé et entretenu aux petits oignons.

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Rocce Fourioun

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Il sentiero del Postino, pour rejoindre le refuge Giacoletti

Je repense à mes cols oubliés, et à leurs cheminements parfois bien aléatoires.

Avant d’arriver au refuge Giacoletti, je mets mes crampons pour remonter confortablement un grand névé.

Au refuge, c’est blindé de monde, mais on me trouve une place. C’est vrai qu’on est près du Viso, tout s’en ressent, le monde, et les prix aussi ! Je dîne avec une famille de Lausanne, et un guide anglais et son client. Il y a plusieurs guides ici parce qu’il y a plusieurs courses à faire, comme la Pointe de Venise ou la Pointe d’Udine.

Dès le soir, il y a beaucoup de vent, un vent du nord glacial. Çà souffle toute la nuit. Le dortoir est sous les toits et ça fait un potin du diable. Impossible de bien dormir.

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#39 22-11-2017 13:09:41

enrico
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Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J23 – Mardi 25/07 – Autour du Viso
étape de 10h15
Refuge Giacoletti (2741m), refuge Quintino Sella, lago Grande di Viso (2590m), passo di Sagnette (2991m), lago delle Forciolline, Bivouac Berardo (2710m), Pontechianale (1620m.
D+ 915m, D- 2035m

Le parcours

Au matin, le vent ne se calme pas. Il fait très froid dehors. Je repense aux jeunes qui ont bivouaqué en vue de faire la Bérhault. Les gens ne se précipitent pas pour partir, les guides non plus.

C’est plus facile pour moi, qui pars vers le bas, en direction du refuge Quintino Sella. Je m’habille bien avec mes vêtements coupe-vent, mon buff, et je démarre. En fait, dès que je descends un peu, je me retrouve assez bien abrité du vent.

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Gros plan sur le Viso

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Le Viso dans son décor

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Lago Lausetto et lago superiore

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Autre angle de vue sur le Viso

Je suis rejoint par deux italiens de mon âge. C’est des gars de Cuneo, on discute pas mal. Des gars habitués à la montagne. A un moment, il y a un passage un peu « craignos », une grande marche à faire vers le bas pour prendre pied sur un névé un peu gelé qu’il faut traverser sur deux mètres. C’est pas grand-chose mais dessous, c’est des rochers et il vaut mieux ne pas s’en mettre une. A ce moment-là, ils sont peut-être 20 à 30 mètres devant moi, ils passent tous les deux et après, l’un d’entre eux s’arrête, l’autre l’attend et du coup, mine de rien, ils ont attendu que je passe. J'ai rien dit mais j'ai pensé, c'est ça la bonne attitude en montagne.

Je ne m’arrête pas trop au refuge Quintino Sella. Je remplis mes bouteilles et repars en direction du Pas des Sagnettes. C’est le début de la voie normale pour le Viso. Tout le long de ce passage, je vais croiser pas mal de monde qui descend du Viso, des particuliers et des guides avec leurs clients. La voie normale est abritée du vent du Nord, sauf la sortie tout en haut.

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Lago Grande di Viso, avec le refuge Quintino Sella à gauche

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Le bachat du refuge Quintino Sella

Je descends au lago Grande à côté du refuge, et monte jusqu'au départ d'un itinéraire classé « via ferrata », qui débouche au Pas des Sagnettes. Un panneau le spécifie aux deux extrémités de ce parcours. Il y a un câble tout le long.

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Vers le pas des Sagnettes (ça ne monte pas dans ce couloir d'éboulis, mais dans des rochers à droite)

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Début de la Via Ferrata vers le Pas des Sagnettes (plaque d'information à droite de la veste bleue)

Les particuliers comme moi ne font rien d’autre que de monter en se tenant au câble quand c’est nécessaire.

Par contre, ça oblige les guides, pour des questions de responsabilités, à s’encorder avec leurs clients, et à les munir d’une longe et d’un mousqueton de sécurité. On pourrait dire que c’est trop mais en montant, j’ai croisé des équipages qui redescendait du Viso, où le client titubait de fatigue devant son guide. Donc, à ce moment-là, c’était nécessaire.

Maintenant, on peut se poser la question de savoir pourquoi le client était si fatigué. Je ne vois pas d’autre raison que le fait du guide qui ne se met pas à la portée de son client, en bref, qui est pressé de rentrer. Parce que, lorsque j’ai constaté ça, en début d’après-midi, il n’y avait, à ce moment-là, en haut du Pas des Sagnettes, aucune urgence à se dépêcher, aucune raison de ne pas faire une pause pour se reposer.

Pour moi, la décision est prise, je ne vais pas au Viso. Décision longuement ruminée en fonction d’une accumulation de petites constatations objectives qui, mises bout à bout, arrivent à me la faire prendre. Déjà, si je veux y aller, il faut que j’attende le lendemain matin au bivouac de Forciolline et ça ne m’enchante guère avec le vent qu’il y a. Et puis je n'ai pas de casque et il y a du monde. Et puis je ne suis pas suffisamment bien équipé. Et puis, et puis... Bref ! Je poursuis en direction du bivouac Berardo.

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Laghi delle Forciolline, de l'autre côté du Pas des Sagnettes

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Vers la vallée et au loin, la plaine du Pô

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Bivouac Boarelli, au bord du lac principal Forciolline

J’ai rarement vu des étendues de blocs rocheux de cette taille à traverser. Je passe devant un lac complètement asséché. Je continue et c’est enfin l’arrivée au bivouac Berardo, en traversant d’ultimes blocs. J’entends des voix, il y a quelqu’un dedans. C’est une jeune italienne et un jeune français, genre un peu « roots » de la montagne. Ils se sont installés là pour la nuit à venir, peut-être pour plus longtemps. Tout gentil, on discute un peu. Ils me disent que, pour l’eau, ils en ont trouvée à un lac au-dessus.

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Lac asséché, en allant au bivouac Berardo

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Le bivouac Berardo

Après, c’est une longue descente vers le lac de barrage de Castello. A un moment, je vois une vieille maison d’alpage de l’autre côté du torrent. Il y a une non moins vieille dame qui est en train de rentrer à l’intérieur avec un fagot de petit bois et, au moment où l’on se voit, l’un comme l’autre lève la main, dans le même centième de seconde.

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En descendant vers le lac de Castello, coup d'oeil sur le haut du Vallone di Vallenta que j'ai rejoint

De Castello, je file de l’autre côté du lac, à Pontechianale, où je me pose au camping. Courses à l’épicerie du village, où je me prépare un festin pour le soir. A ce stade, je commence à ressentir le besoin de manger beaucoup au moins une fois par jour.

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Le lago di Castello, avec Pontechianale au bout du lac

Dernière modification par enrico (15-12-2017 22:28:50)


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#40 22-11-2017 17:32:29

enrico
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Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J24 – Merc 26/07 – Traversée du Val Varaita
9h30 à 19h15
Poste de Pontechianale le matin pour renvoi piolet + crampons
Pontechianale → passo di Fiutrusa (2858m) → point bas 2020m, colle di Bellino (2804m), descente à 2520m (bivouac).
Très beau temps.
D+ 1960, d- 1090

Le parcours

La poste ouvre officiellement à 8h30 à Pontechianale, mais comme c’est l’été, il y a moins de monde pour travailler et aussi un vague mouvement de grève larvée. Bref, ce n’est qu’à 9h que, du bar où je bois un café, j’apprends que la poste vient d’ouvrir. Mais il y a déjà du monde qui fait la queue. Queue assis pour les premiers et queue debout pour les derniers arrivés. Il n’y a que des gens du pays, et ça discutaille un peu, sans doute en patois. Je ne capte pas grand-chose avec mon italien scolaire et ça me désole.

