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#1 28-06-2007 11:26:57

Olaf Grosbaf
Membre
Inscription : 27-02-2007

Sur le GR20, de Calenzana à Vizzavona

Hello,
Voici le (long) récit de récentes pérégrinations sur l'Ile de Beauté. C'est aussi l'occasion de me présenter un peu sur ce forum qui m'a permis de m'alléger le corps et l'esprit (et aussi le porte-monnaie...).
Bien entendu, toute ressemblance avec des faits ou des personnages existant ou ayant existé ne serait que pure coïncidence...
Bonne lecture,
Olaf

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Fra li monti
De Calenzana à Vizzavona

Mercredi 13 juin

Le soleil se lève sur la Méditerranée alors que le ferry Mega Express Two double le Cap Corse, aux villages à flanc de montagne. Peu après c'est l'arrivée au port de Bastia, qui exige du pilote un impressionnant créneau arrière. Premiers pas sur l'Ile de Beauté en direction de la Place St-Nicolas pour un petit déjeuner à la terrasse du Bar Napoléon. Température douce et palmiers, ça fleure bon les vacances.
Le train à destination de Calvi et Ajaccio est bien plus rempli que l'automne précédent. Par chance, c'est une charmante corse aux cheveux de jais, et non un randonneur allemand et velu, qui prend place à mes côtés. Les chemins de fer corses ayant reçu la manne européenne, de nombreux tronçons sont en réfection. C'est donc en bus que se fait le trajet de Ponte Leccia à Ile Rousse. Nouveau transbordement pour Calvi dans une bétaillère des années '50. Trajet moite et pénible, à écouter un gros pinzut rougeaud débiter son discours de beauf: " Je me suis fait tout seul moi, Monsieur… Rien de tel qu'une bonne torgnole… etc… etc…". Sarko ou Le Pen?
La citadelle de Calvi est en vue, je me décide à aller manger un morceau au port. Mais sans trop comprendre comment, je me retrouve dans le bus pour Calenzana, point de départ du mythique "Géhèrevin". Au gîte d'étape, je fais la connaissance de Marc et Gilles, deux gars qui se trouvaient à bord du même ferry. Ils vont manger au village et me proposent de les accompagner. Départ pour un plat de pâtes au figatellu. Ils viennent du Sud-Ouest et ont réalisé le rêve de tout petit garçon: chauffeur de locomotive! Je n'en avais encore jamais rencontré et j'apprends pas mal de choses plus ou moins drôles et rassurantes sur leur métier. C'est aussi la première d'une longue série de rencontres avec le wagon du jeudi. Du montagnard au cuir tanné au novice innocent, de 17 à 67 ans. Il y a ceux qui l'ont déjà fait, et les autres… Ca rappelle d'autres choses… Et là encore ce ne sont pas forcément les plus forts en gueule qui ont la plus longue… expérience!
Vue la chaleur, pas de regrets de ne pas avoir attaqué la première étape dans l'après-midi. Il est bien plus agréable de siroter une bière en se gavant de fruits. En début de soirée je pars visiter Calenzana. Les petits vieux ne sont pas habillés en noir mais Uderzo et Gosciny ne sont pas loin de la réalité. Des chants corses sortent de l'église. Plus tard je croise une procession qui promène le Saint du village à travers les rues.
Sur une terrasse, j'aperçois le chauve à bacantes avec qui j'ai pris le bus. Je vais le saluer et nous décidons d'aller souper ensemble: brochettes d'agneau au feu de bois. Bernard a la cinquantaine et viens des Cévennes. Il s'est mis à la rando l'année passée. 1200km qui l'ont mené de sa maison à St-Jacques-de-Compostelle. En mémoire de son père, mort peu avant. La seule chose qu'il ait faite pour lui, me dit-il avec comme un regret dans la voix. Invité au mariage de son petit-neveux dans un village près de Bavella, il a décidé de s'y rendre à pied par le "chemin le plus dur d'Europe".
Retour au gîte au soleil couchant. Obligé de dormir avec la tente et le sac de couchage grand ouverts. Difficile de croire que quelques jours plus tôt trois personnes sont mortes d'hypothermie 1000m plus haut….

