5 jours de rando en Haut-Champsaur - 81 km

Herdubreid · 05-09-2008 18:39:13

Bonjour,

A suivre un petit compte rendu de la rando que j'ai effectuée cet été. J'en suis extrêmement satisfait. Ce n'est pas que j'ai réalisé un parcours exceptionnel, mais le fait même de partir était pour moi une victoire. En effet, bien que marcher soit mon loisir de vacances principal, je me contente depuis plusieurs années de balades à la journée (si l'on excepte de petits courses en montagne sur 2 jours), et j'ai bien souvent du mal à me libérer (corps et esprit !) pour envisager plus. Si l'on excepte une tentative ratée il y a deux ans (je me suis violemment cogné le genou le premier soir, et j'ai dû renoncer de suite), je n'avais pas randonné (ne serait-ce que passer 2 nuits consécutives) depuis .. 1997 ! J'ai beaucoup de petits ennuis physiques, pas graves, mais qui forment un ensemble qui entame sérieusement ma volonté : maux de têtes, migraines, mal au genou, douleur chronique inexplicable à une épaule, douleur chronique inexplicable sur le flanc gauche, mal au dos, rhumatismes (bon, j'arrête...). Pour la petite histoire, 5 jours avant le départ, une violente crise de sciatique m'a paralysé une bonne demi-heure (alors qu'il me restait encore 1000m à descendre sur 1600m), lors de ma semaine d'entrainement/dérouillage préalable....J'en reparlerai !

Si j'ai pu partir, je le dois en majorité grâce au forum. Je suis encore un MUL bien débutant, mais après mûres réflexions j'ai ramené le poids de base de mon sac à un peu moins de 8 kg (version 3 saisons - oui j'emporte du 3 saison en montagne l'été, je suis abonné aux conditions pourries). Je vais avoir du mal à descendre en dessous, mais j'ai encore quelques points sur lequel je peux gagner (un APN inadapté à 350 g environ, un abri proto de bric et de broc à 1250 g, un sac à dos à 1450g). Cette baisse de poids fut un facteur déterminant : je ne serais jamais reparti avec un "gros sac" comme avant. Alors je vous adresse un grand merci à tous !

edit : orthographe

Dernière modification par Herdubreid (05-09-2008 19:54:51)

sebastien74 · 05-09-2008 19:07:17

Bonsoir Herdubreid,

nous attendons votre compte rendu avec grand plaisir

Herdubreid · 05-09-2008 19:36:17

J'ai donc effectué une boucle de 81 km au départ de Molines en Champsaur. J'ai concocté mon itinéraire à partir des cartes IGN dans le but de parcourir une région qui semblait fort sauvage, avec très peu de sentiers mais de nombreux cols apparemment praticables. Une bonne lecture des cartes et quelques renseignements glanés sur le net ont suffit, je n'ai pas eu de mauvaises surprises. Ce parcours correspond grosso modo aux 2,5 premiers jours, pendant lesquels que n'ai effectivement rencontré qu'un groupe de 3 personnes, au tout début. Les 2,5 jours restants (le retour, en quelque sorte) se sont faits sur des sentiers beaucoup plus simples et donc, fréquentés.

Ne sachant pas exactement quelle était ma forme, je suis parti avec 6 jours d'autonomie complète, sans avoir prévu le lieu des bivouacs. (J'ai calculé les données techniques - dénivelées, km - après coup.) Finalement cinq jours m'auront suffi (et hop, 650 g en trop !). Sans montre, je n'ai pas noté mes temps de marche, pauses, etc. En regardant a posteriori l'heure sur mes fichiers photos, je peux dire qu'en gros je pars entre 7h30 et 9h30 du matin et je m'arrête entre 18h30 et 20h. Je marche assez lentement, je m'arrête parfois longtemps (sieste, cafés) aussi les étapes ne semblent pas formidables. Les étapes en hors sentier (globalement sur pierrier) sont plus courtes : on monte droit, mais on s'épuise d'autant !

Premier jour :

Molines en Champsaur - Remontée du Vallon de Peyron Roux - Col de Font-froide - Vallon de Navette - Début de remontée du vallon de Buchardet

Profil : 1460 m - 1230 d - 250 m (ce sont les dénivelées : m = en montée ; d = en descente )
Soit 1710 m et 1230 d pour 14 km.

