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#426 26-12-2023 00:21:51

bernard_lyon
Μηδὲν ἄγαν
Lieu : Lyon
Inscription : 16-12-2015

Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

Joyeux Noël Hervé, joyeux Noël à tous !


Mon trombi | Liste | HRP Banyuls-Alos d'Isil | GR738
"Le soleil n'est jamais si beau qu'un jour où l'on se met en route." (Jean Giono, "Que ma joie demeure")
Modification non explicitée : orthographe ou syntaxe

Hors ligne

#427 26-12-2023 14:55:28

Hervé27
éMULe
Lieu : Normandie
Inscription : 01-11-2017
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

#53 dimanche 13 août 2023
Bjørnhollia - Veslesætersætri
48km +1392 -1281 11h28 (+pauses 1h51)
Cumul 2132km D+43300m 523h
Vidéo #53

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Comme souvent dans les refuges gardés et la Norvège ne fait pas exception, l'horaire du petit-déjeuner est incompatible avec les lève-tôt. C'est à 6h40 que je m'éclipse, cherchant à faire le moins de bruit possible dans les couloirs et escaliers déserts de ce vaste bâtiment, traditionnel à l'extérieur mais ultra-moderne et confortable à l'intérieur. J'avais besoin de cet arrêt qui m'a offert une belle soirée de socialisation au sein du petit groupe de randonneurs présents, affluence très réduite en raison des difficultés d'accès de la région après la tempête.

En tant que marcheur, si j'ai pu constater le gonflement des rivières et parfois les traces de la crue, aucun obstacle n'a jusqu'à présent entravé ma progression sur mes itinéraires de dérivation. Pour les vacanciers dépendants des transports, la donne est toute autre : routes coupées, déviations, circulation ferroviaire interrompue, pas suffisamment de bus pour assurer des dessertes alternatives via d'immenses détours ...

Je n'ai pas eu de réseau dans le refuge et ma météo n'est donc pas actualisée de celle prise la veille à Straumbu : je m'attends donc ce dimanche à une journée de petite pluie, suivie demain lundi d'un très relatif beau temps ... puis d'un nouvel épisode de fortes pluies mardi, pile quand je compte me trouver dans le Parc National de Jotunheimen ... Il faut faire avec ce que l'on a, et je pars ce matin dans un temps bouché pour ma traversée d'une petite section du Parc National de Rondane.

Bjørnhollia et son solarium
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Sur la carte j'ai une douzaine de kilomètres à faire en quasi ligne-droite par la vallée profonde de l'Illmanndalen aux allures de défilé, encadrée par 2 lignes de sommets à environ 1700m d'un côté, 2100m de l'autre, mais dont je ne verrai que peu de choses. Pour ma part je ne m'y élèverai que jusque vers 1300m d'altitude, ce qui sera un nouveau "record" de la traversée (à peine un ballon vosgien ...), pour finir au refuge suivant de Rondvassbu. Après c'est une très longue et profonde redescente qui m'attend jusqu'à la ville d'Otta, objectif minimal de ce jour.

Cette matinée de montagne doit donc m'offrir la plus jolie partie de cette journée, mais dans le temps bouché et rapidement pluvieux les vues seront limitées. Après une portion d'ascension aménagée en escaliers casse-pattes, je retrouve bientôt un sentier de montagne traditionnel comme les Alpes ou Pyrénées savent en offrir.

Par habitude je scrute les alentours, histoire de voir si j'avais des bivouacs possibles en alternative au refuge. J'en vois très vite un, absolument impeccable en bord de sentier et à 10 mn du refuge, alors que la forêt n'a pas encore cédé la place. Ensuite l'environnement est trop pentu ou rocheux pour enfoncer les piquets, et il en va ainsi tant que l'on n'a pas atteint la première perle du collier de lacs qui occupe le fond du défilé de l'Illmanndalen.

Je monte vers la chape de nuages qui masque les sommets, et avant d'atteindre les lacs je dois enfoncer les pieds dans les ruisseaux qui coupent le sentier et se prennent parfois pour des torrents. Le ruissellement semble renouer avec l'intensité de la fonte des neiges, alors que les rares névés que j'aperçois sont maintenant bien réduits et confinés sur les hauteurs. Dommage pour mes pieds et chaussures presque séchés de la veille ... Je reçois mes premières gouttes de pluie, lesquelles se feront de plus en plus régulières avec l'avancée dans la vallée, mais jamais intenses. J'avais sur moi la veste de pluie dès le départ, que je complète bientôt avec la jupe de pluie.

