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#26 17-09-2021 07:22:49

Hervé27
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

Shanx a écrit :

#626748Je crois que le récit d'une seule de tes journées correspondra à 3 jours de mon prochain récit. Si je te fournis les photos tu ne veux pas faire le mien ? big_smile

Moyennant facture wink tout est possible ... Il y en a bien qui vendent leur fabrications de sacs à dos ou abri (et tant mieux smile , je suis heureux de bénéficier de leurs talents !), pourquoi pas leurs retex cool  ?

Je trouve que la fin du mois d'août offre le meilleur compromis entre la durée du jour et les heures de lever et coucher de soleil. big_smile

Tout dépend des quotas de marche que l'on s'impose ... Mes 10h / jour avec les pauses exigent des durées du jour d'au moins 14h, soit une "fenêtre" allant de début mai à fin août sous nos latitudes. Vers la fin du périple il m'a fallu rogner sur les pauses hmm pour pouvoir encore  "caser" mon quota de marche ... J'en retire de nombreux enseignements pour la planification de futures aventures  wink


Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

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#27 18-09-2021 20:23:18

Hervé27
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

Salut à tous  smile ,

Je prends peu à peu mon rythme de croisière pour ce récit au jour le jour, lequel va sans doute m'occuper pour encore de nombreuses semaines. Il me faut le mener sur 2 fronts : celui de l'écriture sur RL d'une part, du montage photo / vidéo d'autre part (c'est ici sur mon compte YT). Vu le temps que cela exige, ne comptez désormais pas sur plus qu'un épisode tous les 2 ou 3 jours au mieux ...

NB : j'ai perdu beaucoup de vidéos de ma 1ère semaine d'une part (mauvaise manip après une sauvegarde   roll ...), et mon micro s'est encore une fois avéré défaillant pour les prises de son jusqu'à ce que j'en change après les Alpes Carniques (2ème semaine). La qualité de ce que je présente s'en ressent, mais devrait donc s'améliorer à partir de l'épisode 13. N'attendez cependant pas de miracle, ce ne sont que des images de vacances et je n'ai aucune prétention à être un influenceur YouTube ...

A chaque ajout d'un épisode RL ou YT, je mets à jour l'index en début de ce post, n'hésitez pas à vous y référer pour naviguer à Fleur de Pô wink




J08 - jeudi 8 juillet - ~4h30

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Le vent a soufflé fort en début de nuit puis est totalement retombé. J'en étais abrité par le rideau d'arbres près duquel j'avais planté les piquets, et seul son ronflement à travers les mélèzes était audible par-dessus les miens. Pour une fois j'ai dormi 5 heures d'une traite et sur le dos, fait assez rare pour que j'en prenne note : mes nuits en bivouac sont généralement décousues ... La toile est légèrement humide de rosée et de condensation, mais sans excès. Vaches et chevaux ne sont pas revenus me visiter, tant mieux !

Ce sont les 1ères lueurs du jour qui me font émerger, pas besoin d'un réveil pour pouvoir me mettre en marche à 5h15, peu avant le lever du soleil. Au milieu des rhododendrons en fleur, je monte rapidement les quelques dizaines de mètres de D+ qui me séparent du sommet du Sagranberg (1 931 m), d'où pour le 2ème jour consécutif je capte les 1ers rayons perçant à l'horizon.

en marche avec le soleil
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Le beau temps n'est ce matin pas uniforme : des nuages sombres flottent au Sud sur l'Italie et la Slovénie. Il me faudra garder l'œil dessus car la météo est donnée à l'orage pour cet après-midi.

Cela va sans dire, mais tout mon itinéraire carnique se déroule aux abords de la frontière austro-italienne (telle qu'établie après la Ière GM), si ce n'est directement sur son fil ...

Au sommet du Sagranberg 1 931 m
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La redescente du petit sommet court tout droit par la crête boisée, jusqu'à un petit col où je rattrape une piste qui descend en vallée par de longs lacets côté autrichien. Ce n'est pas le type d'itinéraire le plus intéressant, mais mes cartes ne montraient rien d'autre qui m'aurait permis de rester sur la crête frontière.

Descente du Sagranberg : mélèze en pièces détachées ...
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Je viens "rebondir" sur la frontière au petit col de Kesselwaldsattel. De là le chemin remonte par l'autre côté du vallon dont j'aurai fait tout le tour, et avant d'attaquer cette petite montée je décide de profiter d'un agréable spot herbeux et ensoleillé pour installer ma pause et tenter d'aérer / sécher mon couchage (j'anticipe une suite de la journée pluvio-orageuse ....

Kesselwaldsattel 1477m : Achtung ! Frontière !
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Rituel
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Après une (courte) section dans laquelle mon sentier s'avère évanescent, je rattrape une nouvelle piste qui m'amène à Poludnig Alm, où j'arrive à 9h30. Avec ma longue pause je n'ai avancé que de 10 km, mais avec tous les zigzags de l'itinéraire je ne suis qu'à 4 km à vol d'oiseau de mon point de départ que je vois toujours par-dessus le vallon. Pas très performant ...

Ils ont des chevaux dalmatiens ici ? J'appelle Cruella !
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Le plein d'eau est fait au hameau, et je m'offre le petit luxe de passer par les crêtes jusqu'au Mont Poludnig 1 999 m, plus communément appelé "il-en-manque-un". Les vues sont encore belles malgré l'approche des nuages, et je m'y offre une nouvelle petite pause.

Mont Poludnig 1 999m
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L'alignement des Alpes Carniques me montre la route à suivre
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Au fond et touchant le plafond nuageux, il doit s'agir du Jof di Montasio 2 754 m ...
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Quelques gouttes vont commencer à tomber tandis que j'essaye de profiter de ma pause : je vais vite remballer et m'éclipser, je ne veux pas rester là pour l'orage qui s'annonce ... J'ai plus de 500m de D- par un sentier assez direct le long de la crête boisée jusqu'au col de Schloßhüttensattel 1 452 m. Malgré la météo qui s'assombrit, je croise plusieurs groupes italiens (ou un seul groupe dispersé ?) qui montent. Cela me change de voir un peu de monde après mes heures de solitude du petit matin ...

Des grondements de tonnerre et toujours quelques gouttes m'accompagnent à la fin de la descente. Il y a quelques cabanes en bois au col, et je les inspecte rapidement pour voir si j'ai matière à y prendre abri tandis qu'éclairs et tonnerre se rapprochent dangereusement. Tout est hélas fermé / cadenassé, et je vais me contenter de me plaquer contre un mur de planches à l'opposé du vent pour échapper à l'averse qui va tomber drue, mais seulement pour un court instant ...

La météo dont je dispose annonçant encore plus de pluie entre maintenant et le milieu de la nuit, à la fin de l'averse je décide de modifier mon itinéraire et de faire un détour par Egger Alm :  ce ne serait pas un mauvais plan que d'aller y déjeuner en laissant passer l'orage, voire d'y prendre abri si les conditions s'y dégradaient encore. Cela me rajoute de la distance mais m'offre une option de sécurité ... Je prends donc cette direction tandis que la pluie s'estompe, et au final c'est sous un soleil retrouvé que je parviens à Egger Alm ...

... et je vais alors changer d'avis : pas question de laisser passer une fenêtre de beau temps assis à la table d'une auberge ! Je me ravitaille en eau et pars rattraper mon itinéraire, m'étant ainsi rajouté près de 3 km pour rien, et tout ça par de la piste au lieu d'un joli sentier forestier ...

Chouette fontaine, mais il manque quelque chose ...
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Je repasse en Italie au Stallensattel, où je retrouve un très joli et facile sentier. Je suis sur la Karnischer Höhenweg (comme souvent ces jours-ci roll ) et j'y croise quelques randonneurs. Parmi eux un trio de jeunes allemands qui arrivent dans l'autre sens, avec qui je vais discuter un long moment. Ils sont partis de Sillian il y a 8 jours pour effectuer la KHW, tandis que je programme d'y être dans 4 seulement. Forcément il y a pour eux incohérence entre la traversée que j'évoque et le sac sur mon dos : la suite de la discussion est facile à deviner (cf tous mes récits précédents)... Ils avaient commencé par me demander si le chemin devant eux comportait des difficultés, et j'ai pu facilement les rassurer sur la facilité absolue qui les attendait pour la fin de leur aventure d'ici à Thorl-Maglern. A l'inverse ils m'annoncent qu'ils ont traversé pas mal de sections délicates, la dernière étant à quelques centaines de mètres d'ici. Il semble que les choses vont enfin se corser !

En effet un peu plus loin le joli sentier pour balade familiale a été bien raboté / raviné en plusieurs endroits. Quelques chaînes ont été disposées pour aider le randonneur. Rien de réellement difficile, le morceau le plus délicat étant la traversée d'un petit torrent dont le lit a été profondément creusé, obligeant à mettre la main au rocher pour descendre / remonter. Obstacle vite franchi pour moi, mais mes 3 sympathiques mulets y ont probablement consacré plus de temps et d'effort avec leurs lourdes charges ...

Stallensattel 1498 m. Contrôle des passeports !
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ça me change enfin des pistes forestières
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L'espace de quelques centaines de mètres je vais transiter dans un environnement radicalement différent : de l'équivalent des sommets arrondis des Vosges couverts de sapins et de mélèzes, je suis passé à un monde méditerranéen calcaire et couvert de pins. Les choses vont rentrer dans l'ordre un peu plus loin avec le retour des sapins, mais je vais désormais garder le calcaire.

L'ambiance se fait plus montagneuse ...
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J'approche maintenant de la station de ski de Naßfeld, et comme le temps est toujours au beau je m'en tiens à mon itinéraire de crêtes plutôt que de la rejoindre par des pistes disgracieuses et éprouvantes sous un soleil brûlant (et ils sont où ces orages ?!?). Je passe d'abord par un petit lac artificiel et une courte montée vers un col où se rejoignent les pistes.

Il s'ensuit un très bel et facile itinéraire au fil des monts Gugga (1 928m), Karnitzenberg (1 950 m), Auernig (1 864 m), tous à cheval sur la frontière et séparés par de petits cols, tel l'Auernig Sattel (1 818 m). Le petit sentier serpente entre des rangées de rhododendrons, et les vues sont éblouissantes. Je suis vraiment très heureux de n'avoir pas cherché à accélérer le mouvement pour rallier Naßfeld ...

Un bémol toutefois : la descente qui suivra va me paraître interminable ... Ce ne sont "que" 400 m de D- du Garnitzenberg à Naßfeld, mais sur un versant très exposé au soleil en ce début d'après-midi. Je surchauffe dans cet effort, d'autant que je suis ralenti par mon entorse qui se réveille alors (fatigue ? mauvais laçage ?) ... Je me sens un peu rincé quand j'arrive aux abords de la station.

Superbes vues vers la Slovénie qui s'éloigne
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Naßfeld, et la suite de mon programme droit devant
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Normalement je fuis ce type d'environnement, n'y voyant qu'un saccage de la montagne. Un élément va cependant retenir mon attention : je reconnais la petite chapelle du Souvenir bâtie sur la frontière par les anciens combattants italiens et autrichiens, et que j'avais déjà vue dans une vidéo sur la Traversata Carnica par "The Art of Backpacking" et où ils avaient bivouaqué alors. Il n'est cependant que 16h30 et ce n'est pas l'heure du bivouac ...

Chapelle du Souvenir, encadrée par les drapeaux italien et autrichien
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En revanche, 2 jours après Ratece où j'avais ravitaillé pour 4 jours, je me dis qu'il serait judicieux de compléter mes victuailles pour me donner toute l'autonomie requise jusqu'à Sillian, que je compte atteindre dans 4 jours (mon épouse et l'une de mes filles doivent m'y rejoindre). Je descends donc dans la station et, après avoir un peu zigzagué, j'y trouve une supérette bien sympa où je vais trouver tout ce dont j'ai besoin. Comme de juste je me fais plaisir avec quelques suppléments à consommer immédiatement : un large chocolat liégeois bien frais, pomme, banane, fromage ... A la sortie du magasin je m'installe sur un banc (et près de la poubelle) pour reconditionner mes achats et boulotter les excédents. Je réalise que j'ai eu de la chance, car les portes vont se fermer derrière moi : le commerce fermait à 17h ! Si vous visez bien les horaires et jours d'ouverture, inutile de vous surcharger depuis Ratece ou Maglern comme je l'ai fait ...

Le temps de ma pause sur ce banc, la météo va se gâter et l'orage va de nouveau gronder. Cette fois les prévisions très pessimistes que j'avais eu hier se confirment, l'orage de l'après-midi devant être suivi de fortes pluies dans la nuit ... mais tout indique que ça se gâte déjà. J'estime donc qu'il n'est pas raisonnable de tenter le sort en remontant maintenant dans la montagne : je visais un possible bivacco à peut-être 2 heures de marche d'ici ... Finalement le porche de la Chapelle du Souvenir n'est peut-être pas si mal, après tout ?

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Ayant donc pris ma décision de m'arrêter à Naßfeld, je referme difficilement mon sac et me mets en recherche d'un point d'eau. COVID oblige les toilettes publiques sont fermées, et je me rabattrai sur un point de lavage de VTT ... Portant à la main ma Platypus gonflée à bloc, je remonte les pentes de la station en direction de la chapelle ... et réalise alors que je n'ai plus les bâtons ! Ils sont restés sur le banc de la supérette, et me voilà reparti à leur recherche ... Plus de bâtons près du banc quand j'y arrive, mais je n'ai pas le temps de désespérer, la jeune vendeuse m'avait vu les oublier et les avait ramassé pour qu'on ne me les chipe pas : la voilà qui se précipite depuis le magasin fermé où elle faisait sa caisse et me restituer mon bien. J'ai remobilisé tout mon allemand pour la remercier chaleureusement smile ...

Il se remet à pleuvoir quand je remonte, je m'arrête à la chapelle mais pas question de déballer dès maintenant mon barda : il n'est pas 18h, je suis tout près de la route / piste où il y a encore du passage de randonneurs à la journée. Certains s'arrêtent d'ailleurs pour visiter le monument. Pour passer le temps je vais ressortir (la pluie s'est arrêté) avec mes affaires sur le dos, et faire le tour du lac en contrebas sur le côté italien. Peut-être y trouverai-je d'autres possibilités de bivouac ?

Finalement je reviens à mon monument : le porche en dur fermé sur 3 côtés me semble un meilleur abri pour la nuit très agité qui s'annonce ...

Passé 20 h et maintenant que tout est tranquille j'installe mon couchage. Evidemment je vais encore avoir de la visite de promeneurs, lesquels ne sembleront pas plus que ça s'étonner de ma présence ...

Tandis que la nuit tombe et que je suis bien installé au chaud dans mon duvet, la lumière s'éteint automatiquement ... mais se rallume si je me tourne dans le duvet. Je réalise qu'elle se déclenche avec un détecteur de mouvement ! Rien de mieux pour signaler ma présence à quelqu'un qui jugerait ma présence indésirable en ces lieux ?

De toute façon les orages vont bientôt arriver, et je vais alors avoir droit à un son et lumière impressionnant, lequel durera jusqu'à 3h du matin ...