Enfin, je peux expédier mon paquet comprenant mon piolet et mes crampons, dans un colis fabriqué avec un vieux carton dans l’arrière boutique de l’épicerie du village, avec l’aide d’un apprenti qui a été missionné par le patron pour m’aider, avec les outils coupants nécessaires, et le rouleau de scotch d’emballage qui va bien. Tout cela est fort sympathique, sauf que je me suis dis sur le coup qu’un envoi simple suffirait. Je me suis bien fait envoyer des trucs de Chine en envoi simple parfois et ça avait marché ! Sauf que là, la personne chez qui j’ai envoyé mon colis n’a toujours rien reçu ! Faut être patient...

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Pontechianale et le lago Castello, un peu après mon départ

Je pars donc vers 9h30 en direction du col de Fiutrusa. Aucune indication au départ. C’est sur le mode « Carto et débrouille-toi Jeannot ! ». Bref, je  réussis à me mettre dans la bonne direction. Le chemin est quand même marqué rouge et blanc. Vieux marquage. Le sentier a été tracé, et même banqueté, à une époque lointaine. Mais l’herbe a poussé depuis. Maintenant, c’est encore l’un de ces chemins oubliés.

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Les indications sur les sentiers abandonnés sont assez folklos, mais utiles

Le tracé est fait selon un mode, une intelligence, qui permet de le suivre assez facilement une fois compris le truc. Seule une traversée de torrent dans une pente un peu raide me fait dévier de mon itinéraire, mais j’avais alors anticipé cette possibilité d’erreur en voyant que je pouvais retraverser facilement plus haut vers l’autre option, qui était la bonne.

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En montant au passo di Fiutrusa

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Toujours dans la montée au passo di Fiutrusa

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Le passo di Fiutrusa en vue

1250 mètres de dénivelé plus tard, me voilà rendu au col de Fiutrusa. De là, une descente tranquille m’attend pour prendre pied dans un long et large vallon d’alpage d’une tranquillité totale, le vallone Varaita di Rui. En fait, il n’y a aucun troupeau, pas d’ovidé ni de bovidé dans ce vallon. Les fermes d’alpage et autres constructions diverses semblent toutes avoir été plus ou moins rénovées en résidences secondaires. Il faut dire que l’endroit est magnifique, mais peut-être un peu trop éloigné de tout pour les troupeaux.

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Le Viso toujours bien présent mais avec un problème photo... non entièrement résolu en post-traitement)

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Vue sur les rochers à droite du passo (mais avec un problème photo... non entièrement résolu en post-traitement)

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Vallone Varaita di Rui

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Ancien alpage rénové dans le Vallone Varaita di Rui

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Vue vers le sud et la chaîne de montagne avant le Val Maira

Plus loin, le vallon bifurque en descendant vers la gauche. Plutôt que de descendre trop bas, je trouve un chemin de traverse pour prendre pied sur le Pian Ceiol, un grand vallon plat avec une vieille grange rénovée. Mais là, il y un troupeau de vaches et comme j’ai rejoint la GTA, je croise quelques personnes.

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Le Pian Ceiol, point bas avant de remonter vers le colle di Bellino

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Large vue dans le rétro, avec le Passo di Fiutrusa en haut à droite

Après, c’est la montée au col Bellino, avec des vues lointaines sur les sommets et les cols environnants. C’est la fin de l’après-midi et le soleil envoie ses rayons dorés sur les pentes, mettant en évidence tous les reliefs.

Je croise un gars au pied de la dernière montée. Ce gars au visage complètement buriné, je suis à peu près sur de l’avoir déjà vu, mais je ne sais plus où. Je me rappelle lui avoir simplement dit en le croisant: « Una bella giornata ! ». Il m’a regardé et m’a rendu mon sourire.

Voilà le col Bellino, bien gardé par le Mont Bellino à gauche et une barre verticale de rochers ambrés au nom inconnu sur l’autre côté. De là, je redescends 300 mètres jusqu’à un vague replat près d’un ruisseau tranquille où je m’installe pour la nuit.

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Au colle di Bellino en fin de journée

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Bivouac sous le colle di Bellino

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#41 22-11-2017 18:23:39

kodiak
Pas assez léger, mon fils!
Inscription : 09-06-2014

Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

Chercher le sentier abandonné en se mettant dans l'esprit de ceux qui l'ont tracé, j'aime assez cette randonnée des cols perdus!

------
Edit: ortho

Dernière modification par kodiak (23-11-2017 20:09:31)


Lâche ce clavier, attrape ton sac et pars marcher!
Il y a toujours un objet plus léger que celui que tu portes dans ton sac : celui que tu as eu le courage de laisser chez toi.
« Strong, light, cheap, pick two » (*)

| k

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#42 22-11-2017 23:13:19

enrico
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Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

kodiak a écrit :

Chercher le sentier abandonné en se mettant dans l'esprit de ceux qui l'ont tracé, j'aime assez cette randonnée des cols perdus!

Salut kodiac  smile

Merci pour ta lecture, et pour cette jolie phrase.

C'est vrai qu'à côté des sentiers des grands itinéraires très bien balisés et entretenus, ces autres sentiers font pâle figure et semblent parfois vraiment abandonnés, tant ils peuvent être parfois en mauvais état, pas entretenus, peu parcourus, sans indications hormis quelques vieux marquages de peinture ça et là. Les sentiers du colle di Piccola, du passo dell'Ometto (versant vallone di Sea), de la Punta di Cirisera (versant Villanova), du colle di Fiutrusa (versant Pontechianale), en sont de bons exemples parmi d'autres.

Edit : modif texte

Dernière modification par enrico (23-11-2017 08:33:08)


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#43 23-11-2017 18:53:29

enrico
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Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J25 – Jeudi 27/07 - Le Val Maira
de 7h40 à 17h40
de 2520m, descente à 1800m, montée au refuge Stroppia (2260m), puis la Forcellina (2800m), point bas vers 2200m (source), passo di Cavalla (2539m), bivouac au lago di Munie, avec source (2409m)
D+ 1530, D- 1660

Le parcours

Je fais le plein d’eau au torrent en partant. Plus bas, il y a un grand troupeau de vache qui se met en ordre de marche pour monter dans un alpage supérieur dans une vallée annexe à celle où je descends.

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Monte Albrage

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Zoom sur Rocca Bianca, dans les belles lumières matinales

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Une maman pleine d'attentions

Je ne veux pas passer par le refuge Campo Base et par le village de Chiappera, où je suis déjà passé au moins deux fois en raid à ski de rando l’hiver. Et puis, il n’y a pas de possibilité de se ravitailler à Chiappera.

Par contre, je ne connais pas la variante qui passe par le refuge Stroppia et le col dit « la Forcellina ». La pente est raide pour monter à ce refuge Stroppia. Je traverse à plusieurs reprises un torrent bien tumultueux. A la fin, le sentier est taillé dans la roche. 

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Rocca Bianca, et le passo dell'Asino où je vais monter

Il y a un autre couple de randonneurs devant moi qui fait une petite halte au refuge Stroppia. Ce dernier n’est pas gardé, c’est un refuge en accès libre. Mais il n’y a pas d’eau, le bachat est sec. A se demander d’où venait l’eau du torrent vu à plusieurs reprises en montant.