Le vallon de Peyron Roux est très sauvage, quoique que parcouru par un bon sentier, utile principalement au berger : vers le col et au-delà des brebis, le sentier s'efface. L'ambiance est d'un calme olympien, je monte doucement, je suis heureux d'être là, d'être (enfin!) parti. Un "jour blanc" s'installe peu à peu : bien, je ne mourrai pas de chaud aujourd'hui !

Arrivé au col (où je croise un groupe de 3 personnes), je découvre mes chers Ecrins (si vous voulez bien me pardonner ce possessif !), ainsi que, plus près, mon terrain de jeu du lendemain : la rigolote Tête Virante, toute plate, que j'atteindrai le lendemain en fin de matinée, ainsi que le Pic de Parières, qui m'accueillera en soirée. Je n'ai pas avalé ces 1400 m de dénivelée, mais j'estime être monté raisonnablement, je me dis que tout va bien. Je suis serein, heureux, je fais une longue pause sur le tout petit sommet dominant le col au Nord.

Je me remets en route pour la longue descente qui me mènera du col de Font-Froide au fond du vallon de Navette : descente raide dans les pierriers, jalonnée de 2 ou 3 cairns incohérents parfaitement inutiles. Je ne distingue aucune trace récente.

La descente du haut vallon de Navette sera bien plus facile, mais je n'emprunte pas le sentier rive gauche, je choisis les drailles de la rive droite qui me mèneront (après quelques petites acrobaties végétales) au pied du vallon du Buchardet. Le jour blanc tourne au gris, mais rien vraiment ne m'inquiète aujourd'hui, je flotte sur mon nuage, même si la fatigue de cette première journée commence à se faire sentir.

Au fond du vallon de Navette, un glacier se meurt, au pied de la bien nommée "Brèche de l'Homme étroit".

Regard en arrière sur le vallon descendu : tiens, le temps se met au beau ?

Ah ah, que nenni, ça sent soudain le soufre par ici, je me dépêche un peu dans les premiers mètres de montée du vallon de Buchardet, il serait temps que je me mette à l'abri !

Damnation ! Alors que je montais mon abri, un orage aussi soudain que violent éclate sur ma tête. Je m'engouffre sous le double toit pour laisser passer une démentielle et tempêtueuse averse de grêle. Je rigole (tant que l'abri tient !), je suis tellement heureux d'être ici, et puis le mauvais temps en montagne, je suis abonné, je me sens presque chez moi ! Finalement un quart d'heure plus tard les éléments se calment, même si l'orage gronde encore sur le Valgaudemar tout proche.

Je finis de m'installer, prends mon temps pour me faire à manger. Le soir m'offrira un superbe spectacle de brumes déchirées.

edit: orthographe

Dernière modification par Herdubreid (05-09-2008 19:59:32)

sebastien74 · 05-09-2008 19:48:32

Un superbe récit à laquelle je me suis imprégné, et les photos sont superbe grand bravo.

Petite question toute bete, comment vous vous procurez les topo,cartographie.....? ( je suis un débutant)

Herdubreid · 05-09-2008 20:16:50

sebastien74 a écrit :

Petite question toute bete, comment vous vous procurez les topo,cartographie.....? ( je suis un débutant)

Personnellement, je ne me sers jamais de topo pour marcher (donc je ne saurai pas te renseigner sur les topos), uniquement des cartes. Mais ça demande une bonne expérience de leur lecture. Pour la France les cartes IGN au 25 000 ème sont parfaites, et se trouvent en librairie, presse, grandes surfaces, sur le net, etc. Chaque carte cible une région limitée donc il faut tout de même avoir au préalable une bonne idée du lieu désiré, en fonction de tes goûts et capacités, pour acheter la bonne carte.

sebastien74 · 05-09-2008 20:26:04

Merci beaucoup Herdubreid, concernant mais capacité je ne pourrais le dire.
Pas de randonné en mon actif dans le millieux de la montagne, mais ça viendras dès l'année prochaine.
J'ai hate

didoenrando · 05-09-2008 22:41:11

ce récit dans "du vécu, que du vécu" est vraiment a sa place.
on sent que tu as vraiment pris du plaisir a vivre ces moments, et tant mieux !
j'adore ton lieu de bivouac, très bon choix.

je te souhaite d'y retourner dès que tu le voudras.

Herdubreid · 06-09-2008 14:28:17

didoenrando a écrit :

ce récit dans "du vécu, que du vécu" est vraiment a sa place.
on sent que tu as vraiment pris du plaisir a vivre ces moments, et tant mieux !
j'adore ton lieu de bivouac, très bon choix.
je te souhaite d'y retourner dès que tu le voudras.