Home, sweet home
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En quelques chiffres :

J08 :
33 km
D + 1 857 D - 2 166
Marche 9h15
km-Effort 57.2

Cumul J01-08 :
296 km
D+ 16 488
Marche 84 h
km-Effort 494

Itinéraire & progression
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Impression générale :

Rien de sensationnel sur cette étape, malgré quelques beaux points de vue. Je ne suis pas encore dans la "vraie" montagne, jamais au-dessus des 2 000 m ... Les chemins disponibles n'étaient déjà pas très directs, et mes détours n'ont rien arrangé. J'ai l'impression de ne pas avoir beaucoup progressé vers l'Ouest, d'autant que j'ai "tronqué" ma journée en renonçant aux 2h de marche qui me séparaient d'un bivacco plus en altitude. Ma cheville s'est aussi rappelé à mon souvenir, faisant de nouveau peser une épée de Damoclès sur mon périple ... Pour tout arranger la météo se dégrade, avec tous les jours qui suivent annoncés orageux ...


voir la vidéo :
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Dernière modification par Hervé27 (16-11-2021 11:29:54)


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#28 21-09-2021 12:07:47

Hervé27
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

J09 - vendredi 9 juillet - Naßfeld, ~4h30 

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Je n'ai pas vraiment bien dormi ... Entre le sol de pierre dure et froide, le son et lumière de l'orage qui a duré jusque 3h du matin, les micro-projections d'eau dans les bourrasques, la lumière intermittente de la chapelle qui se rallume chaque fois que je me tourne dans le duvet ... il était difficile de fermer l'œil plus que quelques minutes à la fois ...

Ayant dormi dans un lieu public, je ne veux pas non plus m'attarder. Bivouaquer "en dur" aura au moins permis de faciliter le rempaquetage, et c'est dès 5h10 que je recommence à marcher. M'étant arrêté un peu plus tôt que prévu hier, j'ai à cœur aujourd'hui de faire une grosse journée, d'autant que je sais que je vais gagner en altitude et commencer à m'extraire de la montagne à vaches.

Je reprends une météo avant toute chose, et tout ce que je peux en dire c'est qu'elle est "variable" ... Raison de plus pour partir tôt et se donner toutes les chances de pouvoir progresser.

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L'objectif n°1 est de m'extraire de la station, et de remonter les pentes vers le Mont Madritschen, soit un "petit" dénivelé pépère de 400m D+.

Ma chapelle visible à gauche du centre de l'image
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Marchant vers l'Ouest, le soleil se lèvera dans mon dos et mon panneau solaire est disposé en conséquence. Par contre la batterie du téléphone va mal supporter la fraîcheur matinale, renforcée par un vent froid : je ne serai pas en mesure de photographier / filmer l'émergence de notre étoile. Il me faudra attendre d'être au soleil pour me poser quelques instants, et permettre au téléphone de se "réveiller". Dans les matins frais c'est toujours l'utilisation du mode photo / vidéo qui déclenche la mise en rideau de la batterie : dans l'absolu il faudrait éviter d'en faire usage, mais ce sont aussi les instants des plus belles images roll  ...

Avant l'extinction de la batterie
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Ce matin je suis comme mon téléphone, je n'ai pas de jus. J'en prends mon parti et laisse à mon rythme le temps dont il a besoin pour s'établir. Sur ces crêtes carniques, je navigue entre un plafond bas devant moi, et des horizons ensoleillés de part et d'autre. Difficile d'entrevoir comment cette météo va tourner aujourd'hui ...

c'est bas de plafond, par ici ... mais pas dépourvu d'horizons lointains
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Une fois passé un petit col l'environnement de la station semble passer enfin derrière moi, mais c'est sans compter la redescente sur un petit lac artificiel, vaste zone aménagée / décorée de sculptures et attractions diverses ... Drôle de conception de la montagne, jugée trop ennuyeuse pour la laisser à son état naturel. Il faut la "meubler" pour lui donner de l'intérêt et attirer le touriste. Je fuis.

la mer à la montagne ...
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Juste à l'extrémité de ce petit lac, la transition est soudaine : fini le large sentier, place à la trace dans les éboulis de gros blocs et aux névés. Je date de cet instant mon retour dans la montagne ... Avec enfin du caillou sous les pieds, je vais peu à peu retrouver mes sensations.

Changement d'ambiance
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Au col de Rudnigsattel (1 945m), je vais apercevoir le bivacco que j'avais pour objectif hier soir avant de finalement me résoudre à m'arrêter à Naßfeld.

Bivacco Ernesto Lomasti dans son environnement
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La crête rocheuse au-dessus de moi est celle du Trogkopfel ( 2 279m) et l'ambition de mon itinéraire prévisionnel était de suivre la trace qui, sur ma carte, en fait l'ascension. Il me faut pour cela bifurquer sur la droite depuis un petit col et légèrement redescendre ... pour me retrouver au pied d'un raide couloir calcaire que je n'ai aucune envie de suivre. Je décide de retourner vers le col d'où je viens, et de m'en tenir pour l'instant à l'itinéraire bien marqué et à flanc de montagne de la Karnischer Höhenweg (KHW) ...

En associant carte et terrain, il m'a semblé devoir passer comme ça ... Euh ... Oui, mais non !
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Retour sur la KHW : ça roule !
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Tandis que les kilomètres du matin commencent à s'additionner, je vais croiser un couple de randonneurs allemands dans l'autre sens sur la KHW et nous allons discuter un peu de nos itinéraires respectifs, nos bivouacs, nos sacs ... Ils vont me dire que je suis le 3ème "thru-hiker" qu'ils croisent en quelques jours, et je me sens flatté de ce qualificatif.

A peine plus loin je vais faire une autre rencontre, celle d'une jeune fille de peut-être 20 ans, en sandales, dans une longue robe à fleurs et avec un grand bâton de berger. J'ai l'impression de croiser Heidi revenue dans la montagne retrouver son grand-père. Elle travaille au Rattendorfer Alm que j'aperçois plus bas dans la vallée, où elle s'occupe de la traite et de la confection de fromages. Dans ses moments libres elle part arpenter les chemins. Elle s'intéresse à mon parcours, me décrit sa balade du jour ... Il me faut cependant bien dire au revoir à Heidi et poursuivre ...

Avec un faible dénivelé le chemin poursuit son parcours en balcon, avec toutefois quelques jolis passages plus escarpés dans le secteur du Ringmauer ( 2017m). Ici et là le rocher est creusé de cavités, héritage de la ligne de front de la 1ère GM. A un moment il faudra passer à travers le rocher, dans une vaste cavité verticale heureusement équipée de barreaux & câbles.

Visez bien !
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Je vais faire ma première vraie pause à seulement 11h00, près du col de Kordin Sattel ( 1716m). Le chemin et les kilomètres vont ensuite dérouler facilement entre rhododendrons et mélèzes. Il faut redescendre d'une centaine de mètres pour atteindre Straniger Alm, où la piste amène randonneurs, voitures et quads. Je ne fais qu'un bref passage le temps de renouveler mon eau, puis reprend de l'altitude pour passer par un ancien camp militaire austro-hongrois, avec un monument orné d'un portrait gravé de François-Joseph, et où je visite quelques galeries.

Franz-Josef
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galeries
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Je monte ensuite par les pentes herbeuses jusqu'au Findenigkofel (2 016m), longeant sur les crêtes les anciennes tranchées aujourd'hui envahies par les herbes. LE sommet en lui-même offre de très belles vues, mais est tellement envahi par les taons que je ne peux pas m'y tenir. Heureusement, plus loin, là où la crête se fait plus rocheuse, je trouve une petite galerie qui la traverse de part en part : c'est le lieu idéal pour m'abriter du chaud soleil et marquer ma deuxième pause.

les anciennes lignes de défense sont encore visibles
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Findenigkofel
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Le chemin continue ensuite de bien dérouler. Je longe ainsi le joli Zollnersee, et ne m'arrêt que quelques minutes à la Zollnersee Hütte pour refaire le plein d'eau et définir ma stratégie pour ce soir. Il n'est que 16h et je dois choisir entre poursuivre par une petite section en crêtes qui me ferait remonter de 500 m D+, ou bien demeurer un peu plus bas par une section que j'imagine plus roulante. J'opte pour cette dernière, me disant qu'elle permettra de m'avancer plus ce soir, avec en tête le risque d'orage que m'annonçait la météo.

Zollnersee
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Cette section "roulante" va néanmoins comporter une remontée dans un environnement très végétalisé, presque tropical (si je fais abstraction des névés qui traînent ...). Je vais manquer de peu d'y marcher sur une vipère, chacun ayant effrayé l'autre ...

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Passé le Col de Kronhof Törl (1792m) à 19h, je repasse en Italie et déjà à l'ombre en mode de recherche active de mon bivouac. Après avoir visité encore quelques ancienne galeries militaires froides et humides, je trouve le spot idéal à côté d'une ancienne étable (ou écurie ?), munie d'une table de camping et d'un point d'eau. J'y trouve un espace juste suffisant pour installer le Pioulou et prendre un dîner assis plus confortable qu'à l'habitude. Je pouvais monter encore un peu jusqu'au petit lac que je vois sur ma carte, mais après plus de 11h de marche effective je suis rincé et veux me poser.

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En quelques chiffres :

J09 :
32 km
D+ 2 005 m D- 1 726 m
Marche 11h20
km-Effort 55.2

Cumul J01-09 :
328 km
D+ 18 500m
Marche 95h30
km-Effort 550


Itinéraire & progression
7Q04ijR48.Trace-J09.s.jpeg7Q04joPRb.Progression-J09.s.jpeg


Impression générale :

J'en retiens une très belle étape facile sur de bons chemins, un peu plus en altitude que les précédentes, laissant entrevoir les débuts de la "vraie" montagne. Les vues sont superbes, l'eau abondante ... Tout va bien !

Les vestiges du front de la 1ère GM se font plus présents, c'est l'un des aspects qui m'intéressait le plus sur cette section. Je vais être servi !

Côté matériel c'est ma powerbank qui se révèle inopérante. Désormais et jusqu'à la fin je ne fonctionnerai plus qu'avec le téléphone directement relié au panneau solaire.


voir la vidéo :
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Dernière modification par Hervé27 (16-11-2021 11:30:39)


Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

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#29 26-09-2021 12:03:06

Hervé27
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

J10 - Samedi 10 juillet - Pramosio ~4h45

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Avec une discipline maintenant bien acquise pour m'extraire du confort relatif de mon duvet dès les 1ères lueurs, c'est avec de très belles lumières que je me mets en chemin à 5h25. Je dis confort relatif car cette nuit n'a pas été idéale sur un sol un peu en dévers, et avec un vent qui aura soufflé à l'opposé de ce à quoi je m'étais préparé. Le bon côté d'un mauvais bivouac, c'est qu'on n'y traine pas une grasse matinée ... Je profite de ma fontaine pour bien m'hydrater, mais ne me charge que de mon 1/2 litre maintenant habituel. L'angoisse du prochain point d'eau s'est désormais effacée.

ma fontaine
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Vue arrière sur mon lieu de bivouac
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C'est par un large chemin que je m'élève, pour rapidement atteindre le lac Avostanis (1950m) encore dans l'ombre, non sans profiter des magnifiques lumières du levant. En contrebas, la profonde vallée italienne du But prend le chemin de l'Adriatique. Arrivé au lac tandis que les crêtes s'illuminent, je découvre que ce que je croyais être un casernement en ruine est en réalité un beau bivacco à côté d'anciennes écuries. Si j'avais su et au prix de 20 mn de marche supplémentaire mais facile hier soir, j'aurai pu dormir en dur, à condition de faire abstraction des souris que je vois se cacher lorsque j'ouvre la porte ...

Casera Pramosio Alta : tout confort, mais attention aux souris !
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Lago Avostanis, bivacco et étables / écuries
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Le chemin s'élève encore un peu et je dépasse brièvement les 2100 m d'altitude, profitant de belles vues avec la lumière rasante du levant sous un plafond nuageux qui me laisse dans l'incertitude quant à la suite de la journée. Au Sud les plaines menant à la Lagune de Venise et à l'Adriatique semblent être bien ensoleillées : je les longeais en train il y a 10 jours ... déjà une éternité !

Un large névé occupe encore le thalweg qui m'amène au col de Tischlwanger Törl à 1761m. La Casera Palgrande di Sopra est en ligne de mire, et j'y arrive à 7h15 par un sentier en balcon. La partie habitable aménagée par le Club Alpin Italien est en revanche fermée, mais l'enceinte de cet ancien casernement est facilement bivouaquable.

Au pied du Blaustein (2195m), belles lumières vers le Levant et au Sud vers l'Adriatique
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Tischlwanger Törl 1761m
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Casera Palgrande di Sopra 1700m
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Depuis ce refuge ouvert (mais fermé ...) je remonte rapidement vers la crête que je vais désormais suivre par de petits sentiers parfois évanescents. Je me fie aux bornes frontières d'une part, à la marque enregistrée sur ma cartographie d'autre part. C'est un terrain de lapiaz, où les profondes entailles naturelles de la roche ont été retravaillées par l'armée austro-hongroise pendant les années de guerre avec l'Italie (1915-1918). Pour nous Français, l'image des tranchées est celle de la boue, et les cicatrices du conflit ont été rapidement recouvertes avec la remise en culture. Ici les tranchées furent taillées dans la roche et demeurent inaltérées ...

Ligne de crêtes, ligne de front ...
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Lors de la redescente par un petit sentier au Rossbodentörl (1581m), je découvre par le haut ces tranchées de pierre qui ont ici été dégagées de la végétation pour en permettre la visite. Le site a été constitué en un vaste musée à ciel ouvert. Je passe ici par une douce matinée d'été, mais il faut imaginer que durant 3 ans on s'est battu ici été comme hiver, et que des hommes y ont vécu agrippés au rocher. Quelques jours plus tard à Sillian, je vais trouver un livre formidablement documenté sur cette guerre alpine, où même les sommets à 3 000 m des Dolomites constituèrent des positions militaires dûment aménagées. Sur cette période, les pertes humaines liées aux intempéries et aux accidents de montagne furent chiffrées à 60 000 morts pour le seul côté italien ...

Suivant fidèlement ma trace préparée à la maison depuis le Rossbodentörl, je m'élève à nouveau par le petit sommet du Freikofel 1757m, perdant souvent le chemin jusqu'à constater qu'il n'existe tout simplement pas, malgré le tracé présent sur OpenTopo. Au GPS je vais m'efforcer de rester sur cet itinéraire, enjambant les antiques tranchées, m'accrochant aux rhododendrons et me frottant aux orties ... Les choses empirent quand je dois redescendre vers le col de Freikofelscharte 1649m, où j'en viens à faire de l'accrobranche à flanc de rocher pour péniblement redescendre.

Quand enfin j'y parviens, je suis prévenu mais un peu tard que je viens de faire tout ça à mes risques et périls ! Il m'aura fallu 1 heure pour progresser d'1 km ...