Jeudi 14 juin

Réveil à 4h45. Le déjeuner vite avalé, il me reste à faire le sac. Suite à ma première expérience corse qui m'a fait traîner 21kg sur les pentes du Monte d'Oru, j'ai décidé de m'alléger un peu. Pour ce faire rien de mieux que de prendre un sac trop petit et de rejeter impitoyablement tout ce qui n'y trouve pas place. C'est bien connu, la nature a horreur du vide et tout sac finit par se remplir, quelle que soit sa contenance. Au final, 15kg avec la bouffe pour neuf jours et deux litres de flotte. Mais cela nécessite une sérieuse science du rangement…
Le chemin débute dans le maquis. Malgré l'heure peu avancée, le soleil me rattrape rapidement et c'est en nage que j'atteins le premier col. Magnifique vue sur la citadelle de Calvi au loin. L'arrivée à la Bocca à u Saltu me fait basculer dans la vraie montagne corse: piliers de granite et vallées inextricables. Le chemin roulant, c'est fini pour quelques jours… Les mains entrent rapidement en action, dans des passages plus exposés que difficiles. J'en profite pour rattraper deux sympathiques lyonnais. C'est leur première aventure en montagne. Rapides dans les sections roulantes, ils patinent quelque peu dans les sections techniques.
Peu après la Bocca à u Bazzichellu, j'aperçois un gros rapace. Queue en losange, ailes en accent circonflexe: pas de doute, il s'agit d'un gypaète barbu. Durant une dizaine de minutes je le regarde surfer les ascendances qui naissent au-dessus de grandes dalles chauffées à blanc. Il n'en subsiste qu'une dizaine de couples en Corse. Chanceux. Puis  j'arrive au refuge d'Ortu di u Piobbu, terminus de la première étape. Seuls deux anglais qui doublent l'étape me précédent. J'en profite donc pour dénicher le meilleur emplacement de bivouac possible, à l'ombre. Quand, en tant que pinzut responsable qui, suite aux tragiques événements d'il y a quinze jours ( trois morts par hypothermie, deux disparus et un groupe de vingt personnes qui est passé à deux doigts d'y rester, alors-que-le-Gardien-leur-avait-bien-dit-de-ne-pas-partir), a bien intégré qu'il fallait écouter les locaux et leur connaissances ancestrales et légendaires sur la météo ô combien capricieuse et dangereuse de leur île, je m'enquiers de la météo, voici la réponse du gardien, mot pour mot : « Il devrait pleuvoir, mais je ne pense pas qu'il va pleuvoir ». Corse ou normand ? Si ses collègues ont été aussi clairs…
Eric et Xavier, les deux lyonnais, arrivent peu après. On sympathise rapidement et ils me proposent de partager leur platée de riz de midi. La chaleur de bœufs me coupe l'appétit et je me contente de boire un verre avec eux. Malgré leur inexpérience de la montagne, ils marchent bien et fort. Ayant voulu s'alléger au maximum, ils ne portent qu'un minimum de nourriture et n'ont ni réchaud ni tente. Du coup ils sont obligés de partir tôt et de marcher vite s'ils veulent pouvoir dormir dans des refuges au nombre de places limité. Il en est de même pour Bernard, qui arrive tranquillement, encore bien frais malgré les 1400m de dénivelé.
Lézardant à l'ombre, j'entends soudain un bon accent de Geunève. Voici Stéphane et Sébastien, 27 et 22 ans, cyclistes et amateurs de demi-marathons et autre polyathlon. Ah, jeunesse arrogante qui écluse bière après bière sans se refuser un petit cigarillo, tout en contemplant les épaves de plus en plus délabrées s'échouant sur la terrasse du refuge. Les cartes du poker menteur d'hier sont maintenant abattues. La plupart gardent le sourire malgré la fatigue. Mais qu'il est cruel ce GR: plus on va lentement, plus on subit le soleil et plus on souffre. Cercle vicieux.
L'après-midi se passe à l'ombre, à grignoter, siester et discuter avec les voisins de tente. Puis c'est en admirant le coucher du soleil que je soupe en compagnie de Sébastien et Stéphane.

