[Récit + liste] Pala2/Hervé27 Semois en yo-yo (Ardennes) 06/2020

Hervé27 · 03-07-2020 10:28:33

Salut à tous

Lorsqu'à l'hiver dernier nous avions décidé d'associer nos projets pyrénéens pour cet été, Pala2, azerty et moi étions convenus de nous organiser chaque mois une sortie d'entraînement sur un week-end prolongé. Confinement oblige, chacun est sorti - quand il a pu - de son côté et nous n'avons encore jamais réussi à marcher en trio …

A maintenant seulement quelques jours du départ de Cerbère, Pala2 et moi avons réussi à nous organiser une petite virée en Ardennes française et belge, au départ de Monthermé. Il n'y avait pas d'objectif particulier autre que d'être en itinérance du vendredi soir au lundi : l'idée était tout simplement de longer les méandres de la Semois par une rive jusqu'à la mi-temps, puis de revenir par l'autre rive. Pas de repérage préalable des sentiers, uniquement la main courante de la rivière à suivre.

Même s'il s'agit de se préparer à une HRP Est-Ouest depuis la Méditerranée, nous commencerons par les conditions du Pays Basque :

J0 - RDV à Monthermé & bivouac - 2 km - D+ 122 m - marche ~30 mn

Rendez-vous donné en soirée à Monthermé, le temps pour moi de jongler avec 3 trains depuis ma Normandie (et encore, j'ai évité le métro pour ma correspondance parisienne en marchant 30 mn de St Lazare à Gare de l'Est ). Programme sans accroc et arrivée précisément à l'heure à 21h03 en gare de Monthermé. Je profite du coffre de la voiture de Pala2 pour y abandonner les affaires civiles dans lesquelles j'ai voyagé, m'étant changé dans le TER depuis Charleville.

Même si la nuit met du temps à tomber en cette fin juin, il ne faut pas traîner pour se mettre en quête d'un bivouac, d'autant que nous n'avons procédé à aucun repérage. La première opération est celle de faire le plein d'eau au cimetière de Bogny sur Meuse (la gare de Monthermé est plus proche de Bogny que de Monthermé …), puis d'opter pour démarrer le périple par la rive Nord ou Sud. Plouf-plouf, ce sera rive Sud …

Un peu de tâtonnement pour trouver comment quitter le fond de vallée et monter sur la crête qui domine le méandre de la Meuse (il suffisait de traverser le cimetière), et nous voilà en marche dans le couchant. Des orages nous étaient promis pour ce soir, mais une bonne âme météorologique en a décalé les lignes successives : nous marchons dans une chaleur lourde avec une belle lumière au crépuscule.

Coucher de Soleil : la Meuse en fond de vallée, Monthermé à droite

Grimpette dans la rocaille jusqu'au monument des 4 fils Aymon : en contrebas se trouve un vaste replat aménagé pour le pique-nique et les loisirs. Passé un instant d'hésitation, nous estimons que ce n'est pas suffisamment discret pour nous affranchir des visites importunes et nous nous engageons sur les crêtes boisées.

Tandis que la lumière baisse rapidement, nous trouvons un petit collet / carrefour de chemin, muni d'un banc et d'une croix de bois, et juste ce qu'il faut de terrain presque plat pour caser nos deux abris. Montage moyennement rapide en ce qui me concerne, puis dîner sur le banc … C'est toujours pratique de disposer de mobilier … Pala2 ne fait que regarder mon fond de soupe / semoule avec pitié : il avait déjà dîné avant de partir. Ma pitance à peine consommée, il est un peu plus de 23h et voilà que tombent des gouttes de pluie, il faut rejoindre les abris …

Juste une très mauvaise photo du Pioulou avant fermeture des portes pour illustrer