On aurait pu me le dire avant ...
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Mémorial au sommet du Freikofel 1757m
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D'ici, on contrôle un accès direct vers l'Adriatique, visible à l'horizon
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Le chemin semble mieux marqué / aménagé pour remonter au Kleiner Pal (1867m), et malgré l'appréhension avec laquelle je m'y engage, la montée raide ne présente heureusement pas les mêmes difficultés que celles que je viens d'éprouver. Les vestiges sont là-haut encore plus impressionnants, car mieux préservés par l'absence de végétation d'une part, par leur position dominante sur les vallées alentours d'autre part. J'y rencontre maintenant de nombreux visiteurs arrivés par l'autre côté, dont l'affluence va se faire plus forte avec l'heure qui avance (il est 10h30 quand j'arrive).

Sommet fortifié du Kleiner Pal
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Aparté historique : ce que je parcoure est la partie carnique du front, laquelle resta essentiellement statique durant les premières années de la guerre, jusqu'à l'effondrement italien de Caporetto en octobre 1917 (suivi d'un redressement avec l'appui des troupes françaises, puis de la dislocation de l'empire austro-hongrois fin 1918)

Le front des Alpes 1915-1918 sur Wikipédia
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Avant de redescendre du Kleiner Pal, je vais profiter d'un poste d'observation bien frais et à l'ombre pour faire ma pause-café et me remettre de cette matinée éprouvante. En 5h je n'ai progressé que de 9km. Sur ce sommet on peut visiter les casemates, naviguer dans le réseau de tranchées, explorer les galeries dont la montagne est truffée. Le site est accessible à pieds uniquement en montant depuis le Col du Plöckenpass 1360m, soit 500m de dénivelé par d'étroits lacets ... qu'il me faut maintenant descendre ... Je pimente cette redescente en prenant l'option d'emprunter "l'escalier de fer", cheminée verticale aménagée durant la guerre, puis rééquipée il y a quelques années pour les visiteurs amateurs de frissons (modérés).

L'escalier de fer. Une randonnée verticale ...
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Au Plöckenpass 1360m, étroit col routier frontalier entre Italie et Autriche coincé entre les 2 falaises du Kleiner Pal 1867m et du Frischenkofel 2226m, la route d'accès côté autrichien a été refaite et est désormais couverte pour la protéger des avalanches. C'est facilement compréhensible quand on voit que l'ancienne route est jonchée d'arbres et même d'une grande plaque de neige résiduelle ... un 10 juillet ... à 1350 m ...

Plöckenpass
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Au vu de ma lente progression de ce jour et du terrain, je décide ici de ne pas poursuivre par les crêtes. Ce que j'ai pu apercevoir de loin de mon itinéraire prévisionnel, lequel m'aurait fait passer par un sommet à 2686m (le Kollinkofel), m'en dissuade complètement. Cela risque fort de s'apparenter à de la via ferrata et je n'ai aucune envie de m'y risquer. J'opte donc pour revenir sur la Karnischer Höhenweg, moyennant un large détour par le Sud sur le versant italien. C'est certes plus long en distance, mais certainement beaucoup plus roulant et bien moins incertain ...

Je ne m'attarde donc pas au col, redescends quelques minutes par la route puis m'éloigne des lieux surfréquentés pour retrouver un sentier paisible tandis que le temps se fait menaçant. Je réalise trop tard que je n'ai pas profité du col et du réseau qu'il offrait pour actualiser mes prévisions météo, trop occupé à échanger avec mon épouse pour organiser notre RDV logistique prévu à Sillian dans 2 jours ... Je dois donc m'en tenir à mes derniers relevés de la veille au matin pris à Naßfeld, maintenant quelques dizaines de km derrière moi ... De moins en moins fiable au fur et à mesure que j'avance sous ce ciel couvert qui pourrait devenir orageux ...

Peu après le col un panneau attire l'attention sur une inscription romaine gravée dans le rocher, laquelle s'interpréterait comme une marque de dévotion à la montagne après une avalanche destructrice, appelant à sa clémence pour l'avenir. C'est ce que je crois avoir compris du panneau explicatif en italien, langue que je n'ai jamais étudié ... Vertige de la superposition historique à travers 2 000 années en ce lieu stratégique ...

Vue arrière sur le Plöckenpass, au pied des falaises du Kleiner Pal
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Atteignant maintenant un genre de petit col à 1860m, j'ai en ligne mire le Rifugio Marinelli, sis sur la Forcella Moraret à 2112m. Le refuge semble à portée de main mais j'ai pas mal de yo-yo à faire avant de l'atteindre, longeant encore des fortifications et galeries diverses de la Grande Guerre. Sur ce tracé ,"La Scaletta" est un passage vertical percé dans la roche (ou aménagé dans une cavité naturelle ?), dont le franchissement serait difficile sans les barreaux métalliques et chaînes qui l'équipent. A mi-parcours de cette cavité, une statuette de la vierge semble exiger une prière au visiteur sujet au vertige ...

La Scaletta
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Pas de regret d'avoir contourné les crêtes rocheuses embrumées
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Rifugio Marinelli, sur son col perché
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Le sentier va tantôt longer la falaise, tantôt remonter par les vallons. De nombreux fontis, certains encore partiellement remplis de neige, signalent la présence de larges cavités calcaires sous mes pieds. Il est 15h quand, après un large vallon herbeux agrémenté d'un petit lac, j'arrive au Rifugio Marinelli par un bout de piste en lacets. Les lieux ne m'inspirent pas pour une pause, et je porte trop de provisions pour m'autoriser de dépenser mon argent liquide dans le refuge. J'entreprends donc rapidement la descente par l'autre côté, et après avoir fait un plein d'eau sur un captage, je me trouve une agréable pente herbeuse à l'ombre d'un mélèze pour moi, au soleil revenu pour le séchage de mon couchage.

Longue redescente par le fond de vallée
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Après la pause la descente se poursuit encore, maintenant par la forêt, jusqu'au refuge aux allures d'hôtel-restaurant Edoardo Tolazzi à 1370m, soit presque 800m de D- et un pénible retour dans la chaleur. Ma cheville faiblit à nouveau malgré son strapping, et après un plein d'eau sur la fontaine du parking, je me fais violence pour entreprendre la remontée vers la Wolayer Pass à 1973m. Heureusement la fin d'après-midi et la reprise d'altitude m'amènent de la fraîcheur, ce qui compense en partie ma chute d'énergie.

Long névé à remonter avant la Wolayer Pass
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A l'approche du col dans une ambiance de plus en plus minérale, le temps se fait incertain et je crains l'orage. Je vais recevoir quelques gouttes à hauteur du Rifugio Lambertenghi (fermé pour travaux), m'amenant à renfiler la veste de pluie ne serait-ce que comme coupe-vent après avoir abondamment transpiré dans la montée.

Un panneau richement documenté explique les lignes de fortifications qui séparaient italiens et austro-hongrois sur ce col, à quelques mètres les uns des autres. Situation hallucinante quand on voit les lieux ...

Wolayer Pass. Rifugio Lambertenghi sur le versant italien ...
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... et le magnifique Wolayer See côté autrichien
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L'heure avance et il est 18h30 lorsque je passe le col et longe la Wolayer Hütte à l'extrémité du lac. Je ne pense plus qu'à une chose, établir mon bivouac, avec en tête les règles assez strictes en la matière en Autriche. Je cherche donc à me faire le plus discret possible, et les abords du lac et du refuge ne s'y prêtent pas ... Je commence donc à redescendre par la piste, plutôt péniblement car ma cheville fatigue, cette journée est trop longue pour permettre sa convalescence ... Le fond de la vallée est un vaste replat herbeux ... mais partout j'y vois vaches et chevaux ... Sur la piste je vois patrouiller un 4x4, que j'interprète comme étant celui du berger inspectant ses troupeaux en raison de  ses arrêts réguliers. J'évite donc de planter ma tente sous ses yeux et poursuis mon chemin en quête du spot qui m'accueillera ce soir. J'hésiterai à frapper à la porte de la Obere Wolayer Alm, où visiblement des randonneurs sont hébergés et se préparent à dîner. Un nouveau grand replat herbeux est là encore occupé par les troupeaux. Ma dernière chance semble être un peu plus loin dans un petit bois avant que la vallée ne devienne plus raide et encaissée. Je quitte la piste pour l'explorer et finis par y trouver une surface herbeuse entre les blocs rocheux, qu'il me faudra dégager des branchages qui la jonchent, et que je disposerai tout autour en guise de barricade à l'égard des vaches.

Je vais croire quelques instants avoir perdu mes piquets, mais ouf, je finis par les retrouver  - allez savoir pourquoi - dans mon sacabouf ...

La piste n'est pas loin et j'espère que le vert kaki du Pioulou ne sera pas trop visible. Je vais entendre le 4x4 du berger passer, s'arrêter un long moment à ma hauteur ... mais personne ne viendra me prier de décamper. Un peu plus tard, tandis que je suis couché , une vache débouchera de derrière le rocher qui me cache, et restera longtemps en arrêt, interloquée de ma présence ... Vu du raz du sol, la bestiole était impressionnante à voir, mais à ce stade plus rien ne m'aurait fait me relever ...

Mon spot vu aux petites heures le lendemain matin
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En quelques chiffres :

Total J10 :
26 km
D+ 2407 D-2531
Marche 12h00
km-Effort 56.3

Cumul J01-10 :
354 km
D+ 21 000
Marche 107h30
km-Effort  606

Itinéraire & Progression
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Impression générale :

Clairement ma plus belle étape depuis le départ, comme en témoigne l'abondance d'images que j'ai ressenti le besoin de partager.

Fatigué dès le matin par une section pénible à jouer le sanglier acrobate sur les crêtes fortifiées, et handicapé par ma cheville à la fin de cette longue journée, le manque d'énergie était manifeste et j'aurai apprécié de trouver un spot bien plus tôt que cela ne m'a été possible. Mes 12h de marche n'ont été entrecoupées que de 2 pauses, il m'en a sûrement manqué une ...

C'est ce jour-là que les vestiges de la Grande Guerre auront été les plus impressionnants à longer / traverser, et je ne puis que recommander leur visite ... Les nombreux vastes névés bien en-dessous de 2000m, bien que facilement traversés (sans crampons ni piolet, bien que je les porte depuis le début sur mon dos), vont fermement ancrer en moi l'appréhension d'aller naviguer plus haut en altitude. Au fil du périple, je vais mettre du temps à m'en affranchir.

Ayant prévu de m'arrêter 2 jours en famille à Sillian que je compte atteindre lundi après-midi, j'espère que ce repos permettra à ma cheville strappée de se remettre.


voir la vidéo :
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Dernière modification par Hervé27 (16-11-2021 11:31:31)


Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

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Hors ligne

#30 28-09-2021 16:49:45

Hervé27
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

J11 - dimanche 11 juillet : Pô à vau l'eau

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Toujours efficace pour démarrer aux petites heures, je quitte mon bivouac à 5h30 sous un ciel embrumé. La nuit en fond de vallée a été humide malgré le couvert des arbres, il faudra que je trouve le moyen de sécher abri et couchage dans la journée. Mes projections d'itinéraire me font arriver demain à la mi-journée à Sillian, où mon épouse et ma fille doivent me rejoindre en voiture. Une location pour 3 nuits est réservée, et après 11 bivouacs sauvages consécutifs il va être temps que je reprenne forme humaine ...

Rapide marche arrière par la piste à la sortie de mon petit bois, que je quitte à la perpendiculaire pour longer la prairie où vaches et chevaux recommencent à s'animer et me regardent passer avec placidité. Je retrouve le fléchage de la KHW à travers le chaos des gros blocs de calcaire, ainsi que quelques restants de neige. Le sentier évolue à flanc sur un gros kilomètre, puis oblique pour affronter la montée au Col Giramondo (2 005 m) par une succession de petits lacets dans la pente herbeuse.

réveil brumeux
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soleil ouaté
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J'arrive au col un peu avant 7h, avec un soleil qui a du mal à s'extirper des nuages. J'y repère de multiples replats qui auraient permis de planter l'abri, mais il était illusoire de vouloir les atteindre hier soir. Il m'aurait fallu marcher jusqu'à 21h, et poser le bivouac dans la brume ...

Col Giramondo, vues arrière & avant
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Je quitte ici la KHW et emprunte un petit chemin à flanc pour rejoindre le col de la Niedergaller Joch (2 003 m). De là je constate que le sentier qui doit me faire brièvement redescendre en vallée côté autrichien n'est pas très entretenu, largement envahi par les herbes détrempées en ce début d'été humide. Mes plans prévoient ici une succession de montée-descente avec des dénivelés importants, pour rejoindre et suivre une ligne de crêtes rocheuses à 2400 - 2500 m. Pris de doutes sur la pertinence du tracé et alors que les nuages s'accrochent toujours sur les sommets, je me ravise et décide de m'en remettre au confort de la Traversata Carnica / Karnischer Höhenweg, laquelle suit un itinéraire beaucoup plus doux par le versant italien, et me fera rattraper mon prévisionnel un peu plus loin ... (changement d'avis n°1)

se mouiller les pieds pour aller mettre la tête dans les nuages ? bof ...
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oui, on sait ...
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Je me transfère donc facilement vers la Sella Sissanis (1 987 m) par un sentier en balcon, longeant au passage un petit lac grouillant de têtards ... et de dépouilles décharnées des grenouilles de l'an passé ...

devinez ce que les têtards ont dévoré ?
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Sella Sissanis
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Descente facile du vallon Sissanis, cependant encore encombré de larges névés, et où les arbres ont été broyés comme des allumettes par les avalanches. A partir des anciens casernements ruinés de la Casera Sissanis di Sotto (une grange en état pouvant servir d'abri), la déclivité s'inverse pour maintenant entamer la douce remontée par le Val Fleons. Le ciel est toujours bien chargé, et je ne me fais pas d'illusion sur le fait que j'aurai à affronter la pluie sur mon trajet. 1ère rencontre du jour avec un belge bien chargé sur la KHW : on discute un peu puis chacun reprend sa route ...

résidus d'avalanches
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Casera Sissanis di Sopra. Abri possible, pince-nez indispensable ...
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Le sentier s'élève lentement entre alpages et mélèzes, et au pied d'une impressionnante falaise monolithique. Il se transforme en piste après la Casera Fleons di Sotto, où le vaste chalet que ma carte indique comme un abri me semble plutôt être occupé par le berger, mais bon, je n'ai pas posé la question ...

Je croise des groupes déjà dans leurs ponchos à la descente du Col de l'Ofner Joch (2 011 m), et bien vite je vais moi aussi enfiler la veste de pluie en même temps qu'une petite pluie s'installe. Evoluant à une altitude modérée, pas particulièrement exposé sur un sentier bien marqué avec des possibilités d'abri régulières, je suis résolu à poursuivre ma progression sans me laisser arrêter par les éléments.