Vendredi 15 juin

Bip bip, bip bip… Il est 4h55 et le campement s'agite. Le réchaud ronronne tandis que j'avale mon müesli quotidien. Départ à 6h pour le refuge Carrozu. C'est bientôt le passage des premières dalles, pas faciles pour des novices chargés à bloc. Je dépasse rapidement un petit groupe de français. L'un d'eux porte une salopette Gore-Tex et des coques plastiques flambant neuves. Bien du plaisir! En contrebas de la Bocca Pisciaghjia, Xavier et Eric me font signe. Je leur rends leur salut. Je ne l'apprendrai que trop tard, mais ils cherchaient à me montrer des mouflons sur les crêtes. Je n'ai rien vu, dommage. Il faut dire que les chemins corses ne se prêtent guère à la marche contemplative. J'en ai fait l'expérience l'année précédente, je n'ai pas envie de repasser par les urgences de Corte…
L'arrivée à la Bocca di Pisciaghjia offre une vue magnifique sur l'impressionnant Cirque de Bonifatu. Tout autour, ce n'est que jaillissement de granites rouges, verts et gris léchés par les brumes de la côte balane.
S'ensuit un cheminement sur les crêtes de toute beauté, mais où il convient d'être attentif si l'on veut éviter de passer des gradins à la piste. Puis c'est la longue descente vers Carrozu, où le soleil me rattrape.
Il n'est que 10h15 et je suis déjà heureux de me mettre à l'ombre sur la terrasse du refuge. Vue l'heure, le gardien me demande si je pense doubler l'étape. D'après lui la météo annonce de petits orages pour l'après-midi. Combinée avec la chaleur et l'envie de revoir les passagers du wagon du jeudi, je décide de profiter de la terrasse. Mais comme les emplacements de bivouac ne sont pas terribles et que je suis le premier, je me permets le luxe de prendre le meilleur lit du dortoir. Le petit train arrive. Pietra, Colomba ou Serena, les bières se suivent.
Avec les Geuneuvois, les Lyonnais et les Perpigniaings, nous décidons d'aller faire un tour dans les vasques de la Spasimata. L'appel de la sieste étant le plus fort, seuls Stéphane et Sébastien m'accompagnent. Nous ne résistons pas à franchir la passerelle brinquebalante qui surplombe la rivière d'une dizaine de mètres.
Osera, osera pas? C'est qu'à la mi-juin, l'eau est encore bien fraîche. Un Anglais s'est décidé. C'est vrai que par là-bas, ils ont l'habitude. Je me décide mais m'arrêterai, le souffle coupé, au niveau du nombril. C'est bon, mais faut pas abuser. Une fois sec, lézardage à l'ombre sur des dalles  chaudes, une merveille.
Le ciel se couvre, nous rentrons au refuge. Devant notre enthousiasme, Eric et Xavier se décident. Une heure plus tard, Eric revient le visage en sang. Pieds nus, il a glissé sur une dalle humide et s'est écrasé sur des rochers après avoir sauté une petite barre. Le menton ouvert et les dents de la mâchoire inférieure droite brisées… Fait chier… Pour eux les vacances sont finies. Le gardien appelle les secours mais l'orage naissant retarde les opérations.
Ce n'est que 2h plus tard, après avoir dévasté nombre de tentes et répandu une bonne quantité de chaussettes et slips mouillés dans le maquis que l'EC135 de la Sécurité Civile treuille Benoît et l'emmène à l'hôpital de Calvi pour un premier bilan. L'année passée, un gars s'est fait une double fracture du bassin au même endroit. Maigre consolation… Dommage de se quitter comme ça…
Du coup c'est une soirée un peu terne que je passe en compagnie de Xavier et Bernard. Mais la Nature nous redonne le sourire en nous offrant un somptueux coucher de soleil.