Merci Bon, pour y retourner, faudra attendre de bons mois. J'ai la mauvaise habitude d'habiter loin dans les plaines ... quelle idée !

Herdubreid · 09-09-2008 22:45:35

Deuxième jour :

Col de Val Estreche - Tête Virante - Col des Lauzières - Lacs de Crupillouse -Pic de Parières.

Profil : 970 m - 120 d - 250 m -150 d - 400 m - 350 d (ce sont les dénivelées : m = en montée ; d = en descente )
Soit 1620 m et 620 d pour 10 km.

Une étape courte mais totalement hors-sentier, excepté les 400 premiers mètres de dénivelée vers le premier col. Un régal de sauvagerie et de paysages. La plus jolie étape quant à l'itinéraire et l'ambiance.

Nuit impeccable et reposante, je pars serein pour la remontée du vallon de Buchardet, en vue d'atteindre le col de Val Estreche ... encore bien haut (à droite sur la photo).

Le temps est assez nuageux, mais s'annonce en fait très beau : il faut simplement évacuer toute l'humidité de la veille. Le Valgaudemar en fait les frais avec cette petite mer de nuages.

Au delà de la vallée, vue sur le Pic Turbat (à gauche), un 3000 facile qui doit encore recevoir ma visite, le col Turbat, et à droite l'Olan qui ne parvient pas encore à se défaire de son chapeau.

Le sentier est effacé depuis un bon moment quand j'aperçois enfin le col tout proche ... regard sur la carte : encore 300 m de dénivelée ! Mince, je suis lent, ce matin. Qu'importe, c'est sauvage, magnifique, je me régale. Dans les pierriers je vais cependant m'essoufler beaucoup, et je pense aux gens de Champoléon qui, à l'époque, passaient par là pour rejoindre leurs pénates, à peine déssoulés après 2 ou 3 jours de fête canaille en Valgaudemar (source : "Les cols du Parc des Ecrins", J.P. Nicollet). Quelle santé !

Encore un effort après le col et j'atteins la Tête Virante, sommet tout plat. Je découvre avec ravissement que la "petite mer" sur le Valgau n'était que le fjord d'un océan recouvrant tout le Trièves et le Matheysin. Au loin, le Mont Aiguille et le Grand Veymont pointent leur proue.

Un quart de tour à droite pour découvrir les sommets des Ecrins (de gauche à droite, arrière plan) : la Barre, le Pic Coolidge, Ailefroide occidentale.

Un immense cairn chapeaute la Tête (notez le sac de l'apprenti mul !). Aurait-il été initié par ces fameux fêtards d'antan ?

Tout en haut à gauche, le col des Lauzières, suite de mon itinéraire. J'observe bien : descendre un peu, longer les rochers, remonter la base du triangle orange par la droite, remonter dans les éboulis et les rochers : ah, ça doit passer !

Dans cette portion sauvage, quelques chutes de pierres m'annoncent ce que j'espérais : des chamois. Je commence à compter machinalement : 1, 2, 5, 10, mazette, j'abandonne, ils sont une petite trentaine ! L'ambiance est magique. Sur cette photo on les voit peu, mais l'atmosphère y est.

J'arrive au col des Lauzières sans vraies difficultés, de bons rochers faciles m'ayant épargné les éboulis instables. Un itinéraire rêvé : pas une trace, concrétisation de mon imagination cartographique. De l'autre côté : les lacs de Crupillouse (bien à gauche), le Sirac majestueux, le fond de la vallée de Champoléon. Je plane.

Je traverse tout le plateau des lacs pour rejoindre le col de Veyre. Un bon sentier amène aux lacs depuis la vallée, je m'attendais à trouver quelques promeneurs. Au loin je vois un chapeau sur une tête qui commence la descente. Ma seule rencontre de la journée ! Du col de Veyre je découvre la combe de Veyre, que je dois descendre demain. Quelle plongée !

Mais pour l'heure, je plante le bivouac, Pas facile de trouver une place dans ce chaos de rocs. Une petite recherche m'amène sur une minuscule terrasse mi herbe/mi cailloux. Pas d'eau mais un névé au col à 2 mn, vue splendide, parfait !

Il semble bien tôt me direz-vous. Mais c'est que j'ai encore le Pic de Parières (3075m) à mon programme, que j'atteindrai (très léger pour le coup) par le col de Parières et l'arête E. Escalade facile mais demandant un pied sûr.