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Torrent en montant au refuge Stroppia, puis au passo dell'Asino

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Bon sentier muletier

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Arrivée au refuge Stroppia

Plus haut au dessus du refuge, passé un verrou rocheux, j’accède à des grands vallons où l’herbe et les cailloux se livrent à un féroce combat territorial. Je passe devant des lacs asséchés. Je prend à gauche la Valle Stroppia, puis encore à gauche vers la Forcellina. Le sentier évite astucieusement de passer dans des encombrements de rochers.

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Dans le vallone di Stroppia, au dessus du passo dell'Asino, avec en face le Monte Baueria (2960m)

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Dans la valle di Stroppia en direction de la Forcellina

Au col de la Forcellina, je ne m’attendais pas à un départ aussi pentu de l’autre côté. Pentu dans une pente de rochers instables. Un clapier bien raide délimité par une paroi de chaque côté. Passés les premiers instants dans cette descente, je vois qu’il y a une corde fixe qui longe sur toute sa longueur la base de la paroi en rive droite, attachée à cette paroi par des anneaux métalliques tous les 30 mètres environ. Je descends donc environ 150 mètres de dénivelé le long de cette paroi, en me servant de cette corde fixe pour me maintenir debout dans cet immense pierrier irrégulier. Plus bas, alors que la corde fixe prend fin au bas de la paroi, je continue directement dans le pierrier, mais je trouve des veines de cailloux suffisamment petits pour pouvoir descendre facilement plus ou moins face à la pente. Plus haut, c’était de trop grosses pierres pour pouvoir tenter ce genre de descente. En bas, je retrouve un sentier marqué par des cairns dans le bien nommé « il Valonasso ».

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En approche du col de la Forcellina

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Itinéraire de descente, de l'autre côté de la Forcellina

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Rochers à gauche en descendant de la Forcellina

Alors que je m’inquiète de ne pas trouver la moindre trace d’eau et que je scrute les alentours, je vois, au moment où je fais une traversée pour prendre pied dans un autre vallon, des gens à côté d’un bachat 50 mètres sous moi. Ouf ! Je respire et descend tant bien que mal dans une pente raide en escaliers pour faire le plein à ce bachat. Il est alimenté par une source, la sorgente del Baclasse.

Puis c’est la remontée au Passo di Cavalla. Je chemine ensuite sur le bord d’un vallon qui me mène au col d’Enchiausa. Je passe au-dessus de quelques lacs aux eaux stagnantes très vertes, peu alimentés en eau fraîche. Ça ne m’incite pas à faire le détour.

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Vue du passo di Cavalla

Je bois peu, économise mon eau, ne sachant pas si je vais trouver une eau acceptable pour bivouaquer. Je repère plus loin, dans des pentes sur le côté du col de l’Enchiausa, des névés où je vais pouvoir peut-être trouver un filet d’eau de fonte. Il y a aussi la possibilité de puiser de l’eau dans le grand lac d’Apzoi, eau qu’il va falloir traiter ou faire bouillir.

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Monte Oronaye (ou Tête de Moïse)

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AutoVallonasso (2885m), col de l'Enchiausa (2740m), Tête de Moïse (3100m)

Un petit lac attire cependant mon attention. C’est le lago di Munie. De loin, je vois une eau aux reflets argentés. Je descends et m’approche. Effectivement, l’eau est claire, très claire même. Sur le côté du lac, un petit panneau sur un piquet. Je fais le tour pour le lire : « Sorgente » ! Je cherche autour et vois un petit tuyau d’où sort la belle et bonne eau fraîche d’une source qui alimente ce lac.

J’installe sans tarder mon bivouac sur un beau gazon plat. Il y a quand même du vent qui vient du côté du lac. Pour m’en protéger, je dois monter l’abri dos au lac. Le soir, des chamois viennent boire. Ils se tiennent à distance de l’autre côté du lac.

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Bivouac au bord du lago Munie

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Chamois venant s'abreuver le soir de l'autre côté du lac

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#44 23-11-2017 19:32:43

enrico
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Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J26 – Vendredi 28/07 – Du Val Maira au Val Stura
Lago di Munie, colle d’Enchiausa (2740m), petit lac à 1800m (point bas), colle Oserot (2640m), Bersezio (1624m)
D+ 1205, D- 1955m

Le parcours


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Le lago di Munie le matin

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Les couleurs changent vite avec le soleil qui monte

Dans la lumière du matin, les rochers découpés du Monte Oronaye (Tête de Moise en France) se découpent sous un ciel éclatant. Mais il y a du vent. La montée au Colle d’Enchiausa est assez raide, sur un sentier qui chemine dans un pierrier.

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Tout est encore à l'ombre à part la Tête de Moïse qui s'éclaire

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Pleine cadre sur la Tête de Moïse

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Détails des rochers au soleil

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Le colle d'Enchiausa

De l’autre côté du col, la descente se passe aussi dans un pierrier du même style qu'à la montée. Sur les bords du vallon de descente, des falaises de rochers très lisses me font penser que les éventuelles voies d’escalade ne doivent pas être à la portée de n’importe quel grimpeur passant par là.

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De l'autre côté du col, le vallone Enchiausa bordé par de belles falaises

Tout en bas de la descente, une piste dessert une exploitation agricole où s’alignent à 2000m d’altitude des rangées cultivées, loin de toute pollution.

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Au plus bas avant de remonter, une exploitation agricole, les Grangie Gorra

Je remonte ensuite, d’abord sur une piste, puis sur un sentier, au Colle Oserot, qui s’insère étroitement entre le Monte Oserot et Roccia Brancia.

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Le colle Oserot

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Détail paroi Rocca Brancia, depuis le colle Oserot

Puis c’est une longue ancienne piste militaire, qui va sur la même courbe de niveau, en surplomb du lac d’Oserot, jusqu’à la Bassa Terra Rossa, avant de redescendre sur Berzecio.

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Grand vallon de l'autre côté du colle Oserot, avec l'ancien chemin militaire à emprunter sur la droite

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Dans ce vallon, le lago Oserot sous le passo Bernoir

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Bersezio en vue depuis la Bassa Terra Rossa

Je traîne un peu dans le village, dont la partie ancienne ne manque pas de charme. Il y a de nombreuses fontaines d’eau. Pour se ravitailler, il y a une supérette bien achalandée à la sortie vers le col de Larche. Mais avant d’y aller, je fais un rapide crochet par la pâtisserie salon de thé située à proximité, où je mange une glace, qui ne me laisse pas un souvenir impérissable.

Pour bivouaquer, c’est un peu compliqué dans ce village. A moins que, finalement, je cherchais une fois de plus à dormir dans du dur. Bref, à côté de la supérette, je trouve un « campeggio » de caravanes privées avec des annexes en bois pour chacune d’elles. Toutes les caravanes en question sont des vieux modèles et l’ensemble de ce campeggio semble s’être arrêté de toute évolution il y a 30 ans, sauf le bloc sanitaire qui est propre et moderne. La gérance est assurée par un couple de personnes âgées. Le gérant m’autorise à planter mon abri, mais le sol est en cailloux tellement compactés que c’est impossible. Finalement, il me loue pour 10€, le même prix qu’il m’aurait demandé pour mon abri, sa caravane qu’ils n’occupe plus avec sa femme. Sympa.

Pour couronner le tout, je m’offre un un bon restaurant italien qui jouxte cet endroit bizarre.