Casera Fleons di Sotto, ça se gâte ...
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A la bergerie Casera Fleons di Sopra, après déjà une petite montée, la pluie se fait plus forte. Avec difficulté je vais consulter ma carte car il va me falloir prendre une nouvelle décision d'itinéraire : je suis à rien de mon tracé prévisionnel, lequel depuis le col de l'Ofner Joch descendait côté autrichien vers le refuge de la Hochweißsteinhaus, pour suivre ensuite les crêtes à 2 400 - 2 500 m, inenvisageables avec cette météo. En-dehors des crêtes, les versants italien et autrichien présentent une différence majeure : les vallées autrichiennes sont perpendiculaires à la crête et ne communiquent quasiment pas entre elles. On ne peut alors longer le massif que si l'on descend de 1 000 m pour remonter ensuite par la large vallée du Gaital. Côté italien en revanche, les vallées sont obliques, beaucoup plus larges, et permettent de longer en balcon, en contrebas des crêtes et à une altitude raisonnable (1 900 - 2 000 m). C'est donc le choix que je fais alors ... (changement d'avis n°2)

Je prends la direction du refuge Calvi sous une pluie soutenue, dont je crois à chaque accalmie que le plus dur est passé. Mêlée de grésil, elle va me fouetter les jambes, mais dans l'ensemble ma pourtant très légère veste de pluie va bien me protéger (pour le haut du corps, s'entend ...). Malheureusement, chaque accalmie est suivie d'une averse aussi soutenue que la précédente, et lorsque j'arrive au Passo Sesis (2 367 m) je remets en cause mon arbitrage précédent. En effet, si la pluie doit durer et m'immobiliser sur le versant italien des Alpes Carniques, comment vais-je rejoindre Sillian où l'on m'attend demain midi au pied du versant autrichien si les cols et les crêtes restent barrés par le mauvais temps ? Je ne suis pas aidé par l'étui détrempé de mon téléphone, rendant la consultation de ma cartographie plus que compliquée. Je vais donc me rabattre sur l'option de la longue redescente par le versant autrichien, que j'avais pourtant exclue tout-à-l'heure ... (changement d'avis n°3).

Je suis poussé vers ce choix par le fait qu'à cette altitude et dans ces conditions, je ne vais pas tarder à me refroidir et prendre des risques imbéciles. Suivant le marquage, je vais rejoindre d'abord le Passo di Castello ( 2 318 m) en restant essentiellement à niveau, puis descendre légèrement vers la Hochalpjoch (2 281m) pour repasser en Autriche et descendre vers le refuge de Hochweißsteinhaus (~1 850m) par un long chemin en lacets. Je n'ai plus qu'une idée sous la pluie qui continue : tant qu'à être mouillé, autant que l'eau soit chaude et il me faut donc perdre de l'altitude roll  ...

Je vais donc descendre, descendre ... longer plusieurs Alm par le sentier, rentrer dans la forêt, attraper l'interminable piste forestière ... La pluie s'assagit enfin, la moiteur remplace la fraîcheur ... 10 km et 1 200 m de D- après mon revirement, j'arrive au village de Frohn qui surplombe le fond de la Gaital. Rincé au propre comme au figuré, je squatte un banc près de l'église tandis que le soleil revenu commence à me sécher. J'étale mes affaires et rumine mon fiasco du jour ... A bien regarder la carte et avec tous mes changements d'avis, j'ai pratiquement tourné en rond 2 h sous la pluie, au lieu de prendre sagement abri ...

Frohn 1 310m : son église, son banc, sa vue ...
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Je repars un peu avant 15h, avec guère d'autre choix désormais que de remonter la Gaital par une succession de sentiers et surtout de pistes forestières. Mon objectif est désormais de progresser le plus possible en direction de Sillian, de manière à me donner le plus de marges de manœuvre pour demain en fonction de la météo et du RDV familial prévu. Longtemps le long du torrent, parfois plus en forêt, je vais aligner les kilomètres dans le mode bourrin qui me caractérise ...

La Gaital et le Gail qui lui donne son nom
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Je croiserai bien quelques cyclistes et promeneurs, mais l'heure avançant  ma promenade restera très solitaire. A 18h avec les pieds qui chauffent, je me pose sur une petite aire aménagée avec table et fontaine. Je n'ai plus croisé personne depuis longtemps, et je me dis que finalement les lieux se prêtent excellement bien au bivouac, même si ici tout est interdit. A 2 doigts de planter les piquets, je vais voir passer un promeneur avec son chien, puis un cycliste ... Je finis par quitter les lieux pour aller chercher un spot plus à l'écart et moins en vue ...

Occasion manquée
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Choses vues : ici, l'ordre règne
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Et avec ça, faites de beaux rêves !
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Il va cependant me falloir marcher encore longtemps, tandis que le jour tombe. Si j'ai bien repéré quelques replats possibles sur la carte, ils s'avèrent tous être excessivement spongieux. J'ai l'impression qu'ici c'est tout le flanc de la montagne qui dégouline d'eau ... Maintenant prêt à m'installer n'importe où pourvu que je m'arrête, je repère un bord de piste raisonnablement plat et herbeux ... mais une femme en tenue de camouflage avec jumelles et fusil me fait un signe pour signaler sa présence ... chasseuse ? garde-forestière ? Je suis contraint de poursuivre encore pour m'éloigner et éviter d'être vu ...

Maintenant sur une portion de piste inaccessible aux véhicules car non encore dégagée des arbres tombés de l'hiver, je finis par m'échouer sur un espace presque plat où j'aurai du mal à enfoncer les piquets, mais vaguement abrité des regards par un arbre tombé. Il est 21h, je suis naze ...

rideau !
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En quelques chiffres :

Total J11 :
47 km
D+ 1880 D-1974
Marche 13h20
km-Effort 70.4

Cumul J01-11 :
400 km
D+ 23 000 m
km-Effort 676


Itinéraire & Progression
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Impression générale :

La journée avait bien démarré mais ma tentative d'affronter la pluie a tourné au fiasco, m'amenant à accumuler les mauvais choix. Rétrospectivement, la bonne solution était de m'arrêter à l'abri le temps de laisser passer le mauvais temps avant de reprendre la route dans l'après-midi. A bien regarder la carte, cela ne m'aurait pas spécialement retardé par rapport à l'immense détour que j'ai effectué ... J'ai été emporté par mon désir de rester en mouvement, et ma crainte que l'orage s'installe dans la durée et m'immobilise sur le versant italien.



voir la vidéo :
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Dernière modification par Hervé27 (16-11-2021 11:32:21)


Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

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#31 28-09-2021 18:32:18

Serval
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

Salut Hervé smile

T'inquiète, on est toujours là... wink

Hervé27 a écrit :

#628244Je prends la direction du refuge Calvi sous une pluie soutenue, dont je crois à chaque accalmie que le plus dur est passé. Mêlée de grésil, elle va me fouetter les jambes, mais dans l'ensemble ma pourtant très légère veste de pluie va bien me protéger (pour le haut du corps, s'entend ...). Malheureusement, chaque accalmie est suivie d'une averse aussi soutenue que la précédente, et lorsque j'arrive au Passo Sesis (2 367 m) je remets en cause mon arbitrage précédent. En effet, si la pluie doit durer et m'immobiliser sur le versant italien des Alpes Carniques, comment vais-je rejoindre Sillian où l'on m'attend demain midi au pied du versant autrichien si les cols et les crêtes restent barrés par le mauvais temps ? Je ne suis pas aidé par l'étui détrempé de mon téléphone, rendant la consultation de ma cartographie plus que compliquée.

Quelle journée, dis-donc... Quand je pense qu'à la même époque je marchais aussi en Italie, mais par une température de 40°C et en rêvant qu'un peu de pluie rafraîchisse l'atmosphère ! big_smile

Dernière modification par Serval (28-09-2021 18:33:23)


(Modification non justifiée = orthographe, typo, etc.)

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« Jamais je n'ai tant pensé, tant existé, tant vécu, tant été moi, si j'ose ainsi dire, que dans [les voyages] que j'ai faits seul, et à pied. » (J.-J. Rousseau)

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#32 28-09-2021 19:31:20

zorey
HRP addict
Lieu : Pyrénées, Aure et Louron
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

Serval a écrit :

#628259T'inquiète, on est toujours là... wink

Ouaip ! cool


La nature nous a donné deux oreilles et une bouche pour écouter le double de ce que l'on dit.

Ourson Power

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#33 28-09-2021 19:43:52

Hervé27
éMULe
Lieu : Normandie
Inscription : 01-11-2017
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

Serval a écrit :

#628259Quelle journée, dis-donc... Quand je pense qu'à la même époque je marchais aussi en Italie, mais par une température de 40°C et en rêvant qu'un peu de pluie rafraîchisse l'atmosphère ! big_smile

Salut Serval wink

Sans dévoiler le suspense des épisodes suivants, je vais encore avoir de quoi te rafraichir  roll


Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

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#34 28-09-2021 20:29:14

laxmimittal
Membre
Inscription : 23-10-2016

Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

zorey a écrit :

#628266

Serval a écrit :

#628259T'inquiète, on est toujours là... wink

Ouaip ! cool


+ 1

L.


La touche Majuscule de mon ordinateur fonctionne mal.

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#35 28-09-2021 22:07:09

Stéphane_33
Membre
Lieu : Bordeaux
Inscription : 05-12-2018

Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

Je suis là aussi  wink

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#36 28-09-2021 23:27:55

moby59
à l'école des MUL
Inscription : 08-06-2006

Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

T'as vu comme "rétrospectivement" c'est facile de faire les bons choix big_smile

Mais sur le moment on n'a aucune visibilité sur la réalité de la météo, et se peler moitié déjà moitié mouillé, sans moyen de se mettre au chaud en attendant une hypothétique amélioration qui ne viendra peut-être pas... C'est assez peu réaliste. Surtout quand on a un planning à tenir pour être au bon endroit le bon jour.

Pour moi le plus important c'est de savoir limiter la prise de risque inconsidérée (genre tiens si j'allais à 2500m en plein brouillard alors qu'en plus mon duvet est trempé), et ça visiblement tu es plutôt doué pour ne pas (totalement tongue ) faire le foufou.

Bon c'était ma manière de dire "j'avais volontairement commencé à lire ton récit en retard pour toujours avoir de la marge mais je viens d'atteindre la fin... Je suis pas dans la m..."

Vite la suite  cool

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#37 30-09-2021 10:24:24

Hervé27
éMULe
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

J12 - lundi 12 juillet - Sillian, fin des Alpes Carniques et repos !

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Nuit pas terrible sur le bord de cette piste forestière. Je remballe une tente bien mouillée de rosée et un polycree tout crotté, avec en prime une belle déchirure de ~10 cm par le milieu ! Je le replie précautionneusement, pour pouvoir le réparer au duct-tape avant le prochain bivouac. En marche à 5h30, je suis toujours dans le rythme ...

Mon épouse et ma fille devaient prendre la route très tôt, mais même ainsi elles ne seront pas à Sillian avant le début d'après-midi, pour une chambre réservée à partir de 16h.  Si je marche directement vers Sillian par la vallée, j'y serai dès 10h, ce qui n'a pas d'intérêt. J'ai donc le temps de profiter de ma journée et de remonter en altitude profiter du beau temps, avec juste quelques voiles de brume qui s'évaporeront vite au soleil.

Comme déjà indiqué, ici les vallées du versant autrichien sont parallèles entre elles et perpendiculaires à la crête principale, séparées par des crêtes secondaires raides et essentiellement dépourvues de chemins de franchissement. On communique d'une vallée à l'autre soit en descendant dans le Gaital pour remonter la vallée suivante, soit en montant vers la crête principale pour redescendre. Je pourrai remonter directement depuis la vallée où je me trouve, mais je me mets en tête de suivre encore un peu la Gaital jusqu'au village de Kartitsch, avec l'idée d'y profiter d'une (possible) boulangerie. J'aimerai en effet agrémenter mon menu de la journée, car si mes réserves ne sont pas épuisées elles ont perdu en diversité ... Las ! Aucun commerce alimentaire dans ce village que j'atteins après avoir longé la grande route sur plus de 2 km ... J'aurai mieux fait de tracer direct vers les crêtes !

Kartitscher Sattel 1530m
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Bredouille, je bifurque donc après Kartitsch pour remonter par la vallée de Hollbrucker, quittant les prés fauchés au millimètre pour la forêt. Le chemin est large et confortable, puis rejoint la piste. Au fond de cette vallée encaissée, quelques chalets servent de résidence d'été. J'ai le choix de poursuivre par la piste qui fait de grands lacets par la droite de la vallée, ou par un autre chemin tout aussi bien marqué qui remonte le torrent plus directement par la gauche. C'est l'option que je prends ...

Alors que je passe à gauche du torrent je salue à distance le berger qui, avec son chien, descend par la piste à droite. Mon chemin s'avère être celui des vaches, et avec la météo bien pluvieuse ce que je pensais être un large chemin (trait continu épais sur OpentTopo), s'avère être une sente étroite et raide en surplomb du torrent, bien serrée par une végétation luxuriante et détrempée, la texture du chemin consistant en un malaxage de cailloux et de bouses, servant qui plus est d'exutoire au ruissellement ... Bref, je ressors bien mouillé et crotté de l'expérience. Le chien du berger viendra cependant m'accompagner, peut-être pour m'encourager et éviter que je ne me perde ?

Résumé de la situation
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Passé cet épisode j'émerge au-dessus des arbres et dans un vaste cirque d'alpages au pied des crêtes. Quand je recoupe la piste il y a là quelques voitures, et j'aperçois des randonneurs devant moi dans la montée. Je me programme avec succès pour les dépasser dans l'ascension, même si je commence à sentir que je manque de jus, n'ayant pas déjeuné. Je ne veux cependant pas faire de pause avant d'avoir rallié la crête et ainsi renoué avec mon itinéraire "officiel". Je double ma dernière cible lorsque celle-ci s'arrête pour prendre de l'eau au torrent qui alimente un magnifique petit lac, puis opte pour l'ascension de la Hollbrucker Kreuz ( 2581m), qui sera le plus haut point de la traversée à ce stade. L'ascension  se fait par une arête herbeuse sans difficulté, sauf que j'ai la sensation de m'y traîner, par manque d'énergie ... Je ne vais cependant m'y poser que 20 mn, le temps de souffler et m'hydrater. Après cette rapide ascension de 1 300 m D+, tout est maintenant facile par de très beaux chemins de crêtes.

lac
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Hollbrucker Kreuz
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J'aurai pu/dû arriver par ces crêtes ...
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... mais je suis venu de par là en bas
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la suite est par ici
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Je pousse ainsi jusqu'au mont Helm 2484 m, la proue et terminus des Alpes Carniques, dont la cime est occupée par un refuge désaffecté, à l'origine un hôtel restaurant d'altitude, avec une terrasse panoramique et vue éblouissante sur (entre autres) les Dolomites. Je vais rencontrer de plus en plus de monde en allant dans cette direction, essentiellement des italiens montant depuis Sexten, via les parkings situés à mi-pente. Il y a bien du monde au sommet, mais je vais me faire une belle place dans l'herbe, face aux Dolomites, pour une longue et agréable pause ensoleillée.

En chemin
7QeiBWM3s.J12-08.s.jpeg

Dolomites ...
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L'ambiance est bon enfant, avec tout un groupe assemblé en chorale et chantant des chansons de supporters ... C'est ainsi que je pourrai déduire qu'hier soir, l'Italie a remporté la Coupe d'Europe ...