L'ambiance au sommet est extraordinaire. Alors qu'au sud c'est le grand beau, au nord s'évacuent encore les brumes, par grandes bouffées remontant les pentes, emmenées par le vent. Par moments des bruits très lointains et incongrus me parviennent : un torrent, des moutons, un berger criant après son chien... Une fin de soirée en haute altitude est un plaisir rare, à savourer. (Exercice : trouver l'abri sur la 4ème photo).

Redescendu de mon perchoir, reposé, repu, j'admire les couleurs du couchant.

Journée exemplaire ... Alors que je me lève de mon rocher siège pour aller dormir, le drame : une flamme au bas du dos, une connection fulgurante jusqu'au genou, je suis quasiment coincé... sciatique. Je rejoins l'abri en boîtant et me couche tant bien que mal, en espérant...

Nicko · 10-09-2008 11:46:21

Vraiment un superbe récit, vivement la suite !!!

Dire que j'ai renoncé aux lacs de Crupillouse pour la deuxième année consécutive !!! Tes photos me convainquent que c'est mon prochain objectif obligé. Tu es déjà monté par le sentier depuis la vallée ? Si oui, dirais tu qu'un débutant peut s'en sortir ? Le commentaire d'un topo guide m' un peu refroidi quant à l'idée d'y amener des amis peu aguerris ... je n'achèterais plus jamais ce genre de guides, trop alarmistes ...

Herdubreid · 10-09-2008 12:01:37

Nicko a écrit :

Tu es déjà monté par le sentier depuis la vallée ? Si oui, dirais tu qu'un débutant peut s'en sortir ..

J'y suis monté il ya très longtemps, mais c'était au printemps et toute la deuxième moitié était en neige ... Au vu de la carte : sentier tout le long, montant assez raide par endroit, et 1400 m de dénivelée. Il faut donc (mais tu peux aussi lire : il suffit donc ) être en forme. Si difficultés il y a, elles sont au début, lorsque le sentier franchit une barre rocheuse. Je n'ai aucun souvenir de difficultés, mais bon, la mémoire peut me faire défaut. A priori c'est un sentier, certes assez raide, mais un sentier. Franchement fais l'essai, si tu trouves le passage de barre trop vertigineux à ton gôut, il te suffira de faire demi-tour ! C'est en effet comme cela l'on apprend à connaître ses capacités et qu'on les
fait progresser, que l'on démythifie les appréciations d'autrui (cf topo) pour se faire sa propre opinion.

Edit : encore les lacs, pour Nicko

Dernière modification par Herdubreid (10-09-2008 12:10:55)

Nicko · 10-09-2008 12:13:58

En fait je n'ai pas trop peur pour moi, sentier ou pas je passe tant qu'il ne faut pas escalader plus de quelques mètres, mais ça m'arrive souvent d'être trop optimiste sur les capacités (surtout la volonté en fait) des gens que j'emmène. J'ai vraiment du mal à me rendre compte de ce qui est difficile pour quelqu'un de pas habitué et il me semble que renoncer à une ballade devant les difficultés fait beaucoup de mal à la confiance en soi de certains débutants ... et la confiance en soi c'est 95% de ce qu'il faut pour la moyenne montagne, du moins tant qu'on se contente de ballades à la journée.
Merci en tous cas.

Nicko · 10-09-2008 12:15:58

Raaaaaaaaaaaahhhh tu vas me tuer avec tes photos ... je repars tout de suite dans les Alpes !!!

NThony · 10-09-2008 13:08:38

Elle est géniale ta sortie J'ai déjà vu les Ecrins du Vercors, de Belledonne, du plateau d'Emparis, du massif des Cerces, de la Vanoise, du Queyras mais jamais du Champsaur !!! Va falloir que je remédie à ça parce tes photos me donnent vraiment envie d'y aller

La suite !!

fab05 · 10-09-2008 13:27:15

Herdubreid a écrit :

Nicko a écrit :
Tu es déjà monté par le sentier depuis la vallée ? Si oui, dirais tu qu'un débutant peut s'en sortir ..
J'y suis monté il ya très longtemps, mais c'était au printemps et toute la deuxième moitié était en neige ... Au vu de la carte : sentier tout le long, montant assez raide par endroit, et 1400 m de dénivelée. Il faut donc (mais tu peux aussi lire : il suffit donc ) être en forme. Si difficultés il y a, elles sont au début, lorsque le sentier franchit une barre rocheuse. Je n'ai aucun souvenir de difficultés, mais bon, la mémoire peut me faire défaut. A priori c'est un sentier, certes assez raide, mais un sentier. Franchement fais l'essai, si tu trouves le passage de barre trop vertigineux à ton gôut, il te suffira de faire demi-tour ! C'est en effet comme cela l'on apprend à connaître ses capacités et qu'on les
fait progresser, que l'on démythifie les appréciations d'autrui (cf topo) pour se faire sa propre opinion.