Dernière modification par enrico (15-12-2017 22:55:03)


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#45 24-11-2017 00:01:50

enrico
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Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J27 – samedi 29/07 – A saute-mouton de cols en cols
De Besezio au refuge Migliorero, par les cols di Stau (2500m), Sotto di Scolettas (2223), di Rostagno (2536m)
Arrêt 1h 30 au refuge Zanotti, avant celui de Migliorero, à cause des orages
Erreur au départ ~ 80m D+
D+ 2010m, D- 1575m

Le parcours

Je trouve le départ d’un chemin en balcon pour rejoindre le bas du Vallone Forneri. Mais je monte trop tôt dans une première vallée qui n’est pas la bonne, et où je fais dans les 80 mètres de dénivelé. Je coupe en redescendant sur cet itinéraire marqué Lou Viage, qui est une piste assez longue qui remonte le bas du Vallone Forneri.

Au bout de cette piste, je trouve le sentier qui monte dans une pente assez raide jusqu’à l’étage supérieur de ce Vallone. Là, je trouve des indications de sentier qui m’indiquent la bonne direction à prendre pour aller au Colle di Stau.

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Un vallon adjacent en montant au colle di Stau

Je suis maintenant sur la Via Alpina / GTA, et je tombe sur une petite famille allemande, un couple et un jeune ado, qui font une semaine de rando en allant de refuge en refuge. Ils marchent bien mais s’arrêtent assez souvent. La femme porte un ballon gonflé dans la poche à l’arrière de son sac à dos.

Du colle di Stau où il y a beaucoup de vent, je descends vers un alpage, le Gias di Stau où je trouve un couple d’italien très bruyant, parlant très fort. La femme me demande si le col est encore loin.

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Le colle di Stau

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De l'autre côté du colle di Stau, la descente sur le vallone di Pontebernardo

Juste avant que je n’arrive près d’eux, il y avait là aussi 4 français, deux jeunes couples, qui avaient bivouaqué à cet alpage, car il y a là une source alimentant un bachat. Ils sont partis juste avant que je n’arrive, je les voyais depuis le chemin par lequel je descendais. Je les retrouve plus bas en train de pique-niquer.

Du coup, on commence à discuter et je pique-nique avec eux. Je mange même une pomme que l’une des randonneuses avait posé après avoir croqué une seule fois dedans. Délicieux.

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Un aigle et sa proie (un serpent ?)

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Autre vue de l'aigle

Je repars devant eux mais un peu plus bas dans la descente, je m’arrête dans un virage de la piste près de deux randonneurs locaux, habillés en tenues de chasseur. L’un d’eux a un problème de contracture musculaire à l’une de ses cuisses. En fait, c’est arrivé alors qu’ils étaient en train de redescendre après être montés pour jumeler un aigle que j’avais vu aussi et même pris en photo.

Le blessé est assis, l’autre est allé lui chercher dans le torrent à côté de l’eau froide avec sa poche à eau et il lui applique pour essayer de calmer la douleur.

Du coup, je sors ma pommade miracle Powersill et je lui fais un massage. Ensuite, l’autre me fait couler de l’eau de sa gourde pour que je me lave les mains.

Plus bas, alors que je traverse une zone hors sentier faite de plusieurs lits de torrent, asséchés ou non, pour rejoindre le départ du sentier qui remonte vers le passo Sotto di Scoletas, je vois de loin qu’ils ont pu reprendre leur descente.

Du coup, les 4 français, qui étaient passés devant pendant mon opération de massage, mais qui n’ont pas coupé en bas au plus court pour rejoindre le sentier qui remonte de l’autre côté, sont repassés derrière moi.

Dans l’après-midi, le temps tourne franchement à l’orage. C’est tout noir et ça se met à tonner lorsque j’arrive en approche du refuge Zanotti. Je décide donc de m’y arrêter. C’est un petit refuge. Le gardien n’est pas là, on me dit qu’il fait des aller-retour avec sa voiture garée sur la piste en aval du refuge pour remonter des victuailles et du vin, en prévision d’une fête qui va avoir lieu le lendemain.

Je l’attends et discute avec un italien très sympa de Gènes. Il y a aussi déjà là d’autres italiens, hommes et femmes, plutôt du genre bedonnant au verbe haut, qui ont fait la montée pour venir à cette fête.

Le gardien arrive, lourdement chargé. Il me dit que le refuge est plein mais qu’il va me trouver une place. Il a l’air assez fatigué par ses portages, il est torse nu sur la terrasse du refuge et pour se retaper, il se met à fumer un cigare en buvant un fond de verre de whisky pur.

Les 4 français arrivent, et malgré l’orage qui menace, décident de poursuivre vers le refuge Migliorero, où ils ont fait une réservation seulement pour dîner vu qu’ils dorment dans leurs tentes.

Moi, je ne bouge pas d’ici. Je discute un peu avec le gardien qui parle français. Il finit par me dire que si l’orage ne s’est pas déclenché à cette heure – il est peut-être bien déjà 17 heures – c’est qu’il ne se déclenchera pas.

Du coup, je décide de repartir malgré le ciel qui reste bien noir. Je me suis arrêté 1h30 ici mais je n’ai pas trop envie de faire étape dans ce refuge.

Je marche assez vite et atteint le col de Rostagno en 50 minutes, Je rattrape les 4  français dans le début de la descente, où je me propulse en une demi-heure au refuge Migliorero. Finalement, c’était assez court. Mais j’ai eu le temps de m’installer et de prendre ma douche avant que les 4 français n’arrivent.

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Passo di Rostagno

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Arrivée au refuge Migliorero, que j'ai failli ne pas voir dans le brouillard

Ce refuge est très grand, tenu de main de maître par un gardien très efficace et accueillant. Je dîne le soir à côté d’une sympathique petite famille de Gap, les parents et deux jeunes enfants qui font de la randonnée itinérante de refuge en refuge entre la France et l’Italie.

En face de moi, un randonneur de la région parisienne qui a un chalet à Auron. Un peu diminué par quelque problème de santé, c’est un vrai passionné de cette région qu’il connaît comme sa poche, l’ayant arpenté dans tous les sens du temps où il était en forme. Au cours du dîner, avant et après, on passe du temps à regarder des itinéraires sur sa carte IGN.

Quant aux deux jeunes couples de randonneurs, les 4 français, ce n’est que beaucoup plus tard dans la soirée qu’ils peuvent rejoindre leurs deux tentes, à la faveur d’une petite accalmie dans le déluge qui s’est abattu toute la soirée et une bonne partie de la nuit. Ils vont me raconter ça le lendemain matin, lorsque je démarrerai ma journée.

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#46 24-11-2017 00:33:48

enrico
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Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J28 – Dimanche 30/07 – Mini étape
Petite étape saut de puce à cause d’un parcours d’arête à faire sous menace orageuse
Refuge Migliorero, Pas de la Marmotta (2890m), refuge Dahu de Sahamui, à San Benolfo (1702m)
D+ 820m, D- 1220m

Départ sous le soleil, ce qui me permet, après mon arrivée la veille dans le brouillard, de découvrir le site de ce refuge Migliorero, qui surplombe un lac aux contours très découpés.

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Lago Ischiator inferiore, juste au-dessous du refuge Migliorero

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Vallon de montée vers le Corborant

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Le refuge Migliorero et le lac Ischiator inferiore

Dans la montée vers le passo Marmotta, je passe successivement à côté de chacun des deux lacs Ischiator, le 'mezzo' et le "superiore'. Après le lac Ischiator di Mezzo, la montée s’effectue dans un clapier de rochers où, dans un premier temps, j’ai du mal à trouver le bon itinéraire. Je suis doublé par un jeune couple équipé léger à la journée, en short, débardeur, baskets et petit sac.