En prévision de nos 3 semaines de Pyrénées j'avais récemment entrepris une ré-étanchéisation recto-verso des coutures de mon Pioulou, et de toute la surface de mon KS. Les ondées sont intermittentes en début de nuit : je profite d'une accalmie pour m'aventurer hors de l'abri pour éliminer un excédent d'eau. Peu après m'être recouché, un bruit de course monte du chemin puis le faisceau d'une frontale vient éclairer nos abris : 2h41, un trailer passe … La pluie reprend bientôt, plus soutenue … Mon intérieur reste désormais bien sec tout le long des coutures, et surtout au niveau des attaches qui m'avaient encore précédemment donné quelques mauvaises surprises. Je m'en étais déjà assuré sous un orage dans mon jardin, mais cela fait du bien de reprendre confiance dans son matériel sur le terrain ...

La météo nous promet un court créneau plus calme entre 5 et 6h, nous sommes convenus de nous lever à ce moment là.

(à suivre)

Hervé27 · 03-07-2020 20:29:53

J1 - samedi 27 juin

Au matin nous bénéficions d'une accalmie juste suffisante pour nous permettre de remballer sans nous faire arroser. Le bel abri bleu de Pala2 est déjà démonté quand je pense à tenter une image, mais la lumière est décidément trop basse en cette heure matinale et dans ce sous-bois.

je vous ai pourtant dit que la lumière était trop basse

Après avoir éprouvé l'étanchéité retrouvée de l'abri, la reprise de la pluie va me permettre de vérifier celle de mon KS Imo Pack. Alors que je me prépare à l'emmener dans un 3ème grand périple, l'usure apparait ici et là et il m'avait paru nécessaire de lui apporter quelques soins. J'ai en particulier refermé / recollé / étanchéisé une découpe pour poche à eau que j'avais bêtement demandé à Kinpu San, et jamais utilisé (j'ai abandonné la pipette d'une part, jamais mis une poche à eau dans le sac d'autre part …). Toute la surface intérieure / extérieure a été réenduite au silicone dilué dans le white spirit. La météo s'annonce propice aux essais, car la pluie reprend dès notre mise en route.

Nous suivons encore la crête arrondie et boisée pour atteindre l'extraordinaire altitude de 400 m, avant de redescendre en direction de la Semois et du village de Tournavaux. Nous y retrouvons la fontaine abritée en bord de rivière où nous avions fait une pause en décembre 2018 avec un petit groupe RL improvisé. Les lieux se prêtent à une pause anticipée (nous avons marché seulement 1h30) et une boisson chaude.

J'apprends à cette occasion que Pala2 n'exerce aucune détestation à l'égard des boissons chaudes, contrairement au récit HRP prévisionnel de confinement dont il était l'un des protagonistes. Comme quoi le changement de trame spatio-temporelle peut avoir un effet sur les appétances ... Il se fera chauffer un thé pendant que je profite de mon café soluble (une bonne lavasse comme je les aime …).

snack-bar

Nouvel aparté sur mon matériel : très fier de mon petit ensemble cuisine qui me suit depuis ma HRP2018, un défaut a fini par se révéler avec le temps. A force de ranger le P3RS directement dans la popote en titane, des résidus d'alcool traité à l'additif s'y déposent et finissent par se retrouver dans mon café. C'est à partir d'ici que je m'essaye donc à un rangement différent, tout aussi compact, mais évitant le contact du réchaud et de la popote. Comme à chaque fois que l'on change une habitude établie, cela va m'amener à faire quelques boulettes … comme par exemple remplir ma popote d'eau alors que mon briquet s'y trouve encore . Plus de peur que de mal, Pala2 saura me fournir une flamme salvatrice … Le changement de méthode de rangement a néanmoins du bon, le café a meilleur goût …

Quelques vélléités de ciel azuré se font jour lorsque nous repartons, et comme de juste les températures deviennent vite étouffantes. Nous restons quelque temps dans le fond de vallée, avant de nous élever à nouveau à hauteur du village d'Haulmé. Mine de rien, chaque passage de la vallée au plateau représente un dénivelé de 150 m …