Merci pour ce compte rendu et ces images qui me parlent beaucoup. En effet, c'est un peu mon fief et je connais très très bien les secteurs Champsaur et Valgaudemar y ayant habité au fond de l'un et l'autre. Joli cheminement bien élégant d'ailleurs, pour ces 2 premiers jours. C'est hyper sauvage même en été. Je laisse imaginer ces cheminements en hiver en ski de rando .... coins rares et non aménagés( disons non massacrés).

Pour Nicko,
La montée de 1300 m, soutenue, donc efficace, aux lacs depuis la vallée, ne pose pas de problèmes en général (enfants, randonneurs moyens...). En revanche c'est la descente qui représente la difficulté essentielle : après l'effort de montée, la baisse de motivation (car c'est un retour et le but est atteint), la descente parait longue et les jambes sont mises à rude épreuve tout le long pour les non habitués...

Herdubreid · 10-09-2008 13:46:40

Merci pour vos appréciations La suite du parcours sera cependant moins sauvage, il n'est pas facile de faire une boucle cohérente en évitant toute portion fréquentée. Mais j'ai repéré de nombreux autres cheminements et cols possibles dans ce coin, il faudra que j'y retourne pour une "exploration" plus approfondie.

NThony a écrit :

J'ai déjà vu les Ecrins du Vercors, de Belledonne, du plateau d'Emparis, du massif des Cerces, de la Vanoise, du Queyras mais jamais du Champsaur !!! !

Perso il me manque celle de Belledonne J'ai un super projet de rando tout-terrain par là-bas, que je traine dans mes cartons depuis des années. Pour ce qui est de la vue depuis le Champsaur, l'apothéose sera pour le dernier jour. Fab, tu dois te douter depuis où, mais chut, préservons le suspens

Herdubreid · 10-09-2008 22:47:23

Jour 3 : Combe de Veyre - Vallon d'Isora - Col Gouiran - Col de la Valette - Refuge de Pré Chaumette - Cabane des Rougnoux.

Profil : 1000 d - 900 m - 100 d - 170 m - 880 d - 300 m
Soit 1470 m et 1980 d pour 16 km.

Réveil morose après une nuit pénible. Je suis toujours à moitié coincé et le sol inégal et caillouteux n'a visiblement rien arrangé. Je prends un cachet, heureusement emmené suite à ma crise de sciatique de la semaine dernière. Le moindre geste est compliqué, je plie bagage comme je peux : il faut bien que je descende ! Oui mais, par où ? Si je prends le sentier, cela signifie abandon définitif, et 1400 m de dénivelée. Si je descends la combe de Veyre en hors piste, je n'ai "que" 1250 m à descendre avant la route. Le hors-piste est-il sérieux dans mon état ? Je réfléchis et conclus que oui : je vais descendre direct, avec un peu de chance névés et éboulis m'offriront de rapides glissades. Adjugé, je choisis la combe. D'après la carte il y a tout en bas une barre rocheuse à franchir. Mais j'ai lu plusieurs témoignages, ça passe (même si la plupart passe en ski). Sur la photo, prise plus tard d'en face, mon trajet en jaune. En rouge un passage beaucoup plus facile, mais aboutissant au torrent à un endroit ou le névé le recouvrant me surplombe de 3 m, infranchissable (cercle rouge). Nul doute qu'en ski il s'agit de la bonne voie.

Les premiers pas sont très pénibles, je me demande vraiment combien de temps cela va me prendre. Puis, comme prévu, j'enchaîne glissades sur névés puis éboulis : pas loin de 400 m avalés sans trop d'efforts. Après, il me faut bien marcher dans la pente raide, mais la douleur s'est estompée, je respire un peu. Bon an mal an je parviens en haut de la dernière barre rocheuse.
Mince, vu d'en haut, le passage n'est pas évident à trouver ! J'ai vu un seul cairn inutile au milieu des éboulis, mais ici, plus une trace ! Au jugé je descends une ravine facile, elle tourne et en quelques pas je suis au torrent ! Déjà sorti ? Eh non, le névé me surplombe d'un bon 3 mètres, demi-tour, remontée. Je tente une sorte de sente, j'abouti à un replat au dessus de la barre, demi-tour, remontée. Je suis une autre ravine, elle devient très raide mais bien protégée par la végétation. Je descends en me tenant aux rhododendrons, aux fougères, aux racines de saules...2 ou 3 pas de désescalade facile, ca y est, je suis sorti !

