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#401 18-11-2022 12:14:25

Hervé27
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Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Salut à tous et merci du passage smile !

Que les lecteurs fatigués se remettent vite, la suite va être intense lol ...

@Pat85 : je fais tenir les Mescalito version cuir largement plus de 1500 km sans problème ... sur les chemins normands et vosgiens roll ...

Comme l'état à Hendaye était encore excellent (800 km), et toujours bon à 1000 km quand je suis revenu dans le "dur" des Pyrénées, j'ai cru pouvoir peut-être les faire tenir jusqu'au bout. Des petits bouts de semelle ont commencé à se déliter vers 1100-1200 km, et à 1300 km avec mon étape Certascan - Sorteny j'ai senti que l'amorti n'était plus là et que l'accroche se dégradait de plus en plus ... J'aurai pu les forcer encore, mais ça aurait été pénible. Mon achat de ce qui était disponible au Pas de la Case n'a pas été heureux, ça m'a un peu gâché l'existence des derniers jours  hmm


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#402 19-11-2022 18:55:57

Hervé27
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Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

J41, lundi 15 août : du Pas de la Case à Bolquère

Vidéo
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Après une belle soirée et une bonne nuit, nul besoin de me hâter ce matin pour me remettre en marche : mon objectif immédiat est de me procurer une nouvelle paire de chaussures pour remplacer les Mescalito qui perdent semelles, accroche et amorti. Comme indiqué dans ma réponse précédente sur ce même fil, j'ai pêché par optimisme en voulant croire qu'elles pourraient tenir l'aller-retour : j'aurai mieux fait de m'organiser un colis avec une paire neuve à Hendaye ... Les enseignes de sport ouvrent au mieux à 9h, j'ai donc du temps à tuer. Lorenzo en revanche, après s'être bien reposé depuis hier midi, prend les devants sur le sentier dès 6h30 : charge à moi de le rattraper quelque part avant la mer ... J'ai maintenant l'habitude, on va bien y arriver  !

Je me réjouis d'avance d'un bon petit-déjeuner dans la salle à manger de l'hôtel, mais quand je me présente à cet effet à la réception je suis déçu : il eut fallu réserver avec la chambre hmm ! Tant pis, je remonte ranger et fermer mon sac, et après avoir déposé la clef je m'en vais prospecter ce qu'il est possible de trouver "en ville". Au final je gagne au change, puisque je m'installe à l'étage d'une boulangerie - salon de thé - cafétéria, avec un plateau lourdement chargé de breuvages divers, viennoiseries et pâtisseries tongue . Lorsque j'en ressors j'ai encore quelques instants avant l'ouverture du magasin de sports que je vise, et trouve juste le temps de passer dans une supérette recompléter mon ravitaillement (sans excès puisque j'envisage de passer à Bolquère demain matin, et après-demain soir à Amélie : fini les longs portages smile ! ).

Enfin dans mon magasin à la minute même de l'ouverture de sa porte, on est au petit soin pour l'unique client que je suis à cet instant. Comme je présente au vendeur le cahier des charges de ma recherche et qu'il veut savoir le genre de périple que je fais, il appelle son patron pour lui montrer mon sac roll ... Avant d'essayer l'unique modèle qui pourrait correspondre à mes exigences, je demande un grand sac plastique dans lequel vite enfermer mes vieilles chaussures : inutile que leur pestilence déclenche une évacuation générale lol ! La manip du sac plastique limite un peu les dégâts olfactifs, et je ressors avec aux pieds un modèle générique d'une obscure marque allemande fabriquée en Chine et qui, après un début prometteur, me laissera surtout un douloureux souvenir sad  ... J'ai sûrement aussi ma part, car ma bonne résolution d'y aller mollo aujourd'hui ne durera pas au-delà du 1er kilomètre roll  ... Je dépose les Mescalito dûment enfermées dans le plastique à la première benne de l'autre côté de la rue, au bas de laquelle je traverse la frontière pour y reprendre le tracé.

mission accomplie (marque et modèle n'ont aucune importance, à oublier)
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Sur ces 1ers pas arrive face à moi un jeune marcheur (enfin, plus jeune que moi), lourdement chargé comme les statistiques le laisseraient supposer. Pas besoin d'être devin pour m'autoriser à l'aborder sur le thème de la HRP qui vient de l'Atlantique face à celle qui vient de la Méditerranée. Effectivement peu de chance de me tromper, et je discute ainsi un instant avec Sébastien, qui pour son ravitaillement s'inquiète de ne pas avoir de commerce avant longtemps. Je complète son information sur les possibilités de quelques refuges, gîtes et villages sur l'itinéraire ou à proximité immédiate, lui évitant peut-être ainsi de doubler le poids de son sac déjà à 2 chiffres ...

A 10h00 tout pile je suis enfin lancé, avec donc 3h30 de retard sur un Lorenzo bien requinqué. Ce n'est pas rattrapable en un jour, surtout avec de nouvelles chaussures auxquelles il faut laisser le temps de se faire. Inutile donc de seulement essayer et j'y vais donc doucement sur un kilomètre avant de mettre la gomme ...

Adios Pas de la Case
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les pôvres !
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Il faut avouer que le terrain se prête au jeu : le dénivelé sur le bon sentier de terre à flanc d'alpages entre ici et le Col de Puymorens est quasi-nul, et globalement en légère descente. Dans la vallée de l'Ariège en contrebas et sur la N22, les véhicules à la montée roulent au pas et cul à cul, sûrement plus lentement que je ne descends en sens inverse ce beau sentier roulant comme je les aime. En face et au loin, je peux apercevoir le Carlit qui me fait de l'œil, mais avec mon départ tardif et des prévisions orageuses il est peu probable que je sois en mesure d'y monter cette fois-ci. Au fond de l'Ariège et au niveau de l'Hospitalet, la brume est déjà présente, et je la vois distinctement s'infiltrer dans les vallées transversales par-dessus le Siscar et les Pédourés, tandis que je reste sous un beau soleil. Cette différence de météo entre vallée et crêtes est à prendre en compte lorsqu'il s'agit de faire son choix de variante. Finalement, je révise mon opinion : l'itinéraire crête & frontière par le Pas de la Case oblige certes de passer par la grosse verrue de la station défiscalisée, mais est autrement très agréable à parcourir et offre des vues superbes. Je continue de lui préférer l'esthétique des vallées ariégeoises Bésines / Pédourés via l'Hospitalet, mais je n'en fais plus le même repoussoir ...

j'ai au fond beaucoup aimé ce chemin
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L'eau coule en abondance et je croise plusieurs ruisseaux et sources, avant de passer dans le périmètre plus sec des Mines de Pimorent, dont la grande bâtisse à l'abandon est peu à peu rappelée vers le sol, tuile après tuile, poutre après poutre, pierre après pierre ... Combien de générations avant qu'elle ne disparaisse totalement ? En tout cas, je n'y prendrai pas refuge tant les lieux sont sinistres et font craindre de se prendre un plafond sur la tête ...

Mine de Pimorent
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Tagada, tagada, j'avance vite dans mes nouvelles chaussures, et c'est à 11h30 que je passe au col routier de Puymorens, à l'approche duquel j'ai croisé mes premiers et seuls marcheurs de cette fin de matinée. Quelques véhicules sur le vaste parking et une collection de bâtiments délabrés, je passe vite ...

Après un très court morceau d'un relativement joli sentier, c'est par la piste qu'il me faut m'élever à flanc du vallon de Cortal Rosso, remontant par là en direction de la Porteille du Lanoux et, au-delà, le vaste étang du même nom. Au moins ça me permet d'avancer vite, débitant les kilomètres plus vite que je ne l'avais imaginé à mon départ du Pas de la Case, où je ne pensais pas bénéficier de chemins aussi faciles. Après tout, mon départ tardif ne devrait pas m'empêcher d'afficher un "beau" total au compteur de ce soir ...

la légende est dans la photo
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Au bord de la piste je veux visiter la cabane de Cortal Rosso, mais sans être verrouillée la porte me résiste et je ne veux pas forcer. Il y a là des ruisseaux qui descendent de la montagne et de l'eau intermittente selon la saison, et une bien belle vue perchée sur le vallon. Un peu plus haut on trouve un beau replat cerné d'un cirque, où le ruisseau  doit largement s'étaler en temps normal. Sécheresses et chaleurs accumulées évitent cependant cette année qu'il ne s'agisse d'un marécage, et c'est là que je quitte la piste pour retrouver du sentier qui traverse le Pla d'herbe verte, avant de remonter le long du ruisseau en direction de la Porteille du Lanoux.

Cabane de Cortal Rosso
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Pla de Cortal Rosso
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Il faut alors s'élever de 300m D+, et après tous les kilomètres facile de ce matin le retour à un peu de difficulté me permet de mieux ressentir ma fatigue heureuse ... Avant le col je croise un couple à la descente, bien couvert avec leurs coupe-vents, buff et bonnets ... J'en suppose qu'il doit faire frais et venté là-haut. Je réalise alors que, si j'ai encore eu chaud hier en descendant dans le Val d'Incles, l'atmosphère aujourd'hui est bien plus fraîche (sans pour autant être froide, c'est juste le contraste avec toutes les chaleurs qui ont précédé). Au col je vais effectivement enfiler mon coupe-vent en vue de la descente vers le barrage. L'étang du Lanoux est là aussi bien bas, comme toutes les retenues croisées jusqu'ici ...