Samedi 16 juin

Bernard me réveille en se levant. C'est un peu tôt pour moi, mais bon. Aujourd'hui, je n'ai rien à ranger et c'est à 5h40 que je démarre, suivi par l'équipe du gars aux coques plastiques. Le franchissement de la passerelle chasse les dernières brumes cérébrales. S'ensuit un cheminement sur les dalles lisses dominant le torrent. Heureusement, elles sont bien sèches, mais gaffe quand même. J'arrive rapidement au lac de la Muvrella. Décevant. Et en plus, il n'y a pas de mouflons (mouflon=a muvra en corse)… Une petite traversée et hop, j'arrive au sommet de la grande descente sur Ascu Stagnu. Le vent s'est levé et pour la première fois je suis content de retrouver le soleil. Le massif du Monte Cintu, point culminant de la Corse à 2700m, est pris dans les nuages.
A 9h10, me voilà à Asco. Zut, l'épicerie vient de fermer. Mais la gardienne, qui rigole bien de mon accent, laisse entrer le P'tit Suisse. Quel bonheur de croquer une pomme!
Asco, c'est une ancienne station de ski. Le cadre est beau, mais le coin est moche. Sur un vieux pin laricio tombé à la gloire du développement, un anonyme a écrit: "J'ai été assassiné par la bêtise humaine. Après plus de 600 ans de force et de beauté, de sombres imbéciles m'ont condamné à mort pour rien, si ce n'est pour essayer de prouver qu'ils étaient puissants. Mais même mort, je resterai ici plus longtemps qu'eux. Amen…"
La météo annonce un petit risque d'averses pour l'après-midi, mais comme j'ai déjà passé trois après-midi à faire le lézard, il est temps de faire parler le mouflon en moi. Départ donc pour la Bocca Tumaginesca, porte d'entrée du mythique Cirque de la Solitude. Ce dernier, et les angoisses qu'il génère, sont au centre de bien des conversations depuis Calenzana. Les mains dans les poches pour certains, terrifiant pour d'autres… Le meilleur moyen reste d'aller y jeter un coup d'œil. A l'approche du col, l'ambiance se fait plus alpine. La végétation disparaît, quelques névés subsistent. Les brumes, accrochées aux flancs de sommets élancés, que déchire un vent violent contribuent à une ambiance qui devient sévère.
J'ai faim, mais je préfère aller voir ce qui m'attend avant de casser la croûte. Pas à dire, ça jette! 200m de dalles rocheuses bien raides à descendre, une traversée au pied et une remontée tout aussi raide sur la Bocca Minuta. On quitte là la grande randonnée pour entrer gentiment dans l'alpinisme. Les deux gars de l'Est qui mangent non loin n'ayant pas l'air pressé, j'en profite pour m'engager dans la descente. Seul, je n'aurai pas à craindre les chutes de pierre et les croisements.
Une  vire exposée mène aux premières chaînes. Et hop en position de rappel pour traverser en diagonale une dalle lisse. Pas trop vertigineux, ça va bien le faire. Et voilà que les chaînes s'arrêtent, mais pas les difficultés. S'ensuivent de longs passages de désescalade pas vraiment difficile mais terriblement exposée. Mieux vaut ne pas se mélanger les lacets! Les géhèristes dont c'est la première expérience alpine ne vont pas être déçus! Apprendre les rudiments de l'escalade ici, avec un gros sac de 25kg, sympa…
Bien que plus raide, la montée est nettement plus tranquille. J'arrive à la Bocca  minuta en compagnie de deux corses bavards (!). Pour la première fois, le panorama s'ouvre au-delà de la chaîne du Cintu, et dévoile celle de Capitellu-Rotondu, but des prochains jours. Descente rapide sur le refuge Tighjettu. Le fort vent et le temps qui se couvre, combinés à la fatigue d'avoir enchaîné deux étapes et 1900m de dénivelé, me font préférer le dortoir au bivouac. Pour une fois le gardien n'est pas taciturne : décidément, c'est la journée !
Je me retrouve avec le wagon du mercredi et ce n'est pas aussi facile de s'y intégrer, car il y a davantage de gros groupes. Je fais néanmoins la connaissance de Javier et François, qui sont eux aussi partis ce matin de Carrozu. Ils cherchent à faire le GR en une grosse semaine. Mais les pieds de François ne sont pas d'accord et le font savoir sous forme de grosses cloques. Javier poursuit seul et enchaîne sur le refuge de Ciottolu i Mori, à 3h de marche environ. François étant aussi allé se casser les dents sur l'Aconcagua l'année dernière, nous échangeons des souvenirs d'anciens combattants, dont celui de leur guide qui a fait une dépression au camp de base... Sympa de faire le psy à 4200m avec la tête prête à exploser!

