[Récit + liste] Acherpééééééé (2020)

Joy Supertramp · 18-09-2020 15:29:01

Tout à fait, entre guerosso et flamisella ça passe très bien mais il faut repérer la vague sente qui monte. Nous avons eu du bol : la veille au soir en prenant de l'eau juste en face on a eu le bon angle de vue pour l'aperçevoir Sinon, pour la redescente après le col au dessus de Mariola, ça passe clairement bien jusqu'à rattraper le sentier habituel pour monter au refugi du mont roig. Mais bon, il faut toujours que je m'embarque dans des trucs à la 'hon dès que je suis avec quelqu'un alors ... En fait je randonne tellement souvent seule que je n'ose que rarement sortir de l'itinéraire prévu (et donc que j'ai donné à un ami, au cas où). Je me dis toujours que s'il m'arrive un truc personne ne viendra me chercher à 5 bornes de là où je dois être. Du coup dès que j'ai un acolyte avec moi j'ai la proposition facile

Eric le rouge · 18-09-2020 16:04:02

Merci pour ces retours à plusieurs mains, zyeux, jambes, goûts, etc.
Je crois que j'ai repéré une photo que Joy avait déjà partagé presque en direct
Cette distinction "dynamique" (ou "sportif") et "contemplatif" fonctionne bien (mais ce n'est pas une opposition : on peut aller viiiiite et regarder, faire des pauses panoramiques, goûter les environnements par les jambes ; à l'inverse, on peut aller lentement, mais longtemps, longtemps, longtemps, loin, loin, loin avec une performance endurante).
La randonnée (comme le trail ou autre) peut parfois permettre d'être seul-ensemble.

Joy Supertramp · 18-09-2020 16:22:11

Tout à fait ! Et moi, je fais les deux : je fais ma bonne journée de marche en marchant vite, en prenant très peu de pauses. Mais par contre, passé 17h j'ai du mal à continuer, pour moi, le plaisir se trouve aussi dans la lecture en fin d'après-midi, l'exploration du lieu de bivouac, les jeux avec ma chienne ... Bilan : je fais bien mes 9h de marche, mes dénivelés au delà des 2000 mètres, mais je profite de mon temps le soir pour me sentir, aussi, un peu en vacances. Là où d'autres préfèrent parcourir la même distance sur 12h ou bien s'arrêter à la même heure en ayant marché moins vite ... C'est ça qui est génial dans la rando : il y a autant de façons de l'apprécier que de randonneurs pour la pratiquer !

Balipit · 18-09-2020 21:41:26

Eric le rouge a écrit :

#584739Cette distinction "dynamique" (ou "sportif") et "contemplatif" fonctionne bien (mais ce n'est pas une opposition : on peut aller viiiiite et regarder, faire des pauses panoramiques, goûter les environnements par les jambes ; à l'inverse, on peut aller lentement, mais longtemps, longtemps, longtemps, loin, loin, loin avec une performance endurante).
La randonnée (comme le trail ou autre) peut parfois permettre d'être seul-ensemble.

Bonne synthèse , aucun antagonisme entre vitesse et appréciation du milieu naturel
Méme en entraînement trail , on alterne des phases actives avec des phases de récupérations qui permettent de profiter pleinement de l’environnement .

florencia · 18-09-2020 22:27:29

Hervé27 a écrit :

C’était la seule section où j’avais osé placer un itinéraire hors traces OpenTopo : grâce à vous, je sais maintenant que ça passe, mais aussi qu’on peut encore raccourcir un peu entre Guerrosso et Flamisella. Tout ça pour rester en altitude sans redescendre par Noarre, et se payer quelques lacs en plus.

C'est quand même une variante décrite sur RL par chouxrave depuis une petite dizaine d'année et comme le dit Joy Supertramp, facilement lisible sur le terrain, et l'Estany de Mariola, souvent vanté ici par Zorey

Edit : ortho

Flo

Dernière modification par florencia (18-09-2020 22:53:43)

azerty · 19-09-2020 01:54:35

J12 - 29 juillet 2020 - L'orientation
Du barranc de Comamala au Refuge Mataro

J'ai deux nouvelles pour aujourd'hui, une bonne et une mauvaise, par laquelle on commence ? La bonne c'est que l'on va découvrir un trésor de la HRP, la superbe cabane Gracia Airoto, la mauvaise c'est la pire journée d'orientation. Bougre d'ectoplasme de moule à gaufres de cairn espagnol à la noix de coco.

Départ matinal à 6:09, j'ai levé le camp sans faire trop de bruit pour ne pas réveiller les voisines car une grasse matinée ça se respecte.

Au revoir, et au plaisir de se retrouver un jour sur un chemin

Beaucoup de questions ce matin sur la suite des événements, j'en suis au douzième jour mais c'est la première fois que je me retrouve seul. J'ai l'impression que c’est le grand départ, face à moi même, libre de m'immerger dans l'expérience à l'état brut.

La descente est facile à travers les vaches et les sous bois, il faut une heure pour rejoindre la route à Bordas de Pina puis encore 30 minutes de bitume jusqu'à Alos d'Isil.

GROINK

Il n'y a pas de ravitaillement, je m’arrête juste pour prendre de l'eau et profiter du réseau. Je réactualise mes bulletins météo, et je donne quelques nouvelles. J'informe Hervé27 qui est désormais notre routeur à terre que je me suis séparé de Pala2 il y a deux jours et de Joy Supertramp ce matin. J'apprendrai plus tard que Pala2 est environ une demi journée derrière moi.

Après une vingtaine de minutes le téléphone est rangé et je me lance dans la montée. 1100m D+ jusqu'au Col del Clot de Moredo. Tout le monde m'a donné le même conseil pour aujourd'hui, c'est paumatoire, prévois de la batterie dans ton GPS.

2 jours après le ravitaillement le sac à dos a repris un poids acceptable, malgré l'ajout du piolet et des crampons. Il faut encore tenir en autonomie jusque Bielsa, c'est à dire 4 à 5 jours. Je charge de l'eau pour 3 à 4 heures, soit environ 2 litres.