c'est quand l'été ?
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torrent surgi de nulle part
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Aux premiers lacs je passe le point haut à 1304m (dixit mon GPS) et le chemin s'horizontalise, avec juste une légère descente au rythme des eaux qui s'écoulent d'un lac à l'autre au long d'un immense chapelet. Je m'imagine bivouaquer près des rives de l'une ou l'autre de ces étendues d'eau, là où je repère des replats d'herbe avec quelques pierres rassemblées trahissant là un feu de bivouac, ici la consolidation d'un abri ... Tous ces spots sont inoccupés, je ne vois personne ce matin et Rondane est pour moi seul. Pour vous donner une comparaison, c'est un peu comme traverser la Vanoise un 15 août sans croiser âme qui vive. Improbable.

je récite en solitaire mon chapelet aquatique
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La chaîne de lacs finit par s'interrompre dans la lente descente vers Rondvassbu, n'en conservant qu'un seul pour la fin, le plus grand, juste avant le verrou par-delà lequel je dois arriver au refuge et changer de vallée. La petite pluie s'apaise et j'aimerais faire une pause, mais j'ai peur que ce ne soit pas bien confortable dans la fraîcheur et avec le risque que les ondées ne reprennent. Je passe ce dernier lac, sur la rive duquel je vois un vieux hangar à bateau en pierres sèches, unique aménagement aperçu sur toute la longueur de l'Illmanndalen, autre que le sentier bien entendu.

De ce dernier lac je remonte dans un entrecroisement de multiples sentiers pour trouver le passage du verrou en direction du refuge. Je pouvais le court-circuiter et tirer droit dans la vallée pour démarrer immédiatement la très longue descente vers la ville d'Otta, mais je m'octroie ce petit détour pour assouvir mon besoin d'une pause confortable.

Au fil des "T" rouges, encore un lac avant Rondvassbu
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Il y a un décrochage un peu brutal entre la douce vallée d'où j'arrive et le creux où se trouvent Rondvassbu et son grand lac, et j'ai jusqu'au dernier instant un doute sur l'existence d'un chemin praticable pour la descente directe. Je ne trouve ce petit raidillon qu'une fois tout au bord, découvrant en même temps une bien jolie vue sur le site desservi par une piste. Je touche ladite piste après une raide descente un peu passé 10h, et me dirige vers le complexe de bâtiments qui constituent le refuge. Il ne pleut plus et bien qu'encore en altitude (1173m), il fait un peu plus doux et je me dirige vers les bords du lac plutôt que le refuge. Il y a là un peu de monde qui va d'un bâtiment à l'autre, apparemment surtout des cyclistes venus par la piste et dont les vélos sont parqués ici.

J'ai cette fois envie d'un moment à moi, et je délaisse même les tables de pique-nique pour aller m'asseoir sur la rive, où je peux chauffer mon café tout en méditant sur l'étrangeté des lieux. Le refuge constitue un îlot d'activité humaine, formant à lui seul un hameau dans la montagne autrement déserte. Le lac tout en longueur est bordé de montagnes et falaises montant à 2000m, et je pourrais me croire à l'extrémité d'un fjord. Un gros bateau à moteur est amarré sur le quai ... vision incongrue à cette altitude.

avant de plonger sur Rondvassbu
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Rondvassbu, une ruche qui s'affaire
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un fjord et une marina miniature à 1173m ?
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La pluie ne se sera interrompue que le strict temps nécessaire à cette pause. Aux premières gouttes qui reviennent je dois me presser d'avaler le fond de mon café, et remettre au sec ce qui doit l'être (et en particulier ma doudoune !).

Sur la carte je pouvais a priori emprunter un sentier plutôt que la piste de terre en direction de la villégiature d'altitude de Mysusæter, encore à 10 km d'ici. Avec le ruissellement et l'aspect spongieux de la végétation de la vallée, la piste me semble cependant beaucoup plus simple, et surtout moins énergivore. D'ailleurs je ne vois personne sur l'itinéraire du sentier : les quelques marcheurs que j'apercevrai seront tous comme moi sur la piste monotone, de même que bien sûr les cyclistes. Ce n'est pas la foule, je vois peut-être 10 personnes sur autant de kilomètres ...