Par échange de SMS je suis la progression routière du groupe familial qui doit me rejoindre à Sillian, village sur lequel j'ai une vue directe et qui ne doit pas être à plus de 2h de marche. Je quitte mon perchoir pour n'entamer la descente que quand je suis sûr que personne n'aura à attendre l'autre trop longtemps.

Tout en bas, Sillian (1103m)
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La foule s'évapore dès que je bascule dans la descente sur le versant autrichien : beaucoup moins de candidats pour un dénivelé de 1 400 m D- ! Les rhododendrons sont en pleine floraison et magnifiques sous le soleil. Un fois en forêt, la descente se fait par un chemin très direct, sans lacets, lequel doit être particulièrement éprouvant à la montée. Il s'agit en fait du "Heimatsteig", sentier de découverte agrémenté de panneaux d'information, documentant le Tyrol d'hier et aujourd'hui, la cicatrice de la Ière Guerre Mondiale depuis laquelle les villes jumelles de Sexten et Sillian sont séparées des 2 côtés d'une frontière mal acceptée ...

Ma cheville supporte mal la forte déclivité, et c'est avec soulagement que j'atteins le fond de vallée et Sillian. A l'entrée du village et comme il n'est que 15h30, je tue le temps assis à une table de pique-nique entre le véloroute, le torrent et la voie ferrée, parcourue par des trains régionaux ultra-modernes et resplendissants de propreté.

Encore bien en avance sur la famille qui a fait une pause sur la route, je me décale ensuite en centre-ville vers le gîte / hôtel où nous avons réservé. Une plaque signale que la vieille bâtisse a accueilli les séjours estivaux du jeune Richard Strauss ... J'ai un peu peur de mon apparence après 12 jours et 11 nuits passés dehors, mais je vais recevoir un accueil absolument adorable. Le jeune homme et la jeune fille de la réception vont me poser des questions passionnées sur la randonnée, ayant entendu parler de la Via Alpina mais imaginant la chose réservée à des aventuriers de haut niveau ... La sidération sera à son comble quand je soulèverai mon sac léger (d'une seule main, évidemment), pour leur expliquer que je fais la chose un peu différemment de l'image habituelle associée aux mulets ...

Je vais avoir le temps de m'installer dans la chambre, prendre un bain chaud, faire ma lessive ... avant que ma petite famille ne me rejoigne. Quel plaisir !

Me concernant, le séjour à Sillian sera studieux, car j'ai concédé d'y travailler un dossier pour un client. Malheureusement pour mon épouse et ma fille, la météo sera particulièrement mauvaise. Elles auront juste le temps le lendemain matin d'aller faire un tour à Sexten au pied des Dolomites, mais avec un temps qui sera vite bouché. Nous passerons nos 3 soirées à écumer les pizzerias de la ville (on a essayé de trouver plus typique, mais on s'y est pris le jour de fermeture).

Bloqués par la pluie le 14 juillet, on tuera le temps le matin en regardant le défilé en streaming wink

Pizza XXL, puis Pizza Nutella-Chantilly-Framboise tongue tongue tongue tongue
7QeiGOwem.J12-11.s.jpeg7QeiI5frK.J12-12.s.jpeg

Lors de ce ravitaillement, je vais procéder à des ajustements mineurs :
- remplacements des chaussettes X-Socks "Outdoor Low Cut" par X-Socks "Run Discovery". En effet, les Outdoor semblent s'user beaucoup plus vite dans mes chaussures Scarpa Mescalito, étant déjà percées après seulement 400 km. Les Run Discovery neuves avec lesquelles je repars vont me durer tout le reste de la traversée.
- abandon de ma batterie tampon, que je n'arrive jamais à recharger correctement. Je me débrouille finalement très bien avec le branchement direct du téléphone sur le panneau solaire, même par temps couvert (mais pas en forêt !).
- réparation au duct-tape de mon polycree. A la fin de la traversée tout mon duct tape y sera passé ...
- échange de ma sardine à tête cassée avec une neuve de réserve

Je vais retirer le strapping de ma cheville durant une journée pour voir où j'en suis, mais je le referai à neuf avant de repartir ... La convalescence ne fait que commencer.


En quelques chiffres :

Total J12 :
27 km
D+ 1662 D-2154
Marche 8h40
km-Effort 50.2

Cumul J01-12
428 km
D+ 24500
Marche 129h30
km-Effort 726

Itinéraire & Progression
7Qe7GW9Xg.Trace-J12.s.jpeg7Qe7I7whV.Progression-J12.s.jpeg

Impression générale :

Le retour du beau temps me laisse encore l'illusion que l'été va enfin s'installer. La journée aura été consacrée à partiellement compenser mon fiasco de la veille, pour m'offrir malgré tout un court final par les crêtes et de superbes vues sur les Dolomites. Le retour pour quelques jours à une vie sociale et familiale me fera le plus grand bien. Je passerai ces 2 jours de repos à Sillian en espérant qu'ils seront l'occasion de laisser passer les orages ...

voir la vidéo :
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Dernière modification par Hervé27 (16-11-2021 11:33:30)


Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

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#38 01-10-2021 19:28:55

Hervé27
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

J13 - Jeudi 15 juillet : la pluie fait la Bonner

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Après avoir fait mes au-revoirs à la petite famille, je quitte le gîte à 6h45, le sac rechargé pour 3-4 jours d'autonomie. La météo dont je dispose est maussade mais pas spécialement pluvieuse avant la soirée. Mon idée est donc de rejoindre les crêtes tant que ça se tient, puis d'improviser en fonction des conditions : le tracé ne manque pas d'échappatoire vers l'un ou l'autre versant.

Je vois les quelques nuages qui circulent dans la vallée comme de la brume qui va se dissiper au soleil, et c'est donc avec bon moral que je traverse le village et rejoins le véloroute pour rallier le village d'Arnbach, d'où je reprendrai le sentier qui me ramènera sur les crêtes.

La météo telle qu'on me l'annonce ... à Sillian
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L'hypercentre de Sillian, on peut croire au soleil
7Qgkx670y.J13-02.s.jpeg

eau, rail, (vélo)route
7Qgl7iVds.J13-04.s.jpeg

tout est propre et rangé, pas un brin d'herbe ne dépasse
7QglvaRB1.J13-05.s.jpeg

A Arnbach, je me réhydrate et recomplète ma 1/2 bouteille à la fontaine près d'une chapelle, puis attaque tranquillement la longue remontée des 1 500 m D+ qui sont au-dessus de moi. Le chemin agricole va s'élever pour rejoindre d'abord une petite route, laquelle se transformera ensuite en piste forestière que je vais suivre assez longtemps. En m'élevant, je vais constater que la brume ne se dissipe pas et même, au contraire, se renforce en nuages épais ...

Là-haut, le mont Helm et le terminus des Alpes Carniques
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J'aurai eu de quoi faire des milliers de photos d'oratoires, croix et autres chapelles. Je vais vite arrêter d'en faire tant j'en croise (et croiserai encore ...). Idem pour les belles façades de maisons tyroliennes ... et les innombrables (et bienvenus !) bancs ... et fontaines ...
7QgmlNIp5.J13-08.s.jpeg7QgmmCOE0.J13-09.s.jpeg7Qgmnt9kl.J13-07.s.jpeg7QgmIgSI6.J13-10.s.jpeg

Le chemin est facile, la piste égrène quelques lacets avant de tirer plus droit à flanc de vallée, et maintenant en forêt. Je traverse une nappe de brume, et à partir de là il me faut enfiler la veste de pluie car il commence à pleuvoir. Pourvu que ça s'améliore plus en altitude, me dis-je ... Etonnamment quand la piste se refait sentier, je traverse quelques prés où les hautes herbes masquent totalement la trace. Je progresse au pif, me trempe les pieds définitivement, après tous mes efforts pour faire sécher mes chaussures à l'hôtel ... Heureusement je retrouve bientôt un chemin moins détrempé lorsque je rattrape la piste qui arrive de l'autre versant pour desservir les chalets environnants.

Mon téléphone a rejoint son étui étanche, au détriment de la qualité des prises de vue
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J'émerge du couvert forestier, passe la barre des 2 000 m, et rejoins enfin les alpages ... toujours sous la pluie, et toujours un peu plus au frais avec seulement 6-7°C au thermomètre ... La pluie n'est jamais forte, mais toujours présente. Je garde la polaire par-dessous, et l'ensemble est confortable. Quelques lacs pourraient égayer le paysage, et je me prends à rêver d'une pause ensoleillée sur leur rive ... Une conséquence de la pluie, c'est qu'elle n'incite pas à s'arrêter en terrain découvert : il n'est donc pas question de feignasser ...

Pas besoin de baignade pour se mouiller
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J'affronte mon 1er petit sommet au Parggenspitze 2323 m, puis un peu plus loin et plus haut, je rattrape la Bonner Höhenweg au petit sommet de la Hochrast (2433m). Il y a là d'anciens baraquements militaires italiens, que j'explore à la recherche d'une place au sec et au propre, mais je n'y trouve rien d'engageant. Plutôt que de me refroidir dans une pause sans charme et malgré les 4h de marche maintenant dépassées, je préfère poursuivre.

Là en face, les Dolomites ...
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J'arrive un peu plus tard au refuge du Marchkinkele à 2545m, et à 11h30 il eut été très tentant d'aller se réfugier dans sa chaleur et y quémander un déjeuner. Je vais me faire violence pour résister à la tentation, car sinon pourquoi porter mon plein de vivres ? Le chemin ne quitte plus les crêtes et permet une progression très facile car il est d'excellente facture, c'est ce qui m'a permis de prolonger cette session de marche qui s'éternise. Quand néanmoins 20 mn plus tard je croise de nouveaux baraquements, j'y trouve un espace où quelques planches permettent de s'asseoir au propre, et m'y installe pour faire chauffer un peu d'eau et grignoter. Pour ne pas prendre froid, j'enfile mes affaires de bivouac bien sèches (je me rechangerai avant de repartir, naturellement), et m'enfile dans le Bivy. A l'abri du vent, l'ensemble est bien agréable.

Refuge de Marchkinkele, sans vraiment de charme ...
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de l'eau, de l'herbe, des nuages ...
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Au Tobiacher Pfannhorn 2663m, je dépasse mon nouveau plus haut point de la traversée. La pluie n'est jamais tout-à-fait absente, mais je m'y suis habitué et ma configuration vestimentaire m'apporte une protection convenable.  Les petits cols et petits sommets s'égrènent, longtemps entre 2400 et 2600m. Privé des vues sur les massifs environnants, le chemin en devient monotone. Seuls quelques névés viennent apporter un peu de contraste dans l'environnement.

c'est pour orienter les randonneurs ou pour les égarer ?
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Quelques névés décoratifs
7QgrgDJE0.J13-17.s.jpeg

En milieu d'après-midi la pluie va se dissiper et le temps se faire un peu plus lumineux. Je vais même avoir droit à un peu de soleil et de ciel bleu, alors que je remonte vers mon dernier col du jour, le Heimatjochl à 2644m. Je suis vraiment en montagne et plutôt soulagé de voir la neige fondre maintenant rapidement.

Enfin un peu de soleil !
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(un peu de) vue depuis le Heimatjochl
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Il est 17h15 et après 9h de marche, proche de mon quota des 10h, il me faut envisager le bivouac. J'avoue que par ce temps frais et avec la météo qui était donnée pluvieuse pour ce soir et cette nuit, il pourrait être judicieux de chercher bivouac à un peu plus basse altitude. J'ai toutefois sur ma carte un assez grand lac sur l'itinéraire, le Schwarzsee, dont je me dis qu'il serait bête de ne pas aller y prospecter. Pour le rejoindre, le chemin va changer un peu de nature et se faire plus aérien, avec quelques passages de ruisseaux et névés dans une pente plus raide.

en fin de journée, attention à l'accident (forcément) bête ...
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Ce changement de terrain va réveiller ma cheville et je vais garder de ce fait un souvenir un peu pénible de cette fin de journée. En revanche je bénéficie de très belles lumières avec un soleil maintenant plus bas, qui perce à travers les déchirures des nuages. J'arrive soudainement à l'aplomb du Schwarzsee, qui s'avère être un très beau lac, très sombre (le nom le laisse deviner) car entouré d'un cirque de falaises. Il me faut encore naviguer sur une crête de rochers lissés par l'ancien glacier, pour arriver enfin au déversoir  du lac. En face, j'ai aperçu deux cabanes, et je me demande si ...

vue du versant autrichien
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le Schwarzsee
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En raison des falaises rejoindre les 2 toitures aperçues n'est pas simple : il me faut remonter puis redescendre un verrou rocheux, tout cela avec ma cheville fatiguée qui réclame le repos. Quand enfin j'y parviens, je découvre 2 beaux "Biwak" (nous sommes en Autriche) en bois et jumeaux, sous une simple toiture en A, avec chacun un large perron abrité, et une baie vitrée en guise de façade. Ils ont l'air pratiquement neufs, et offrent 8-9 couchages chacun (matelas et couvertures).

Je rencontre là 2 jeunes randonneurs. Nous allons tâtonner pour identifier nos nationalités et langues respectives, cherchant à échanger d'abord en allemand (je les crois autrichiens et ils pensent la même chose de moi puisque c'est dans cette langue que j'essaye de communiquer). On se mettra d'accord sur l'anglais, évidemment ... Ce sont en fait 2 tchèques qui font des randos en étoile depuis un point de base dans la vallée, et avaient repéré ces abris quelques jours plus tôt et y reviennent passer une nuit dans le cadre d'un nouveau circuit. Ils se partagent un abri, je vais me partager l'autre à moi tout seul !

Une fois que je me serai posé et changé, nous partagerons nos grignotages respectifs de fruits secs, chocolat et autres biscuits ... La conversation se serait bien éternisée, mais les températures décidément fraîches à ~5°C nous pousseront à rallier nos appartements et duvets respectifs.

Luxueusement installé, je serai réveillé un peu plus tard par des éclats de voix. Mes 2 tchèques en accueillaient un 3ème, arrivé à la frontale ...

Grüß Gott !
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En quelques chiffres :

Total J13 :
33 km
D+ 2876 D-1455
Marche 10h00
km-Effort 61.4

Cumul J01-13 :
460 km
D+ 27300
Marche 139h30
km-Effort 788

Itinéraire & Progression
7Qgj4fEzD.Trace-J13.s.jpeg7Qgj5pMzF.Progression-J13.s.jpeg

Impression générale :

En dépit des longues heures sous la pluie, j'ai bien aimé cette journée toute en douceur, sur un chemin qui permettait toujours une allure régulière, sauf peut-être la dernière heure pour rallier le Schwarzsee. J'imagine que par beau temps les vues au Sud sur les Dolomites et au Nord sur le Höhe Tauern doivent être magnifiques. La Bonner Höhenweg est un très bel et facile itinéraire d'altitude.