Effectivement la monté est galère. les difficultés d'orientation commence de suite dès la sortie du village et continuerons jusque là haut. Je dépasse une famille d'Espagnols qui ne jurent que par les balises jaunes, j'essaye de leur dire que ça n'est même pas la peine d'y penser, il faut carte + boussole + altimètre + GPS + un chien renifleur. Je crois que l'on ne se comprend pas, mais je ne les reverrai pas. Il y a parfois une balise, parfois un cairn, parfois juste 2 pierres, on se demande si c'est un cairn homologué ou si elles sont tombées là comme ça, mais la plupart du temps il n'y a rien .... débouille toi tout seul. Et quand tu pense tenir une sente, si par malheur tu la suis, elle ne va pas dans la bonne direction ... J'ai déjà du mal à m'orienter quand c'est facile, mais là j'ai du tomber dans tous les pièges de la journée. Par contre on sent une évolution, cela ne me gène pas le moins du monde qu'il n'y ait pas de chemin, de marcher tout droit devant moi vers un point de repère. J'ai été formaté au discours "Évitez de marcher à côté du sentier ou de couper dans les virages". Je me rends compte que ce discours vient des lieux sur-fréquentés. Ici je ne me sens pas fautif de quoi que ce soit à marcher ou je veux et comme je veux.

Je m'offre une petite pause à 2000m d'altitude, il est 10h et il fait déjà très chaud. Depuis 3 jours je marche avec ma chaussure droite éventrée. Dans les descentes j'ai parfois tout l'avant du pied qui passe par dessus bord. Et surtout plein de cailloux et de brindilles qui rentrent dedans. Mais dans l'ensemble j'arrive à m'en sortir assez bien.

Dans le dernier vallon avant le col je commence à croiser du monde, ils viennent sans doute du refuge, on a pas tous les mêmes horaires semble t'il. C'est tout un groupe de HRPistes, pour eux j'ai bien fait de prendre piolet et crampons, ils ont utilisé les leurs il y a quelques jours.

J'arrive au col à 11h, ça nous fait un petit 400m à l'heure de moyenne, c'est pas si terrible. Devant moi, au loin, le paysage pour les prochains jours.

La descente est facile jusqu'au refuge Gracia Airoto, il se révélè au dernier moment, pourtant avec sa couleur orange on ne peut pas le rater. C'est un moment un peu magique d'arriver vers cet endroit dont j'ai tellement entendu parler.

Une seule frustration, c'est d’y arriver à la mi journée et non pas pour dormir.

La grande table en extérieur est avenante mais je vais privilégier de manger à l’ombre et au frais à l'intérieur.

L’intérieur est accueillant.

Je ne résiste pas à l'appel des matelas et je vais quand même m'offrir une petite sieste. Je peux maintenant dire que j'ai dormi à Airoto ....

En repartant je fais un plein d'eau à la fontaine toute proche puis, à peine remis en marche, c'est déjà la galère pour s'orienter. J'essaye dans un sens, puis dans un autre, pas bien réveillé après ma sieste je me viande et ma jambe passe entre deux blocs, on respire un grand coup et on se calme.

Toute l'après midi va être un peu comme cela. Dans mon souvenir après le refuge AIroto on passe un petit col, puis on descend à vue de pif dans une grande prairie, jusque là tout va bien. Au bout du vallon la trace part d'un coup à droite et c'est le début des problèmes. On marche dans les blocs et il n'y a plus rien pour se repérer, même pas deux moitiés de cairns.

Estany de Garrabea

Une fois le dernier col à 2400m franchit, on arrive au dessus de l'Estany Pudo -où bizarrement il y a de l'eau- et on retrouve une façon plus normale de marcher, c'est à dire un pied devant l'autre et si possible dans la même direction. La descente jusqu'à la bonaigua sera tranquille, j'y arrive à 17h.

Par contre petite déconvenue, je n'ai pas trouvé un point d'eau et je suis à sec dans cette chaleur étouffante, il fait près de 35°C à 2000m. J'avise les camping car et je commence ma tournée. Bingo, on me fournit une grande bouteille d'1,5L. Je vais me mettre à l'ombre sur le auvent d'une cabane en bois, au milieu du parking, pour refroidir un peu.

Je dois être dans un sale état car la femme qui m'a donné la bouteille revient me voir avec une boite de comprimés, elle m'explique que c'est pour aider à la réhydratation et elle veut me donner toute la boite. Je me contente d'en prendre une dizaine, une par jour restant et je la remercie chaleureusement. Je pense que pour mes prochaines sorties il faudra que je prenne ce genre de choses, si ça peut éviter d ese gaver de chips le soir au bivouac pour reprendre un peu de sel.

Pendant les quelques 30 minutes de pause à la Bonaigua, je n'oublie pas d'informer zorey de mon avancée, on en a sans doute pas terminé avec les Guests... Il était prévu que je le contact lors de mon passage à cet endroit pour anticiper un point de rendez vous dans les jours prochains.

Une fois apaisé et rafraichit je consulte la carte et j'estime un point de chute pour ce soir. Je me donne encore 3 heures et 500m D+.

Je commence mon ascension et je croise tout plein de gens qui descendent. décidément on a vraiment pas es mêmes horaires... J'ai l'impression de ne jamais aller dans le sens "normal" de la marche, et pourtant cette fois je suis sur le bon itinéraire ....

Je vais remonter les étangs Gerber, il y a au moins 3 beaux lacs, et le dernier sera le plus grand. On arrive ensuite dans une zone plus humide, et enfin en vue du refuge Mataro sur son perchoir. Il est presque 20h. Je suis heureux car j'ai bien grillé mon GPS qui me donnait une heure estimée d'arrivée bien plus tardive. Depuis le départ il m’annonçait des temps que j'avais du mal à tenir, mais désormais je lui mets la pâté. Il y a donc bien une progression et ça ne fait que commencer.

Le refuge est très sympa. l’intérieur est en bois avec 9 couchages et une table. Il y a déjà deux espagnols à l’intérieur, un père et son fils (le fils a mon age).