Lanoux et Carlit depuis la Porteille
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les mêmes d'un peu plus près
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Ignorant s'il est possible de traverser sur le fil du barrage, je tente ma chance par là mais trouve barrière close. Je voulais d'abord marcher encore un peu avant de faire une pause, mais cela fait 4 heures que j'avance avec de nouvelles chaussures et il est temps de permettre à mes pieds de s'aérer. Quelques frottements inévitables, mais à ce stade je pense la corne de mes pieds suffisamment formée pour ne pas y prêter plus d'attention. J'ai la flemme de redescendre jusqu'à la cabane des ingénieurs pour tenter d'y chercher un peu de confort, et trouve finalement un agréable spot d'herbe douce au bord du ruisseau, suffisamment abrité du vent pour me chauffer un café tiède ...

J'y reste la 1/2 h réglementaire, avant de me motiver au départ car désormais les nuages en chou-fleur se forment, l'orage pourrait désormais venir vite. Le Carlit n'a pas la tête dans les nuages, mais je n'ai pas le jus pour tenter l'aventure avec le risque électrique que je pressens : j'ai pleinement profité du sommet par une météo sublime au trajet aller (voir J06), cette fois-ci ce sera le contournement par Porteille et vallée de la Grave. Long, mais plus sûr et sans difficulté ... Comme à l'aller j'arrive à me tromper de chemin au même endroit, et me retrouve à suivre la marque rouge et blanche vers le Carlit, au lieu de la marque rouge et blanche vers le fond du Lanoux. Demi-tour en grommelant, pourvu que ce 1/4 h détour ne me coûte pas d'être rattrapé par l'orage ... Ce faisant je redouble un couple de randonneurs à qui, peu avant, je donnais des indications d'orientation lol !

Particularité de ce tronçon entre barrage du Lanoux et cabane de Rouzet : à l'aller et au retour je l'aurai parcouru 2 fois dans le même sens, puisqu'en juillet j'allais du Carlit vers la Coume d'Anyel et l'Hospitalet ...

du barrage à la cabane de Rouzet
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Après avoir longé l'étang aux rives largement surbaissées par le tirage de l'eau au profit de la plaine assoiffée, ce sont des nuages très noirs qui menacent quand je passe à la cabane du Rouzet. J'y bascule en configuration pluie en enfilant ma veste imper-respi (plus pour le vent froid sur ma transpiration que pour me protéger d'une pluie qui n'est pas encore là), et mettant l'électronique à l'abri (panneau solaire dans le sac, ziploc pour la caméra, téléphone dans son étui transparent). Je bifurque en direction de la Porteille de la Grave et pas question de trainer puisque j'y monte en seulement 12 minutes ... Persuadé de me prendre la saucée avant peu, je passe vite la Porteille, pressé d'avaler tous les longs kilomètres qui me séparent encore des Bouillouses.

Finalement je ne recevrai que quelques gouttes de temps à autre : pas assez pour justifier de garder la veste de pluie, mais trop craintif d'une averse plus sévère pour la retirer ... Au moins elle me fait coupe-vent car pour une fois il ne fait pas bien chaud ...

Vallon de la Grave après la Porteille : temps incertain ...
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... et quelques longueurs encore à parcourir
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Ma progression très rapide depuis le Pas de la Case me fait envisager la possibilité d'atteindre Bolquère dès ce soir, peut-être même avant 20h00. Si je sais que le supermarché de Pyrénées 2000 est ouvert le 15 août (c'était le cas à mon passage à cette même date en 2018), j'ignore son heure de fermeture. Pour m'assurer tout le plaisir des calories désirées, je développe donc la stratégie de tirer mon itinéraire pour passer devant l'enseigne. Soit c'est encore ouvert et je fais mes courses dès ce soir, libre de contraintes pour demain matin, soit je bivouaque un peu plus bas pour ne me fournir qu'à l'épicerie du vieux village à l'heure d'ouverture demain matin.

Je double quelques marcheurs au long de la vallée de la Grave, mais finalement assez peu pour un 15 août à proximité du secteur hypertouristique des Bouillouses. Même impression quand je commence à longer le lac, mais plus je me rapproche du barrage et plus je trouve de bivouacs installés, ou bien de marcheurs chargés en quête du spot idéal. Ici et là on se baigne, et finalement j'aurai bien aimé en faire autant ... si la petite pluie intermittente ne venait pas à chaque fois se rappeler à mon souvenir. Impression étrange : entre les tintements de clarines du cheptel en vagabondage, j'entends distinctement à plusieurs reprises le cri des mouettes ! Le lac des Bouillouses fait office de mer intérieure, torturant mon impatience / réticence à retrouver la Grande Bleue  ...

Lac des Bouillouses : rares marcheurs, quelques bivouaqueurs ... et des mouettes !
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Arrêt express aux toilettes de l'office de tourisme pour boire abondamment et recharger de l'eau. Une rapide vérification sur le réseau retrouvé me confirme l'ouverture du supermarché jusqu'à 20h, et je calcule pouvoir y être entre 19h30 et 19h45 si je maintiens l'allure. En étant parti à 10h ce matin, j'ai déjà 33 km et 7h30 de marche accumulés jusqu'ici aux Bouillouses, ce qui fait déjà en soi une journée tout-à-fait honorable. Pourtant il n'est que 18h (et oui, seulement 1/2 h de pause sur la journée), et j'imagine pouvoir peut-être aussi rattraper Lorenzo à Bolquère, bien que je n'en ai pas de nouvelles. Je lui propose un plan pizza par SMS, mais pas de réponse (en tout cas pas avant demain matin, une chose à la fois).

Tagada, tagada, je suis lancé vers Pyrénées 2000, passant sur la piste devant l'étang de la Pradelle, puis montant par un joli sentier en direction du Coll del Pam d'où une descente assez directe m'amènera vers Pyrénées 2000. Je maintiens l'allure mais avec plus de difficulté : cette rallonge coûte à mes pieds dans mes nouvelles chaussures et ce n'est pas très malin. Je ne retrouve pas l'abondante affluence du 15 août : il semble qu'en cette soirée qui clôt le long week-end, la foule est maintenant repartie. Je ne croise qu'une joggeuse et un couple de randonneurs à la journée. En tirant sur mes pieds, mes jambes et ma volonté, je traverse finalement Pyrénées 2000 et arrive à 19h40 au centre commercial.

bout de sentier jusqu'au Col del Pam
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par-dessus la Cerdagne, le programme de demain
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Après avoir posé mon sac à dos (interdit dans le magasin) à une caisse, fatigué et réfléchissant mal, je ne suis pas efficace et tourne dans les rayons en y attrapant un peu n'importe quoi : 2 sacs de chips, un yop framboise, des pains au chocolat, des pastilles Vichy, un fromage, du chocolat ... Avec la fermeture et les invitations à se diriger vers les caisses je me dépêche, galère après coup à récupérer mon sac que la caissière a confié à une autre collègue qui se fait attendre. Je me retrouve les bras encombrés, poussé vers la sortie où je m'assois par terre pour reconditionner le tout ... Le paquet de pains au chocolat et le Yop ne rentrent pas dans le sac à dos que j'ai du mal à refermer parce que tout est en désordre, et je les garde à la main après avoir remis sur mon dos mon sac mal foutu. L'instant frénétique est passé, je peux me calmer et réfléchir enfin plus calmement aux plans de ce soir ...

Le redémarrage depuis le parking du centre commercial est très difficile, les pieds sont douloureux car les orteils ont trop frotté aujourd'hui : je retrouve les mauvaises sensations que je n'avais plus eu depuis mon passage aux Mescalito ... Je ne pourrai pas m'occuper des dégâts avant d'avoir posé bivouac, alors je souffre mais compense en buvant mon yop et bafrant mes pains au chocolat tout en marchant. Une poubelle judicieusement placée me libèrera vite de mes déchets de consommateur boulimique... Il est un peu plus de 20h et j'ai environ 1h de jour disponible : je décide de me laisser descendre jusqu'au vieux village par le joli sentier qui longe les lotissements et évite presque complètement l'asphalte, car je trouve qu'il fait ce soir particulièrement frais et préfère dormir le plus bas possible. Passé le village où je fais un lourd plein d'eau à une fontaine près de l'église en vue du bivouac, je pars me chercher un espace dans les prés entre les voies du train jaune et la route nationale. Je me dégote à 21h00 un spot tout-à-fait convenable par-delà une haie et, a priori, bien caché à la vue d'éventuels promeneurs comme des maisons à distance respectable.

Mes pieds et orteils ont rougi mais pas d'ampoule, fausse alerte ? Je me glisse vite dans le duvet pour enfin reposer des muscles fatigués, mais le sommeil ne sera pas de qualité : ce seront d'abord les feux d'artifices successifs des villages alentours (et oui, le 15 août) interdisant le sommeil avant 23h30. Je bénéficie du bruit, mais hélas pas du spectacle car mal placé pour voir directement le moindre d'entre eux, juste quelques lueurs ... Ensuite et pour la 1ère et seule fois de toute la double traversée, je vais avoir froid : j'ai trouvé l'air étonnamment frais aujourd'hui, mais il est cette nuit surtout terriblement humide. Ma tente sera trempée recto-verso, mon sac de couchage imbibé d'humidité malgré le bivy (ça aurait été pire sans !). J'y ajoute aussi les bruits de la route pourtant à bonne distance en contrebas mais qui remontent jusqu'à moi ... Bref, une mauvaise nuit sur un organisme fatigué ... On le serait à moins !

joli spot, mais mauvaise nuit ...
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En quelques chiffres :

Total J41 :
47 km
D+1353
D-1906
Marche 10h07 (+pauses 1h22)
kmE 67
IBP 220

Cumul J01-41 :
1407 km
D+ 78 100 m
Marche 381 h
kmE 2366

Itinéraire
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Profil
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Progression
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Vidéo
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Dernière modification par Hervé27 (18-01-2023 12:06:02)


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#403 19-11-2022 22:53:20

Cat 09
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Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Hervé, te lire est un régal ! Et en plus, on voyage à la vitesse de l'éclair, à peine partie je suis déjà en Ariège  smile !

