[Récit + liste] La Trtraversée De Belledonn

ACJL · 16-11-2022 16:15:18

C'est toujours un plaisir les paysages brumeux. Beaucoup plus dynamique qu'un grand ciel bleu, même si parfois les conditions rendent la chose un peu complexe.

Freydane était galcial, vers le col de la mine de fer la température était plus supportable, le vent était un peu tombé et il n'y avait plus de crachin, juste de la brume.

Jour 3 Bis

Cette nuit, le vent a bien soufflé, mais ma tente était abritée, j'ai donc plutôt bien dormi. Quelques aboiements de patous au loin au crépuscule, c'est tout. Aujourd'hui, le temps a l'air de s'être bien amélioré.

Direction le pas du Pin. Il fait beau mais frais, étant encore à l'ombre de la montagne.

Au loin, un patou me regarde avancer. petite tâche blanche immobile, je ne l'aurai pas reconnu sans son vacarme remarquable. Je le perds finalement de vue.

Un troupeau de bergers s'occupent de leurs moutons. Le patou est là, ainsi que deux ou trois autres chiens. Ils me regardent passer en aboyant, mais sans s'approcher, tant mieux.

Le soleil va bientôt me rattraper ! Ce n'est pas de refus.

Mais le temps semble déjà se recouvrir à l'approche du Col de la Vache.

Le chemin deviens caillouteux tandis que les nuages avalent progressivement les sommets.

Me voici dans le pierrier qui a l'air de durer jusqu'au col. On a bien fait de changer d'itinéraire avec ma coloc, elle ne serait pas passée ici. Le soleil s'est caché et le vent s'est levé, je renfile quelques couches. Je n'avance pas très vite vu le terrain, alors la montée et lente mais peu fatigante. J'ai une pensée émue pour les coureurs qui sont passés ici en courant, la nuit, dans le crachin. Quelle idée ! Seuls restes de leur passage, une trace boueuse et quelques fanions oubliés.

Une fois le col franchi, le vent se calme et j'entame la descente vers les sept Laux. Dès le premier, une bergerie avec son troupeau, son patou et ses deux autres chiens. Ils aboient et courent en direction d'un marcheur me précédent de quelques centaines de mètres. J'en profite pour contourner l'endroit tant qu'ils sont occupés à intimider l'autre intrus.

La zone des sept Laux est belle, bien qu'ayant un peu trop d'aménagements à mon goût : une grande partie des lacs sont artificiels.

Et pour certains, la sécheresse de cet été est plus que visible...

Je fais une pause soda au refuge histoire de profiter d'une table au soleil pour étudier les cartes, et je repart une fois l'itinéraire compris : C'est pas bien compliqué, je descends jusqu'à fond de France et ensuite je remonte jusqu'au chalet de la Fouetterie, et on verra quand on y sera.

Le dernier des sept Laux (même si je n'en ai vu que 5)...

Et c'est le début de la descente.

Je marche paisiblement quand soudain, sans raison apparente, je me met à avoir très mal au genou. Mais pourquoi ! Ça m'énerve au plus au point, alors que je commence à peine a me sentir en forme. J'attends 5 minutes, pour voir si c'est juste ponctuel, puis je repart en boitant et en pestant intérieurement contre ma jambe et l'existence en général.

Un peu plus loin, je crois un couple de (probables) retraités qui râlent contre le chemin "Oh là là, c'est pentu, ça fatigue les genoux, c'est un chemin pour les jeunes.

Grmbl.

Je ne sais pas trop quoi faire. J'ai pas envie de m'arrêter maintenant, vu que je suis allé deux fois dans le coin, que j'ai fait plus ou moins la moitié du GR, et vu le nombre d'endroits ou j'ai envie d'aller marcher, je n'y retournerai probablement pas avant très longtemps. D'un autre coté, c'est évident que c'est pas une idée exceptionnelle de continuer à cloche pied. En plus je vais bientôt arriver à Fond de France et c'est peut être faisable de regagner la civilisation relativement facilement.

La pente s'adoucit et le chemin devient forestier.

Je m'égare dans Fond de France : je n'avais pas vu que le Pleynet était à la fois un village et un ruisseau, aussi je ne comprenait rien aux panneaux. Pourtant, c'est assez rare de voir un panneau de villages avec des petites vagues devant !

je finit par me retrouver, et traverse le ruisseau de la grande Valloire.

La plus grande partie de la montée se fait dans les sapins, avant d'arriver dans les alpages.

J'en profite pour manger quelques myrtilles, avant d'arriver au chalet de la Fouetterie.

Celui-ci est très accueillant (et vide). Tout propre, quelques ustensiles de cuisines, des livres, des cartes, une table pour manger dehors, un abreuvoir (à sec mais c'est l'intention qui compte)... Il y a même des matelas dehors sous le toit pour pouvoir dormir à l'abri sans se sentir trop enfermé. J'ai très envie d'y passer la nuit, hélas, il est encore un peu tôt. Je regarde la carte. Pas très loin, il y a le chalet du Léat ! Il est peut être aussi bien (maintenant, j'ai envie de dormir sur un matelas sous un toit à ciel ouvert), je vais y aller.