Je vide mon sac vite fait et je file à la salle de bain avant que le soleil ne se couche.

Ce soir je suis crevé, ça fait une bonne journée. Il y a parfois eu un peu d’énervement à cause de l'orientation mais pour a première journée en solo je suis content d'avoir gardé la motivation et d'aller de l'avant.

J'ai le temps de prendre mon repas tranquillement dans le refuge puis je ne tarde pas à me coucher. Mais vers 22h tout un groupe arrive avec des enfants. Ils s'excusent du bruit et restent manger dehors. Certains d'entre eux dormiront sous abri et les autres prendront les couchettes disponibles. On finira donc à 9 dans le refuge, moi et 8 barcelonais dans une étuve de 4 mètres carrés en pleine épidémie de COVID .... Mais sur le coup j’étais tellement déconnecté que je n'y ai pas vu de problème.

Topo J12

azerty · 19-09-2020 02:09:11

Je viens juste de croiser rhomain en Route vers la Plage. Pendant que je montais par le vallon de Moredo depuis Alos d'Isil , lui descendait le vallon voisin de Airoto vers Isil.

Salut Rhomain, et bonne route vers l'Est

Dernière modification par azerty (19-09-2020 02:09:31)

Ruz boutou · 19-09-2020 12:15:25

Bonjour Azerty et un grand merci pour ce récit qui apporte de nombreuses informations utiles.
Tu fais des sacrées distances !!! Je n'en suis pas là... J'ai fait cet été une partie du parcours (Lescun - Mounicou) en sens inverse. J'ai moi aussi bivouaqué à Comamala mais en partant du lac de Garrabea... Bon, chacun ses capacités. Ceci dit c'était ma journée "orage" (09/08/20) et j'ai donc poireauté 2h30 sous un abri à bois (vide celui-là) au bordes de Moredo ce qui n'a pas arrangé ma moyenne au demeurant très moyenne.
Du hameau de Moredo (sens inverse, donc), le choix du "chemin" est effectivement assez déconcertant. On tâtonne, on se questionne, on scrute et on s'égare en permanence mais... on finit par y arriver... Au flair.. Je suis, pour ma part, passé par une ancienne bâtisse (Borda de Sanç) où se trouve une cabane ouverte au-dessus d'Alos d'Isil (l'autre partie de la bâtisse est en ruine). Cela permet de descendre les courbes de niveau progressivement en suivant les anciennes terrasses. La descente est ensuite plus claire sur Alos d'Isil et se fait assez facilement.
J'ai aussi pas mal galéré entre le lac de Garrabéa et l'estany superior del rosari.. (la grande prairie ... et son estany )

"Dans mon souvenir après le refuge Airoto on passe un petit col, puis on descend à vue de pif dans une grande prairie, jusque là tout va bien. Au bout du vallon la trace part d'un coup à droite et c'est le début des problèmes. On marche dans les blocs et il n'y a plus rien pour se repérer, même pas deux moitiés de cairns.
C'est tout à fait ça. Entre les deux lacs (Garrabea et Rosari) j'étais le nez sur le GPS pendant 1h30 à 2h00 ce qui a rendu ma moyenne encore plus moyenne que moyenne.
Ton choix de parcours par les étangs Gerber est une bien meilleure option que le passage au col de Bonaigua à ceci près que le restaurant qui s'y trouve permet de casser la croûte dignement et de profiter de la Bonaigua en question (et de faire baisser la moyenne qui n'avait pas besoin de ça). A part ça, le chemin par les Prats de Locampo n'a pas grand intérêt et l'arrivée sur les pistes de ski non plus. Bref, mauvaise option de ma part. Mais je prends de la graine (pas les cahouètes... les infos) en te lisant...
J'attends avec impatience la suite du récit et encore merci aux différents contributeurs : Hervé 27, Pala 2, Joy Supertramp, et ceux à venir...
Acherpéééé à tous !!!

Dernière modification par Ruz boutou (19-09-2020 12:24:35)

Hervé27 · 19-09-2020 15:53:02

« Dans mon souvenir après le refuge Airoto on passe un petit col, puis on descend à vue de pif dans une grande prairie, jusque là tout va bien. Au bout du vallon la trace part d'un coup à droite et c'est le début des problèmes. On marche dans les blocs et il n'y a plus rien pour se repérer, même pas deux moitiés de cairns. »

Effectivement paumatoire mais en l’absence de chemin et de cairn fiable, suivre la trace OpenTopo au GPS et sans se poser trop de questions est encore la meilleure solution ...

Dans mon souvenir et après le virage à droite susmentionné, il faut traverser un pierrier de gros blocs : j’y avais suivi la ligne d’une brisure de pente, me permettant de rester à niveau.

Après avoir passé le fond du vallon, le plus délicat est de trouver le franchissement de la crête rocheuse pour passer du côté de l’étang Garrabea.

Franchement pas évident ...

Joy Supertramp · 19-09-2020 17:34:23

@ ruz boutou : avec un pseudo pareil tu dois y laisser quelques paires de pompes sur la Acherpéééé non ?

Ruz boutou · 19-09-2020 20:04:29

Pour l'instant, vu que je tronçonne le parcours en trois... ça va. L'usure est là, mais c'est très gérable. En plus, je fais des pauses...
J'ai choisi un pseudo "couleur locale" qui me rappelle pas mal de choses et qui colle bien à mes ambitions modérées en terme de progression sur les chemins. Déjà, si j'arrive à finir la HRP (l'an prochain) , je serai très content.
Bon, ceci dit, en vrai, je ne traîne pas tant que ça des pieds mais par contre, oui, j'aime traîner mes savates un peu partout.
En tout cas, bravo pour vos explorations pyrénéennes et vos retours que je suis avec attention.