Encore un matériel à l'essai ce week-end : mon téléphone iPhone SE de l'année dernière, resté dans un coma profond l'été dernier après noyade sur le GR5 dans un orage. J'ai finalement pu le faire réparer à bon prix, moyennant un changement de la batterie et de l'écran, et je m'assure ici qu'il est de nouveau opérationnel. Cela semble être le cas, même si je retrouve quelques bugs liés à l'enregistrement de traces sur Iphigénie, avec des positions parfois approximatives et des dénivelés farfelus … Bon, je n'ai pas l'intention d'enregistrer mes traces cet été, et j'ai l'habitude lors d'un point GPS de toujours attendre que le curseur se soit stabilisé pour m'assurer de ma position : dans les environnement encaissés et boisés, le nombre de satellites visibles peut en effet se trouver très réduit et la précision amoindrie. En retrouvant ce téléphone, je regagne en poids (115 g pour un iPhone SE) et en autonomie (bien moins gourmand que mon iPhone 6S pour une batterie équivalente). En plus, il semble bien répondre au branchement direct sur le panneau solaire, même en mouvement. Aujourd'hui sous la pluie ou les nuages d'une part, très souvent en forêt d'autre part, ce n'est pas très probant, mais pour les altitudes dénudées et violemment ensoleillées (enfin presque...) des Pyrénées ça doit le faire … En revanche mon système de fixation s'avère un peu compliqué (coque du téléphone rattachée à un cordon élastique, ce dernier fixé à la bretelle à un clip, un tanka permettant de régler la longueur, depuis le téléphone plaqué à la bretelle jusqu'à tenu à bout de bras). Ces 2 jours à m'emmêler les pinceaux vont me permettre de trouver une combinaison plus simple et ergonomique à base des mêmes éléments.

La Semois à Tournavaux

Nous enchaînons les dénivelés positifs et négatifs dans un environnement plutôt ensoleillé mais moite. Nous transpirons sans vraiment sécher et c'est plutôt désagréable. Au moins les chemins sont de bonne facture, et les bords de rivière bucoliques alternent avec les points de vue admirables en crête.

Un banc judicieusement disposé à la sortie du village de Navaux nous permettra une première pause séchage dédiée à nos pieds et chaussures bien mouillés de la pluie de ce matin. Je suis d'autant plus prudent sur ce point que mes chaussures sont neuves et que je veux vérifier qu'elles me conviennent ...

vue arrière vers Nohan sur Sémoy

Nous ne nous préoccupons pas de gérer notre allure ou notre temps de marche : la journée comme le week-end n'ont pas d'objectif, et selon notre humeur, la qualité des chemins et la perspective de sites agréables, nous accompagnons parfois les méandres de la rivière, ou bien prenons un raccourci pour les couper. D'ailleurs, plus nous musarderons sur le trajet "aller", moins nous aurons de contraintes pour le trajet "retour" par l'autre rive … Cool, on a dit …

La vraie grande belle pause du déjeuner s'organise sur les bancs et la pelouse du cercle nautique des Hautes Rivières. Nous assistons au départ des kayakistes, puis étalons nos affaires au séchage sous un soleil et un vent soutenus … Nous admirons quelques gros poissons placides (je pense à des tanches, mais je suis ignare dans le domaine piscicole …), ainsi qu'un ragondin pas farouche qui évolue sous nos yeux, et qu'au premier abord nous avons pris pour un castor.

Pala2 installe au séchage le morceau de polycree ajusté pour servir de baignoire à son abri

En repartant nous accompagnons le méandre de la rivière pour passer en face et au-dessus de la petite ville des Hautes Rivières, redescendre vers la Semoy et passer en Belgique. Nos vestes de pluie attirent le soleil, les ranger attire la pluie … Dans le doute, on les garde sur nous et on transpire ...