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Lago Ischiator di Mezzo

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Lago Ischiator Superiore

Plus haut, dans la dernière montée avant le col, des câbles permettent de se tirer dessus pour passer le dernier étranglement encombré de rochers instables. Du col, ça monte au Corborant, dans des pentes de bons rochers faciles.

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Accès au passo Marmotta

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Au passo Marmotta

Mon objectif à ce moment-là n’est pas le Corborant, et je redescends donc de l’autre côté, notamment en passant dans ce passage équipé, qui rentre à l’intérieur des rochers dans une sorte de puits, et ressort au-dessous d’un ressaut vertical d’une quinzaine de mètres.

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Passage dans un puits à l'intérieur de la roche

Beaucoup de monde monte de l’autre côté du col, où l’itinéraire est plus long mais plus facile.

Je descends aux lacs Lausfer, alors que le temps commence à se boucher sérieusement. Comme la suite de la journée est un parcours proche des arêtes sommitales, je me dis que si c’est pour ne rien voir et passer mon temps à courir avec l’orage, je ferais mieux d’écourter cette étape et de repartir du bon pied le lendemain. Je vois au-dessous de moi le village de San Bernolfo. Certes, il est très bas, mais selon la carte, il y a là un refuge.

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Lago Lausfer Superiore

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Lago Lausfer Inferiore

Je descends donc un peu dépité et en regardant derrière moi l’évolution de la perturbation. Si j’avais su avant que j’allais faire ça, j’aurai pu prendre le temps d’aller faire un tour au sommet du Corborant. Tantôt ça se bouche, tantôt ça s’éclaircit. Une heure et demi pour descendre. Le soir, il y aura une bonne radée au soi-disant « refuge » au nom exotique de « Dahu de Sabarnui ».

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Vallone et village de San Bernolfo

C’est en fait une auberge de montagne qui propose un hébergement en dortoir. Comme c’est dimanche, il y a peut-être bien 200 voitures garées dans le village, et l’auberge est pleine à craquer, jusqu’à ce que la pluie s’en mêle.

Je ronge mon frein dans cet endroit.

Plus tard, cinq français débarquent, ils sont en train de faire un tour d’une semaine dans le coin. C’est une sortie organisée par le comité d’entreprise de Thales. Il y a là entre autre un ingénieur en optique, un docteur en physique quantique et un ingénieur IBM. Tout ce que je peux dire, c’est qu’on a passé un bon moment et qu’ils ne boivent pas que de l’eau.

Repas savoureux dans cette auberge, mais ils ne voulaient pas servir le petit-déjeuner avant 8h. J’ai dû parlementer pour en obtenir un à 7 heures.

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#47 24-11-2017 01:18:45

enrico
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Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J29 – Lundi 31/07 – De col en col
De San Benolfo, à sous la cime de Collalunga, puis les colle di Seccia, di Guercia, dell'Autaret, di Bue, di Saboulé, et bivouac au 2e lac de Lausfer (avant le colle del Lausfer)
D+ 1710m, D- 1045m

Le parcours

La journée commence par une heure et demi pour rejoindre l’endroit où j’ai quitté mon itinéraire la veille. C’est long, cette remontée de San Bernolfo !

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Qui va là !

Puis c’est le début de cette rando près des arêtes, de col en col. En commençant par passer tout près sous la Cima de Collalunga.

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Sentier dans un pierrier pour monter sous la Cima di Collalunga

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Mais c'est un ancien sentier militaire, donc plutôt bien terrassé

Puis c’est le colle di Seccia, assez facile, au dessus du lac éponyme.

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Lago di Seccia, et au second plan, la Testa dell'Autaret

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Lago di Seccia

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Laghi de Colle Longue

Pour monter au colle di Guercia, le chemin est bien marqué, mais il évolue dans une pente très raide. Jusqu’à la fin, on ne sait pas où on va sortir.

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En face, sentier pour le colle di Guercia

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Zoom sur une maison forestière. Tout proche à 150 mètres à gauche dans la forêt, mais non visible sur la photo, le refuge De Alexandris-Foches (ou refuge du Laus) : un bon échappatoire, et c'est un refuge gardé

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Avant le colle di Guercia

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Testa dell'Autaret

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Arrivée au colle di Guercia

Après la descente vers le passo dell'Autaret, la remontée au passo di Bue est assez efficace. Puis, c'est assez long pour rejoindre le col de Saboulé, après avoir longé et contourné les Roche di Saboulé par un ancien chemin militaire pas toujours en bon état.

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Vue sur le passo dell'Autaret

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Arrivée au passo di Bue

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Roche di Saboulé

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Col de Saboulé

Heureusement, tous ces cols ne demandent pas à faire beaucoup de dénivelé. De l’ordre de 300 mètres pour chacun d’entre eux.

J’arrive enfin aux lacs de Lausfer. Ils ne s’embêtent pas par ici pour le nom des lacs, ils les appellent tous « Lausfer ». Je crois que ça veut dire « lac sauvage » en occitan.

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Lac Lausfer (France)

Il y a là un groupe d’une cinquantaine de jeunes italiens en colonie de vacances au bord du premier grand lac. Je vais au deuxième mais il y a beaucoup de vent. Je tourne dans tous les sens pour trouver un emplacement, parce que d’une part, le lac n’est pas très propre, et d’autre part il y a du vent, partout, en bourrasque.

Finalement, je pose mon abri sur un replat devant les ruines d’une casemate militaire au-dessus du 2ième lac. Je prends de l’eau dans le lac mais je la fais bien bouillir. Le lendemain, c’est cette eau que je mettrai dans mes bouteilles, avec traitement micropur. Mais en final, je n’en boirai pas beaucoup avant de la jeter pour la remplacer par une bonne eau de source trouvée plus loin.

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Bivouac au-dessus du 2ième lac lausfer

Dernière modification par enrico (16-12-2017 16:50:46)


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#48 24-11-2017 02:25:59

enrico
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Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J30 – mardi 01/08 - Journée très diverse, sur la crête entre France et Italie
durée 11h
Du lac Lausfer, colle Lausfer, col Lombarde, passage en balcon au-dessus d’Isola 2000, Baisse de Druos, lac de Valscura inferiore, sous le ref Questa, vallon de Fremamorte, bivouac Guiglia
D+ 1425m, D- 1405m

Le parcours

Je commence la journée par un petit détour vers une vieille casemate où je tombe sur une harde d’une dizaine de bouquetins.

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Suis pas tout seul ce matin...

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... des petits et des grands

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C'est une grande famille harde

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Certain ventre plus rebondi que d'autre... hem !

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Calinade

Puis je passe au col de Lausfer avant de devoir descendre par une piste ou par des chemins qui la coupent jusqu’au lac du colle di Sant Anna. De là, ça remonte d’abord dans un terrain sauvage où je vois deux chamois qui traversent devant moi.

Après être passé à côté de la Cima Moravacciera, je poursuis sur un itinéraire un peu vallonné. Je discute avec un italien contemplatif posté avec ses jumelles dans l’attente de voir des animaux sauvages. Je lui dis que je viens de voir 2 chamois.

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La longue crête qui mène au col de la Lombarde

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Rocca San Giovvanni, monte delle Valletta

Plus loin, un peu avant le col de la Lombarde, je trouve une belle source bien canalisée sur le bord de ce qui n’est plus un sentier mais une piste, sous une grande casemate. C’est à cinq minutes avant le col de la Lombarde.

Au col de la Lombarde, il y a beaucoup de vent et de voitures et de monde.