Doomlike · 19-09-2020 20:51:38

Hervé27 a écrit :

#584860« Dans mon souvenir après le refuge Airoto on passe un petit col, puis on descend à vue de pif dans une grande prairie, jusque là tout va bien. Au bout du vallon la trace part d'un coup à droite et c'est le début des problèmes. On marche dans les blocs et il n'y a plus rien pour se repérer, même pas deux moitiés de cairns. »
Effectivement paumatoire mais en l’absence de chemin et de cairn fiable, suivre la trace OpenTopo au GPS et sans se poser trop de questions est encore la meilleure solution ...
Dans mon souvenir et après le virage à droite susmentionné, il faut traverser un pierrier de gros blocs : j’y avais suivi la ligne d’une brisure de pente, me permettant de rester à niveau.
Après avoir passé le fond du vallon, le plus délicat est de trouver le franchissement de la crête rocheuse pour passer du côté de l’étang Garrabea.
Franchement pas évident ...

Pour être passé par là il y a quelques jours, je pense qu'il ne faut pas suivre la trace "HRP open topo" mais une seconde trace qui prend à droite plus loin. Elle fait descendre plus bas (presque au lac en-dessous) mais permet surtout d'éviter les passages dans les blocs. Ce passage semble logique en regardant le vallon après avoir traversé les blocs (quelle galère!)

azerty · 20-09-2020 01:15:10

J13 - 30 juillet 2020 - Les patatas bravas
du Refuge Mataro à l'hospice de Vielha

Je n'ai pas trop mal dormi dans ce petit refuge orange de Mataro. Il faut dire que j'accuse un sacré déficit de sommeil depuis le départ, et chaque heure de sommeil que je peux gagner est un bien précieux.

J'avais prévenu mes colocataires hier soir que j'allais me lever vers 6h. J'essaye de plier sans faire trop de bruit. Le refuge est équipé de matelas, mais j'ai quand même utilisé mon matelas gonflable comme oreiller. Le pliage de cet engin ne se fait malheureusement pas sans crissements désagréables.

Je décolle à 6:30, dehors il fait gris et froid. Le refuge est situé à 2460m d'altitude, et bien exposé au vent sur son rocher. Il se met même à pleuvoir, à l'encontre des prévisions météo qui sont au grand beau. Je sors ma veste imper jaune, qu'est ce qu'elle s'ennuie au fond de mon sac depuis le départ. Elle n'a pas l'impression de servir à grand chose.

Le premier col est vite franchit, l'effort a été minime, à peine 100m de D+.

Col de L'estany Gelat , vue sur le Lac de Saboredo

J'arriverai au refuge de Saboredo à 8 heures. La marche ce matin est très agréable et le coin est magnifique, il y a un lac tous les 50 mètres.

Je reprends un peu d'eau à la fontaine. Devant le refuge il y a un groupe de français qui se préparent à partir. Ils parlent boulot et politique. Beurk! Je réalise à quel point j'ai déconnecté depuis maintenant 13 jours et j'en suis fort aise. La pause durera à peine 5 minutes.

Je repars en direction de Colomèrs, Il faut remonter à peine 150m D+ jusqu'au col puis redescendre 300m de l'autre coté. J'arrive au refuge à 10h. il y a pas mal de monde à cet endroit, ça sent le parking pas loin.

Le grand refuge n'est pas très beau, malgré sa situation devant ce grand lac, la batisse est quelconque, voir austère. Toutes les portes sont fermées et interdites d'accès à quiconque ne dort pas ici. Moi qui bavais depuis 1 heure en pensant à mon petit déjeuner je suis un peu déçu. Car le seul intérêt que l'on peut porter à ces grandes baraques moches c'est bien d'y trouver de la bouffe à volonté.

Je me pose quand même à l'ombre sur les marches pour ma pause de 10h. Il y a 2 gars qui sont déjà là. J'ai tout ce qu'il faut dans mon sac pour me nourrir, ce n'est pas le problème, mais personnellement je trouve que la nourriture est meilleur quand on ne l'a pas portée, voir succulente quand elle a été portée par quelqu'un d'autre.

Je vais à la fontaine (suivre le panneau "fuente") faire un plein d'eau pour le thé et pendant que la bouteille se remplie je sens une agréable odeur de menthe. Il y en a tout autour du point d'eau. J'en prélève une branche, cela me changera du thé noir.

Ma trouvaille permet d'engager la conversation avec les 2 voisins qui s'empressent de faire la même chose pour parfumer leurs poches à eau. Ce sont deux français, deux copains, qui font une partie de la HRP chaque année, ils vont vers l'est. On parle rapidement de sacs car ils sont surpris de me voir sortir tout le nécessaire pour me faire chauffer un thé depuis mon petit sac rouge. Je leur explique que malgré la taille et le poids réduits je suis tout confort et je peux m'offrir une pause avec boisson chaude quand je veux. Les gars sont bien affutés, leurs gros sacs ne leurs posent apparemment pas de problèmes, mais j'essaye de leur explique qu'avec leur physique de trailers et de petits sacs ils gagneraient énormément en mobilité. Cela dit on insiste pas et on discute de montagne et de nos itinéraires respectifs. Comme on va en sens inverse chacun informe l'autre de ce qui l'attend.

Les 2 types sont vraiment sympa, je ne me souviens malheureusement pas de leurs prénoms, mais après 30 minutes de pause il faut repartir.

Pendant que l'on parlait nous avons assistés à un défilé de touristes du style de ceux que l'on croise à 10 minutes des parkings, le coin devient une autoroute, oui il faut vraiment mettre les voiles d'ici.

Je reviens un peu sur mes pas et je tombe sur un panneau qui m'annonce le refuge de la Restanca à 5h30 de marche, waouh, ça fait un bout.

Je me remets en marche vers le port de Caldes, que je passe vers 11:30. A chaque passage de col je vois ces montagnes enneigées devant moi se rapprocher chaque jour un peu plus.

port de Caldes

Je n'ai pas trop la frite aujourd'hui, je galère un peu à trouver mon rythme dans les montées, en fait je galère tout court dans les montées. Je suis un peu à coté de mes pompes pour tout dire.

En parlant de mes pompes, celles çi ne ressemblent plus à grand chose. Et pas seulement à cause du mesh qui a déchiré. Je commence à partir de plus en plus souvent en glissades. Sur les cailloux qui roulent ou dans la poussière c'est une chose, mais dans l'herbe c'est plus inquiétant.