Le débouché de la combe : aucun passage évident !

Je marque une pause bien méritée. Soudain je prends conscience que toute douleur a disparu ! J'étais tellement concentré que je n'y pensais plus. Chouette, je continue ! Mais une page vient de se tourner. Désormais mon programme emprunte de bons sentiers. Je repense à d'autres cheminements imaginés, bien tentants pour prolonger l'aventure : par exemple gravir le fond du vallon d'Isora pour revenir par le col de Clapouse. Je n'ai aucune certitude sur la praticabilité. Etant donné le sérieux avertissement donné par mon dos, je renonce vite et reviens au programme initial.

Le fond du vallon d'Isora :

Derniers pas hors piste, descente du vallon d'Isora :

Par une petite traversée ascendante, je rejoins le sentier qui me ménera au col Gouiran. C'est parti pour 900 m de remontée, pile en face de la combe de Veyre, sur l'autre versant du vallon d'Isora. Je pénètre ainsi dans un paysage de marnes noires, que j'adore, elles me rappellent mes bien-aimées Basses-Alpes. Pause déjeuner peu avant de rejoindre l'autoroute (GR 54), je regarde avec déjà un peu de nostalgie mon terrain de jeu de la veille et de ce matin.

Après, GR 54 jusqu'au refuge de Pré Chaumette. C'est dimanche, il fait un temps splendide (peut-être un peu chaud ?), et pourtant je ne croiserai "qu'une" quinzaine de personnes, et aucun randonneur au long cours. Du col Gouiran on découvre le col de Vallonpierre (au fond : Cime du Vallon, les Rouies), ainsi que le futur col à franchir, celui de la Valette.

Du col de la Valette, un dernier regard, par delà le col Gouiran, sur le pays parcouru.

La descente sur le refuge de Pré Chaumette me décevra un peu. Je voulais passer là pour découvrir le versant sud du Sirac. Mais la vue est écrasée par la dénivelée, et les grands glaciers de la carte sont morts, réduits, à quelques exceptions près, à de pauvres névés. Il fait très chaud maintenant, et je commence à manquer d'eau. Je passe au refuge pour faire le plein, et boire au passage 1,5 l en deux traites ! Oui, décidemment, j'avais chaud ... Je ne m'éternise pas, je ne suis pas prêt du tout à retourner à la civilisation. Bien que fatigué, j'entame une nouvelle montée de 300m, toujours sur le GR 54, jusqu'aux Rougnoux où je plante mon abri. Le soleil à déjà basculé derrière la crête, il ne doit pas être bien tôt !

Derniers regards sur la crête du Martinet dominant de magnifiques plis :

fab05 · 21-09-2008 18:39:18

Il ne manque pas une petite suite ?

Herdubreid · 21-09-2008 20:06:50

Si bien sûr, un bon point à ceux qui suivent Un peu trop occupé cette semaine, mais je compte bien finir le compte-rendu ... A suivre donc

Herdubreid · 07-10-2008 21:53:10

Jour 4 : Rougnoux - Col du Cheval de Bois - Col de Méollion - Vallon de Méollion - Les Borels, Les Fermons - Vallon du Tourond jusque "Planure" (1900m).

Profil :380m 120d 220m 1300d 660m
Soit 1260 m et 1520 d pour 20 km.

La nuit fut très bonne et le départ matinal. En montant au col du Cheval de Bois je découvre enfin la face S du massif du Sirac selon une perspective avantageuse. Je ne peux que constater à nouveau la mort des glaciers qui devaient être si beaux il y a encore quelques années.

Au col du Cheval de Bois, le sentier s'estompe. On y découvre le Sommet de Prelles qui me fait de l'oeil, le parcours en traversée par l'arête du NE au SO étant très tentant. Mais la perspective d'y apercevoir les teleskis d'Orcières me fait renoncer.