Dans la sombre lumière, sous la pluie et dans un environnement désolé, la monotonie est un peu sinistre, et de fait je reste sur ma faim de cette trop rapide traversée du Rondane, d'autant que quand je me retourne j'aperçois un massif bien plus riche que le peu que j'en ai vu ce matin. Avec une meilleure météo, d'autres itinéraires plus gratifiants étaient possibles. C'est ainsi ! Maintenant je marche vers le Jotunheimen, que j'espère atteindre demain soir, mais avec l'appréhension d'un ciel pas plus favorable...

le Rondane déjà derrière, avec quelques regrets ...
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là-bas, le Jotunheimen (paraît-il)
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Avec ce temps, un paysage répétitif et un itinéraire rectiligne sans creux ni bosse, j'avale la distance en marche rapide et passe à midi à hauteur du parking d'entrée du Parc National, sans avoir pourtant réussi à rattraper avant cela un couple de marcheurs devant moi que j'avais pris dans ma ligne de mire, et qui arrivent les premiers à leur voiture. Sur ce parking il y a une flopée de vélos à louer en libre-service, concept inconcevable dans nos contrées où le vandalisme et l'incivilité sont la norme ...

inconcevable
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Passé le parking et sorti du parc, la piste continue en direction de Mysusæter,  dont la proximité s'annonce avec toujours plus de cabines de villégiature étagées en altitude. Je peux voir que je vais bientôt quitter la "plaine" que je viens de traverser, pour descendre dans une vallée profonde. La pluie a cessé et la température s'adoucit, alors que la végétation s'étoffe et que je reviens vers la forêt. Je traverse le cœur du village dispersé de Mysusæter, dédaignant quelques aires de pause pourtant abritées. Je retrouve momentanément l'asphalte, mais je peux vite bifurquer vers la route forestière qui s'enfonce dans le vallon.

Il s'agit d'une nouvelle route privée à péage et je pense n'y croiser que peu de monde, mais je déchante ... Les passages de voitures roulant au pas sont fréquents, tant à la descente qu'à la montée. Elles sont si nombreuses que j'en arrive à la conclusion que la route principale d'accès à la station a dû être coupée par une coulée de boue, renvoyant tout le trafic par ici. C'est dommage, parce qu'autrement cette descente dans la forêt de sapins aurait eu son charme ...

premières cabines au-dessus de Mysusæter
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ma piste à péage que j'espérais tranquille
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La piste n'est pas si large et je dois me serrer à chaque passage de voiture, et je vous laisse imaginer quand les véhicules montant et descendant doivent se croiser. La descente est fatigante et je suis bien content de pouvoir enfin toucher le fond du vallon pour marcher plus à plat en bord du torrent, après 700m D- depuis Rondvassbu. Les eaux sont hautes et les berges souvent noyées, il n'y a guère d'endroit où je puisse me poser confortablement, alors que j'en ai besoin. Je me fais à l'idée de devoir poursuivre jusqu'à Otta, pour une (trop) longue section de plus de 20 km entre 2 pauses : mes pieds vont en souffrir ...

La promenade au long des gorges eut été plaisante sans le passage régulier des véhicules, certains croisés dans un sens revenant dans l'autre, trouvant peut-être la pente trop forte pour continuer. Si j'en avais eu l'énergie, je pouvais m'offrir une petite excursion pour aller rendre visite à un site géologique et quelques demoiselles coiffées, mais j'ai poursuivi ma route ...

Le rugissement du torrent se tait lorsqu'il entre dans un lac de retenue, m'offrant quelques instants plus paisibles. Les eaux reprennent ensuite leur cheminement tumultueux par de belles cascades, mais malgré son joli nom de "sentier des elfes" j'évite le passage glissant, escarpé et envahi de végétation détrempée qui les longe. Après le barrage je quitte la route de terre à péage, et par 2 lacets de la route me retrouve au fond de la vallée, et en même temps sur les bords de la route nationale E6, celle-là même qui dessert tout le pays jusqu'au Cap Nord ! 1000m de dénivelés descendus depuis le plus haut du jour, voilà longtemps que cela ne m'était pas arrivé !

au fond de l'Uldalen : des coulées ont emporté quelques arbres vers le torrent
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finalement pas besoin d'y monter, je vous en montre plus avec un panneau d'information
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les eaux se calment un instant ...
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... puis rugissent à nouveau
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Je marche encore 4 km jusqu'au centre-ville d'Otta, parfois sur le bord de la nationale, mais heureusement plus souvent par des voies secondaires ou cyclables. Ici et là j'aperçois les effets des pluies et du ravinement, certains jardins défoncés par les charmants ruisseaux qui les traversaient, ou bien la chaussée maculée de boue et de débris végétaux charriés par l'eau. Il y a encore beaucoup d'eau drainée dans les petits fossés en bord de chemin ou de route, je sens désormais que je me suis bien rapproché de la zone où les pluies ont frappé fort ...