Il est 13h passées quand j'arrive au refuge de la Restanca, soit 2h45 après avoir quitté Colomèrs, bien loin des 5h30 annoncées, mais je suis loin de faire le coq, c'est la petite forme. Le auvent du refuge est plein de randonneurs qui profitent de l'ombre, l'entrée du refuge est également interdite aux personnes qui n'ont pas reversées un hébergement. Cependant un service de restauration est disponible en extérieur.

Il ne faut pas plus m'en raconter pour que je me présente au bar et passe commande. Un coca, une racion de patatas bravas et une de carne. à table.

refuge de la Restanca

Bon pour ce qui est de la carne je m'attendais à autre chose qu'une vieille saucisse moisie. Mais bon, je suis content de manger des champignons.

Pendant le repas je discute avec un HRPiste français qui trimballe tout un tas de matériel photo, drone, etc , je n'ose même pas lui demander le poids de son sac, rien que d'y penser j'ai mal aux genoux.

Après manger il ira chercher un coin d'ombre pour faire une sieste, pour ma part après 1h15 de pause il est grand temps de repartir sosu la cagnard.

Les premières trente minutes de marche seront éprouvantes, je suis toujours un peu HS et j'ai vraiment très chaud. Il est 14h30, il doit faire 34 degrés en plein soleil et j'ai l'impression que la température continue de monter.

Mais après une demi heure de marche, la digestion aidant, je me sens de mieux en mieux et je commence à pousser sur les jambes, je retrouve un rythme de marche correct et le motivation revient. viva las patatas bravas !!

Je me rend alors compte que ces derniers jours je n'étais pas vraiment au top et que la bouffe y est vraiment pour quelque chose. à ce moment je pars en glissage et je me casse la gueule.

Depuis deux ou trois jours je me rends bien compte que mes chaussures sont mortes mais avec mes deux jours de retard j'essaye de me persuader que ce n'est pas grave. Que je ne vais quand même pas encore perdre du temps à faire un détour pour les remplacer. N’empêche que demain c'est la grosse montagne qui commence, est ce que je ne prends pas un risque débile de monter avec des semelles dans cet état ?

Pendant la pause repas j'ai regardé le GPS et je vise le refuge de Molière pour ce soir. à peu près 2 heures avant de l'atteindre je devrai franchir la route de Viehla. Cette route peut être une opportunité si je veux changer d'équipement.

A ce stade de la randonnée j'ai besoin de 3 choses pour marcher, de la bouffe, de bonnes chaussures, et encore de la bouffe. La décision est prise de faire le détour par Vielha. Mais si possible en mode aller et retour rapide, de façon à ne pas perdre plus de 2 heures de marche effectives, qui correspondent à la montée au refuge de molière que je ne vais pas pouvoir faire ce soir.

Ces histoires de chaussures et de patates m'ont tellement absorbé que j'en ai oublié le reste, le passage au lac du Rius et la montée au dernier col de la journée.

Port de Rius

Comme pour me conforter dans ma décision je vais encore me payer 4 ou 5 belles glissades dans la descente vers l'hospice de Vielha ou j'arrive un peu avant 18h.

Je me rends compte qu'il est déjà tard, et je suis encore bien loin de la ville. Pas question d'y aller à pied, je suis à l'entrée d'un grand tunnel routier et la ville st à au moins 15 km de là. Il faut trouver une voiture. J'hésite un peu, sois je vais au bord de la route, sois je reste sur la parking à attendre que des randonneurs arrivent à leur voiture. Je choisis la seconde option. je prévois un masque pour rassurer mes éventuels hôtes.

La première voiture ne va pas dans le bon sens. Un coup d’œil sur le parking et je me rends compte qu'il n'y en pas pas beaucoup d'autres, il ne faudra pas laisser passer ma chance.

Je me dirige vers un couple qui rentre de balade, ils n'ont même pas ouvert le coffre que je tente de leur expliquer ma situation. Mais la barrière de la langue est un frein terrible. A un moment la femme s'adresse à son mari et je comprends qu'elle m'a compris, elle lui dit (en espagnol) : "je crois qu'il veut monter dans notre voiture", et là je fais un grand sourire et je montre mon masque pour qu'ils n'aient aucune crainte. Bingo ils me prennent en charge. J'ai quand même l'impression de leur avoir un peu forcé la main, et j'en suis navré, mais je devais parvenir à mes fins.

à peine 10 minutes plus tard je serai dans les rues animées de Vielha, c'est l'angoisse, tout le monde est masqué, la montagne me manque déjà.

Il n'y a pas de crainte à avoir su les horaires, nous sommes en Espagne et les boutique de sport ferment à 22h, j'ai donc tout le temps de chercher parmi les très nombreuses enseignes celle qui vend la marque LA SPORTIVA afin de reprendre le même modèle.

Je trouve rapidement mon bonheur, mais j'ai quand même un peu la honte en rentrant dans le magasin car je dois sentir le bouc. Je prend le risque de choisir 1/2 pointure en dessous car j'avais le pied qui se baladait un peu. Disons qu'il était temps.

verso

recto

Pendant la descente sur vielha en voiture j'ai appris par la messagerie que Pala2 était aussi sur vielha ce soir, il faut que j'essaye de le trouver. Il me donne l'adresse de son hôtel au téléphone et à peine ai-je raccroche que j’entends quelqu'un m'appeler par mon prénom. Ce sont les deux types croisés au refuge Colomèrs qui sont installés en terrasse et qui m'invitent à prendre une bière, que je décline, j'avais promis que je ne boirais pas d'alcool pendant la HRP. Je suis depuis 30 minutes dans une ville ou je n'ai jamais mis les pieds et me voila à l'apéro avec les potes de cet après midi et j'ai rendez vous à l’hôtel avec un autre pote juste après. Je me sens comme à la maison.

Une fois passées ces amabilités je reprends mon chemin vers le supermarché, il ma faut des fruits, du chocolat, des chips et des barres de céréales. L'alimentation de base quoi.