Parce que oui, cet après-midi, je suis partie de Banyuls avec toi. S'il y en a un qui a fait des scoubidous dans la montagne wink , moi, depuis plusieurs semaines, je fais du scoubidou avec les récits. Grappillant par ci par là quelques bribes, passant des cartes postales au jour 13, puis au jour 22, puis au jour 38 car d'un coup je me suis vue apparaître, ne répondant rien car pas le temps, puis, grâce au mauvais temps enfin arrivé, je suis repartie des cartes postales pour ensuite lire dans l'ordre le récit de cette HRP yoyo. Bref, aujourd'hui, gros mauvais temps bien froid, ça doit neiger là-haut, franchement on est mieux au coin du feu, et donc j'ai lu d'un coup jusqu'au jour 7. Et les Allemands m'ont bien fait rire. Même si, je suis bien d'accord, il vaut mieux croiser des personnes qui incitent à être prudent que des inconscients qui vous disent que c'est "à vache" alors qu'on passe à flanc de falaise. C'est d'ailleurs pour ça que je préfère ne rien dire wink ...

Hervé a écrit :

ils me parlent de leur 25 ans d'expérience en rando, et que l'itinéraire d'où ils viennent est extrêmement difficile, voire dangereux. Il n'y a pas de chemin, les cairns sont trompeurs quand ils ne sont pas inexistants, 5 ou 6 fois cet après-midi ils ont dû rebrousser chemin pour retrouver un passage entre les falaises. Ils reconnaissent que, certes, ils sont bien plus chargés que moi, mais me décommandent fortement de poursuivre, mais que, bon, je suis seul juge ...

Heureusement qu'ils n'ont pas croisé Azerty's family à l'été 2021, ils auraient appelé en urgence la Protection Judiciaire de la Jeunesse big_smile !
Finalement, je me dis que le passage était bien plus facile avec la neige, quand Azerty et moi y étions passés, en mai 2021. Il suffisait de marcher à plat (sans s'emmêler les crampons roll ).

Et hop ! un saut à J38 :

Hervé a écrit :

Resté seul, je guette les alentours : une tente s'installe à hauteur du déversoir bien venté du lac, mais c'est un groupe et point de Cat ... L'heure tourne, et comme il va être 18 h je commence à admettre qu'avec Cat on s'est planté quelque part. Après l'averse et avec le vent du soir je vais finir par prendre froid à rester immobile, et décide de rebrousser chemin pour faire à l'envers l'itinéraire qu'elle m'avait dit vouloir prendre. Je broie du noir sur ce "mauvais plan", et Dieu sait que je peux être bougon dans ce genre de contrariété ... jusqu'à ce que j'aperçoive dans la montée le bob bleu caractéristique qu'on m'avait dit de chercher ! La mauvaise humeur s'envole, les MULs qui ne se connaissaient que derrière des masques de pseudos rl se rencontrent enfin ...

A contresens de Cat, je dois lui expliquer que je faisais demi-tour pour tenter de la trouver, alors que pour sa part elle m'a longuement attendu à la cabane de Guerossos ... où elle faisait la sieste lol ! Je n'ai pas aperçu un papier "Cat09" accroché à un panneau de direction pointant vers l'abri, et c'est donc en parfaite ingénuité que j'y ai filmé Cat en train de roupiller ...

Pas vu d'Hervé bougon, moi  roll . La prochaine fois, je me cacherai mieux !

La montée au col n'est pas bien difficile, et comme nous parlons beaucoup nous ne sentons pas le dénivelé

Ce n'est pas l'exacte vérité mais c'est gentil pour moi smile . Et le bivouac en valait la peine, ainsi que la montée au Certescans le lendemain cool .

Bombadyl a écrit :

Il y a quand même une constante dans la recherche de cat09...
Il ne faut pas négliger les zones de sieste  lol

Il y en a qui commencent à me connaître lol.

Bon, je vous laisse, je retourne au J8.

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#404 20-11-2022 10:00:01

Hervé27
éMULe
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Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Coucou Cat  smile

Merci et bonne lecture au coin du feu pendant que tombe la neige ... ici les Ballons des Vosges seront tout blancs quand les nuages vont se lever  wink


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#405 20-11-2022 20:30:29

Hervé27
éMULe
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Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Dernier épisode version Lorenzo, dont un peu de notre final ensemble entre Las Illas et Banyuls

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Pour ma part je commence à entrevoir la fin du récit : plus que 4 épisodes à rédiger !


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#406 20-11-2022 21:29:43

azerty
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Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

BFF  unicorn  pouce


«Le plus grand voyageur n’est pas celui qui a fait 10 fois le tour du monde, mais celui qui a fait le tour de lui-même. »

Profil / trombi ici

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#407 20-11-2022 22:02:45

Nayana
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Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Le spoiler du rattrapage avant la fin et la pause technique immortalisée sur Youtube  lol


Lentement mais surement...

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#408 20-11-2022 22:11:28

Hervé27
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Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Nayana a écrit :

#670939Le spoiler du rattrapage avant la fin et la pause technique immortalisée sur Youtube  lol

Celle-là j’ai adoré lol !

Lorenzo rigole surtout encore de la scène du «piece of cake» …

Bref, une arrivée euphorique et déjantée… dans un vent de folie !

Plus que quelques jours pour ma version wink


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#409 21-11-2022 12:55:02

Hervé27
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Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

J42, mardi 16 août : de Bolquère au Coll Pregon

Vidéo
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Il m'aura fallu attendre de redescendre bivouaquer à moins de 1600m pour avoir, de la 1ère fois de la double traversée, froid ! J'avais déjà trouvé que l'air était frais hier soir tandis que je descendais dans Bolquère, mais n'avais pas réellement anticipé un tel degré d'humidité. L'orage qui n'a pas vraiment lâché hier après-midi a causé de très fortes rosée et condensation, et le SOL Escape en sursac n'y a pas suffi (ça aurait sans doute été pire sans lui ...). Ce qui n'est pas trempé est moite, et je m'imagine ressentir le poids de toute cette eau inutile quand je recharge mon sac, également à plein de provisions ...

Départ à 6h30 avec encore une belle Lune gibbeuse très haute dans le ciel : je mouille vite la surface de mes chaussures dans le peu d'herbe trempée de rosée que j'ai à traverser pour quitter le pré, et rejoindre le chemin de l'autre côté de la haie qui me cachait. Je descends traverser la route qui n'était guère loin en contrebas, franchis le torrent de Bolquère sur une passerelle puis m'engage dans la direction d'Eyne. Je m'abstiens cette fois-ci d'emprunter le sentier plus direct qui mène à Eyne en suivant le torrent : ce serait l'assurance de pieds trempés et de chaussures lourdement imbibées ... Je m'en tiens au marquage qui suit de larges chemins de campagne, et tant pis pour le léger détour !

une Lune gibbeuse et froide ...
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La pensée récurrente de la "dernière fois" dans ma tête, je m'offre un à-côté pour aller - enfin - visiter le dolmen Pascarets, l'un des ensembles mégalithiques du secteur. Je n'avais fait cet effort à aucun de mes 3 précédents passages, par ignorance de leur présence d'abord (2018), pressé par l'orage ensuite (avec Pala2 et azerty en 2020), écrasé de chaleur enfin (le mois dernier). Dans l'aurore les lumières sont magiques, alliant leur charme aux forces telluriques des pierres dressées sur la frontière entre Ciel et Terre ... Avant que les fées ne me happent dans les profondeurs, le tintement caractéristique d'une arrivée de SMS m'informe que Lorenzo a dormi en haut de la vallée d'Eyne, et qu'il monte maintenant vers le Col de Nuria pour admirer le lever de Soleil.

Dolmen Pascarets
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Je me dois de rappeler ici que tout comme moi, il n'a quitté le Pas de la Case qu'hier matin : en m'arrêtant hier à 21h et avec très peu de pauses, j'étais persuadé d'avoir rattrapé ses 3h30 d'avance ... Que nenni, par le même itinéraire que moi il a poussé les feux encore plus loin, pour une journée totale de 54 km et 2000 m D+/D- ... Le semi-repos au Pas de la Case lui a ostensiblement fait du bien, la Ferrari est de retour pouce ! Je vois désormais mal comment je pourrais le rejoindre aujourd'hui ...

J'ai vite fait de traverser Eyne, ne ralentissant que quelques secondes le temps d'y reprendre de l'eau fraîche. Me voilà donc ensuite de retour dans la longue remontée de la vallée du même nom, où je suis (presque) surpris de déjà apercevoir devant moi quelques marcheuses isolées aussi matinales que moi. Malgré mes efforts il en est une que je ne parviens pas à rattraper, ni même à empêcher qu'elle ne me distance ... Tout arrive roll !

Après des alternances d'ombre et de lumière, je ne retrouve un franc soleil que lorsque j'arrive dans le Pla de la Beguda, maintenant totalement affranchi du couvert forestier et de retour à haute altitude. L'excellente qualité du chemin aidant, je m'élève vite jusqu'au Col de Nuria où j'arrive à 10h20 après presque 4 h de marche. Sans bien réfléchir, je me mets en tête que ce dernier total correspond à l'avance de Lorenzo sur moi, alors que si j'avais bien lu ses SMS j'aurai vu qu'il n'était passé ici qu'à 8h20 et n'a que la moitié de l'avance que je lui prête. Je prends alors la décision de ne pas même essayer de lui faire la course, et de viser désormais une grande variante que j'avais étudié avant le départ et sur laquelle je bifurquerai en fin de journée.

alternance d'ombres et de soleil dans la vallée d'Eyne
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Pla de la Beguda
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Au col et sur les crêtes qui suivent je retrouve le même vent latéral venu d'Espagne que j'y avais rencontré à l'aller. Au bas de l'ascension et dans le soleil retrouvé j'étais repassé en T-shirt, mais je vais apprécier ici de ré-enfiler polaire et coupe-vent pour l'essentiel du reste de la journée ...