Nous nous amusons alors d'un découpage biscornu de la frontière, permettant à 2 maisons en bord de Semoy de rester belges :

A 16h nous arrivons sous la pluie revenue au-dessus de Bohan. Par rapport aux agglomérations de la partie française du massif, le contraste est saisissant : on sent une forte fréquentation touristique, un grand nombre de résidences secondaires cossues, les commerces et lieux de restauration foisonnent. Une opulence relative qui contraste avec "l'autre côté".

arrivée à Bohan

Nous traversons la rivière et remontons quelques centaines de mètres sur l'autre rive pour aller chercher de l'eau au cimetière, puis redescendons au bord de l'eau pour y prendre une table de pique-nique en profitant d'une éclaircie. C'est a priori notre dernière pause d'importance avant de basculer en mode "recherche de bivouac". Une nouvelle grimpette sur le plateau nous fait comprendre que depuis 6h ce matin et malgré nos nombreuses pauses, la journée commence à se faire longue … Nous optons désormais paresseusement pour les bords plats de la Semoy plutôt que les A/R en altitude …

Nous croisons des êtres étranges mais heureusement bien documentés :

Arrivés au village de Laforêt pile sur le robinet du cimetière, nous faisons le plein à bloc pour ce soir. Un repérage cartographique nous invite à nous éloigner vers le Sud pour rechercher des replats un peu plus haut en forêt. Les sites que nous apercevons ne sont pas évidents, mais finalement le sous-bois repéré par l'œil averti de Pala2 s'avèrera idéal.

l'abri bleu schtroumpf de Pala2

et mon Pioulou

Tandis que nous montons le bivouac, azerty pense affectueusement à nous via WhatsApp :

Quelques gouttes de pluie viennent encore nous surprendre dès les abris montés, mais au final la nuit sera bien sèche : ni pluie, ni rosée, ni condensation

Je m'impose également une toilette de chat avec mon gant microfibre, quelques gouttes de savon d'Alep et moins de 10 cl d'eau (si, si !). C'est suffisant pour effacer la moiteur de la journée et retrouver un peu de dignité. Ma "lessive" (en fait un simple rinçage avec une goutte de savon) consomme presque 3/4 de litre (surtout les chaussettes !), mais au moins enfilerai-je demain des affaires désodorisées. Cela fait de vous un autre homme …

Malgré notre rythme tranquille à 4,5 km-effort/h (environ) et nos nombreuses pauses, notre démarrage aux aurores et notre arrêt passé 20h nous ont permis de marcher plus de 10h et sur 36 km, et 1 100 m de D+. Nous nous mettons d'accord pour une certaine heure de réveil demain matin, que je m'empresse d'oublier ...

Nayana · 03-07-2020 21:41:07

J'ai regardé la vidéo et comment dire... ça donne pas envie. Foret sans vue et à perte de vue et temps gris. Surement plus sympathique avec le soleil.

gergy · 03-07-2020 21:53:46

>>> des résidus d'alcool traité à l'additif s'y déposent et finissent par se retrouver dans mon café.
Ah, une forme de dopage qui explique tes performances passées!

Hervé27 · 03-07-2020 22:19:36

@nayana :

il en faut pour tous les goûts … Pour ma part j'apprends de plus en plus à apprécier les chemins ruraux, les itinérances de basse altitude, les villages avec leurs vieilles pierres, leur histoire qui affleure … L'idée de la monotonie d'une forêt sans vue renvoie à une certaine discussion avec Eric Le Rouge, et pourtant si une grande partie du massif que nous avons traversé est évidemment exploitée (les "champs d'arbres" comme dit azerty), une partie non moins importante est en train de redevenir primaire et c'est passionnant à observer … et incroyablement difficile à rendre en images comme en récit ! Quand à la météo, j'apprends là aussi à faire avec ce que j'ai, et à éprouver le matériel dans diverses conditions : cela me permet d'envisager les itinérances plus longues et plus aventureuses avec sérénité ...

En parlant de vidéo je n'avais pas encore diffusé le lien sur RL car le son de la première version mise en ligne était exécrable. Nouvelle version corrigée ici

@gergy :

damned je suis fait ! Pour le contrôle, on fait pipi où ?