Je retrouve Pala2 à son hôtel ou je prends aussi une chambre, et je commande un taxi pour me ramener à l'hospice de Vielha tôt demain matin. Rendez vous est pris à 6h devant l’hôtel. Le taxi n'est pas la solution la plus économique pour se rendre d'un point A vers un point B, mais faire du stop à 6h du matin semble trop aléatoire.

Bon, malgré le prix de la chambre, la nuit sera courte, profitons au moins de la douche pendant de longues minutes. Je retrouverai Pala2 plus tard, il est parti faire ses courses.

Vers 21h30 nous nous mettons à la recherche d'une bonne table. je vous rappelle que, en ce qui me concerne, l'objectif de cette virée à Vielha est de me remplir le bide.

opération Dîner en ville

C'est chose faite.

des calories pour la route

Retour à l’hôtel vers minuit, re-douche pendant de longues minutes. Je brise un de mes tabous en rando et je programme mon réveil pour le lendemain matin, 5h30. J'ai proposé le taxi à Pala2 qui l'a accepté, mais il est carrément dégouté de devoir se lever si tôt.

Devant nous ce sont des journées de dingue, des journées de rêve, c'est pour elles que l'on se trimballe piolet et crampons depuis une semaine Les 3 cols que tu redoutes mais tu brûles aussi d'envie de les affronter. Nous y sommes .....

Topo J13

Joy Supertramp · 20-09-2020 09:11:59

Haha c'est quand même marrant on a vécu le même truc avec ces histoires de chaussures lisses, au même endroit ^^ Pratique quand même cette ville de vielha ! Moi aussi j'avais braqué une voiture pour y aller (enfin disons forcé un peu la chance) !

Mais du coup, elles ont tenu CB de bornes tes premières ?

sjeanmarc · 20-09-2020 12:41:50

Je vais peut-être être iconoclaste sur le forum. Je me régale à lire le récit des HRP. J'ai terminé celle-ci cette année : 22 jours du pied du Canigou (j'arrivais du Massif Central) jusqu'à Hendaye.
Je comprends dans une démarche de trailer à la quête d'une performance cette recherche du poids minimum mais sinon :
- Pourquoi dormir sous un tarp avec ses faiblesses lors d'orages ou avec des moustiques (un autre récit de la HRP)?
- Pourquoi marcher avec des chaussures pas forcément adaptées à l'environnement rocailleux de la HRP ?
- Pourquoi manger froid quand on trouve agréable lors du passage à un refuge ou un village d'avoir un repas chaud ou une boisson chaude?

azerty · 20-09-2020 15:11:25

Salut jean marc. Tes questions sont bizarres alors j’essaye d’y répondre mais peut être que je n’ai pas bien compris le sens.

Personnellement je ne cherche pas la performance, je ne veux pas être limité dans ma progression par une charge trop lourde et les effets qu’elle provoque sur l’organisme ( dos, genoux,...).

Pourquoi dormir sous un tarp ? Et pourquoi pas ? Franchement je sais pas quoi répondre. Je ne vois pas de faiblesse particulière, c’est un abri ouvert avec ses avantages et ses inconvénients.

C’est quoi des chaussures adaptées à l’environnement rocailleux des Pyrénées ?

L’abri parfait, les chaussures parfaites, c’est avant tout ceux qui te conviennent.

Pourquoi manger froid ? Qui mange froid ?

Je n’ai toujours pas compris tes questions je pense. Nos choix viennent de nos lectures, de nos expériences, de nos envies et de nos angoisses. Chacun y répond à sa manière.

Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? Et bien parce que !

azerty · 20-09-2020 15:23:48

Joy Supertramp a écrit :

#584939Haha c'est quand même marrant on a vécu le même truc avec ces histoires de chaussures lisses, au même endroit ^^ Pratique quand même cette ville de vielha ! Moi aussi j'avais braqué une voiture pour y aller (enfin disons forcé un peu la chance) !
Mais du coup, elles ont tenu CB de bornes tes premières ?

Certaines villes doivent leur prospérité du commerce de la soie, des épices , .. vielha c’est les godasses

Les chaussures je les avait depuis décembre, disons 400km avant les Pyrénées et 300 pendant. Elles avaient pris l’eau de mer plusieurs fois, je ne sais pas si ça les a arrangées.

Balipit · 20-09-2020 15:51:37

Le mesh des La sportiva Akasha , Akyra se troue en milieu hostile avant l’usure des crampons .

Dernière modification par Balipit (20-09-2020 15:57:53)

Rhomain · 21-09-2020 22:12:37

Je viens de rattraper d'une traite mes 2 semaines de retard dans ton récit !

Toujours aussi sympa la vue de tes chaussettes en prenant son thé après le repas

Fallait oser le coup du « mais si vous votre sac est bien trop lourd, donnez mois ce saucisson qui dépasse » à Certascan, je me suis bien marré

Pour le mesh de tes chaussures, tu n'avais pas essayé de le recoudre, pour limiter l'entrée de débris à l'intérrieur ?

Je compatis pour la galère à l'estany de Garrabea, j'ai vécu la même chose. Peut-être qu'avec Joy, elle t'aurait trouvé des raccourcis improbables à flanc de falaise pour éviter ce chaos

azerty · 21-09-2020 23:34:55

J14 - 31 juillet 2020 - haut les corps
de l'hospice de Vielha au refuge du Portillon

Comme prévu réveil à 5h30 du matin, comme prévu longue douche chaude (on profite du confort jusqu'au bout) et comme prévu le taxi est au pied de l’hôtel à 6h pour nous monter à l'hospice de Vielha. La rando commence à 6:24 pétantes.

Au fur et à mesure que le jour se lève et que la lumière s'installe mes yeux commencent à piquer de plus en plus. Une tache jaune s'installe dans mon champ de vision, puis une seconde, et plus je regarde vers le sol, plus ça pique. Ayé, j'ai compris, ce sont mes nouvelles chaussures. Nous voila moi et Pala2 à la mode espagnole, les couleurs fluo sont de rigueur. Mais j'ai comme un doute ce matin, est ce bien le secteur idéal pour tester de nouvelles chaussures ? Je suis rassuré quand au choix de prendre 1.2 taille en dessous, je sens que le pied se ballade déjà moins au niveau du talon. Il y a un peu moins de place pour les orteils, mais ça passe.