La première partie de ce chemin des crêtes que j'arpente ici pour la 4ème fois est douce, et je préfère faire ma pause avant les quelques grandes montées / descentes qui vont suivre. Je profite d'un passage abrité du sentier brièvement sur le versant français entre Pic d'Eyne et Pic des Nou Fonts, donc protégé du vent espagnol, pour m'asseoir en bord de chemin dans un renfoncement de rocher qui me prodigue un banc naturel. L'air est quand même turbulent et perturbe la chauffe de mon café malgré le pare-vent hmm , mais j'arrive quand même à dépasser le stade "tiédasse" ... Il faut juste ne pas trop traîner pour le boire.

du Col de Nuria, zoom arrière par-dessus vallée d'Eyne et Cerdagne sur le Carlit
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de ma pause, vue abritée sur l'Estanyol et le Roc del Boc
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Au Pic des Nou Fonts je passe quelques instants à imager, ce qui me permet de faire une digression sur mon changement de téléphone intervenu le mois dernier. Au trajet aller, j'avais remplacé à Candanchù (moyennant un aller-retour motorisé à Pau sur un jour zéro familial) mon vieil iPhone SE2016 par sa version 2020, et une amélioration majeure est que jusqu'à présent je n'ai plus constaté le phénomène de la batterie qui se met en rideau lorsque exposée au vent froid ... Je peux ainsi réaliser photos et panoramas, regrettant juste que la Méditerranée se fasse toujours désirer, voilée sous la nébulosité du littoral. Je devrais la voir tout-là-bas juste à gauche du Canigou, mais il n'y a là qu'une brume qui ne permet pas de distinguer le ciel de la terre ...

Pas de Méditerranée à la gauche du Canigou
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La descente au Col des Nou Fonts est protégée du vent, mais le col puis la remontée sont très exposés. Je ne retourne pas visiter l'Orri, dont je pense que ce vent d'Espagne doit s'engouffrer dans son ouverture : il ne devait pas y faire chaud cette nuit ...

Le chemin yoyote autour des 2800 m sur le fil des crêtes, enchainant Noucreus, Fossa del Gegant (et ses croix de métal fichées dans le rocher), Coll de Carança, Pics de la Vaca ... Un conseil pour ceux qui restent sur les crêtes et ne vont pas à Ulldeter : aux Pics de la Vaca inutile de descendre par Tirapits et son Orri dans le vallon, vous pouvez rester sur le fil de crête qui se parcoure très facilement jusqu'au petit col d'El Portell. C'est plus court et vous vous évitez un petit D- / D+ inutile wink .

les Croix de la Fossa del Gegant ...
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Les seules petites difficultés techniques du parcours se trouvent ensuite entre ce col d'El Portell et le Pic de Freser, avec plusieurs passages aériens à entreprendre la main au rocher. Je l'avais fait avec appréhension en 2018, puis à nouveau et bien plus facilement en trio en 2020. En juillet, et pour cause d'une combinaison de météo et de fatigue, j'avais court-circuité ces passages parfois gazeux, que je suis heureux d'entreprendre à nouveau aujourd'hui. Je vais néanmoins y passer un peu de temps, non pour moi mais pour accompagner un binôme féminin (Camille & Rachel, salut à vous smile !). Toutes deux bien lourdement chargées sur un périple de quelques jours, je les attends dans le passage un peu délicat de rochers rouges entre les Pics de l'Infern et de Freser, et où l'itinéraire à suivre n'est pas très évident. Elles se sentiront obligées d'y décrocher leurs sacs pour se les passer de la main à la main.

Rachel et Camille sous le Pic dels Gorgs
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@azerty wink
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Avec la perspective d'un temps qui s'embrume et doit se faire orageux dans l'après-midi (ce sont les prévisions), au Pic de Freser nous pouvons voir que déjà des brumes s'accrochent au Pic des Bastiments en face, point le plus haut de la journée à 2881 m. Je laisse maintenant Camille et Rachel, leur indiquant les possibilités de bivouac qu'elles pourront trouver au-delà sans quitter les crêtes, jusqu'au refuge de Pla Guillem sûrement au-delà de leurs limites du jour.

Depuis l'Infern, le Pic de Freser tout à droite, le Coll de Freser et le Pic des Bastiments
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Descente casse-pattes au Coll de Freser puis remontée à 14h au Piolet des Bastiments tout autant dans la caillasse et les blocs, avec encore de la vue et pas trop de brume, mais toujours beaucoup de vent. Je ne m'attarde pas à vouloir faire une pause dans ces conditions désagréables et avec la crainte de la dégradation orageuse. La crête des Bastiments est vite parcourue, jusqu'à un petit enclos entouré de ficelles que l'on veut protéger du passage pour observer les possibilités de régénération de la fragile flore d'altitude : guère de progrès depuis ma première observation d'il y a 4 ans ... Je redescends toujours dans la caillasse raide jusqu'à l'Esquena de l'Ase, et de là plus en douceur et en légère remontée jusqu'au Pic de la Doña. Dans le vent fort en continu le drapeau catalan est étiré au point d'en être méconnaissable, et c'est une nouvelle descente fatigante que je subis jusqu'à la Porteille de Mantet. Les pieds souffrent dans mes chaussures, je vais sûrement avoir des soins à entreprendre ce soir ...

Piolet des Bastiments
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Pic de la Doña
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désormais ça déroule ...
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Dans le vent et l'épée de Damoclès de l'orage de crête, je vais serrer les dents, heureusement revenu désormais sur le chemin facile, pour enquiller les kilomètres jusqu'à la Porteille de Rotja. Là, le triste abri métallique me fait office de palais, m'offrant table et siège à l'abri du vent le temps d'un arrêt revigorant. Le projet de variante que je mets à exécution ici consiste à ne pas prendre la direction du Canigou mais à rester sur la crête frontière en rive droite de la vallée du Tech. Il eut été plus court de passer directement sur le Roca Colom, mais j'avais besoin d'un abri pour la pause d'une part, d'être en mesure de faire le plein d'eau à la source du Tech d'autre part, m'imposant ce large crochet bien visible sur la carte de mon parcours. Il faut aussi avouer que j'étais à deux doigts de m'arrêter pour la nuit dans l'abri de la Porteille de Rotja ...

Derrière moi Valter 2000 semble menacé par de sombres nuages
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Porteille de Rotja : la pause, enfin !
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Persuadé que, avec son avance que je surévaluais, Lorenzo avait déjà largement dépassé Pla Guillem et se dirigeait vers la Cirère voir Batère, je profite du réseau pour lui faire part de mes nouveaux plans. Tels des voyageurs spatiaux, nos communications sont décalées car nous n'avons jamais du réseau simultanément et ne trouvons nos messages respectifs que décalés de plusieurs heures ... J'ignorais qu'il m'attendait à Pla Guillem que j'aurai pu facilement rejoindre ce soir ... Ma variante devrait quant à elle m'amener à rattraper son itinéraire au Refuge des Salines, dont je fais mon objectif (ambitieux) pour demain soir, et me fera court-circuiter Amélie et sa profonde redescente / remontée dans la vallée du Tech.

Quittant à 18h la Porteille de Rotja sur des pieds souffrants, j'ai pour objectif d'arriver à marcher encore ~2h et ~10 km avant la nuit, motivé pour dormir aussi bas que possible par mon couchage humide que je n'ai pas eu la possibilité de faire sécher en journée ... Le sentier s'engage dans le haut de la vallée du Tech sans vraiment changer de niveau, et passe à une première source où je fais suffisamment le plein pour pouvoir désormais prendre bivouac sans crainte de manquer. C'est lourd sad ... La véritable source du Tech est encore quelque minutes plus loin avec un ruisseau bien alimenté à enjamber, puis le chemin reste à flanc pour couper la crête descendant du Roca Colom à hauteur du Coll de Pal.

Haute vallée du Tech
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Un panneau indique la direction de la cabane de Costabona, mais le petit bâtiment que j'aperçois plus bas est positionné sur une crête qui n'est pas celle que je dois suivre. Hélas depuis mon changement de téléphone j'utilise le fond de carte OpenCycle ... lequel ne mentionne pas la cabane Costabona qui était en réalité toute proche, la bâtisse aperçue hors de mon itinéraire étant la cabane forestière Jaume Ferrer. Les fonds OpenTopo m'auraient indiqué clairement ce refuge qui n'attendait que moi, mais il sont devenus désormais bien trop chronophages à télécharger en masse ... Je rate ainsi une belle opportunité d'une nuit confortable, doublée d'un autre regret quand je croise une nouvelle belle source, juste à l'aplomb du refuge que je n'ai pas su voir. Le gîte et l'eau courante étaient là, et pourtant j'ai porté et marché encore ...

Occasion manquée !
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ma direction générale : un petit quelque chose des Vosges
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Dans le soir donc je descends ce fil de crête, tournant définitivement derrière moi les pages de l'altitude pyrénéenne. Les 2000m sont maintenant franchis, et toujours cette pente régulière à descendre. Je corrige vite une erreur d'itinéraire qui allait me faire suivre un bon sentier bien marqué mais par la mauvaise crête dans une mauvaise direction, et m'en tiens ensuite à suivre scrupuleusement la clôture à vaches qui matérialise sur le terrain la frontière franco-espagnole. Son côté espagnol est herbeux et propice au pâturage, tandis que le versant français est raide et descend vite dans la forêt.