Redfish · 03-07-2020 22:20:25

Hervé27 a écrit :

#576932un bruit de course monte du chemin puis le faisceau d'une frontale vient éclairer nos abris : 2h41, un trailer passe …

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azerty · 04-07-2020 10:29:00

Redfish a écrit :

#576998
Hervé27 a écrit :
#576932un bruit de course monte du chemin puis le faisceau d'une frontale vient éclairer nos abris : 2h41, un trailer passe …
https://www.randonner-leger.org/forum/u … 1593807605

quand il s'agit des autres on les prend pour des fadas....

Eric le rouge · 04-07-2020 14:31:46

Mais c'est qu'il est bien sympathique ce petit récit en forme de mise en bouche de votre futur périple.

Hervé27 a écrit :

des résidus d'alcool traité à l'additif s'y déposent et finissent par se retrouver dans mon café.

Je suis interpellé par ce retour... J'avoue que mon P3RS est aussi stocké dans la popote, et que je ne me suis jusqu'à maintenant pas plus interrogé que cela, ce qui n'est peut-être pas malin.
Ces résidus que tu évoques étaient visibles ? Ou bien tu les as supposés (et ressentis indirectement, au goût) ?

Hervé27 · 04-07-2020 15:10:59

Eric le rouge a écrit :

#577057Ces résidus que tu évoques étaient visibles ? Ou bien tu les as supposés (et ressentis indirectement, au goût) ?

Salut Eric le rouge

Résidus totalement invisibles, mais pas sans saveur : l'arrière-goût dans le café était de plus en plus fort

Désormais et en plus de la nouvelle méthode de rangement, je pense aussi à rincer popote et gobelait juste avant utilisation …

Tu as vu qu'on avait fait des efforts, pour la forêt ?

Eric le rouge · 04-07-2020 16:07:03

Hervé27 a écrit :

Tu as vu qu'on avait fait des efforts, pour la forêt ?

Oui, oui Cela va devenir un running gag
J'ai moi-même été auto-influencé pendant ma dernière sortie, récit à venir

Merci pour ta précision... Pour le coup je n'ai pas (encore ?) de goût quand je cuisine. A suivre donc.

Balipit · 04-07-2020 19:29:15

azerty a écrit :

#577039
Redfish a écrit :
#576998
Hervé27 a écrit :
#576932un bruit de course monte du chemin puis le faisceau d'une frontale vient éclairer nos abris : 2h41, un trailer passe …
https://www.randonner-leger.org/forum/u … 1593807605
quand il s'agit des autres on les prend pour des fadas....

Sont jaloux
c’est cool de courir quand il fait moins chaud mais je trouve dommage de pas profiter pleinement du paysage qui nous entoure .

La forêt c' est dangereux pour les traileurs

https://www2.u-trail.com/grievement-blesse/

Dernière modification par Balipit (05-07-2020 20:27:15)

Hervé27 · 05-07-2020 16:29:51

J2 - Dimanche 28 juin

La nuit est finalement sèche et agréable : pas de pluie, pas de condensation … A l'écoute des bruits nocturnes, les lieux restent tranquilles jusqu'à ce que, vers 4h du matin, des grognements et trottinements de sangliers se fassent entendre. En plantant l'abri hier soir j'avais bien relevé une possible trace habituelle de passage à proximité, mais la rareté des zones plates ne m'avait pas laissé de choix. Allongé au chaud dans le duvet, je m'en remets entièrement à mon ouïe pour "visualiser" la scène : les sons se font plus forts, donc les bêtes se rapprochent … La direction du son ne change pas, donc elles viennent droit sur moi ! Elles arrivent même à un rythme plutôt soutenu, et je décide juste avant qu'elles ne soient sur moi de pousser un grand cri pour me signaler . La harde marque un très court instant d'arrêt, des grognements fusent en tout sens à peut-être 4 ou 5 mètres, sur un ton que j'interprète comme du mécontentement craintif... Finalement les suidés entreprennent à contrecœur le contournement de ma position, tandis que j'essaye de me rendormir ...