Quand j'arrive au Léat, c'est la déception. C'est en fait une cabane de berger avec un petit écriteau "Merci de respecter mon intimité". Je suis pas expert en sous entendu mais ça veut surement dire qu'on peut pas dormir ici.

Je repart déçu en me demandant où je vais passer la nuit finalement. Mais... Le chalet du Léat n'était-il pas au bord d'un lac du même nom ? J'ai vu un baquet d'eau mais ça semble un peu léger. Ou alors il était caché derrière un caillou ou une grande herbe . Étrange.

La réponse est bien plus tristement ordinaire, je n'étais pas au bon endroit. C'est la fin de journée et je ne m'en étais pas vraiment rendu compte, mais je me traîne, et n'était en fait arrivé qu'au chalet de Tigneux. Quelques minutes plus tard, le chalet du Léat et son lac non ambigu apparaissent devant moi.

Quelques personnes déambulent autour du lac. Un mec me croise. Je lui dit bonsoir, il ne répond pas.

J'entre dans le chalet ou se trouvent quelques personnes en train de discuter. Je les salue. Deux filles me répondent, deux mecs m'observent sans rien dire. S'en suit un dialogue étonnant.

Moi : Vous dormez dans le chalet ? Vous êtes combien ?
Une fille : On est 8 !
Moi : Oulà, ben je vais vous souhaiter une bonne soirée et aller trouver un coin tranquille au bord du lac.
Une fille : Mais non il reste de la place !
Un mec : Non mais c'est bon il a dit qu'il partait.
Moi : oui oui j'y vais
Une fille : Mais t'es sûr ? Parce que tu peux te mettre là
Un mec : Non mais il a dit qu'il s'en va
Une fille (suite): ou alors on se pousse et tu te met là si tu préfères ? Ou de l'autre coté ?
Moi : oui oui c'est gentil mais je suis fatigué, j'ai ma tente, il y a plein d'endroits bien au bord du lac, je vais y aller.
Un mec : Oui il a une tente il s'en va.
Une fille : ah bon ben comme tu veux mais ça nous dérange pas si tu veux rester
Un mec : oui oui il s'en va
Moi : Oui merci bonne soirée !
Une fille : bonne soirée !
Une fille : bonne soirée !

Je me trouve un coin potable près d'un sapin, plante ma tente, déballe mes affaires et met mon couscous à tremper. Je défait mes chaussures et... Aïe ! J'ai bien mal à la cheville !

Bah, comme dit sans doute un proverbe chinois, douleur apparue sans raison disparaitra sans raison.

Sur ces bonnes paroles, je vais me coucher.

Baloofix · 16-11-2022 17:31:53

ACJL a écrit :

#670644
J'entre dans le chalet ou se trouvent quelques personnes en train de discuter. Je les salue. Deux filles me répondent, deux mecs m'observent sans rien dire. S'en suit un dialogue étonnant.

Tu es gentil en disant étonnant....

ACJL · 20-11-2022 15:35:48

Bah, on sait jamais la motivation des gens, peut être qu'ils avaient détecté dès le début que j'avais pas envie d'y aller de toute façon et qu'ils ont eu peur que j'accepte par politesse

Jour 4 bis

Je me réveille relativement tôt. J'ai envie de faire une grosse journée, de me pousser un peu à bout, pour voir. Je décolle quand les plus matinaux du groupe vu la veille commencent à sortir du chalet.

Direction la pierre du pin. Première impression dès quelques mètres, j'ai toujours bien mal à la cheville et au genou...

Je commence par une petite pause à la croix du Léat pour admirer le lever de soleil sur les montagnes.

Puis continue jusqu'à l'embranchement du chemin desservant le refuge de L'Oule.

Je redescends jusqu'au Plan, puis Gleyzin.

Avant que le chemin ne remonte vers L'Aup Bernard. Il y a beaucoup de sorbiers

Et beaucoup de fleurs bleues dont j'ignore le nom (si quelqun de cultivé peut m'éclairer ! ) Le placement des fleurs par rapport à la tige est aux feuilles est assez étonnant.

La cabane de l'Aup Bernard est protégée par un impressionnant tas de cailloux. Le coin serait-il avalancheux l'hiver que ça ne m'étonnerait pas.
Quand j'y arrive, un jeune couple en sort et enfile leurs énormes sacs avec difficulté. La fille me dit que le sien fait 17kg et qu'il ne lui avait pas manqué, ce que je comprends tout à fait. Son copain ne me dit pas le poids du sien, mais il est un peu plus gros, alors je le suppose un peu plus lourd. La veille, ils sont venus du refuge de la Pierre du carré. J'ai lu je ne sais plus ou que c'était un refuge gardé, ce sera ma pause boisson de la journée.

Le chemin monte doucement dans les bois jusqu'au Praillet.