A l'affût des spots de bivouac, je suis souvent découragé par l'omniprésence du bétail là où j'aperçois du terrain plat, et par les terrains en dévers là où je n'aperçois pas de bétail ... Je descends donc toujours, et c'est finalement juste avant le Coll Pregon que, à 20h15 et alors que le Soleil a disparu derrière le Roca Colom maintenant loin derrière, je vois que je peux passer la clôture-frontière pour gagner une légère éminence herbeuse protégée des vaches. L'air est doux avec un léger vent, et je vais en profiter pour bien vite étaler mon couchage et essayer de l'aérer enfin.

sur mon fil de crête et la frontière : un embryon d'orage ploie sous le vent au-dessus de la basse vallée du Tech
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au-dessus du Coll Pregon, protégé des vaches migrantes par une frontière
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L'inspection podologique des dégâts révèle une ampoule à un petit orteil, la 1ère de la traversée et au 42ème jour, un comble ! Le reste semble n'avoir été que rougi par les frottements, et je me prends à espérer qu'un peu d'aération nocturne suffira à passer le cap. En réalité ce sont des brûlures de frottement, augurant d'un douloureux calvaire demain ...

Pour l'heure je peux un peu me détendre en marchant pieds nus dans l'herbe sèche, et admire dans le couchant la dissipation flamboyante de nuages d'orages qui n'ont finalement pas crevé. Un brasier semble réduire en cendres les Pyrénées après mon passage, et me voilà tel Néron jouissant du spectacle !

sur un air de lyre ...
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En quelques chiffres :

Total J42 :
43 km
D+2291
D-2292
Marche 11h26 (+pauses 2h20)
kmE 72
IBP 266

Cumul J01-42 :
1450 km
D+ 80 400 m
Marche 393 h
kmE 2438


Itinéraire
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Profil
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Progression
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Vidéo
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Dernière modification par Hervé27 (18-01-2023 12:09:35)


Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

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#410 21-11-2022 15:51:58

Dermochelys
Membre
Lieu : Bruxelles
Inscription : 03-02-2022

Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

J'adore ta prose! Et cette dernière photos aux nuages incandescents! Elle est tout simplement sublime!  pouce

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#411 21-11-2022 17:33:15

Canyon83
Membre
Inscription : 18-04-2021

Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Oui belle photo, variété infinie des couchers de soleil, et encore une belle étape  pouce

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#412 21-11-2022 21:11:53

Stéphane_33
Membre
Lieu : Bordeaux
Inscription : 05-12-2018

Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Fin prêt pour l'étape 43 smile
Stéphane.

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#413 21-11-2022 21:26:23

Hervé27
éMULe
Lieu : Normandie
Inscription : 01-11-2017
Site Web

Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Salut à tous smile et merci de votre assiduité calin !

@Dermochelys : garantie non photoshoppée, elle est encore telle que dans mon téléphone. Les teintes ne correspondent pas exactement à ce que l'œil voyait, mais j'ai préféré ne rien toucher ...

@Stéphane_33 : quelle patience  wink  !

J'avoue que l'approche de la fin du double récit (écrit & vidéo) de cette double traversée commence à me filer le blues ... J'y ai occupé la quasi-totalité de mon temps libre depuis mon retour, ce qui veut dire que je serai resté 5 mois immergé dans cette aventure. J'ai peur d'un grand vide d'ici quelques jours ... et d'une longue attente avant le prochain départ.

J'aurai les Vosges cool !


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#414 21-11-2022 22:32:57

Nicolas36
Marcheur léger
Inscription : 04-03-2021

Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Hervé27 a écrit :

#670979Dans le soir donc je descends ce fil de crête, tournant définitivement derrière moi les pages de l'altitude pyrénéenne. Les 2000m sont maintenant franchis, et toujours cette pente régulière à descendre.

Régulière et raide pour ma part dans la montée.
C'est vrai que sur cette partie là tu ne peux pas te perdre. Le fil d'Ariane sépare France et Espagne.
Presque deux mois à attendre la variante de la variante ... et encore une longue journée de marche en perspective.


Modifications non signalées = Corrections de français

Récits-Listes : Brenne - Ecrins et Queyras - HRP par section

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#415 22-11-2022 13:02:33

Hervé27
éMULe
Lieu : Normandie
Inscription : 01-11-2017
Site Web

Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Nicolas36 a écrit :

#671038

Hervé27 a écrit :

#670979Dans le soir donc je descends ce fil de crête, tournant définitivement derrière moi les pages de l'altitude pyrénéenne. Les 2000m sont maintenant franchis, et toujours cette pente régulière à descendre.

Régulière et raide pour ma part dans la montée.
C'est vrai que sur cette partie là tu ne peux pas te perdre. Le fil d'Ariane sépare France et Espagne.
Presque deux mois à attendre la variante de la variante ... et encore une longue journée de marche en perspective.

Oui, j'aurai sûrement mieux présenté la chose en disant "cette pente régulière mais forte". C'est d'ailleurs la raison pour laquelle j'ai poussé jusqu'au Coll Pregon où la déclivité s'adoucissait enfin et permettait mieux de chercher le bivouac.

Longue journée à suivre, tu l'as dit ! C'est celle qui m'aura fait le plus souffrir de toute la traversée, et son écriture va me replonger dedans. Un exorcisme nécessaire ?


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#416 22-11-2022 14:30:51

Canyon83
Membre
Inscription : 18-04-2021

Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Hervé27 a écrit :

#671071
Longue journée à suivre, tu l'as dit ! C'est celle qui m'aura fait le plus souffrir de toute la traversée, et son écriture va me replonger dedans. Un exorcisme nécessaire ?

Cet art du teasing pouce
Nous somme la langue pendante tongue wink

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#417 22-11-2022 15:10:41

vacuithe
Sébastien
Lieu : Nantes
Inscription : 18-09-2017

Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

on t'a vu arriver à la méditerranée en sautillant comme un cabri, donc on y croit qu'à moitié à ces histoires d'ampoules  lol

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#418 23-11-2022 12:35:24

Hervé27
éMULe
Lieu : Normandie
Inscription : 01-11-2017
Site Web

Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

J43, mercredi 17 août, du Coll Pregon au Sanctuaire des Salines

Vidéo
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A nouveau une nuit humide, histoire de souligner que les nuits sèches de juillet ne sont plus qu'un lointain souvenir. Evidemment, l'orage n'a pas crevé hier soir même si je recevais quelques rares gouttes avant de poser le camp : il fallait bien que toute cette eau condense quelque part. Le ciel n'est pas lessivé pour autant : de la nébulosité s'attarde un peu partout, qu'il s'agisse de nuages trainant près des sommets ou de brume paresseuse ondoyant dans les vallées. Si je n'ai pas eu froid comme la nuit précédente, la nuit a été gâchée par mes pieds "brûlés" par le frottement de mes chaussures acquises au Pas de la Case : des élancements pénibles revenaient sans cesse me tirer du sommeil, qui n'en a de fait été que très décousu ...

J'ai rassemblé sur cette journée toutes les conditions pour en faire une épreuve :
- une petite ampoule et toutes ces brûlures qui n'iront pas en s'arrangeant aujourd'hui ;
- un objectif ambitieux qui serait de rallier dès ce soir le Sanctuaire des Salines, soit un kilométrage de 45 km dans mes tablettes (réduire ce kilométrage était le motif principal de ma marche fatigante d'hier soir). Je veux pouvoir y intercepter Lorenzo avant qu'il n'y passe, mais aussi et pour une fois passer une nuit sur ce site accueillant (refuge ouvert, eau courante des fontaines, cadre bucolique ...)
- une météo décourageante qui annonce de premiers orages faibles pour 13h, puis nettement plus forts pour 18h. Je peux néanmoins voir une tendance qui indique des précipitations d'autant plus fortes qu'elles sont dans l'intérieur : je peux espérer que plus je me rapprocherai de la mer, moins je serai exposé ... Motif supplémentaire de ne pas trainer !

L'équation est simple : à 4,5 km/h sur les chemins roulants que j'anticipe, il faut caser 10h de marche entre mon départ et les orages de 18h. Je dois donc me lever et partir tôt, marcher vite et limiter les pauses au strict nécessaire pour garder ouverte la possibilité de rallier à temps les Salines. Marcher 10 h c'est presque ma moyenne et ça ne me fait pas peur : c'est la limitation des pauses qui va être difficile ... Le Plan B, c'est le village de Coustouges environ 12 km en amont de l'objectif : c'est là qu'il me faudra prendre la décision d'entreprendre ou non les crêtes exposées qui suivront, en fonction de l'état du ciel.

Avant de démarrer je recouvre les surfaces douloureuses de mes pieds avec des bandes d'Hansaplast, et dispose quelques morceaux d'élastoplaste autour de mes orteils les plus endoloris. Quand je pars à 6h30 les sensations au démarrage sont déjà désagréables hmm : j'espère qu'avec l'échauffement des muscles et ces protections les élancements vont progressivement s'apaiser.

Autre préoccupation : l'eau ! Il m'en reste suffisamment de ma lourde charge d'hier soir pour voir venir, mais sur des crêtes toujours plus basses et à la fin d'un été de sécheresse, cela pourrait devenir problématique en journée ...