Après 1h à compter les sangliers moutons, je réalise que je n'avais pas réglé d'alarme, et tente en vain de me rappeler quelle heure nous avions fixé pour le réveil : était-ce 5h30 pour nous lever ou bien pour nous mettre en marche ? Trop bien éveillé pour espérer me rendormir alors que la lumière du jour s'installe, je tente un appel, puis un second, vers Pala2 (nous sommes à 15 mètres l'un de l'autre), sans réponse … Finalement à 5h10 je déclenche l'arme fatale … Une semaine après, il m'en veut encore … (au moins j'ai ma réponse, l'heure convenue c'était 5h30 pour se lever).

Le remballage est plus efficace qu'hier en ce qui me concerne, car j'arrive à égaler la célérité de mon comparse. Nous voilà lancés dès 5h45 ... Très vite cependant une douleur à la cheville amène Pala2 à signifier qu'il ne marchera pas 10 heures aujourd'hui : le confinement et une cabriole récente à vélo ont laissé des traces. En soi ce n'est pas grave étant donné l'absence d'objectif : on va juste lever un peu plus le pied et entamer le demi-tour au prochain village / pont, afin de ne pas trop forcer sur l'articulation émettrice de signaux d'alerte. Doublement cool, c'est le mot d'ordre du jour.

Sur nos cartes, des pistes forestières s'entrelacent dans un labyrinthe peu lisible. Nous préférons paresseusement ne pas nous y engager et visons de rejoindre au plus court le village de Mouzaive, d'où nous pourrons aborder l'autre rive.

sauras-tu retrouver la sortie ?

En fond de vallon et au bout du chemin carrossable un groupe est installé sous le couvert des arbres. Tandis que je m'engage pour passer à gué le petit ruisseau, ils me signalent qu'une large passerelle se trouve à leur niveau. Je dédaigne cette dernière et claironne que ce n'est pas grave, on a l'habitude de franchir à gué. Pour bien illustrer, je rate ma pierre et fiche le pied dans l'eau !

Le temps est couvert, la pluie reviendra bientôt ...

Une plateforme métallique incongrue permet de s'affranchir des arbres pour prendre la vue. Après seulement une heure de marche, et puisqu'on a décidé d'y aller cool, nous nous y installons pour un petit-déjeuner d'altitude.

oh, et si on montait ?

ne pas laisser tomber sa petite cuillère ...

Remis en marche après nous être sustentés, nous sommes à Mouzaive à 7h45, prêts à traverser la Semois et entamer le chemin de retour vers Monthermé. Finalement Pala2 estime pouvoir pousser un peu plus loin, et nous voilà lancés vers le village suivant : Alle, bourgade un peu plus importante certainement dotée de quelque commerce nous permettant d'entretenir l'espoir d'une viennoiserie agrémentée au chocolat … Il faut en passer par une courte grimpette puis une jolie descente, dans laquelle la pluie nous rejoint : faible d'abord, puis de plus en plus soutenue tant que nous chercherons à nous approcher de la boulangerie.

arrivée à Alle sous la pluie

Nous ne nous laissons pas démonter par les forces adverses, la dernière d'entre elles étant la distanciation sociale à respecter dans l'établissement : comment choisir sa viennoiserie si celui qui paye est dedans et celui qui choisit doit rester dehors sans voir les rayons ? Finalement équipés des surplus alimentaires quémandés partiellement engloutis sur place, nous reprenons notre chemin toujours sous la pluie en quête d'un lieu tout à la fois bucolique et abrité … Il faut en passer par une belle grimpette en forêt et redescente subséquente pour éviter le bord de route, et revenir finalement à Mouzaive par l'autre rive. Une passerelle en dur franchit ici la Semois, et ses arches nous offriront le couvert espéré pour le 3ème petit-déjeuner (si je compte la boulangerie d'Alle comme le 2ème).