Cap donc sur la suite du programme, le col de Méollion, qui s'atteint de ce côté par le haut : il faut d'abord rejoindre le petit sommet le dominant au S (à gauche sur la photo). Une dernière petite portion hors sentier, mais très facile. Il est encore assez tôt, la luminosité est belle et le silence royal.

La vue de là-haut est très sympa, plus développée que ce que j'avais imaginé. On domine le sauvage Vallon de Prelles :

Le Sirac trône toujours, mais aussi au loin l'Olan que ne parvient pas à cacher la jolie Aiguille de Morges (tout en bas à gauche, le vallon d'Isora descendu la veille):

Vers l'Ouest on aperçoit même le Gapençais avec, au delà de col Bayard, la très reconnaissable montagne de Ceüse:

La suite du parcours consiste en la descente complète du vallon de Méollion. J'avais prévu de monter au sommet de la montagne de Cédéra, mais ... je n'ai pas eu le courage d'effectuer ces 600m de dénivelée en aller-retour ! Je déteste ressentir cela, si je n'ai pas le courage au cours d'une rando où je me régale, quand l'aurais-je ? Je ne me sens sûrement pas assez en forme, passons ... Il faut dire que la prochaine montée de mon parcours sera de plus de 1900 m de dénivelée, et je veux absolument l'entamer aujourd'hui pour la couper en deux, j'ai peur de trop en baver sinon. Ah où sont passés les jours de grande forme ...

Dans ce vallon je retrouve un paysage de marnes noires que j'apprécie particulièrement.

Je croise également un sympathique couple de mulets se rendant à Guillestre. Bonne route !

La descente fut assez longue, j'ai chaud ! Dans le bas du vallon je croise ensuite de nombreux promeneurs, cette après-midi sera la moins tranquille de toute la rando. Je passe aux Borels (la route ... heureusement seulement traversée !) ce qui m'amène très bas, et j'entame aussitôt la remontée par le vallon du Tourond. Là encore je croise de nombreux touristes descendant sans doute du refuge-buvette du Tourond. Je grommelle et presse le pas ... et finalement j'aboutis bien plus haut que ce que j'espérais.

Je plante le bivouac au lieu dit "Planure", dans un magnifique cadre parsemé de mélèzes, dans le calme retrouvé maintenant que le refuge est bien dépassé. De cet endroit magique je peux contempler tout le chemin parcouru depuis le col de Méollion (le vallon au fond à droite) :

Mais je découvre aussi, bien haut et au loin, le but du lendemain :

thierrycth · 08-10-2008 09:18:54

Super ce récit on s'y croit...

scal · 08-10-2008 23:18:00

oui, superbe...

je l'avais loupé... heureusement que le file remonte car c'est vraiment le
genre d'itinéraire que j'affectionne et j'irai certainement sur tes pas Herdubreid
merci pour ce reportage

Herdubreid · 09-10-2008 18:43:57

Je suis ravi que ça vous plaise. Comme quoi j'ai bien fait de paresser un peu avant de poster ce jour n°4 En attendant le récit du 5ème et dernier jour, voici une photo de mes 6 jours de nourriture en autonomie complète. Un volume relativement restreint pour environ 2850 cal. et 650 g par jour. Si ça vous intéresse, je posterais la liste complète et détaillée. (En fait je l'ai perdue et j'ai la flemme de tout recalculer )

P.S. le couvercle en plastique ne fait pas partie du matos emporté

Herdubreid · 15-10-2008 22:17:00

Jour 5 : Col de Côte Longue - Vieux Chaillol - col de la Pisse - Descente finale sur Molines (Forêt du Roy, Ubac de Muande).

Profil :1240m 1610d 110m 440d
Soit 1350 m et 2050 d pour 21 km.

De nouveau nuit très bonne, mais tellement bonne que le départ sera moins matinal, sous le soleil déjà présent. Objectif du jour : le sommet du Vieux Chaillol, 3262 m, point culminant de la rando. J'y tiens beaucoup, l'ayant raté il y a ... 16 ans pour cause de mauvais temps.

La première montée, jusqu'au col de Côte Longue, se déroule dans une ambiance merveilleuse : soleil généreux mais encore doux, calme olympien. Je ne vois, au loin, qu'un berger montant lui aussi une pente faisant vis-à-vis. Un regard en arrière me permet d'embrasser une fois de plus tout le trajet de la veille.

Au col de Côte Longue, la vue est déjà merveilleuse. Par exemple, loin au delà de l'Embrunais, les hauts sommets du Queyras.