Je repasse la clôture qui m'a séparé des vaches cette nuit (même si dans mon mauvais sommeil j'ai entendu des clarines venant de la forêt en contrebas sur le versant français), et reprend mon fil de crête maintenant avec très peu de dénivelé. La démarche est lourde, mais le chemin déroule dans les pâtures sans difficulté. La montagne est ici très arrondie et j'ondule autour d'une altitude de 1600 m, passant des petits sommets peu perceptibles et de larges cols très évasés. Dans la nébulosité du littoral le lever de soleil n'est pas directement visible, mais j'ai cependant à nouveau droit à un embrasement des nuages et quelques belles perspectives photographiques ...

flâneries ...
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quelque chose de vosgien
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Très solitaire depuis hier quand j'ai dépassé Valter 2000, j'ai la surprise de voir passer un VTTiste très matinal, tandis que je grimace à répétition au rythme de mes élancements toujours présents, mais que par la force des choses j'apprends petit à petit à ignorer ... Personne ne m'entendra pleurer cry , alors à quoi bon ?

Après 1h30 à zigzaguer sur la frontière et entre les vaches à admirer les lumières rasantes du petit jour, je finis par descendre un petit peu pour passer au col routier d'Ares : une borne frontière de plus, un parking, des tables de pique-nique, un bâtiment désaffecté, un monument des chemins de la liberté ... Des voitures se garent et un petit groupe de marcheurs se prépare. Je cherche une éventuelle fontaine mais rien, alors je poursuis.

Col d'Ares
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Voulant m'économiser une remontée de quelques dizaines de mètres sur le petit sommet de Montfalgars, je prends une piste qui me semble rester à flanc et offre une détente bienvenue à mes pieds serrés dans leurs chausses de torture. Las ! La piste est vite barrée d'un portail qui signale son caractère privé : j'en suis quitte pour couper dans la pente boisée reprendre le sentier que j'aurai du prendre dès le col, et aussitôt après décrocher abruptement de 250m D- vers le Col de Vernedell, passant de ~1500 à ~1250m mais aussi désormais dans la brume que jusqu'ici je regardais de haut. Je n'avais pas quitté polaire et coupe-vent depuis le démarrage, ce n'est pas maintenant que je vais les enlever.

Si je bénéficiais jusqu'à présent du marquage du Tour du Canigou, il me faudra maintenant faire sans car son tracé descend ici vers Lamanère alors que je veux rester sur les crêtes. Ce sont des sentes de chasseurs qu'il me faut désormais suivre, doutant régulièrement de leur qualité de chemin de randonnée. Bien que l'ambiance soit celle d'un automne précoce avec tous les feuillages martyrisés par la sécheresse, la chasse n'est heureusement pas ouverte ...

perte d'altitude, et bientôt de visibilité
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Toujours sur cette frontière que je ne dois pas quitter de la journée, je passe toujours dans la brume un nouveau Coll Pregon (ce n'est pas le dernier), pour ensuite une nouvelle descente sur un étroit sentier bordé alternativement de buis, de ronces et de fougères détrempées. L'eau froide ruisselle sur mes mollets et finit dans mes chaussures, ajoutant à mes sensations déplaisantes. Plus je progresse sur cette sente incertaine, plus je m'interroge sur ce tracé défini sur carte dans le confort de mon intérieur alsacien. Je m'attends à tout instant à me retrouver perdu dans le maquis, et à devoir tailler ma route vers quelque autre itinéraire plus pratique. Pourtant, à chaque fois, le sentier reprend et me mène enfin à un nouveau Col, dit de Malrem à 1133 m seulement. A répétition je croise des clôtures électrifiées pas spécialement aménagées pour le passage randonneur : je me paye régulièrement des châtaignes à chaque franchissement ...

mouille-pattes
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Col de Malrem et borne électrique
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Echaudé par le mauvais sentier  d'où j'arrive, j'étais à 2 doigts de bifurquer sur le versant espagnol où, 100 m D- en contrebas, une large piste m'aurait permis de progresser à vive allure vers l'Orient méditerranéen. C'est alors que j'aperçois côté français un joli panneau de bois qui flèche un petit sentier de la mention "Point le plus au Sud" : je suppose à juste titre qu'il doit s'agir du point le plus méridional du territoire français "continental", et me dis qu'étant ici il serait bien bête de ne pas suivre cet itinéraire tellement dans l'esprit de la HRP. Je balance entre mes pieds qui veulent du facile et l'intérêt de ce que je pourrais plus tard raconter à mes lecteurs, et penche finalement pour ces derniers wink : va pour le Sud cool !

le Cap au Sud va vers l'Est
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Je craignais une nouvelle sente de chasseur mais ce petit sentier va s'avérer bien joli : il remonte vite vers un fil de crête parfois acéré, bordé de forêt sur les 2 versants, parfois même d'une falaise côté espagnol. La crête et la frontière, que demander de mieux sur la HRP ? La brume pourrait me faire regretter les vues masquées sur l'Espagne dont je ne vois presque rien, mais elle ajoute à la touche très automnale de cette matinée, d'autant que je marche dans d'épais tapis de feuilles mortes. Par étages successifs je reprends de l'altitude, et c'est peu avant de parvenir à la Cime de la Coma Negra (1558m) que j'émerge soudain du brouillard et peux mieux profiter de mon environnement. Juste une borne et une plaque sur la cime boisée bordée d'une petite falaise sur son versant espagnol, et la crête commence alors à redescendre avec une infinitésimale inflexion vers le Sud justifiant de placer "le Point le Plus au Sud" en contrebas à l'écart de la cime. Un nouveau panneau de bois mentionne ce point. Un point parmi d'autres. Un point comme un autre. La masse de tous ces points arbitraires forme une longue ligne qu'on appelle un chemin ...

promenade d'automne
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en vue arrière, excursion hors de la brume pour monter à la Coma Negra
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qui dirait le Sud ?
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La crête descend encore un peu, franchement revenue dans le brouillard au sein duquel vaches et moutons m'observent placidement. Enfin un panneau "Lamanère" me fait bifurquer dans la descente versant français. Ce n'est pas que je quitte la frontière : c'est la frontière qui quitte la crête et bifurque à angle droit dans la pente boisée. J'ai 400 m D-  de lacets à redescendre dans la pente raide avant de stabiliser à nouveau mon altitude. Je n'avais vu personne depuis 3h de temps et mon passage au Col d'Ares, mais je vais pouvoir saluer ici un trio d'ouvriers affairés à rénover le sentier. Ils me répondent dans une langue que je n'identifie pas, alors j'ignore s'ils ont perçu le "merci" que je leur ai aussi adressé pour leur travail dont je suis le profiteur.

L'escapade du Sud a été belle et sympatoche, mais longue : ma moyenne horaire que je suis aujourd'hui sur mon téléphone est tombée à 4,0 km/h, et il m'en faut 4,5 d'ici ce soir pour tenir les objectifs. C'est le seul jour du périple où je "pilote" à ce point la cadence à tenir, alors quand "j'atterris" de ma longue descente au Col de les Falguères (1126 m), et que de là je retrouve un large sentier qui déroule à niveau dans la forêt, j'ignore mes petites douleurs et pousse sur les bâtons ... Côté météo je ne suis plus dans la brume mais c'est toujours gris. En revanche je n'entends rien de l'orage qui pourrait se former, ni ne reçois la moindre goutte de pluie, alors j'avance. Jusqu'ici, tout va bien. Sauf mes pieds.

le planter de bâton, m'sieur Hervé27, le planter de bâton !
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Presque toujours sans dénivelé et complètement en forêt j'enquille des petits cols rapprochés, bénéficiant parfois d'une échancrure dans le couvert des arbres pour voir un peu des falaises et des gorges du versant espagnol. J'avais un peu plus d'un litre d'eau à mon départ ce matin : la fraicheur et le dénivelé surtout négatif m'ont permis de ne pas trop transpirer et de consommer à l'économie, mais ma réserve baisse et je m'astreins à ne boire qu'une gorgée à la fois. Quand j'arrive dans le haut du ravin de grès rouge - violacé des sources de la Muga, j'espère pouvoir y trouver un filet d'eau (quitte à le filtrer), mais tout est à sec. Il est midi et je n'ai fait aucune pause depuis mon départ, pourtant je ne veux pas laisser à la météo la possibilité de me barrer le chemin. Si je fais ici un arrêt, c'est juste le temps de me déchausser et contrôler l'état de mes pieds, où mes protections s'avèrent avoir été illusoires : bandage trop fin pour résister aux frottements ... Je corrige comme je peux avec quelques morceaux d'élastoplaste plus épais et collant, renfile et resserre les chaussures, transvase quelques fruits secs et barres d'Isostar vers les poches extérieures pour grignoter tout en marchant, remise enfin polaire et veste de pluie dans le sac et repars ...

Quelques perspectives se dégagent parfois
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sources de la Muga
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Il me reste 1/4 de litre et je n'ai plus que 8 km jusqu'au hameau de Vila-Roja où, d'une façon ou d'une autre, je parviendrai bien à retrouver de l'eau. En quittant les sources de la Muga je trouve un secteur bouleversé par les travaux forestiers, puis alterne piste forestière défoncé, sentier, route de gravier, puis encore de la piste. Je perds de l'altitude et passe sous les 1000 m, tandis que le ciel est plus lumineux et se dégage. Il commence à faire franchement chaud et l'interminable piste me brûle les pieds. Je refais un arrêt dans un lacet, avale mon ultime gorgée d'eau, resserre encore une fois un peu plus mes chaussures et reprend. Ce nouveau laçage semble faire effet, les frottements s'estompent et je souffre moins.

oublier que j'ai mal aux pieds ...
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J'arrive enfin dans Vila-Roja après avoir un peu merdouillé dans le vallon, et me fait alpaguer par un monsieur que je venais de saluer : je me trouve sans son autorisation dans sa (vaste) propriété et dois me confondre en excuses. Je n'ai jamais vu ni franchi le portail que, selon lui, je ne pouvais pas manquer de voir ... Bon, il ne sortira pas le fusil pour autant et me permettra de ressortir par l'autre côté où il viendra m'ouvrir un autre portail, m'autorisant au passage à refaire le plein d'eau à sa (belle et bonne) fontaine. Pardon et merci, mais à bien reprendre ma carte et les chemins qu'elle mentionne, je ne vois pas comment il est possible de passer par Vila-Roja sans violer les propriétés privées ... ou jouer au sanglier dans le maquis ...