Initialement, je voulais passer par la Cima della Lombarda, puis par le passo del Lupo, les lacs de Terre Rouge et la Baisse de Druos. Mais quand j’ai vu cette montée schisteuse à la Lombarde, je me suis dit que ça ne valait pas le coup, et j’ai pris l’itinéraire qui passe en balcon au-dessus d’Isola. Je pense que c’était une erreur parce que, passés les 450 mètres pour gravir ce sommet sur ces pentes schisteuses, l’autre côté – je l’ai vu plus tard - est apparemment en bon sentier dans des terrains herbeux ou en beaux rochers. C’est sans doute l’itinéraire à suivre.

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Après le col de la Lombarde, sentier supérieur d'Isola

Mais après les quelques passages pas très esthétiques au-dessus d’Isola, y compris sur des pistes de ski nivelées au bulldozer, toute la montée par les lacs de Terre Rouge jusqu’à la Baisse de Druos est très intéressante.

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J'aurai même eu droit à ça ! Grrr !

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Mais ça ne dure pas - Lac de Terre Rouge

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En approche de la Baissa di Druos

De ce col, la descente vers les lacs de Valscura se fait sur des bons sentiers, et même plutôt sur des anciennes pistes militaires agencées avec des pavages réalisés avec des blocs pris sur place. Un véritable travail de romain à l’époque !

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De l'autre côté de la Baissa di Druos, les laghi di Valscura

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Ancienne route pavée militaire

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Autre portion de l'ancienne route pavée militaire

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Lago di Valscura

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Lago di Valscura, vu de l'autre côté

Après le dernier grand lac de Valscura, je remonte par une piste en direction du refuge Questa.

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Toujours sur des anciennes routes militaires, sur fond de sommets non identifiés

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De la belle ouvrage

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Et ça tient à l'épreuve des ans, même au-dessus du vide

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Lac

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Lago di Claus

Mais je ne vais pas au refuge Questa et continue en descendant vers la Valle Morta, une vallée très minérale, sans aucune trace d’eau. Je la remonte jusqu’au Coletto di Valasco, d’où je redescends sur le premier lac de Fremamorte.

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Valle morta

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Dans la valle morta

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Du colletto di Valasco, lago di Fremamorte inferiore

Je trouve là un couple de randonneurs un peu à la peine, car lui a sa semelle de chaussure qui s’est décollée et qui tient par du scotch d’emballage. Ils cherchent un coin pour bivouaquer seuls. Il y a du vent, et rien de plat près du premier lac.

Je monte au deuxième, et je vois là au bout du lac un coin correct. J’attends de les voir arriver et leur montre l’emplacement de loin, avec la pointe de mon bâton. Puis je monte encore et vais au bivouac Guiglia où je me pose.

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Bivouac Guiglia,où je fais étape

C’est un bivouac classique en tôle avec neuf couchages (trois par côté hors porte d’entrée), chacun d’entre eux avec ses couvertures. Je trouve même parmi différents vieux trucs un paquet de spaghettis de 500 gr tout neuf dont la moitié fera mon dîner.

Je dors la porte grande ouverte, bloquée par un gros bloc, mais le vent réussira quand même à le déplacer pendant la nuit et je devrai me relever pour consolider l’installation avec un deuxième gros bloc de pierre. Nuit pas très reposante avec le bruit du vent.

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#49 24-11-2017 15:33:21

enrico
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Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J31 – mercredi 02/08 – Dans le Parco Naturale Alpi Maritimi
Du bivouac Guiglia (2420m), descente sur le ref Regina Elena (1834m), remontée au refuge Remondino (2485m), puis colle di Brocan (2892m), descente au refuge Genova-figari (2010m), remontée au col de Fenestrelle (2463m), descente à San Giacomo (1213m)
Durée 12h23
D+ 1565m D- 2700m

Le parcours


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Au petit matin, passage au lago superiore di Fremamorta avant la première descente de la journée

Je descends sur un bon chemin dans la Valle della Valetta. Il fait beau et j’ai laissé le vent en haut. En bas, je trouve un sentier qui coupe le haut du vallon pour rejoindre celui qui remonte en face, vers le refuge de Remondino.

En attendant, je m’arrête pour boire un café au petit refuge Regina Elena. Ce refuge privé est au fond de la Valle della Valetta. Il est tenu par un couple un peu âgé, très gentil. Là-aussi, il est impossible de payer son jus. Cependant une boîte permet de glisser une ou deux pièces. Je ne reste pas longtemps et remet mon sac sur le dos pour monter au Remondino.

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Le refuge Regina Elena après m'y être arrêté boire un café

Le chemin est extra, très bien entretenu tout le long des 700 mètres de dénivelé jusqu’au refuge. Il y a des marches en bois, en pierre, des marquages en grand nombre. C’est presque trop, on sent l’effort des gens du refuge pour faciliter l’accès à leur établissement.

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En montant au refuge Remondino : La Madre di Dio, et la Cima de Cessole

Je m’arrête donc à ce grand refuge, agrémenté d’une large terrasse d’où la vue est superbe vers les sommets. Il n’y a pas trop de monde à cette heure de la matinée. Du coup, j’en profite pour me commander une assiette de pâtes à la bolognaise que je déguste à l’intérieur, à l’abri du soleil.

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Arrivée au refuge Remondino

Puis je me remets en route pour monter au Colle di Brocan. Là, c’est une autre histoire. Dès le départ, je me retrouve à cheminer dans des pentes de blocs rocheux sans interruption. Plus haut, le marquage se sépare en deux pour les deux destinations que sont le lago della Nasta d’un côté et le colle di Brocan vers lequel je me dirige de l’autre, toujours à sauter d’un caillou sur l’autre jusqu’au sommet.

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En chemin vers le colle di Brocan

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Le colle di Brocan en vue

Dans la descente de l’autre côté, c’est presque pire, car se rajoute à la descente dans les rochers les passages en pentes gravillonneuses qu’il me faut négocier au mieux pour ne pas glisser.

Je m’arrête de temps en temps pour regarder vers le bas le site remarquable des lacs Brocan et Chiotas, avec le refuge Genova-Figari entre les deux. Je passe un groupe de jeunes italiens et leur encadrant. Certains de ces jeunes n’ont pas du tout l’expérience de ce genre de terrain, ils en bavent et le groupe ne peut qu’avancer très lentement.

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Du colle di Brocan : le lago Brocan, et au-dessus, la Punta Camberline et la Punta Fenestrelle

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Lago Brocan et lago del Chiotas, avec le refuge Genova-Figari entre les deux

Puis plus bas, c’est une petite famille avec des jeunes enfants que je croise. Je me demande vraiment sur le coup ce qu’ils peuvent bien faire dans ce terrain hostile. Parents inconscients.

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Chamois

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Un peu plus de zoom

Lorsque j’arrive en bas, et que je longe le lago di Brocan, je me rends compte que ce site n’a de l’intérêt que quand on le regarde à distance. En effet, de près, le lac de Brocan est très bas car il se déverse dans le lago del Chiotas qui est un lac de barrage. Du coup, il y a une zone de rochers terreux et vaseux qui l’entoure. Le refuge situé entre les deux lacs est accessible par une piste. Il y a une voiture garée devant, peut-être celle du gardien. C’était mieux vu d’en haut.
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En approche du site des laghi Brocan et del Chiotas

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Lago Brocan

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Vers le refuge Genova-Figari

Le deuxième lac, le lago del Chiotas, lui aussi très bas, est un peu mieux du fait de sa plus grande taille et de sa plus grande ampleur.

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Lago del Chiotas

Je ne m’attarde pas trop et commence à monter en direction du colle di Fenestrelle.