Dimanche 17 juin

Ben, ce matin, il pleut au réveil… Le ciel est bien sombre, mais ça n'a pas l'air parti pour durer. Dans la montée de la Bocca Foggiale, je dépasse deux militaires qui essaient de boucler le GR en 5-6 jours et qui enchaînent des journées de 12-14h de marche en triplant ou quadruplant les étapes. Voici la Paglia Orba, sommet majeur dans l'esprit des Corses, et le Capu Tafunatu, la montagne trouée. Mais d'ici on n'en voit qu'un petit bout, du trou.
Puis c'est la descente sur le Col du Vergio en passant par les vasques du Golo. L'accident de vendredi me dissuade de tenter la baignade. Au-loin, la vue porte sur le magnifique Golfe de Porto, les calanche de Piana et le dôme granitique du Capu d'Ortu. Encore un coin à aller visiter...
Le Col du Vergio n'est guère plus beau que la station d'Ascu Stagnu, mais aujourd'hui, je ne me sens pas d'e doubler  jusqu'au refuge de Manganu. L'emplacement de bivouac, au bord de la route, ne m'enchante guère. Mais étant le premier sur les lieux, je peux au moins m'accaparer le seul coin d'ombre, entre quelques pins rachitiques. Après-midi douche, sieste et lecture.
En allant m'acheter une boisson, je tombe sur Stéphane et Sébastien, venus d'une traite depuis Asco. Sympa de se retrouver !

Lundi 18 juin

Nouveau départ matinal à destination de Manganu. Enfin un chemin roulant permettant de profiter des charmes de cette forêt de pins laricios. Arrivée à la Bocca San Petru un vent bien frais m'accueille. A voir la forme des arbres, pas de doute que les dominants viennent de l'ouest.
Puis viennent le Lavu de Ninu et ses pozzines, sortes de pelouses-marécages à l'herbe tendre et verte. Un troupeau de chevaux en profiten. Vision quasi islandaise. Au loin, les murailles de Capitellu, point culminant du GR20 à 2200m.
Voici Manganu. Il est 10h15. Malgré les nuages sombres qui arrivent de l'ouest, le gardien m'assure du beau temps. Alors je repars en direction du refuge de Petra Piana. Dix minutes plus tard, il pleut… Pas fiable le local… Néanmoins, je décide de lui faire confiance et poursuis la montée vers la brèche de Capitellu. 600m bien rude, mais les nuages apportent au moins un peu d'ombre. Dalles, gros blocs, petits névés, et hop, m'y voici. Superbe vue sur les flèches de granite, la vallée de la Restonica et les lacs de Melu et Capitellu. Petite pause sur les rochers chauffés. C'est ensuite un joli parcours assez alpin jusqu'à la Bocca à a Soglia. Nouvelle traversée pénible dans les blocs, les vernes et la chaleur. Je peine et je suis bien content de rencontrer un suisse allemand rigolard, tout aussi crevé que moi. Lui va vers Manganu. On rigole en se disant qu'on ne se remonte pas vraiment le moral.
Puis c'est Petra Piana vers 14h40. Petit plouf dans la fontaine. Le gardien n'arrivera que vers 18h, il faudra donc attendre pour la petite bière fraîche. J'en profite pour revoir l'itinéraire assez impressionnant qui monte au Rotondu. Pas facile de l'imaginer depuis le bas. Je vois aussi l'endroit où je m'étais mis la cheville en vrac, à 50m du refuge. Vraiment trop con… Avec la quantité de tentes autour du refuge, l'hélicoptère aurait de la peine à se poser cette fois-ci.
Beau coucher de soleil sur le Monte d'Oru, que l'on a traversé l'automne précédent avec Michel. Une très belle course sur laquelle j'ai bien souffert. Demain l'itinéraire que je parcourrai sera largement connu.