Après l'arrêt au stand à vielha pour changement de pneumatiques

Depuis quelques jours j'ai du me prendre en charge coté itinéraire, mais je ne regarde jamais bien loin, j'essaye juste de prévoir le point de chute suivant dans une fourchette de 2h à 4h de temps. Mais aujourd'hui je prend un peu de recul, et je sollicite mon GPS pour obtenir des heures d'arrivées estimées selon différents scénarios. Il m'annonce un ETA au refuge du portillon pour 20h30. Je me suis rendu compte sur les derniers essais que je commençais à marcher plus vite que les estimations GPS, je pense pouvoir lui mettre une heure à une heure trente dans la vue, soit l’équivalent de la pause repas. Donc c'est possible.

C'était mon objectif de franchir Molières et Literole le même jour mais je devais initialement dormir au refuge de Molières, je pensais que désormais ça n'était plus à ma portée, surtout que je n'ai pas de frontale ce qui rend la marche de nuit impossible, surtout là haut.

Un rapide échange avec Pala2 sur le rythme de la marche, Je lui dit que je veux gazer, lui préfère y aller col et faire des pauses. C'est la re-séparation.

Le sentier parait simple au début mais dès qu'il rejoint le torrent il se met à piquer à travers les courbes de niveau et il faudra plusieurs fois mettre les mains. On m'avait pourtant dit que l'escalade c'était tout là haut.

A l'arrivée aux étangs de Molières à 2300m, l'ambiance haute montagne s'installe. Le refuge est posé là, 50m au dessus du sentier.

refuge de molières

Il y a cette barre rocheuse face à moi et plus on monte, plus on comprend qu'elle nous entoure. On ne peut pas passer dessus. On ne peut pas passer dessous. Allons-y! Il n'y a plus qu'à l'affronter! La vie est belle! Nous n'avons peur de rien. (Extrait de La chasse à l'ours, Michael Rosen & Helen Oxenbury)

Ne me demandez par pourquoi mais il me semble évident que cette dent creuse tout la haut dans la montagne est le point de passage. Je n'aurai de cesse de vouloir m'y diriger, ce qui provoquera une fois de plus quelques incompréhensions avec la DDE espagnole et leurs cairns qui forcement ne vont pas dans le sens que j'ai décidé (vu que le col n'y est pas, en fait).

moi c'est là que je veux aller

Alors forcement je perds un peu de temps en orientation (encore) quand je me fais rattraper par deux locaux. Ils montent à ma droite, mais arrivés à ma hauteur ils continuent de monter, sans se diriger vers mon col. Je regarde dans leur direction et je vois un bel alignement de megalithes cairniques, je soupir, je ferme ma gueule, j'arrête de râler, et je les suis pour le final. Cette fois il faut encore mettre les mains mais ça ne sera plus pour rigoler. Quand je pense qu'il y a des gens qui le font dans le sens de la descente avec un sac de 20kg,....., j'avale ma salive, je ne regarde pas en bas.

Je passe le col de Molière à 10h, check ! à droite, un trou, à gauche un trou, ça c'est de la crête !

Azerty franchissant le col de Molières

Il faudra encore monter un peu en crête à travers de gros blocs pour arriver vers le sommet.

3001m, point culminant de ma HRP, en arrière plan, dans le flou, l'Aneto, bien moins important que mon exploit

Je n'irai pas jusqu'au Tuc, il y a déjà les deux Espagnols qui m’ont précédé, je préfère profiter de la vue dans mon coin. On est plus à 9 mètres près.

Le Tuc de Molières, 3010m

Je ne sais pas si j'ai précisé mais il fait encore un temps de dingue aujourd'hui. La vue est à couper le souffle, c'est le cœur des Pyrénées.

vue panoramique, tout à gauche la vallée de Molières avec les lacs, au centre l'Aneto - 3404m - et tout à droite la vallée de Benasque

Un regard en arrière sur la vallée de Molières

barre rocheuse vue d'en haut

Après une mini-pause de 10 minutes à l'abri du vent pour boire un peu et ingurgiter une barre de céréales, puis j'attaque la descente. Il faut encore jouer le cabri entre les blocs rocheux, j'adore ça. Même si j'essaye de me raisonner et de faire attention à ne pas me gaufrer je ne peux pas m’empêcher de sauter de bloc en bloc comme un gamin.

Le contraste est saisissant entre la montée très raide dans les éboulis et les grandes dalles rocheuses de ce coté de la montagne, très lisses, poncées par les glaciers.

dalles rocheuses dans la descente

La descente est longue, j'ai commencé par bouriner mais il faut avouer qu'au bout de 2 heures les genoux font la tronche. Plus ça descend et plus c'est vert. Vu d'en haut c'est très joli.

plan d'Aigualluts

Cependant je vois plein de petits trucs bouger en bas. C'est trop petit pour être des vaches, et puis c'est habillé en fluo, c'est surement pas des vaches.

La plaine en bas est noire de monde. C'est con elle est joli. D'ailleurs c'est pour ça qu'il y a du monde. Finalement je devrais plutôt aller dans des endroits moches pour être tranquille. Franchement j'ai rarement vu autant de peuple en montagne, on est vendredi, ça n'est même pas le week end. Par rapport à la moyenne de personnes croisées quotidiennement sur la HRP ça fait sérieusement flipper.

Je continue mon chemin à contre courant du flux touristique et j'arrive bientôt à une piste avec un arrêt de bus, il y a là une navette qui charrie ses flots de visiteurs. Je comprend mieux. En fait non je comprend pas.

Au point ou j'en suis je prend mon repas au beau milieu de la foule, sous le préau, à l'ombre. J'essaye d'être vigilant sur les pauses aujourd’hui, 30 minutes max micro-sieste comprise. Je m'autoriserai à nouveau 30 minutes un peu plus bas à l'Hospital de Benasque pour boire un coca en terrasse et profiter des toilettes.