En longeant le lago del Chiotas avant d’accéder au départ de ce sentier, je passe devant des gardes du Parc (Parco Naturale Alpi Maritimi). Je sens que l’un d’entre eux m’observe avec insistance lorsque je passe à sa hauteur. Je dirais qu’après être passé devant lui, je sens presque son regard dans mon dos. Il est vrai que je commence à ne plus ressembler à rien, mais en montagne, normalement, ça ne se voit pas trop. A moins qu’il ait juste remarqué mon équipement de voyageur au long cours, lequel, avec mon pantalon long, mon tee-shirt manches longues, mon chapeau à bords et mon bandana sous le chapeau pour me protéger la nuque, mon sac à dos de 40 litres avec des bouteilles en plastique de chaque côté, et mon visage barbu aux traits tirés, dénote avec celui des italiens qui, au même moment, se baladent en short et en débardeur et se font bronzer au bord des lacs.

Le sentier monte dans un vallon à gauche de celui qui mène au col convoité de Fenestrelle, parce que ce dernier vallon, très rocheux, n’est pas directement accessible par un sentier. Plus haut, il coupe vers la droite dans une zone rocheuse pour rejoindre au dernier moment le colle di Fenestrelle.

Il y a des bouquetins dans la montée, et l’un d’entre eux fait pâle figure, il semble malade ou très vieux.

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Un beau specimen

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Belles cornes

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Coucou j't'ai vu, ton sabot ferme sur le rocher

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Lago del Chiotas, en montant au colle di Fenestrelle

Au col, il y a un petit lac d’eau stagnante et un jeune et fringant bouquetin qui m’attend, et part lorsque j’arrive.

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Colle di Fenestrelle

Je commence à redescendre de l’autre côté. Là, je sais que je peux aller facilement jusqu’au refuge Soria Elena, ou bivouaquer dans ce coin. D’un autre côté, après ce refuge, je veux continuer à descendre dans cette longue vallée jusqu’à San Giacomo à 1213m d’altitude, pour remonter ensuite de l’autre côté, dans le Vallone di Monte Colombo. Pourquoi cette descente et pourquoi ne pas traverser par le haut ? Tout simplement parce que sur ma carte au 1:50000 ième, ce passage par le haut n’est pas indiqué et que je n’ai pas fait plus de recherche que ça. En fait, je découvrirai beaucoup plus tard que cet itinéraire par le haut existe bel et bien et je me mords les doigts de ne pas l’avoir cherché avant de partir. Il suffit d'aller sur le site du refuge Soria Ellena pour le découvrir. Et manque de pot, je ne me suis même pas arrêté à ce refuge.

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Monte Gelàs

En ce moment, les journées sont très chaudes. La météo italienne dit que l’on est « sous la langue de Lucifer ». Il fait plus de 40°C dans les plaines italiennes. Mais là, à 17h30, il n’y a plus de soleil sur le versant où je marche. De plus, la descente est agréable sur un sentier où l’on a pas à retenir ses pas. Il n’y a donc pas de raison que je ne profite pas de cette fin de journée pour descendre à l’ombre jusqu’à ce village. C’est donc ce que je fais même si au total, je sais que ça va faire une grosse journée

En descendant, je rigole en m’imaginant qu’il y aurait un salon de massage à l’arrivée dans le village.

Je passe à côté de deux alpages avec des troupeaux dans les champs autour. Je passe aussi devant deux patous qui attendent je ne sais quoi au milieu du chemin. Comme ils ne sont pas en service, ils ne disent absolument rien à mon passage. Moi non plus d’ailleurs.

A l’entrée du village, je vois une auberge sur la droite et un refuge sur la gauche de la route. Je vais voir un peu plus bas le camping, qui n’est qu’un espace naturel aménagé pour planter sa tente, à côté d’un petit torrent. C’est blindé de monde. Je remonte et essaye de rentrer dans le refuge, mais n’y parviens pas. D’un petit groupe en train de boire un coup à une table sur le côté, un gars vient me voir pour me dire qu’il faut aller à l’auberge.

Je rentre donc dans l’auberge et m’adresse à un type derrière le bar, lui demande si je peux dormir et manger. Il me dit qu’il faut voir avec la patronne, et il l’appelle. En attendant, il me sert un verre d’eau. Petit geste tout naturel, qui ne coûte rien, mais que j’apprécie. Quand l’accueil est bon, le reste suit.

Il y a de la place, on me montre ma chambre, avec une salle de bain attenante. Grand confort ! Il est 19h, j’ai une demi-heure pour prendre une douche et remplir le formulaire, avant le repas servi à 19h30 précises. Tout baigne.

Au restaurant, il y a un autre randonneur à la table à côté. En fait, il est de Mandelieu et passe ses vacances dans cette auberge. On commence à discuter mais je suis un peu dans le coltard, j’ai du mal à me concentrer, c’était une grosse journée. En plus, ce gars parle dans sa barbe et j’ai du mal à comprendre ce qu’il me dit. Il me parle d’itinéraires que j’aurai dû prendre mais qui n’existent pas dans la réalité - je le sais et je l’ai vérifié depuis. Et d’autres choses encore, comme par exemple que je vais devoir faire un bivouac pour aller au col de Tende, que ce n’est pas possible de le faire dans une journée. Ça, je me dis, on verra bien. Du coup, comme je suis déjà bien entamé, je laisse tomber et lui aussi.

Je demande un petit-déjeuner à 6h30 parce que je veux monter en altitude avant les grosses chaleurs. On me propose de mettre un plateau petit-déjeuner avec une petite machine pour faire du thé et du café dans une salle au rez de chaussée du refuge. La patronne encaisse ma demi-pension.

En fait, c’est une française très sympa. Elle est d’Antibes. On discute un peu. Elle a repris cet établissement il y a 30 ans, me dit-elle. Je la regarde et lui réponds qu’il y a 30 ans, elle n’était certainement pas née. Elle rigole et me dit qu’elle a cinquante ans. Je lui dis qu’elle ne les fait pas du tout.  Bon, allez, soyons sérieux, il faut que j’y aille. Je dis bonsoir à cette jeune femme au regard pétillant, monte faire ma lessive et au dodo.

Dernière modification par enrico (04-01-2022 16:25:33)


"De côtes en vallons, de plaines en plateaux, marcher en silence, le regard en paix"

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#50 24-11-2017 16:13:45

enrico
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Inscription : 13-08-2013

Re : [Récit + liste] Léman -> Méditerranée, sur le versant est des Alpes

J32 – jeudi 03/08 – Vers le col de Tende
de 6h15 à 17h30 (11h15)
San Giacomo (1213m) – col de Viei de Bouc (2620m), col ouest de Sabbione (2328m), point bas (au-dessus Baisse de Peyrefique), fort de Gaure (2253m), Col de Tende (1871m), chalet de la Marmotte (1784m)
En stop = -384m jusqu’à 1400m (non comptés)
D+ 1835m, D- 1261m

Le parcours

Je remonte le Vallone di Monte Colombo. Cette vallée est très longue et très sauvage. Elle est bien délimitée par des montagnes abruptes sur ces deux côtés et au fond par des sommets, du Mont Gelas au Mont Clapier.

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Le Vallone di Monte Colombo

Je suis doublé par 3 italiens, deux hommes et une femme, qui vont au refuge Pagari, sous le Clapier. Moi, je bifurque à gauche pour monter au Colle del Vei del Bouc à 2620 mètres.