En revanche le réveil de ma cheville malgré 2 jours de repos complet vient me rappeler que l'épée de Damoclès est toujours au-dessus de ma tête (étonnant pour une cheville, non ?)...


voir la vidéo :
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Dernière modification par Hervé27 (16-11-2021 11:34:26)


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#39 02-10-2021 10:43:03

Bebacksoon
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

Hello Hervé  smile
C'est un plaisir de lire ton récit, merci de partager ton aventure ! J'y puise un jour l'envie de partir sur un tel chemin  smile
Je me demande si ton récit puise dans ta seule mémoire ou bien si tu prenais des notes chaque fin de journée ?
Au plaisir de lire la suite!


"La route m'appelle et m'attire. À l'Est, à l'Ouest, au Sud, au Nord.
Ce soir, ici, j'ai trouvé un lit. Demain, je coucherai dehors…" Michel Corringe

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#40 02-10-2021 11:06:56

Hervé27
éMULe
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

Salut Bebacksoon et merci wink

Pour bâtir le récit de chaque journée, j'ai désormais une méthode bien établie :

- reprendre en détail la trace GPS (enregistrée les 1ers jours, puis tracée manuellement chaque soir par la suite)
- reprendre les quelques notes prises sur le bloc-notes du téléphone (souvent au dictaphone) : il ne s'agit parfois que des horaires de passage et de pause, parfois de rédaction plus fournie si j'en avais le temps en journée ou au bivouac
- visionner toutes les photos / vidéos, chacune ayant été faite pour montrer / raconter quelque chose. Chaque prise de vue est aussi une prise de note ...
- laisser affluer les souvenirs et faire le tri de ce qui vaut la peine d'être raconté

La rédaction du récit "fixe" ma mémoire de l'aventure et empêche l'oubli de faire son œuvre. C'est pour cela que l'exercice est si important pour moi. En revanche il me faut bien 3 ou 4 heures pour pondre un épisode, raison pour laquelle il me faudra plus de temps pour clore le récit qu'il ne m'en aura fallu pour effectuer la traversée  ...


Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

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#41 02-10-2021 18:23:47

Hervé27
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

J14 - vendredi 16 juillet, Schwarzsee

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Pluie et brouillard ont dominé la nuit, bien fraîche dans le Biwak dont la température est restée à 5°C. Au moins étais-je au sec et à l'abri du vent ...

Chute d'efficacité pour me lever et rempaqueter mon barda, peut-être pour repousser le plus longtemps possible le renfilage de chaussettes et chaussures toujours mouillées et froides ... Après la nouvelle alerte hier soir pour ma cheville, je refais mon strapping : il me semble que la cheville ayant désenflé, le strapping fait à Sillian s'est relâché, et c'est peut-être la raison de la résurgence des symptômes.

Ce n'est qu'à 6h10 que je quitte les lieux, après avoir revisité mon itinéraire prévisionnel et ses options.

Si j'ai pu m'assurer hier que je pouvais progresser malgré une pluie continue mais légère, mon tracé prévisionnel doit me faire passer à la mi-journée le col de Jägerscharte à 2870m, puis ensuite un passage à 3070m à la Lenksteinjoch entre 2 petits glaciers ... Je sais déjà que les températures, les névés et la pluie vont rendre l'exercice déraisonnable ... La seule bonne question est donc de savoir où et quand décrocher des crêtes pour rejoindre la vallée et des conditions moins précaires, ainsi que la question du versant par lequel basculer :
- côté italien se succèdent 3 grandes vallées perpendiculaires à la crête, elles-mêmes séparées par des cols de 2300 à 2700 m et un très large détour kilométrique, mais de multiples options offrant le choix de naviguer à des altitudes plus ou moins hautes selon les conditions
- côté autrichien je peux rejoindre et remonter une vallée plus encaissée parallèle à mon itinéraire (la vallée du Schwarzach), mais avec un seul itinéraire de sortie à son extrémité via des cols à 2200 et 2600 m, et donc le risque d'y rester bloqué un certain temps si les conditions se dégradent (la dernière météo dont je dispose est mauvaise pour aujourd'hui et surtout demain ...)
Au plus tard, il me faudra prendre cette décision au col routier de Staller Sattel (2052m), sinon après cela je n'aurai plus d'échappatoire. Je prends donc la résolution de garder mon itinéraire sur la crête frontière pour l'instant, et d'aviser à chaque possibilité de bifurcation.

Je m'élève dans le brouillard, mais au col tout proche de Gsieser Lenke je constate que celui-ci ne bouche que le côté autrichien, la vue côté italien portant assez loin sous le plafond nuageux. Il recommence rapidement à pleuvoir, et à cette heure il fait frais : seulement 4°C sur cette crête où je progresse en yo-yo, montant 100m puis redescendant d'autant, fouetté par la pluie glacée ... Au Höllböden 2710m que je passe sans rien voir dans la brume, je remonte d'un cliquet supplémentaire le point haut de la traversée, ça me console mais ne réchauffe pas le randonneur en short ...

6h17 Par là-bas, un col, peut-être ...
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6h20 Vordere Gsieser Lenke 2539m, vers l'Italie
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6h21 Vordere Gsieser Lenke 2539m, vers l'Autriche
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Arrivé au col suivant de la Pfolscharte 2608m, je dispose de ma 1ère option de redescente, et franchement je ne vois déjà plus l'intérêt de m'exposer ainsi à la pluie et au froid. Comme le côté autrichien est bouché (c'est de là qu'arrivent les nuages depuis hier) et l'italien dégagé, je bifurque à gauche et entame la redescente. Vite arrivé à un petit lac et un banc, alors que la pluie s'est faite plus légère, je remets en cause ma décision : l'Italie me ferait un détour bien trop important, et quand bien même c'est de ce côté qu'il me faudrait finalement descendre, le détour serait moindre en poussant encore jusqu'au col suivant. Je me ravise donc et remonte au col, pour reprendre la crête et passer par le Hochkreuzspitze 2739m : encore un petit cliquet supplémentaire ... mais toujours 3-4°C, de la pluie et du vent ...

7h22 Pfolscharte 2608m, vue vers Sankt Magdalena (Sud-Tyrol)
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7h49 juste après le Hochkreuzspitze 2739m
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Passé le Hochkreuzspitze, je redescends vers le col suivant du Gsieser Törl, et après 3h de marche j'estime mérité de m'offrir une pause à l'abri relatif d'un ancien casernement. Je peux m'asseoir à l'intérieur sur un vieux volet en bois posé au sol et faire chauffer de l'eau, comme hier dans mon bivy en guise de couverture de survie pour un peu de confort thermique. Ainsi posé au calme, je peux tranquillement scruter mes cartes et prendre ma décision de descendre depuis ici vers l'Autriche. Je pourrai pousser jusqu'au col routier de Staller Sattel sans avoir à affronter de conditions plus difficiles (chemin en balcon et via col à 2549m "seulement"), mais je trouve plus plaisant de descendre par une vallée "sauvage" plutôt que par la suivante, traversée par la route. Finie donc l'altitude pour ce matin !

9h04 juste avant le Gsieser Torl 2206m, pause petit déj avant de bifurquer
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Dès le début de la redescente je dois faire avec un chemin qui canalise le ruissellement ... De fait, l'eau coule de toute part, je n'essaye même plus d'éviter les flaques ... La pluie se calme un peu et la luminosité remonte tandis que je perds de l'altitude, je commence déjà à douter et à regretter mon choix de la redescente ... mais pas de nouveau changement d'avis : la température se fait plus douce et je m'en tiens à ma décision. Je retrouve la ligne des arbres, croise quelques chalets et des fontaines ... ainsi que quelques randonneurs qui montent depuis le village de Maria Hilf. La vallée du Schwarzach semble être un départ de randonnée prisé, et ça se comprend quand on voit tous les massifs auxquels elle donne accès.

Je fais une tentative de retirer la veste de pluie et la polaire, mais après seulement 10 mn il faut déjà reconfigurer. C'est lors de ces changements répétitifs que je vais constater que les coutures de ma veste de pluie ont commencé à craquer au niveau de la taille : je savais que le risque de ce vêtement hyper-léger était la possible fragilité du tissu, mais je m'attendais plutôt à voir des accrocs après frottement à la végétation ou aux rochers, pas un délitement de la structure de la veste. J'ai d'ailleurs toujours fait particulièrement attention à ne jamais tirer dessus trop fortement ... Bref, satisfaction quant à l'efficacité de la membrane MP+ (imper/respi au top !), mais très grosse déception sur la qualité de fabrication. Je consommerai un peu de duct-tape pour consolider ces déchirures et les empêcher de se propager, pour peu à peu perdre confiance dans cet article et changer de veste à mi-parcours début août.

10h00 juste après le Gsieser Torl, chemins de pluie ...
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Je passe en fond de vallée à petite distance du village, d'abord par une piste carrossable puis par un sentier, presque toujours à un jet de pierre du torrent (lequel déborde chaque fois que son lit se fait moins encaissé). C'est plutôt agréable et bucolique, même si la pluie m'accompagne toujours. Je progresse ainsi un long moment, et vers 13h l'alignement des planètes m'offre la fin de la pluie, un chaud rayon de soleil et un espace dégagé où m'installer ... Je réquisitionne une souche d'arbre tronçonné en guise de banc, dispose mon panneau solaire au mieux pour reprendre un peu de charge, tout en reprenant quelques calories. Evidemment, je dois vite refaire usage de mes talents de garçon vacher en éconduisant une, puis deux vaches trop curieuses ... J'essore mes chaussettes et les enfile sur les bâtons plantés dans le sol, espoir illusoire, ce n'est pas de sitôt que je marcherai les pieds secs !

11h39 le Schwarzach, cascade de la Frattentümpfel 1600m
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13h23 fenêtre ensoleillée
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Je repars avec l'espoir d'un temps meilleur pour la suite de la journée, mais je suis vite douché roll . Retour aux 3 couches et à la combinaison polaire + veste de pluie (NB : la respirabilité de la veste de pluie est bien meilleure avec un vêtement intermédiaire par dessous). Maintenant à nouveau sorti du couvert forestier, je peux profiter d'un peu de vue sur les massifs de part et d'autre de la vallée, le plafond nuageux écrêtant juste les sommets au-dessus de 3000m. Le sentier se refait désormais piste sur de longs kilomètres, j'y croise en 1h plus de randonneurs et VTTistes que je n'en avais vu depuis 2 jours.

14h17 le Schwarzach vers l'aval : ça se (re)couvre déjà
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15h15 par là-haut, les crêtes et cols où j'aurai dû me trouver
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15h22 Seebachalm 1870m
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Me préparant à une dégradation des conditions, je me fixe comme objectif minimal de remonter toute la vallée, jusqu'à l'intersection qui me permettra de retrouver mon itinéraire théorique. Les kilomètres sont longs sur cette piste, et comme un refuge (l'Arvental Alm) est indiqué sur ma carte au niveau de mon intersection, je me dis qu'il ne serait pas déraisonnable d'aller m'y mettre au chaud. Il est 16h30 quand je vois les couleurs autrichiennes flotter au-dessus de l'alm (c'est a priori le signe de reconnaissance convenu pour attirer le randonneur affamé / assoiffé / épuisé / détrempé (rayez les mentions inutiles) ... Je pousse jusque-là, franchis la terrasse où des tables détrempées n'accueillent plus personne pour aujourd'hui, entre et trouve un large groupe attablé. Après un rapide échange, je comprends que les lieux n'offrent que la restauration et pas d'hébergement ... Tant pis, je ressors sous la pluie et envisage d'autres plans pour ce soir ...

Il n'est pas tard et le chemin qui s'offre pour l'instant à moi est des plus facile, avec toujours la piste carrossable qui cette fois remonte en pente régulière vers un col pas très élevé, le Klammjochl. Je l'atteins en seulement 1/2h, et dois demander aux vaches de s'écarter pour me laisser passer le portillon anti-bovins qui sert de frontière avec l'Italie ...

17h01 Klammljoch 2288m, contrôle des passeports, les douaniers sont vaches
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17h04 Klammljoch : je retrouve l'itinéraire et commence à prospecter plus sérieusement pour un bivouac
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Le temps est toujours bien bouché avec une pluie faible et à nouveau frais maintenant que je reprends un peu d'altitude. J'entame ma prospection du bivouac, car j'ai vraiment envie de pouvoir m'isoler dans le cocon chaud et douillet du duvet ... Il y a de nombreux espaces bivouaquables près du col, mais rien de discret car en vue directe de la piste (il passera 2 ou 3 véhicules), et surtout au milieu des vaches. J'aimerai pouvoir me poser avant le prochain obstacle sur l'itinéraire, qui est le col de l'Ochsenlenke à 2585m : je ne m'attends pas à pouvoir le passer avant 19h, et crains d'y affronter des conditions un peu rudes pour une fin de journée. Mon chemin bifurque de la piste carrossable pour en commencer l'ascension, et je vais à plusieurs reprises sortir du chemin pour explorer différents spots possibles. Outre que les terrains suffisamment plats vont manquer, je vais également affronter un vent froid qui martyrise ce vallon ... Je me prends à espérer qu'une cabane de berger soit accessible, mais la trouve cadenassée, et les alentours aussi peu propices à planter les piquets.

Après avoir consommé peut-être 1/2 h dans cette vaine prospection, je vais me résoudre à affronter le col de l'Ochsenlenke ("Col du Boeuf"). J'ai déjà fait le gros de la montée dans ma recherche de bivouac, et il ne me reste plus que 250 m d'ascension, sur un sentier somme toute assez facile ... sauf pour le vent violent qui m'accompagne et se renforce avec l'élévation. Au moins ne pleut-il plus ... Au col je trouve des vues belles autant que sinistres par cette sombre météo, quelques lacs de fonte et d'épais névés. Les conditions ne sont pas idéales pour une batterie d'iPhone et je dois vite le mettre au chaud pour empêcher qu'il ne se mette en rideau.

17h10 Klammljoch : prochain col visible sur la droite. Ah la vache !
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18h54 Ochsenlenke 2585m : vue sur le Westlicher Riesenferner, glacier au pied du Magerstein (3273m). Pas mécontent d'avoir largement contourné ces altitudes ...
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18h56 Ochsenlenke 2585m, vent à décorner le boeuf
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Heureusement pour moi le vent est cassé après le col et les conditions se font plus acceptables. Je descends des pentes d'estives bien enherbées, mon large chemin faisant de nombreux lacets (sûrement une ancienne "strada militare"). Il y aurait bien quelques replats favorables, mais je suis dans le territoire des vaches. La descente des lacets est interminable, mais j'atteins enfin une nouvelle piste à hauteur de bergeries ruinées. Les alentours sont malheureusement envahis par les épinards sauvages et les orties, sur une hauteur proportionnelle à l'arrosage reçu cette année. Chou blanc dans les épinards !

Le vallon se fait maintenant très encaissé et je deviens pessimiste sur mes chances de bivouac. Quand un peu plus bas je longe un beau chalet moderne bien entretenu et visiblement inoccupé, je suis à 2 doigts d'aller y squatter le petit carré de pelouse bien plane près de la terrasse ... mais je me dis que si les vaches sont là, le propriétaire ne doit pas être loin non plus, et le risque de le voir remonter en 4x4 de la vallée est trop grand. Bref, je continue encore, me demandant où tout cela va me mener ...