A 15 heures je commence la montée, vers la vallée de Remune. On inverse les rôles, cette fois c'est moi qui monte et les autres qui descendent.

Sur les 600 premiers mètres la pente est correcte, mais ça commence à s'accentuer entre 2400 et 2800m.

Montée vers Literole

S'ensuit un yoyo pendant un ou deux kilomètres. Les problèmes d'orientation reprennent. un cairn par çi, un cairn par là. un cairn à droite, un cairn à gauche, et je perd le fil. je monte, je redescend, je remonte, je m'énerve, je me prend un cailloux dans le tibia, je serre les dents, je respire. On sort le GPS, c'est par là.

Il va être 19h et je n'ai croisé personne depuis bien longtemps. ça n'est pas le moment qu'il m'arrive quelque chose car il ne faut pas espérer du passage avant demain matin. Tiens je tente un truc et j'allume mon téléphone à 2800m, ça capte, j'envoie une photo en live à la famille et je reçois un message de Zorey, notre rencontre est compromise, mince. Le gadget retrouve sa place et moi mon chemin, col en vue, il faut juste contourner le dernier lac pour trouver le départ de la dernière montée.

La partie enneigée est à l'ombre et à bien durcît. On distingue bien la trace. Il est 19h, je suis tout seul et je vais me tenter ma toute première montée avec les équipements, microspikes et piolet (sans dragonne). C'est pas la grosse sortie alpi mais moi j'ai le kiffomètre à bloc.

vue d'ensemble vers le col

J'ai bien fait de mettre les crampons, la neige est dure et bien glissante. Moi en short et TSML je n'ai pas si chaud.

montée dans la neige

20 minutes toppissimes. J'ai adoré. je me suis bien viandé deux ou trois fois, rattrapé de manière non homologuée avec le piolet. Certes je n'avais pas de la neige jusqu'au genoux, ni une pente à 70%, ni rien de très sensationnel, mais juste ce petit truc qu'on ne fait pas tous les jours.

Alléluia

Literole, Check !

Azerty franchissant le col de Literole

La descente de l'autre coté est super glissante, c'est sur le cul. Il faudra repasser un peu sur la neige mais c'est bien plus cool.

de l'autre coté, à la lumière

La descente sera rapide, je vois déjà le lac puis le refuge du portillon. On dirait qua ça s'agite en bas, tout le monde sort du refuge, ça veut dire que j’arrive trop tard pour la soupe, mince de mince.

J'arrive au niveau du refuge sous les regards amusés, un type avec un sac de rando à la journée qui descend de la montagne à 20h. Redis ça, il est 20 heures ? j'ai bien mis la misère à mon GPS, même avec les pauses je lui colle 30 minutes d'avance.

J'avise les abords du refuge et c'est cailloux cailloux, je me demande comment planter un tarp ici avec mes petites sardines en alu. Allons voir à l’intérieur. Tiens, il reste de la place. Et est ce qu'on peut encore manger ?

Je tente la private joke initiée avec les amis de Colomèrs et de Vielha en lui demandant un sandwich à l'omelette, mais très vite de me rends compte que si il accepte, je vais vomir. Alors je me ravise et me rabat sur le menu du jour, entrée/plat/dessert. Comme je suis tard je vais mange tout seul dans la grande salle. Avant même d'être servi je bois 2 grands pichets d'eau, je ne me rends pas compte à quel point je n'avais pas beaucoup bu aujourd'hui. Le bonheur c'est simple comme une énorme assiette de pâtes à la bolognaise.

A la différence des jours précédents ou j'ai alterné de multiples montées de 100,200,300 ou 400m, ça a été vraiment différent aujourd'hui avec deux grosses montées de 1400 puis 1300m.

yoyo

Le repas est simple mais gargantuesque, s'ensuit une toilette au gant car les douches sont fermées puis je vais rencontrer mes colocataires d'un soir dans le dortoir. Je tombe sur une petite famille, une maman sa fille et son fils qui ont passé trois jours ici à faire des sortis alpi. On discute un peu mais je suis vanné. Je m'excuse d'avance pour le réveil à 6h et le bruit que je vais faire. J'ai toute la couchette du haut pour moi tout seul, je vais pouvoir dormir en mode étoile de mer.

armoire à chaussures du refuge - il y en a un plus MUL que moi qui se balade en claquettes dans la montagne

Topo J14

Dernière modification par azerty (21-09-2020 23:38:42)

Magne2 · 22-09-2020 08:23:17

Bonjour
Le parcours Besurta (arrêt des navettes obligatoire en juillet août) plan des aigalluts est la ballade familiale par excellence et cette année des familles il y en a pléthore à Benasque et sa région.

Phil82 · 22-09-2020 08:51:50

azerty a écrit :

Un rapide échange avec Pala2 sur le rythme de la marche, Je lui dit que je veux gazer, lui préfère y aller col et faire des pauses.
C'est la re-séparation.

Ca n'arrête pas, c'est les feux de l'amour votre feuilleton!

Balipit · 22-09-2020 08:58:15

C’est clair l’hospice de Benasque - robinet exterieur devant magasin ski - est le spot touristique du coin qui est alimenté par des navettes de bus , je traverse cette plaine d'alpage d’humains trés rapidement pour retrouver la tranquillité en remontant .
Trés belle étape Bravo

Dernière modification par Balipit (22-09-2020 09:04:48)

Hervé27 · 22-09-2020 09:42:33

et pendant ce temps-là, je me traine pour publier les vidéos des 1ers jours : le Jour 2 est tombé !

kodiak · 22-09-2020 19:11:13

Belle journée... (dans tous les sens du terme)

Le coup de la montée à ce qu'on croit être le col, et tous ces cairns qui indiquent le mauvais chemin, et oups... Qui ne l'a pas vécu.

(Je vois que je ne suis pas le seul qui retrouve les mots du Michael Rosen de son enfance dans les montées raides quand on cherche à penser à autre chose... )

Le forum de la randonnée légère ou ultra-légère !

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#126 18-09-2020 15:29:01

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#127 18-09-2020 16:04:02

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