Ici, une fourmilière impressionnante,

Là, une vache. Ça me fait plaisir, j'aime mieux ça que les moutons (même si elle a pas de cornes...)

Le chemin redescends ensuite en direction du plan de l'ours avant de remonter de l'autre coté vers le refuge. Je suppose que ce sera à peu près au milieu en face.

Le plan de l'Ours m'en semble dépourvu, il y a par contre encore de nombreux sorbiers.

Une montée dans les bois sans histoires plus tard et me voilà au refuge... non gardé exceptionnellement cet été. Le soda n'aura donc pas lieu. AU téléphone, un randonneur parle de ses problèmes de ménisques. Ahhh !! Tais toi, tais toi ! Je ne m'attarde pas et monte au Col de Claran. Plusieurs personnes à vélo sont en train de ramasser des myrtilles (Enfin, ils sont descendus de vélo pour l'opération ce qui est assez décevant).

Descente de l'autre coté au refuge de Claran, peuplé par de nombreux moutons.

Le col de Claran, que je n'ai pas fini de voir au loin.

Je me dirige vers une coulée de pierre, probablement pas très loin du refuge de la Balme.

Vu de près, je me dis qu'il ne devait mieux pas se trouver dans le coin pendant les épisodes orageux récents, certaines parties ont l'air "neuves".

Je descends au chalet de pré nouveau et remonte au refuge des Férices. Il est tout petit et d'ailleurs on ne le voit pas sur la photo car il se trouve derrière l'épaulement rocheux. Un petit groupe l'occupe déjà. Ils sont trois ou quatre, et attendent deux amis Belges, mais si je veux rester, ils me feront de la place. C'est tentant, mais aujourd'hui, c'est la grosse journée, alors je veux continuer un peu. Ils me demandent de dire à leurs amis que je vais croiser sur le chemin, qu'ils les attendent pour l'apéro. L'information me parait partiellement fausse au vu de certains verres déjà pleins et de certaines bouteilles déjà vides, mais j'accepte tout de même de la transmettre.

Quelques centaines de mètres plus loin, deux personnes ! Serait-ce des amis Belges ? Et bien non, mais ils les ont dépassé. Ceux-ci ont abandonné un peu plus haut et ont planté leur tente pour la nuit me disent ces nouveaux messagers. Un peu plus loin, je les vois en effet. C'est pas de chance, ils n'étaient vraiment pas bien loin.

Je grimpe en direction du Plant Lachat. Quelques pierriers commencent à se dessiner.

Et le brouillard, à tomber.

Le temps alterne entre des périodes d'éclaircies ou l'on peut voir le paysage parcouru (ici le col de Claran et la coulée de pierres traversée un peu plus tôt)

Et des moments on je suis dans un nuage et où j'ai l'impression qu'il fera nuit dans 30 minutes.

Ici, une tente du néolithique. On raconte qu'en ces temps anciens, les nomades légers, expérimentés, ne portaient pas de tarp en silnylon : Si il fait beau, ça sert à rien, s'il y a du vent, le bruit est désagréable, s'il pleut, ils y a du splash effect : bref, ça marche presque jamais, alors qu'on peut toujours trouver sur place de quoi se faire un abri bien solide

Le chemin continue ensuite jusqu'au refuge de la pierrière en passant près de la pointe de la Frèche, je ne saurai pas situer exactement chaque photo.

Me voila presque arrivé et il est temps. Le col de Claran (à droite) :

Le col de Claran quelques minutes plus tard :

J'arrive au refuge de la pierrière à la tombée de la nuit et décide de m'y arrêter car je commence à avoir très mal, je trébuche à chaque pas...

Un couple l'occupe déjà. On échange quelques mots polis et je les aime pas, sans raison je dois dire.
Ensuite il font un grand feu devant la cabane, pour s'amuser (ils cuisinent au gaz), utilisant ainsi la moitié des réserves de bois de la cabane...

Bon...Je vais me coucher.

lamouchy · 21-11-2022 00:17:22

Hello ACJL,
Merci pour ton récit plein d'humour et tes bien belles photos !

ACJL a écrit :

#670906Et beaucoup de fleurs bleues dont j'ignore le nom (si quelqun de cultivé peut m'éclairer ! ) Le placement des fleurs par rapport à la tige est aux feuilles est assez étonnant.

Sans certitude, je trouve que ces belles bleues ressemblent à la Gentiane à feuilles d'asclépiade. Biotope et période de floraison vont aussi dans ce sens.

ACJL · 21-11-2022 15:52:31

Ah oui ça y ressemble bien, merci !

Ytreza · 21-11-2022 19:01:49

J'ai rattrapé mon retard. Toujours très agréable à suivre, j'apprécie l'humour désabusé
Des conditions dantesques en tout cas ! La brume ça fait des super photos. On peut admirer ça au chaud sans subir le vent, quel luxe !
Et merveilleuses lumières une fois que le soleil revient

(kern -> cairn)

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