De nouveau en chemin alors que la pluie se calme, une montée directe de 150 m D+ s'impose à nous. Plus haut une tâche orange vif signale la présence d'un autre marcheur avec sursac de pluie. Instinctivement nous le prenons en ligne de mire en vue de le dépasser, on ne se refait pas. Malgré sa cheville souffrante, Pala2 a le plaisir de rester capable de doubler d'autres randonneurs. Un salut rapide, quelques mots échangés … Le marcheur solitaire aimerait bien nous tenir compagnie mais nous savons trop bien comment évoluera la conversation, surtout après lui avoir lâché que nous avons bivouaqué ("comment ? Avec vos petits sacs ?" etc...). Nous entreprenons donc de le distancer …

Arrivés au village de Chairière, nous faisons un crochet par le cimetière pour ravitailler en eau. Lorsque nous en ressortons, nous constatons que peu après se trouvait une belle fontaine avec tables, où notre randonneur de tout-à-l'heure fait son propre plein. Deuxième salut …

Malgré notre allure pépère et les multiples pauses, la douleur à la cheville de Pala2 reste présente, et il n'est pas encore midi quand les bords de rivière à Vresse sur Semois s'avèrent agrémentés de tables de pique-nique dans la verdure, ainsi que de toilettes et eau courante … On a dit que la journée devait être cool, et sous un soleil bien agréable après la pluie nous voilà déjà à faire notre 4ème pause du jour, à l'heure où d'habitude je n'ai pas encore envisagé ma deuxième … Notre randonneur nous rattrape et prend table un peu plus loin, tandis que familles à vélo, coureurs, kayakistes … vont et viennent sans que pour autant les lieux soient surpeuplés. Tout cela reste à échelle humaine, et cela fait du bien de (re)voir du monde.

12h00 - Vresse sur Semois

Non loin de nous un petit affluent de la Semois peut être franchi par un large pont de pierre ou un gué. Nous nous amusons à regarder les promeneurs du dimanche se donner des frissons à tenter le franchissement par le gué, à y mettre les pieds dans l'eau ou à renoncer face à la difficulté. Pour notre part, on passera en quelques secondes d'une pierre à l'autre sans crainte des 10 cm d'eau ... Cette fois-ci, je garde les pieds secs !

Nous doublons encore notre randonneur dans la montée, et puisque cela semble désormais inévitable je consens à le prendre en confession afin de l'engager dans le droit chemin MUL. Pala2 reste en arrière (il me dit être lassé de ce genre de discussion et ne sent pas une âme d'évangélisateur ...). Après l'absolution nous le quittons au village de Membre, d'où nous poursuivons en longeant à nouveau la rivière.

Passés les campings au bord de l'eau, le chemin reste un temps bien fréquenté (sans excès), puis beaucoup plus sauvage une fois atteint le gué permettant de traverser la rivière sans trop s'immerger. Nous restons sur notre rive, prenant une courte pause sur un banc bienvenu. Pala2 s'essaye à de multiples étirements de sa cheville douloureuse, je souffre pour lui qui ne parvient pas à profiter pleinement de sa balade …

C'est encore loin, les Pyrénées ?

Passé le gué, la forêt reprend un aspect primaire, le chemin coincé entre la Semoy et une pente abrupte. C'est très joli, puis soudain il faut bifurquer pour remonter la pente raide le long d'un ruisseau encaissé. La végétation est par endroit dense, on s'amuse bien .

La journée avance, la démarche de Pala2 se fait plus claudiquante. Nous savons qu'avant de bivouaquer il nous faudra faire un plein d'eau, ce qui ne pourra se faire qu'une fois refranchie la frontière et rendus à Hautes Rivières. Le passage de France en Belgique est hélas matérialisé par un profond vallon, sans chemin pour connecter les deux pays. Nous essayons de tracer en mode sanglier pour raccourcir le trajet, mais finissons par capituler et nous laisser redescendre sur la route. La tentative nous a pompé de l'énergie et la fatigue commence à se faire sentir, en plus des douleurs du coéquipier .