Il fait maintenant grand beau et je marche sur la petite route asphaltée sous un franc soleil, avant d'en bifurquer sur une piste à travers les pinèdes en direction de Coustouges. Ce coup-là j'ai bien vu la notion de forêt privée (mais aucun bâtiment mentionné sur ma carte), mais l'immense détour qui m'aurait autrement été imposé n'était pas acceptable. Il ne s'agit que de quelques centaines de mètres, et bientôt je retrouve du sentier balisé venu d'Espagne...

J'actualise ma météo, car selon mes prévisions de ce matin c'est bien maintenant que j'aurai dû avoir une première petite salve d'orage. Je suis sous un franc soleil, et Météoblue ne pronostique plus désormais qu'un seul orage plutôt modéré et à 17h. Il est 15h quand j'arrive enfin à Coustouges, après déjà 36 km au compteur et pas de pause digne de ce nom depuis mon départ à 6h30... Ce village et son site au pied d'une falaise sur un col frontière est bien joli. J'y trouve vite des toilettes publiques sur un petit square, me réhydrate et refait un plein d'eau : mon 1/2 litre à la bretelle + 1 litre en réserve dans la Platypus. Si je ne perds pas de temps d'une part, que l'orage annoncé continue de se retarder et s'affaiblir d'autre part, je pourrais arriver finalement assez tôt aux Salines et y profiter au sec de la soirée ... Je n'ai pas passé 1/4 h ici que je repars, apercevant pour la 1ère fois et sans équivoque la mer smile ! Je ne trouve pas le sentier là où ma carte le mentionne, et c'est un couple de retraités sur sa terrasse qui va me réorienter dans la ruelle précédente pour en prendre le départ ...

Coustouges au soleil
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vous, je ne sais pas, mais moi j'ai vu la Mer !
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Le confort relatif des larges chemins, pistes et routes m'avaient permis de négliger sinon d'oublier les désagréments de mes chaussures ... Le retour dans le raidillon rocheux qui s'élève au-dessus de Coustouges va me rappeler à la réalité : les douleurs sont insupportables et je dois vite m'arrêter et me déchausser à nouveau. Ce ne sont pas des ampoules mais bien littéralement des brûlures qui me rougissent jusqu'au sang le dessus des orteils et certains côtés de chaque pied. J'avais eu ça au départ d'autres traversées entreprises avec d'autres chaussures que mes Mescalito : pas d'autre solution que de bander l'ensemble des orteils. Je vais le faire avec cette fois plusieurs tours d'Hansaplast, tenu en place par un tour d'élastoplaste. Je consomme ici une énorme quantité, mais prends garde à en conserver suffisamment pour pouvoir renouveler l'opération aussi proprement que possible demain matin. Les chaussettes renfilées par-dessus ce plâtrage de tissu, je resserre les chaussures à fond, serre les dents et repars encore.

L'itinéraire au plus près de la frontière et de la crête que je m'efforce de suivre va alterner entre sentier, piste carrossable, pistes coupe-feu à l'accès barré pour y empêcher le passage des 4x4, montant et descendant au fil des petits cols et petits sommets autour des 1000m d'altitude. Je n'en garde pas un souvenir immémorial, et attends la portion véritablement sur sentier qui me fera monter en direction des Rocs Comptador et Frausa. Un  instant ma météo va effacer tout orage, et je ne sais comment le prendre : dois-je me réjouir de pouvoir rallier sans risque mon objectif smile , ou bien pester après les souffrances que je me suis imposé à cause de cette menace devil ?

Je passe encore un Col Pregon (le 3ème de la journée), juste après le Corral de la Falguerone qui n'est plus qu'une villégiature abandonnée. La végétation recolonise ce qui avait dû être une piscine, des lampadaires émergent du maquis ... A 17h il me faut m'élever un peu plus franchement sous le Puig del Torn, et me retournant le sombre nuage de l'orage qui ne devait plus venir semble bel et bien arriver par le Sud. Il n'a pas l'air très conséquent et me laisse croire que, si averse il y a, elle ne durera que le temps du passage de cette cellule au mouvement rapide.

euh ... on avait dit plus d'orage, non ?
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j'étais supposé aller là-haut, il va falloir réviser les plans
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Au Coll de Perrillo à 17h30 et à mi-parcours entre Coustouges et Les Salines, une petite averse commence et je décide de la laisser passer à l'abri d'un arbre épais en bord de chemin. Je m'assois et grignote après avoir enfilé polaire et coupe-vent pour ne pas prendre froid, et comme le tonnerre gronde et que la pluie ne semble pas vouloir passer je consulte mes options : plus question d'entreprendre la crête vers le Roc Frausa dont c'était ici le point départ du sentier après des kilomètres de piste. Je pourrai descendre par l'Espagne par une combinaison de pistes et de sentier et rallier les Salines par les pentes boisées plutôt que la crête exposée, mais j'aperçois sur ma cartographie un abri mentionné côté français et nommé "Refuge Salines" et qui ne semble n'être qu'à ~1/2 h de marche, pourvu de rejoindre en contrebas la piste qui y mène.

Le tonnerre se mêle toujours plus à la pluie, qui se fait plus forte. Pas question de rester ici, et j'opte donc pour la recherche de cet abri mystère. Je dois monter sur la crête et la suivre brièvement pour trouver un petit sentier qui redescend vers la piste visée. Juste quand je commence à m'exposer je dé ouvre une belle borne frontière gravée et peinte dans le rocher, et crois bon de devoir en faire une photo malgré la pluie : à l'instant de la prise de vue je vois l'éclair passer au-dessus de ma tête et à la perpendiculaire de l'arête rocheuse dans un fracas assourdissant ! Je ne me préoccupe plus de chercher plus haut le sentier qui doit me faire descendre : je me lance sans attendre à même la pente dans la forêt pour échapper aux éléments ... C'est un thalweg abondamment rempli de feuilles mortes, cachant ce sur quoi je peux mettre le pied. Je dois combiner célérité et précaution, mais ma charge d'adrénaline décuple mon attention comme la précision de mes mouvements. Plus bas que je ne l'aurai cru d'après ma carte je trouve la piste recherchée, un bulldozer garé sur le côté. Visiblement il a récemment été utilisé pour en retailler les bords, me laissant une falaise verticale de 5 m de terre et de roches dans laquelle il me faut trouver un passage. Pour en descendre, je dois faire usage des racines mises à nu d'un arbre, auxquelles je me suspends avant de m'en laisser tomber pour le dernier mètre ...

Encore une borne électrique ... quelques centièmes de seconde entre cette photo et un éclair d'anthologie dans mon palmarès
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Il pleut à verse, les éclairs claquent avec jamais plus d'une poignée de secondes entre lumière et sonorisation. Je marche sur la piste aussi vite qu'il m'est possible, bien décidé à terminer ma journée dans l'abri mentionné quel que soit son état. La piste n'est pas directe et épouse le relief, et il me faut bien plus que la 1/2 heure supposée. Aucune indication de l'abri en question, et je me fie à sa position sur OpenCycle qui me dit devoir le trouver au-dessus de la piste et en haut du petit ravin d'un torrent. Je ne vois rien. Rien de rien, vérifiant ma position exacte au GPS comme sur les repères de mon environnement à de multiples reprises. Dépité mais que faire, je redescends vers la piste, laquelle fait quelques lacets vers le vallon. Je suis au pied du Roc Saint Sauveur, et en haut sur la crête c'est le GR10 que je peux rejoindre si je ne trouve pas en face de moi une gorge infranchissable.

La pluie est toujours là mais moins forte, et si je peux croire que l'orage va se dissiper un nouvel éclair et son roulement associé viennent à chaque fois me démentir. Dans le creux qui n'est finalement pas une gorge mais un petit vallon, je trouve des aménagements et panneaux qui indiquent la présence saisonnière de yourtes faisant office de refuge ... mais le site est inoccupé. Etait-ce là ce "refuge Salines", mal placé sur la carte ?

Je consomme beaucoup de batterie à faire des aller-retours sans cesse sur mon téléphone pour me repérer, et la journée de brumes et de forêts n'a pas été propice à la recharge. J'ai commis l'erreur plus tôt de recharger ma caméra au lieu de mon téléphone, et la powerbank est donc déjà à sec. J'ai encore 25% de charge sur le téléphone : ça devrait suffire mais il ne faut plus que tire trop dessus désormais ... Comme si je n'avais pas déjà assez de questions urgentes à gérer ...

mon Itinéraire-bis sous la pluie, et mon refuge qui n'existait pas / plus...
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Me croyant plus près du vrai site des Salines que je ne le suis en réalité, mais aussi évoluant de plus en plus lentement avec la fatigue et les douleurs, je sous-estime le temps qu'il me reste jusque là-bas et décide que c'est désormais le seul point que je peux viser. Je remonte par un sentier marqué qui rattrape le GR10, et je sais qu'en le remontant je ne devrais avoir qu'un court passage exposé à hauteur du Col de Saint Martin. Je me résous à tenter ma chance ...