J'y rencontre également 2 personnes, déjà bien essouflées. Elles me regardent arriver avec une sorte de stupeur ... Je comprendrais par la suite : en fait de nombreuses personnes ce jour feront l'ascension du Vieux-Chaillol, mais en partant d'un autre endroit. Elles empruntent toutes le même chemin, qui, jusqu'au col, n'est pas le mien. Je n'avais pas imaginé une telle foule ici ...Je renonce à alléger mon sac, et effectue les derniers 500 m de dénivelée chargé ... mais il faut croire que la MUL me donne des ailes : en fait je dépasse une dizaine de personnes ! Au sommet un groupe de retraités pourrit l'ambiance de leurs cris (attention, je précise, je n'ai absolument rien contre les personnes âgées, en revanche j'ai déjà beaucoup plus de mal avec les groupes, et bien plus encore avec les groupes bruyants).

Heureusement ils s'en vont quand j'arrive et ... mon dieu, la vue est absolument exceptionnelle ! Quel choc ! J'ai déjà pourtant découvert de nombreuses vues depuis de nombreux sommets, mais de voir un tel paysage à 360°, sous une luminosité exceptionnelle, au point culminant de la rando et pour couronner le dernier jour, avec une vue d'ensemble de quasiment toute la rando, j'avoue que ce fût un plaisir immense.

Olan, Cime du Vallon, Rouies. Arrière plan : Girose, Plaret (?), Râteau, Meije avec son très joli glacier carré.

Dôme et Barre, Coolidge, les Ailefroide (et tout en bas au premier plan, pour ceux qui suivent : la Tête Virante)

Les Ailfroide, les Bans, le Sirac, et au milieu-plan les lacs de Crupillouse, le Pic de Parières (toujours pour ceux qui suivent )

Col de Côte Longue au premier plan, au fond le Bas-Champsaur

Col de la Pisse au premier plan, col Bayard, Gap, Montagne de Lure

Je fais une pause très longue sur ce sommet. La rando touche à son terme, et je profite au maximum du spectacle. Enfin je me décide à quitter les lieux. Il ne me reste plus qu'à descendre sur Molines par le vallon de la Muande (au premier plan - arrière plan : le Dévoluy) ....

.... soit 2050 m de dénivelée ! Je prendrai pour cela tout le reste de la journée. Il faut dire que je ne suis pas pressé, j'ai un jour d'avance !
L'ambiance est d'abord très chaude sur cet adret, je pause une longue fois auprès d'un torrent. Plus tard, atteignant les bois, l'ambiance sera
plus bucolique. Je m'aperçois aujourd'hui que je n'ai pas de photos de cette après-midi là ... simplement j'étais vraiment bien. Depuis le col de la
Pisse, je suis de nouveau parfaitement seul dans la montagne, le paysage est sauvage à souhait, c'est étrange tout de même comme la foule se concentre sur des chemins bien précis. L'idée me vient de passer une dernière nuit en bivouac. Mais je suis maintenant dans un ubac dense et pentu, et aucun emplacement vraiment
chouette ne m'appelle. De fil en auguille, fourbu, je rejoins la vallée, non sans jeter de temps en temps un dernier regard sur le sommet du jour, qui a déjà repris sa place bien bien haut ...

Dernière modification par Herdubreid (23-10-2008 17:39:37)

michsac38 · 20-10-2008 21:47:34

Je googlisais pour concrétiser une virée pédestre Valgau-Champsaur pour la prochaine Toussaint et voilà sur quoi tombe-je.
J'ai pas la flatterie facile, mais là je me lance, d'un coup.... chapeau! Ca reste de la rando, même hors sentier, dans un de ces spots des Alpes, Champsaur-Valgau que le monde entier nous envie, soyons simple. Mention spécial pour la traversée Navette -Pré de Chaumette, l'aventure totale sur un parcourt rare, les connaisseurs apprécieront.
Joué modeste qui plus est, mais faut pas se tromper, le hors sentier sur ce type de terrain à chèvre et chamois c'est autre chose que le GR en terme d'effort.
Un reproche (quand-même!), je plaide pour les Haut-Alpins qui ne se sont pas manifestés: à trop parler des trésors, il finissent par être connus. Heureusement la rudesse des lieux en défend bien l'accés.

(PS: pour prolonger le souvenir, un petit CR perso d'une virée à ski dans ces parages, en avril dernier
http://saket.free.fr/Galeries/Champsaur … ndex.html)

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