En partant assez tôt, je suis longtemps à l’ombre, ce qui est appréciable par ces journées de forte chaleur. Le chemin est très bon jusqu’au lago del Vei del Bouc.

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En montant sur le versant à l'ombre du Vallone di Monte Colombo

Avant d’y arriver, je fais une rencontre dont je me serai bien passé. Tout à coup, une vipère traverse le chemin à 1,50 mètre devant moi. Une belle vipère Aspic Atra qui déroule ses anneaux à toute vitesse pour traverser le chemin devant moi. Elle doit faire environ 1 mètre dépliée, peut-être 2 cm de diamètre. Mais c’est surtout son extrême vivacité qui m’impressionne. Une belle bête adulte mais ça me fout une sacrée trouille. Ça a duré à peine deux secondes et demi, je suis exactement à 1700 mètres d’altitude, seul sur ce chemin, et il n’y a sans doute pas de réseau pour appeler les secours. Je jure, crie en moi-même, et continue à avancer en tapant avec mes bâtons sur tous les cailloux. Il faudra que j’arrive près du lago del Vei del Bouc, là où je traverse un troupeau de vache, pour que ma pression retombe.

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Lago del Vei del Bouc

C’est à ce moment-là, vers 2000 mètres d’altitude, que je sors de l’ombre matinale pour entrer sous la langue de Lucifer. Mais à cette altitude, c’est un peu plus supportable. Avant d’arriver au Colle del Vei del Bouc, je dérange une harde de chamois qui stationnait sur le chemin. Ils déguerpissent alors que je suis à environ 300 mètres d’eux.

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Vue d'ensemble du lago del Vei del Bouc

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Cima del Tor

Par contre, des bouquetins sont là aussi, qui m’attendent et ne bougent que lorsque je suis à 30 mètres d’eux environ. J’ai comme l’impression qu’ils adorent se faire prendre en photo, mais là, je le dis à haute voix à ce beau mal avec ces cornes énormes : « Bouge-toi, tu es en plein contre-jour ». Il se bouge quand j’arrive à sa hauteur, mais du coup il est trop loin et de dos. J’en prendrai d’autres en photo.

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Séance de yoga : salutation au soleil !

Le chemin est effondré sur de courtes sections avant le col. Je fais attention. Arrivé au col, je me sens un peu fourbu. La vallée du Monte Colombo a été longue et la montée au col également. J’ai déjà 1400 mètres au compteur.

De l’autre côté du Colle del Vei del Bouc, je vois au-dessous le col ouest du Sabbione, qui surplombe le lago della Vacca. Je descend le long d’une barre rocheuse avec sur ma droite en contre-bas le torrent qui alimente ce lago della Vacca.

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Colle ovest del Sabbione, au-dessus du lago della vacca

Du lac, je remonte 100 mètres pour arriver au Colle ouest del Sabbione. Là, je casse une croûte. La vue est très ouverte sur le haut du vallon de Casterino, espace très large et peu pentu. Je ne fais pas suffisamment attention et loupe la montée au Col est de Sabbione, où je voulais passer pour ensuite monter aux lacs de Peyrefique. Du coup, je me retrouve sur un chemin qui traverse à flanc jusqu’à un carrefour de sentier d’où on peut aller soit vers l’aval à la Baisse de Peyrefique, soit vers l’amont au Rocher de l’Abysse. C’est cette dernière direction que je prends. Je ne veux pas aller faire ce sommet, mais bifurquer vers le col de Tende.

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De ce col non nommé, il faut remonter vers la Rocca dell'Abisso

Depuis le Colle del Vei del Bouc, je me demande où je vais bien pouvoir trouver de l’eau. Je n’ai rien vu depuis mon départ de San Benolfo. En passant sous le Rocher de l’Abysse, je vois un gros tuyau de captage d’eau. Comme il y a une barre rocheuse au-dessus, je me dis qu’il vient d’une source au-dessous de cette barre. Du coup, je remonte le tuyau jusqu’à ce que je puisse voir que non, il n’y a pas de source et que le tuyau remonte la barre rocheuse. Le captage doit être fait dans un des lacs de Peyrefique.

Je redescends et continue sur le chemin, croise une petite famille, d’abord le père avec ses deux enfants, puis madame avec laquelle je taille une petite bavette, histoire de savoir si je suis bien sur le bon itinéraire. C’est de la cartographie appliquée ! Elle me demande si je vais au fort de Jaure, d’où ils viennent. Me voilà rassuré. Je continue et arrive aux ruines de ce fortin.

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Fort de Jaure

De là, je descend d’abord par une vieille route militaire, puis par un sentier qui passe à côté d’un petit lac. C’est juste après que je vois un couple arrêté à 20 mètres du chemin vers ce qui semble être un petit chantier recouvert par une protection en plastique transparent. Je me dis tout de suite que, si ces gens sont arrêtés là, c’est qu’il y a de l’eau.

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Sur le sentier après le Fort de Jaure, un petit torrent coule de quelque part dans ces rochers...

Je traverse vers eux et bingo, il y a un petit ruisseau d’eau bien claire et fraîche, qui descend directement d’une grande falaise rocheuse. Je ne sais pourquoi ce couple d’italiens m’a dit qu’elle n’était pas potable. Peut-être n’avaient-ils pas l’habitude ni l’expérience de l’eau en montagne. Par contre je n’ai pas compris ce qui motivait la bâche de protection transparente. Des fouilles, un chantier pour mettre un captage en dur ? Là n’était pas mon souci.

Je me suis bien abreuvé, et j’ai rempli mes deux bouteilles après avoir vidé l’eau chaude qui restait dans l’une d’entre elles, et que je ne buvais plus que par petites gorgées très espacées. Dans ces moments-là de disette hydrique, je m’octroie des gorgées d’eau comme des récompenses : une gorgée quand j’aurai fini cette montée, ou quand il sera telle heure...

Après cela, le parcours jusqu’au col de Tende est évident : je longe la crête, tantôt du côté italien, tantôt du côté français. Au col de Tende, tout est sec, il n’y a aucune possibilité de bivouac. Le sentier qui descend à Limonetto, à 1200 mètres d’altitude, ne m’inspire pas beaucoup.

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Fort Pernante

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Col de Tende

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Les lacets du col de Tende (que l'on trouve sur les cartes postales du coin)

Je file vers un établissement avec des drapeaux, à vue à environ 800 mètres du côté italien. Quand j’y arrive, je vois une fontaine d’eau sur le côté où je peux faire à nouveau le plein. Mais il y a aussi un vent de tous les diables. En fait, ce n’est qu’un restaurant, il n’y a pas de chambre.

Je décide de faire du stop pour descendre en direction de Limone et ne pas me taper les lacets de route à pieds. A peine je commence à lever le pouce qu’une voiture qui démarrait tout juste s’arrête. C’est un gars du coin avec sa femme et un petit chien. En passant à Limonetto 1400, je vois un hôtel, le Chalet 1400, et je leur dis que je vais essayer ça.

L’hôtel a une chambre disponible. Grand confort, bon repas, je me tape mes deux pintes de bière, une à l’apéro et une en mangeant. A noter que ça fait un certain temps que je me suis mis à la pinte de bière dans les établissements où je fais des haltes, m’asseyant sans aucun complexe sur mes engagements anciens de ne pas boire d’alcool en cours de mes voyages à pieds. Ces pintes me font du bien, et je ne ressens pas du tout les effets de l’alcool après les avoir bues.

La patronne de l’hôtel accepte de me faire un plateau petit-déjeuner pour me permettre de repartir tôt.

Dernière modification par enrico (16-12-2017 17:21:19)


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