Malgré les démentis qu'il cherche à m'adresser, l'orage s'affaiblit quand même et je m'engage dans la montée raide du GR10 vers la crête. A mon grand étonnement je trouve une tente plantée en dévers en bord de sentier par-dessus une eau qui a dû ruisseler. Je dois préciser ici que ces flancs de montagne ne se prêtent vraiment pas au bivouac, alors je comprends que quand on trouve un spot, même médiocre, on ne fait pas le difficile ... Je passe en disant bonsoir mais sans voir ni entendre l'occupant bunkerisé sous sa double toile. Désormais la lumière descend et je fais la course à la nuit ... Je vois et entends encore l'orage dans les 450m D+ de remontée depuis mon faux refuge, mais les éléments se sont assagis quand je traverse la zone exposée. J'entends encore le tonnerre mais il est plus lointain, sans que cela éteigne totalement mon appréhension ... Je reviens bientôt en sous-bois, et progresse en grimaçant, chaque pas malaxant un peu plus la peau brûlée, compressée et tartinée de pansements de mes pieds.

A l'aplomb du Roc Frausa, j'ose une photo dans le couchant
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Le sentier n'est pas toujours commode, et avec le jour qui baisse et baisse encore le sous-bois devient très sombre. Aux lenteurs de la fatigue s'ajoutent celles de la prudence, et c'est au bout d'un temps interminable que j'atteins enfin le Col del Pou de la Neu hors du couvert des arbres, et même là les dernières lueurs du jour sont faibles. L'orage est fini et il n'y a plus qu'une pluie légère : j'hésite à aller chercher la frontale pour l'ultime descente sur les Salines, mais décide de faire sans et m'économiser les minutes à manipuler le contenu de mon sac. Cette petite descente est bien courte sur ma carte et bien longue dans mon souvenir : quand je vois enfin la lumière passant par la porte ouverte du local réservé aux randonneurs, je fonce dans sa direction tel un papillon de nuit sur un réverbère. J'entre et m'adresse aux occupants :

-"par pitié, répondez-moi qu'il y a encore de la place !" roll ...

Il est 21h15, la nuit peut maintenant devenir noire. Il y a ici Mathieu et Ingrid qui finissent leur HRP, ainsi qu'une autre HRPiste en sens contraire dont je n'ai pas su noter le prénom. C'est pour eux l'heure de se coucher, et nous ne discutons que brièvement tandis que j'essaye de rattraper ce que j'ai à faire : me changer de mes affaires trempées, dîner, installer mon couchage ... Je laisse chaussettes et chaussures dehors, ainsi que les couches de pansements qui, dans les chaussures trempées, n'ont rien tenu et avaient quitté les positions assignées ... Pas de nouvelles ampoules, mais seulement ces brûlures qui vont continuer de me lancer sad ... J'essaye de ne pas trop faire subir de nuisances sonores au refuge des Salines endormi, avant d'aller m'écrouler à mon tour.

J'ai trouvé mon sanctuaire.


En quelques chiffres :

Total J43 :
56 km
D+2201
D-2676
Marche 13h31 (+pauses 1h00)
kmE 86
IBP 241

Cumul J01-43 :
1507 km
D+ 82 600 m
Marche 406 h
kmE 2523


Itinéraire
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Profil
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Progression
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Vidéo
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Dernière modification par Hervé27 (18-01-2023 12:13:54)


Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

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#419 23-11-2022 12:45:21

bernard_lyon
Μηδὲν ἄγαν
Lieu : Lyon
Inscription : 16-12-2015

Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Bou diou ! Quelle étape à nouveau…


Mon trombi | Liste | HRP Banyuls-Alos d'Isil | GR738
"Le soleil n'est jamais si beau qu'un jour où l'on se met en route." (Jean Giono, "Que ma joie demeure")
Modification non explicitée : orthographe ou syntaxe

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#420 23-11-2022 13:22:46

xROMUx
Membre
Inscription : 31-05-2008

Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Très beau retour et l'idée Yoyo, j'en avais déjà eu l'idée, mais je n'ai déjà jamais fait la traversée que j'avais prévu il y a longtemps, alors une double...n'en parlons pas (encore).
Cela dit ça donne encore plus d'idées d'étapes.

Tu fais d'ailleurs d'énormes étapes (je sais que c'est le même pour certains ici)

Hervé27 a écrit :

NB sur le chiffrage des étapes :
[...]
- distances par calculitineraires.fr tenant compte des gradients de pente (donc plus longues que par la seule mesure "à plat" sur une carte")
[...]

Ça reste très conséquent, je me demande quel entraînement tu t'étais donné avant le départ, j'ai beaucoup de mal à enchaîner plus de 25km et 2000mD+, sans soucis aux chevilles-hanches...et j'en passe.

Et surtout une impossibilité de récupération correcte qui diminue mes performance déjà après 3 jours...

Pourtant, je marchais souvent avant. (et mon sac doit-être vers 3.5-4kg, je n'ai plus regardé depuis longtemps).

En tout cas merci pour ce retour complet.

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#421 23-11-2022 13:23:34

Dermochelys
Membre
Lieu : Bruxelles
Inscription : 03-02-2022

Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Je souffre avec toi! Une nuit qui sera réparatrice j'espère!

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#422 23-11-2022 14:22:27

Hervé27
éMULe
Lieu : Normandie
Inscription : 01-11-2017
Site Web

Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Salut à tous et merci du passage  smile .

Pas ma plus grosse étape en terme de kilomètres et d'effort, mon record reste pour l'instant ici ... En revanche elle l'emporte haut la main en terme de pénibilité !


@xROMUx :

Pour les grosses étapes il faut d'abord aimer ça avant même d'en être capable ... J'adore bourriner sur des grosses journées, mais je comprends que ça puisse ne pas motiver tout le monde. Je fais ça tant que mon organisme veut bien me suivre (53 ans ...)

La fonction cardiaque joue beaucoup pour pouvoir maintenir l'effort sur la longue durée, et j'ai certainement un avantage de ce côté avec un pouls au repos qui peut descendre jusqu'à 40 ou en-dessous à l'heure du réveil, et ~50 en journée ... Il y faut donc un peu de prédisposition, mais de la préparation aide bien évidemment : pour ma part, c'est le footing qui m'a redonné le souffle nécessaire à avaler tous les dénivelés. Dans les ascensions j'adopte la même respiration que si j'étais en train de trottiner sur le plat.

On peut démarrer un long périple sans grosse préparation, mais à condition d'y aller tranquille au départ et être initialement très prudent avec ses articulations. Au fil des semaines à marcher quotidiennement, les distances parcourues tout autant que les cadences vont augmenter. Cette année, mis à part des pieds abîmés sur les derniers jours par de mauvaises chaussures, j'étais au top de la forme au 45ème et dernier jour et continuais de progresser.

On peut pousser plus fort dès le départ si on s'est préparé avant : pour ma part le mix footing / marche un peu tous les jours fonctionne très bien. Je décale mes journées pour commencer à bosser vers 10h, ce qui m'offre quelques heures préalables pour transpirer avant de me coller à mon écran.

Bonne réflexion pour ton choix de destination !


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#423 23-11-2022 16:37:24

xROMUx
Membre
Inscription : 31-05-2008

Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Salut

Ok, ça ressemble à ce que je faisait avant.

J'aime aussi les longues journées, mais ces dernières années je n'ai plus eu l'occaz, ni l'enthousiasme de le faire à cause de soucis de santé (passe les détails)

Mon métier fait que j'ai une "certaine" habitude des pentes raides (avec matos +/- lourd), mais je suis plus en statique qu'avant depuis 2.5 ans.

Quoique l'an passé j'ai fait quelques mois de crossfit, arrêté à cause de ces même soucis de santé, je compte reprendre un de ces 4, cela me permettra un prépa physique et du fun.
J'avais aussi fait un peu de vtt par chez moi (sur les terrils etc).

Il me semble que si je pouvais régler mes soucis de santé "physique", ça le ferait.

Merci pour la réponse wink.

Par contre pas d'ampoules et peu de rougeur au pieds, les Scarpa mescalito t'ont bien convenues.
Jamais trouvé ce qui me convient...il y a ça aussi ^^. et scarpa c'est trop étroit pour mes pieds.
les Peregrine, bof (j'ai des 8 gtx les crampons ne sont pas solides).

Bon, on attend les derniers moments du périple

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#424 23-11-2022 19:37:06

Canyon83
Membre
Inscription : 18-04-2021

Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Des châtaignes en août ? Y a plus de saisons mon bon monsieur !   lol
56km, pas de l'étape de garçon coiffeur  wink
Mais alors les chaussures neuves, une erreur de débutant ? Tu as dû te dire que tes pieds étaient blindés avec tous ces km engrangés, mais que nenni  tongue
Devenir un pied niqué, c'est un comble  wink

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#425 23-11-2022 21:39:56

Nicolas36
Marcheur léger
Inscription : 04-03-2021

Re : [Récit + liste] Pyrénées de Traverses HRP Aller-Retour 45 j

Canyon83 a écrit :

#671182Des châtaignes en août ? Y a plus de saisons mon bon monsieur !   lol

Je me suis fais même remarque en passant 3 semaines plus tard.

Hervé, j'avais pensé à faire comme toi, suivre le plus possible la frontière sauf que ..., je ne parcours pas autant de distance en une journée, et j'avais besoin d'un ravito (St-Laurent). Dans ma réflexion d'itinéraires, je m'étais posé la question des propriétés privés entre Coustouge, Villa Roja, Falgos ... Je me disais que ça pouvais passer en regardant les cartes de chaleur. J'avais lu un récit hors RL qui faisait le GRP Ronde du Canigou et qui avait eu affaire à un proprio lui aussi.
Mon plus beau passage ici était le pla de la Muga.


Modifications non signalées = Corrections de français

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