La vallée est maintenant trop resserrée et les pentes trop raides pour que je puisse espérer trouver le moindre spot dans l'immédiat. Je sais d'après la carte que lorsqu'elle s'ouvrira sur la vaste vallée de l'Arhntal, je n'aurai plus que des pentes boisées peu propices ... Heureusement, la bonne étoile du randonneur bovin brillera pour moi, car juste là où j'estimais se trouver mon ultime chance, j'aperçois un vieil abri de bois et toiture de pierre (naturellement végétalisée...), inhabitable par lui-même mais sur un petit promontoire herbeux offrant un replat honorable, et une vue en surplomb magnifique (sûrement grandiose par beau temps !). Il me faut faire avec les hautes herbes et quelques grosses pierres mal placées, mais j'arrive à y caler le Pioulou. Il est 19h50 et j'ai encore enquillé une très grosse journée, n'ayant fait que 2 pauses véritables ...

A peine la toile tendue la pluie reprend, vite à l'abri ! J'en aurai oublié de célébrer le franchissement des 500 km depuis le départ roll cool

20h13 ultime possibilité de bivouac, à 2080m en balcon au-dessus de l'Ahrntal
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En quelques chiffres :

total J14
40 km
D+1886 D-2322
Marche 11h30
km-Effort 65.8

cumul J01-14
501 km
D+ 29000m
Marche 151h
km-Effort 854

Itinéraire & Progression
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Impression générale :

Forcément frustré d'avoir dû momentanément quitter l'altitude, mais ça restait le moins mauvais choix compte-tenu des conditions. Je l'ai mieux géré que dans l'épisode similaire des Alpes Carniques (cf J11), puisque cela ne rallongeait pas le tracé. Cet itinéraire bis était aussi beaucoup plus plaisant, même s'il a fallu faire avec beaucoup de piste carrossable. Moins engagé, le tracé a permis de ménager ma cheville, que je surveille ...

Je ne profite pas des vues que je pouvais espérer par beau temps, mais j'ai au moins la satisfaction de parvenir à progresser bien dans les temps malgré l'adversité. Mine de rien, en prenant en compte les 2 journées pluvio-orageuses passées bien à l'abri à Sillian, cela fait maintenant 4 jours consécutifs qu'il pleut : à quand l'été ? à quand les pieds secs ?

voir la vidéo :
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Dernière modification par Hervé27 (16-11-2021 11:35:22)


Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

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l'ultralighter più estremo di sempre

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#42 03-10-2021 10:14:11

brons07
Membre
Inscription : 27-06-2015

Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

Bonjour,
Toujours à l'écoute.
Expérience très intéressante.
Tu arrives à garder le moral sur la durée malgré le mauvais temps.
Bravo.

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#43 03-10-2021 14:07:38

Etimul
Membre
Inscription : 13-03-2013

Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

Ah Hervé, j'admire ta sérénité face à la pluie

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#44 03-10-2021 15:08:07

Joy Supertramp
Sempervirens
Inscription : 25-03-2019
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

Franchement je sais pas comment tu fais. J'aurais probablement pris un billet pour les Canaries  lol
Autant marcher l'hiver en conditions difficiles ne me dérange pas (neige, vent, froid), autant enchainer des journées en montagne l'été sans rien voir et en se pelant les miches toutes la journée, au bout d'un moment je n'y trouve plus de plaisir. C'est psychologique, la même chose de programmée en hiver ça passe, mais non, l'été, c'est le moment des longues soirées au bivouac, des baignades dans les lacs et des belles lumières du matin, sinon, autant rester chez soi  smile Bref, j'ai pas de mental, toi oui, bravo wink


Edit sans précision : ortho ou faute de frappe !

Liste montagne été top confort

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#45 03-10-2021 19:20:58

Hervé27
éMULe
Lieu : Normandie
Inscription : 01-11-2017
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

Salut Joy, Brons, Etimul  smile

Mon début de HRP 2018 m'avait appris qu'il était possible de randonner avec quelques jours de pluie, lesquels donnent alors plus de saveur au beau temps à son retour ... Cette année, j'essayais donc de me convaincre que le soleil et l'été n'étaient plus très loin, qu'il suffisait de tenir un peu ...

Nous avons cependant tous nos limites, et je vais craquer à plusieurs reprises dans ce périple, et ça commence dans l'épisode qui suit :


J15 - samedi 17 juillet : Sisyphe, 1ère

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Il pleut. Encore.

Quand je m'arrache à mon duvet, seule une petite pluie accompagne les premières lueurs du jour de son piquetis sur la toile tendue, et n'entrave finalement pas trop le rempaquetage.

Je n'ai eu qu'une très légère condensation intérieure, mais c'est donc une tente mouillée que je range, en l'enfermant avec sa housse (ainsi que le polycree) dans un plastique pour la séparer du reste des affaires. Plus désagréable, ce sont des limaces qui se sont infiltrées un peu partout, il convient d'être vigilant quand on remballe et compacte les affaires ...

L'itinéraire prévisionnel me faisait faire une grande boucle en balcon autour de la haute vallée de l'Ahrntal, mais avec ce temps bouché la décision est vite prise de court-circuiter cet énorme détour, et de réserver le temps économisé à des jours meilleurs ... Plutôt que d'obliquer vers l'Est en balcon, je descends donc directement dans le fond de vallée pour remonter de l'autre côté et obliquer à l'Ouest. La descente se fait sur piste avec de nombreux lacets, pour aboutir sur la route de fond de vallée et la civilisation.

7h02 descente dans l'Ahrntal
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Avant de remonter je me détourne par le village de Prettau, en longeant la route sur 2 km. Il va en effet me falloir une petite rallonge de vivres car je ne prévois plus de redescente en vallée avant le Col du Brenner. La pluie reprend avant que je n'atteigne le village, où je trouve un café supérette parfaitement adapté à mon besoin. Je recomplète avec un peu de Tucs et beaucoup de chocolat, un morceau de fromage ... et m'installe à une table avec café et viennoiseries tongue . Dehors la pluie se fait violente : je patiente et me restaure en attendant l'accalmie. J'actualise aussi ma prévision météo en profitant du réseau, et mon moral perce mes chaussettes ...

7h35 arrivée à Prettau
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demandez le programme !
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Il faut pourtant bien se remettre en chemin, et quand la pluie se calme je retourne affronter les éléments. Sur le flanc Nord de l'Ahrntal le sentier ne devrait présenter aucune difficulté, oscillant entre 1600 et 2000m en limite de forêt et des alpages. C'est de toute façon préférable à une marche en fond de vallée qui me contraindrait souvent aux bords de route. A la sortie de Prettau j'oblique donc à droite par un sentier de remontée que j'ai repéré, avec 550m de D+.

La pluie va se tenir à l'écart sur cette remontée, dont la seule difficulté sera de me faufiler en mode sanglier entre les rhododendrons sur les derniers 100m, ma trace sur carte ne correspondant plus à aucun chemin visible. La pluie fait son retour quand je rattrape la piste : pas besoin de reconfigurer, je n'avais quitté ni veste de pluie ni polaire ...

Malgré la pluie, continue mais pas violente, l'itinéraire à flanc et au-dessus des arbres se fait plus lumineux et agréable. Ayant laissé en place mon panneau solaire, je constate que le téléphone accepte de charger même dans ces conditions dégradées. Moyennant un peu d'économie à l'usage, je réussirai à maintenir ma charge au cours de cette journée bien ennuagée.

9h52 je court-circuite toute la haute vallée de l'Ahrntal, on se demande pourquoi ...
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9h52 j'ai dormi pile là en face, au centre de l'image
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Tantôt piste, tantôt sentier, l'itinéraire et facile et se laisse parcourir avec plaisir. Il relie les "Alm" qui se trouvent au fond de chaque vallon traversé : en forêt entre deux vallons, en alpage dans les vallons. Dans l'un d'eux le chemin semble se perdre quand il déboule de la forêt 50 m au-dessus d'un chalet. Je commence à me faire ma trace pour rattraper en biais la piste qui dessert la ferme, mais je vois le fermier qui me fait de grand signe et ouvre un portillon pour que je n'ai pas à faire ce détour. A peine abrités de la pluie sous la toiture de son chalet, nous allons essayer d'échanger un peu, lui ne me parlant qu'en allemand (version Tyrol roll ), moi ânonnant quelques mots. Il semble plus impressionné que je sois arrivé de Trieste jusqu'ici à pieds, que par le fait qu'il me faille encore marcher 3 fois ça pour finir le périple ... Nous tombons cependant vite à court de conversation (et de vocabulaire en ce qui me concerne), et je poursuis ma route sous la pluie revenue.

A 12h20 et toujours sous la pluie, je me dis que j'ai bien mérité de la patrie et que je peux m'offrir le luxe d'un arrêt-déjeuner à l'Hollenzalm. Je ne me souviens plus de ce que j'ai eu dans mon assiette, mais c'était chaud et roboratif, vraiment bienvenu ! Au dessert, je poursuis la très longue série d'Apfelstrudeln & capuccino dont je ne me lasserai pas de l'été tongue . Météo oblige, pas énormément de monde, et tous en intérieur évidemment ...

12h11 Traduction : "ici commence l'assiette de salade de ma vache, pas les toilettes de votre chien"
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12h11 faudra penser à essorer la salade, d'ailleurs ...
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13h15 j'ai laissé passer l'averse en déjeunant à l'Hollenzalm
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Le temps est plus lumineux quand je redémarre, pas plus que quelques gouttes ...

Sur cet itinéraire en balcon je m'étais réservé un amuse-bouche avec une courte excursion sur le versant autrichien (aller par un col et retour dans la vallée suivante par un autre). Par ce temps bouché, évidemment, je coupe aussi cette boucle et reste sur le confort de mon sentier semi-forestier & à faible dénivelé

13h27 chemin de pluie ...
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13h33 cabanes bivouac randonneurs, mais fermées
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Pour l'heure, revenez un autre jour
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13h53 je renonce à aller explorer le versant autrichien
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14h15 les torrents gonflent
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Les kilomètres s'égrènent sans trop de déplaisir, à cette altitude je n'ai pas froid dans ma configuration pluie.

En passant à la Wollbachalm, je suis alerté par un panneau qui m'informe que le sentier est "gesperrt" / fermé pour cause de dégâts forestiers (depuis les Alpes Carniques, ça faisait longtemps !), mais je ne suis pas très sûr de la direction dont on parle. Je décide de m'engager malgré tout pour aller voir, il y a une bifurcation un peu plus loin qui me précisera de quel itinéraire il est question ... Et puis, peut-être que ça passe quand même malgré tout ?

Le chemin est un peu raide au début, donne le sentiment d'avoir été récemment nettoyé, et permet de progresser sans obstacle. Arrivé à la bifurcation je retrouve la même affichette : c'est bien mon chemin qui est fermé, et je n'aurai pas besoin de faire plus que quelques dizaines de mètres pour trouver un chaos d'arbres dans une pente abrupte. Fin des jeux !

Retour à la bifurcation et à mes cartes : le seul itinéraire disponible redescend presque en fond de vallée avec 700m de D-, pour remonter ensuite d'autant. Un détour considérable pour remplacer un tronçon en balcon qui aurait dû ne me prendre qu'1/2 h ... Qui plus est, la redescente obligée d'abord en sentier se transforme en piste forestière avec de larges lacets, beurk ! Pas le choix, ce qu'on ne peut éviter, il faut le subir ...

Revenu au fond de la vallée de l'Ahrntal au niveau du village de Steinhaus, je vais y faire un court arrêt sous un abribus (ben oui, il pleut, je vous l'avais dit ?), et faire le point de la situation : 17h00, temps pluvieux, plein les pattes, pas très envie de perdre du temps à prospecter un bivouac par ici car maintenant trop urbanisé et ça ne s'arrangera pas plus loin. Je n'ai pas non plus très envie de remonter après une descente pénible, et je dois aussi penser que mes affaires de bivouac n'ont eu aucune opportunité de sécher aujourd'hui. dernier détail : météo très pluvieuse pour cette nuit !

La magie des réseaux et des applications va faire que je trouverai une possibilité de chambre d'hôtel à prix dégriffé à Sankt Johann in Ahrntal, à seulement 3 km d'ici. Cela suffit à ce que je signe l'acte de capitulation, réserve la chambre et longe la route sous la pluie, digérant ma nouvelle humiliation ...

17h30 je capitule : refuge à l'hôtel
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Passé une longue attente à la réception de l'hôtel (particulièrement inefficace, allez savoir pourquoi), et où ma tenue dénote un peu, j'aurai vraiment droit à une chambre de grand luxe. Je vais bien m'activer à me doucher, faire ma lessive, étaler toile de tente, duvet, polycree ... J'essayerai d'accélérer le séchage de mon linge au sèche-cheveux, mais je le ferai régulièrement disjoncter à force de trop chauffer ...

Reconnecté au monde civilisé, je découvrirai les catastrophes des inondations allemandes et belges, relativisant mes petites contrariétés.

Dehors, il pleut.


En quelques chiffres :

Total J15
35 km
D+1685 D-2735
Marche 10h30
km-Effort 61.6

Cumul J01-15
536 km
D+ 31000m
Marche 161h30
km-Effort 915


Itinéraire & Progression
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Impression générale :

La frustration des renoncements cumulés par rapport à mon itinéraire prévisionnel commencent à peser sur mon moral. Je sais bien que c'est totalement subjectif, mais je ne peux m'empêcher de les vivre comme autant de petites défaites, alors qu'il s'agit juste de faire avec les conditions dont je dispose. C'est idiot, hein ? Mon ressenti de la journée aurait pu être sauvé si mon chemin n'avait pas été interrompu par les dégâts d'avalanche, me permettant de progresser en altitude. Peut-être me serai-je alors arrêté en refuge plutôt qu'ici à l'hôtel, et le ressenti n'aurait pas été le même.

Les 3 bons points du jour avec ce mauvais temps :
- ma tenue vestimentaire suffit plutôt bien aux conditions
- le couple panneau solaire / téléphone fonctionne également (aussi étonnant que ça puisse paraitre)
- le sac ALD est bien étanche imperméable


voir la vidéo :
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Dernière modification par Hervé27 (16-11-2021 11:36:20)


Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

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#46 03-10-2021 20:10:49

Joy Supertramp
Sempervirens
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

J'ai déjà fini une journée de marche a l'hotel, une fois, et je n'avais même pas l'excuse du mauvais temps, juste celle du mauvais timing (arrivée tardive en fond de vallée en Andorre) cumulée à la non envie de remonter pendant une durée inconnue. Je comprends le sentiment d'échec qui en découle mais franchement, j'aurais flanché bien avant à ta place. Et puis finalement, c'est les vacances quand même, on est pas là pour se faire du mal  smile


Edit sans précision : ortho ou faute de frappe !

Liste montagne été top confort

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#47 03-10-2021 21:09:17

Cat 09
Membre
Inscription : 04-03-2020

Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

Merci Hervé pour le récit, que je suivais jusqu'alors sans rien dire. Je prends un bon bol d'Alpes, cela me donne envie de retourner y traîner mes chaussures, mais avec de meilleures conditions météo que celles dont tu as "profité". J'admire moi aussi ta persévérance, mon moral aurait flanché depuis bien longtemps !
Et j'ai beaucoup apprécié les références historiques. Je trouve toujours émouvant de marcher dans les pas de ceux qui nous ont précédé, et de de revisiter ainsi la grande Histoire.