Pala2 dans le no man's land franco-belge

La route est fréquentée et nous ne pouvons nous résoudre à marcher sur le bas côté. Nous repartons dans "l'intérieur", alternant piste forestière défoncée par l'exploitation forestière et petite route récemment asphaltée. Ce sont les moments les plus désagréables de la sortie, venant quelque peu effacer le charme des heures précédentes. Nous nous traînons à l'approche des Hautes Rivières, lorsque soudain et sur un point de vue une magnifique table de pique-nique toute neuve nous tend les pieds (ça n'a pas de bras, une table). Décision est prise d'y faire une large pause (il nous reste assez d'eau pour nos boissons respectives), pour ne faire ensuite qu'un arrêt express au cimetière d'Hautes Rivières avant la recherche de notre bivouac. A force d'avoir poussé chaque fois un peu plus loin, nous aurons fait une journée aussi chargée que celle d'hier ...

La pause s'avère salutaire, puisque nous ne ressentons pas le besoin de nous attarder à Hautes Rivières après le plein d'eau. En revanche nous privilégions la pente douce du GR qui fait un large lacet pour remonter sur le plateau, plutôt que la remontée directe. Sur nos cartes nous avons repéré une maison forestière a priori propice au bivouac et c'est notre but de ce soir. Nous y parvenons à 20h15, et les lieux sont à hauteur de nos espérances : gazon idéal pour le piquage des abris, tables, auvents abrités ... Nous nous y installons dans le soleil couchant et prenons notre dîner attablés. Le grand confort !

Bilan : 37 km - marche 11h00 (environ) - D+ 1 500 m (au moins)

JeanClude · 16-03-2022 14:12:54

Bonjour Herve, merci pour le partage, top !
Aurais-tu la trace GPX de ton itinéraire stp ?

Hervé27 · 16-03-2022 15:13:20

Salut JeanClude

Hélas je n'ai pas conservé le gpx, mais il doit être possible de le reconstituer à partir de cette capture d'écran :

En gros il s'agit de se tailler un chemin par une rive et de revenir par l'autre, en essayant de privilégier les sentiers ...

Je te fais suivre une meilleure qualité par MP

Dernière modification par Hervé27 (16-03-2022 15:35:21)

JeanClude · 16-03-2022 16:48:50

Parfait merci

reno 08 · 16-03-2022 22:21:42

Chouette coin , parcouru de Bouillon à Monthermé il y a quelques ans . Beaucoup de charme , celui des Belges en fait partie .
La suite !

benjamin · 28-07-2022 22:52:23

Merci pour ce récit !

Le forum de la randonnée légère ou ultra-légère !

Annonce

#1 03-07-2020 10:28:33

[Récit + liste] Pala2/Hervé27 Semois en yo-yo (Ardennes) 06/2020

#2 03-07-2020 20:29:53

Re : [Récit + liste] Pala2/Hervé27 Semois en yo-yo (Ardennes) 06/2020

#3 03-07-2020 21:41:07

Re : [Récit + liste] Pala2/Hervé27 Semois en yo-yo (Ardennes) 06/2020

#4 03-07-2020 21:53:46

Re : [Récit + liste] Pala2/Hervé27 Semois en yo-yo (Ardennes) 06/2020

#5 03-07-2020 22:19:36

Re : [Récit + liste] Pala2/Hervé27 Semois en yo-yo (Ardennes) 06/2020

#6 03-07-2020 22:20:25

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#7 04-07-2020 10:29:00

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#8 04-07-2020 14:31:46

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#9 04-07-2020 15:10:59

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#10 04-07-2020 16:07:03

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#11 04-07-2020 19:29:15

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#12 05-07-2020 16:29:51

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#13 16-03-2022 14:12:54

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#14 16-03-2022 15:13:20

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#15 16-03-2022 16:48:50

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#16 16-03-2022 22:21:42

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#17 28-07-2022 22:52:23

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