Mardi 19 juin

Dernier réveil aux aurores… Pas un souffle, il fait déjà lourd à 5h, ça promet. La descente sur la Bocca Manganellu est toujours aussi pénible. Puis c'est un parcours de crêtes le long des Pinzi Corbini. Le ciel est bien brumeux et la vue sur la baie d'Ajaccio limitée. Et voici les derniers passages techniques sous la Serra di Tenda. Une longue descente de 600m me mène à la Bocca d'Oreccia, à proximité du refuge de l'Onda. Dommage, car en face il faut remonter de 700m pour gagner la Punta Muratella, en plein cagnard.
Je l'atteins en dégoulinant. Voilà, la dernière difficulté est derrière moi. J'ai tout loisir d'admirer les arêtes du Monte d'Oru avant de me lancer dans l'interminable descente sur Vizzavona. Le chemin prend son temps et zigzague à travers de grandes dalles. Au premier torrent, casquette et T-shirt prennent un bain. Quel bonheur !
L'Agnone parcourt cette vallée le long de grandes vasques granitiques dans lesquelles de nombreux touristes tentent la baignade Les géhèristes S-N souffrent trop pour s'y arrêter tandis que les N-S commencent à sentir l'écurie. Un peu trop motivé, je me retrouve sur le cul, avec une pointe de bâton cassée…
La buvette de la Cascade des Anglais est bien tentante, mais ce serait petit joueur que de faire une pause ici, à 2km du but. J'avale donc ventre à terre la piste forestière qui me mène à la gare de Vizzavona. Ce petit village marque la mi-étape du GR20, neuf étapes au Nord, six au Sud. C'est souvent l'occasion d'un ravalement de façade avant la suite des festivités.
Pour moi, l'aventure se termine ici, devant un menu corse (assiette de charcuterie avec coppa, lonzu et saucisson de sanglier, omelette au brocciu et crème brûlée, le tout arrosé de Pietra, la bière à la châtaigne). J'ai trois jours d'avance sur mon planning. En serrant les dents, je pourrais tenter de boucler le GR. Mais l'envie de revoir ma petite famille est plus forte. Un long trajet m'attend, via Corte, Bastia, Toulon, et Genève. Le lendemain de mon retour, mon fils me gratifie de ses premiers pas à quatre pattes. J'ai fait le bon choix!

Dernière modification par Olaf Grosbaf (28-06-2007 14:14:10)


Mulet pas trop têtu et au régime

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#2 28-06-2007 11:55:45

Yak
Membre
Inscription : 31-03-2007

Re : Sur le GR20, de Calenzana à Vizzavona

Super Olaf,

A défaut d'y être en ce moment, tu viens de m'en faire vivre un super moment.

Merci,

Et bravo au premier pas de ton fils.


LE PARADIS.....??
il est là,
Sous nos pieds....                                                .... c'est la TERRE...

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#3 28-06-2007 17:10:14

piedo
Membre
Inscription : 29-04-2006

Re : Sur le GR20, de Calenzana à Vizzavona

Trés beau récit, qui évoque plein de souvenirs ...

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#4 29-06-2007 09:49:28

Nicholas
Membre
Inscription : 20-03-2007

Re : Sur le GR20, de Calenzana à Vizzavona

J'adhere aux compliments de Piedo et Yak.
Merci pour ce recit.

Mais juste pour info, tu pourrais lister la liste de ton equiment ?


" Si l'impossible existe, c'est parce qu'on essaie pas de le rendre possible." M.Horn

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#5 03-07-2007 08:44:31

Olaf Grosbaf
Membre
Inscription : 27-02-2007

Re : Sur le GR20, de Calenzana à Vizzavona

Voilà Nicholas, la liste du matos est postée sous la rubrique correspondante.
Yak, j'ai mieux compris le sens de ton message en parcourant le Bivouac. Tout de bon pour cette fabuleuse aventure qui vaut tous les GR du monde!
Olaf


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