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#48 03-10-2021 23:25:26

Etimul
Membre
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

Hervé a écrit :

- ma tenue vestimentaire suffit plutôt bien aux conditions

Tu m'étonnes. Une veste à 85g, des gants à 20 et un liner à 26 soit 131 g pour rester " au sec ". Un jeu d'enfant...

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#49 05-10-2021 18:40:06

Hervé27
éMULe
Lieu : Normandie
Inscription : 01-11-2017
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Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

Salut Etimul,

Ne pas oublier que le sac à dos est imperméable, le liner n'est donc qu'une sécurité additionnelle, et ne contient qu'un jeu d'affaires bien compact. Si j'ai pu avoir parfois un peu d'infiltration dans le sac à dos, c'était parce que j'avais mal roulé / serré sa fermeture.

Pour la veste je me suis déjà exprimé sur ses avantages / inconvénients, conscient dès le départ que si il y avait un point faible dans mon équipement c'était celui-là. Si la membrane a été très performante et plutôt résistante, ce sont les coutures qui se sont avérées être les points de fragilité.

Ma tenue a quand même quelques limites, et je vais aller les chatouiller dans l'épisode du jour :


J16 - dimanche 18 juillet : Sisyphe, 2ème

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Il va pleuvoir abondamment toute la soirée et toute la nuit, pendant que mes affaires étalées dans la chambre sèchent. Je ne marque aucun empressement pour me remettre en chemin, profitant longuement du buffet à volonté du petit-déjeuner. Bien que je sois arrivé à l'hôtel avec mon téléphone pratiquement à pleine charge, j'ai beaucoup tiré dessus en soirée pour donner des nouvelles, consulter les options d'itinéraire, mettre à jour mes notes etc. Je le fais recharger à la réception pendant que j'enquille tartines, croissants et café ...

Je ressors affronter les éléments à 9h00 dans une accalmie relative. Le torrent de l'Ahr, juste de l'autre côté de la route depuis l'hôtel, est bien gonflé par les pluies de la veille et de la nuit, et je ne peux m'empêcher de penser aux images de dévastations en Belgique et en Allemagne qui tournaient en boucle sur la TV de ma chambre ...

Il a plu, il pleut, il pleuvra ...
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9h02 en voilà un bien parti pour aller gonfler le Pô
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Mon idée première est celle de la raison, à savoir rester en fond de vallée et progresser vers l'Ouest sans trop m'exposer, en attendant des jours meilleurs. Je commence ainsi à marcher avec une petite pluie, pour aller naviguer sur les sentiers qui surplombent les villages à l'écart de la route principale. Il faut pour cela d'abord passer par les quelques lacets d'une petite route, laquelle passe par-dessus le petit torrent du Trippbach, dont je dois remonter le vallon : celui-ci est bien gonflé et boueux ...

9h04 humour local
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9h07 Sankt Johann in Ahrntal
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9h22 le Trippbach, histoire d'eau
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9h42 Sankt Johann vu de haut
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10h06 ma destination est encore nébuleuse
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Chemin faisant, je trouve les conditions moins mauvaises que ce que j'aurai pu craindre, et je me demande si, après tout, je ne pourrai pas essayer de rattraper mon itinéraire d'altitude, lequel poursuit ensuite plus ou moins à flanc. Je me dis alors que ça ne doit pas être plus difficile que ce que j'ai traversé les jours précédents depuis Sillian ... Et me voilà donc parti dans la longue ré-ascension (Sisyphe, je vous dis ...), 1700 m D+ depuis Sankt Johann jusqu'au col que je vise ...

10h15 Il fait moins mauvais que d'habitude, et si j'allais par là-haut ?
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La route se fait piste. Derrière moi un couple de randonneurs y quitte sa voiture et s'engage comme moi dans la montée, me laissant croire que je ne suis pas si déraisonnable dans ce mauvais temps. J'avance vite, ils n'ont aucune chance de me rattraper ...

Au Schöllbergalm (auberge), la piste se fait sentier et je peux enfin me dérouiller les jambes. Evidemment, c'est ici que la pluie revient, malgré des trouées de ciel bleu qui m'appâtent avec de l'espoir ... Pas grave, je n'avais quitté ni la polaire ni la veste de pluie depuis l'hôtel, les températures ne dépassant toujours pas 10°C malgré l'installation du jour. La montée est franche, mais le sentier est plutôt bien arrangé et permet une progression régulière. Evidemment, après le déluge des dernières 24h, l'eau dégouline de partout et c'est un ruisseau qu'il faut remonter ...

10h52 Schöllbergalm
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11h17 je vous avais dit qu'il allait faire beau ...
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A 12h et à 2500m d'altitude, je rattrape enfin mon itinéraire théorique, et je vais pouvoir (re)commencer à naviguer sur un chemin en balcon. Hélas la pluie à cette altitude s'est faite plus froide, et le vent tourbillonne dans le cirque de cette haute vallée, rendant les conditions désagréables. Je suis désormais le marquage de la Stabeler Höhenweg, dans un environnement de pierriers et de névés, au pied de petits glaciers et de sommets à 3000 - 3200m.

12h14 ... enfin, presque
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Bien vite un premier névé va couper ma trace : il n'est pas très large, peut-être 30 m, mais bien pentu avec un atterrissage dangereux dans les rochers : plutôt que de sortir crampons et piolets, je vais le contourner par le haut dans une zone de gros blocs. Je vais avoir d'autres névés plus étroits que je franchirai directement, toujours sans sortir mon équipement.

Je n'ai qu'un petit dénivelé de 200m D+ pour passer par le "col" de Zu Törla, mais cette ascension va se faire en jouant des mains en permanence. Pas compliqué en soi, mais pluie et vent tourbillonnants contraignent à la vigilance extrême. Les passages les plus délicats sont sécurisés, mais il n'empêche ...

Mon "col" n'est en réalité qu'un étroit passage dans une saillie de la crête rocheuse effilée. J'y arrive avec le ressenti d'en avoir bavé, après 1700 m de D+ en continu depuis mon départ ce matin, et avec une météo qui ne s'arrange pas ... Comme souvent au Tyrol, j'y trouve un banc (certes en mauvais état) ... Il est abrité du vent mais pas de la pluie : j'aurai volontiers fait ici une pause déjeuner, mais la pluie m'en dissuade. A 2746m, je viens de remonter de 7 mètres le nouveau plus haut de la traversée.

13h10 Zu Törla 2746m ... nouveau plus haut !
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J'ai deux autres cols du même genre devant moi sur l'itinéraire, à 2544 et 2724 m, mais de mon point de vue je vois que ce qui m'en sépare est encore entrecoupé de nombreux névés, ainsi que des torrents bien alimentés ...

13h22 redescente du col
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13h22 la suite à travers pierriers et névés
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Un nouveau névé, pas spécialement large, vient couper ma route. Comme les précédents, sa pente est raide et débouche dans des gros blocs, donc potentiellement dangereuse. Le contournement n'est possible ni par le haut (falaise), et hasardeux par le bas (longue descente et autant à remonter). Le tâtant du pied je vais d'emblée trouver de la glace ... Pas le choix : 1er cramponnage du périple, je n'aurai pas emporté mon équipement pour rien. Je perds un peu de temps pour ressortir et enfiler les crampons, puis m'engage. Les abords d'un gros bloc au milieu du névé forment une rimaye, que je m'efforce de contourner par peur de sa fragilité. Peu à peu je retrouve mes marques (je n'avais plus cramponné depuis les Pyrénées en 2018 !) et parviens de l'autre côté. Il me faudra là encore un peu de temps pour "dé"-cramponner avec des doigts bien engourdis par le froid.

13h59 pas impressionnant vu comme ça, mais englacé. 1er cramponnage ...
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Entre l'ascension du col, les pierriers de gros blocs et les névés, ma progression depuis un moment est très lente, toujours sous la pluie et par des températures fraiches (5°C ?). Si je ne retrouve pas du chemin roulant bientôt je risque de me refroidir et d'entrer dans une phase délicate. L'idée commence à se faire que, peut-être, il serait raisonnable de quitter l'altitude ... encore ...

Les éléments vont me donner la bonne justification pour jeter l'éponge (!), lorsque j'arrive à hauteur du torrent : il coule ici sur 10 à 15 m de large, et je ne vois aucun itinéraire qui me permettrait de le franchir en allant de rocher en rocher, ou en tout cas pas sans de gros risques. Il est temps de siffler la fin de partie : ce dernier obstacle me fait basculer du côté où je commençais déjà à pencher, il faut donc redescendre en vallée.

14h50 la voie est close ...
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Petit problème : le sentier de redescente se trouve de l'autre côté du torrent, je dois donc descendre hors sentier par le côté où je me trouve, traversant quelques bras secondaires. Cela se passe sans trop de problème jusqu'à atteindre un verrou rocheux qui se termine en falaise. Je n'ai plus le choix, je vais devoir par un moyen ou un autre traverser le Trippbach ... Je vais remonter, explorer un peu, puis entrevoir un niveau où 2 rochers resserrent le gros du torrent, avec un bond d'1m50 où je n'ai pas le droit de glisser ... De l'autre côté je vais retrouver le chemin, pour une seconde traversée dans l'autre sens, mais dans une zone où le torrent s'étale et où les risques sont moins grands. Cela va le faire dans les 2 cas, mais j'ai eu ma dose d'adrénaline pour la journée ...

15h10 ... je vais pourtant traverser ici ...
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15h14 emporté par la chasse d'eau ...
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Pressé de descendre je vais me gameller sans trop de dommage, avec un minuscule accroc au coude de ma veste. Je vais continuer à patauger dans le sentier inondé, mais l'environnement s'est fait moins brutal, dans un beau replat herbeux décoré de rhododendrons. Un vieux chalet abandonné y ferait un bel abri si on l'aménageait, mais non ...

15h39 retour vers un monde moins brutal
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Ce sont 1 300 m de D- qu'il va me falloir cumuler jusqu'aux chalets de Schwarzbalmalm, d'où je bifurque pour reprendre un itinéraire vers l'Ouest. Il est 17h, et si j'avais tracé direct jusqu'ici depuis mon hôtel ce matin, je n'aurai mis que peut-être 1h30 ... Quel détour !

Avec la redescente je retrouve des températures plus douces, et surtout la pluie cesse ! Je peux même, pour la 1ère fois depuis Sillian, marcher en T-shirt ! Je fais une très courte pause de reconfiguration près d'un banc, d'où je peux observer dans les prés en contrebas le ballet des tyroliens rectifiant le gazon de leurs belles montagnes.

17h38 ... et des lendemains qui chantent
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17h45 le récit n'est pas exempt de coquilles
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Je passe à 18h au village de Weißenbach, où je ne fais qu'une très courte pause pour un ravitaillement en eau à la fontaine. En plus de ma 1/2 bouteille, je charge 1 litre dans ma Platypus, au cas où une opportunité de bivouac se présenterai.

18h00 Weißenbach
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Je passerai outre une fermeture de chemin pour cause de travaux forestiers : j'estime qu'un dimanche soir à 19h il est peu probable que j'y croiserai des bûcheron(ne)s ... A part quelques belles ornières creusées par les camions de bois, ça passera tout seul ...


Signalisation
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J'alterne ensuite piste et sentier quand il s'agit de remonter le vallon de Weißenbach, l'un coupant l'autre. Je fixe désormais mon dévolu sur le vallon en contrebas du refuge de la Chemnitzer Hütte, où tout un secteur autour de 2000 m semble offrir de larges replats. Je dois aller puiser dans mes ressources en cette fin de journée éprouvante, mais la motivation d'un beau bivouac en altitude me donne de l'énergie, après avoir joué à Sisyphe tous ces derniers jours ...

19h26 celui-là, je le franchirai par un pont (tout juste visible en haut de l'image)
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Après une dernière grimpette je quitte définitivement le couvert forestier et retrouve une ambiance d'alpages. Je passe devant le Göge Alm (auberge) et sa chapelle, regardant à tout hasard s'il ne serait pas possible d'y prendre un abri en dur sous un auvent, mais non.

19h54 Göge Alm
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Je vais monter encore un peu, puis m'éloigner du chemin à la perpendiculaire pour explorer une zone qui me semble propice. Encore une bonne pioche, puisque je trouve un bon plat herbeux qui me permet tout à la fois d'avoir la vue et de rester invisible du Göge Alm (sait-on jamais ...). Un peu plus d'exploration va me permettre de trouver une petite source, m'évitant toute restriction sur ce plan. Il pleuvra légèrement avant l'extinction des feux, mais rien de comparable à ce qui a précédé.

20h20 Bivouac !
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20h36 c'est le pied ...
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En quelques chiffres :

Total J16
30 km
D+ 2878 D-1796
Marche 10h00
km-Effort 60.5

Cumul J01-16
566 km
D+ 34000m
Marche 171h30
km-Effort 976


Itinéraire & Progression
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Impression générale :

Beaucoup d'efforts pour tenter une fois de plus de forcer les éléments ... Cette fois-ci, je me suis aventuré un peu trop loin de ma zone de confort. J'ai consommé plus d'1/2 journée dans cet aller / retour finalement inutile en altitude. Le Caradhras m'a rejeté, il m'a fallu emprunter d'autres chemins ... A bien regarder l'itinéraire, je pense que si j'avais pu/su/voulu franchir le torrent au bon moment, j'aurai mis les principales difficultés derrière moi et la suite était plus facile. Ma motivation à redescendre était surtout la crainte d'avoir froid avec l'avancement vers la soirée.

Ma tenue vestimentaire, laquelle avait plutôt bien convenu aux jours précédents, a donc trouvé ici ses limites. Un peu plus en altitude, un peu plus de pluie ... et surtout une progression beaucoup moins "dynamique" dans le franchissement de difficultés successives. Descendre était le choix de la raison (ne pas monter l'aurait aussi été, d'ailleurs roll ...)

Ce n'est qu'au bivouac que je réaliserai que je n'ai fait aucune véritable pause aujourd'hui, seulement des micro-arrêts de reconfiguration, ou pour faire le point. Je n'ai pas eu besoin de faire plus que grignoter tout en marchant, ayant fait le plein de calories lors du petit-déjeuner à l'hôtel.

Depuis Sillian, cela fait 4 jours que je marche sous la pluie ...


voir la vidéo :
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Dernière modification par Hervé27 (16-11-2021 11:37:24)


Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

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#50 07-10-2021 19:20:17

laxmimittal
Membre
Inscription : 23-10-2016

Re : [Récit + liste] Alpes à Fleur de Pô, 50 j de Trieste au Mercantour

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"Je ne marque aucun empressement pour me remettre en chemin, profitant longuement du buffet à volonté du petit-déjeuner."

et voilà, encore un hôtelier en faillite

big_smile  big_smile  big_smile  big_smile

L.


La touche Majuscule de mon ordinateur fonctionne mal.

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