Une passerelle de la voie cyclable me permet d'enjamber la route, et je peux ensuite prendre le pont qui traverse la Gudbrandsdalslågen, aujourd'hui puissante rivière aux berges encore par endroit inondées. La ville d'Otta est à la confluence de cette rivière et d'une autre ... l'Otta.

Nous sommes dimanche et je ne compte pas trouver de supermarché ouvert, mais il me reste assez dans mon sac jusqu'à demain, quand j'aurai encore 2 points de ravitaillement possibles. D'abord tenté par les délices de la ville, je me laisse guider par la concentration des piétons vers les secteurs plus animés. Un instant j'entre dans un McDo animé, mais une fois à l'intérieur la motivation me quitte ... Je me dirige plutôt vers la gare, finalement plus motivé par l'attrait des prises électriques de sa salle d'attente que par les odeurs grasses des frites.

La gare est essentiellement vide, seuls y passent quelques utilisateurs des services de bus. Les annonces sur l'interruption de tous les trains tournent en boucle, nous en sommes maintenant au 7ème jour ! Je branche mes appareils et me pose sur un banc, pouvant enfin me déchausser après trop de kilomètres de piste et de route. Je me suis abimé les pieds à ne pas faire d'arrêt intermédiaire, et avant de repartir il me faudra apposer quelques protections.

Otta, gare déserte
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Accéléré par les pistes et l'absence de pause, je suis arrivé ici plus tôt que je ne l'envisageais. Pendant ma pause le temps s'est éclairci et j'ai un beau soleil au moment de repartir. Je renfile cependant mes chaussures un peu vite, et après les premiers pas je dois m'arrêter sur un banc pour apposer les protections évoquées précédemment ... À trop forcer avec des pieds mouillés, j'ai réussi à déclencher des départs d'ampoules : je n'ai pas de problème avec un espacement de 10 à 15 km entre deux aérations, et ça devient risqué à l'approche de 20 km. Aujourd'hui j'en ai fait 23, ça m'apprendra !

Otta, rivière chargée
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Otta, les fantômes de mes itinérances passées
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J'ai sur carte de bons chemins pour remonter d'ici vers des crêtes à 1200 m d'altitude, et avec une belle météo pour ce soir l'envie d'un joli bivouac me revient. Je me sens motivé pour une poignée d'heures de marche, d'autant que je sais que ce beau temps est éphémère, avec toujours de fortes pluies qui se profilent dans 2 jours. Je me relance dans l'esprit de ne pas laisser passer les bonnes fenêtres de tir ...

Je passe la seconde rivière, puis monte une route à travers les lotissements, et enfin prends (encore une !) la piste forestière visée. Une barrière et un panneau d'interdiction en ferment l'accès aux véhicules : j'espère seulement que les dégâts que cela augure n'interdisent pas aussi le passage d'un piéton ... Je croise effectivement quelques endroits où le bord de route a été entaillé par des glissements de terrain : un véhicule passerait encore à ses risques et périls, mais c'est sans danger pour le randonneur.

pas le plus spectaculaire des glissements de terrain, mais vous voyez l'idée ...
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Je monte dans la forêt puis les alpages, croisant quelques petites fermes d'altitude au son des clarines des vaches qui paissent ici et là. Dans la lumière du soir c'est bien agréable, et comme je marche vers l'Ouest face au soleil j'en décide d'accrocher mon panneau solaire sur le torse pour optimiser ces moments d'ensoleillement (1 heure de prise électrique en gare n'a pas suffi à recharger tous les appareils à bloc ...). Ce sera trop court pour être vraiment efficace, mais bien essayé quand même ...

Bien décalé dans mes erreurs de décompte, j'immortalise le selfie des 2100 km avec 25 km de retard
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Il finit par arriver le moment ou la bonne piste carrossable cède le pas à une voie accessible seulement à de bons 4x4, et bien que je suive fidèlement le tracé proposé par la carte je finis par naviguer à l'azimut dans les sous-bois spongieux, perdant et retrouvant un discret sentier en voie d'effacement. Au gré de ma progression, la présence d'une unique pierre ornée de peinture rouge rappellera que ce tracé fut un itinéraire balisé, bien qu'aujourd'hui il vaille mieux faire confiance à son GPS.

Je finis par atteindre le petit torrent d'où je peux attraper un bien meilleur sentier qui le longe dans une montée franche en direction des hauteurs et de la crête. J'y croise des moutons qui s'éparpillent à mon approche, puis ressors de la forêt et retrouve la toundra.

Il est 19h30 quand je passe le col un peu en-dessous des 1200m. Derrière moi le temps reste variable vers le Rondane, mais par-devant ce sont de sombres masses nuageuses qui m'arrivent dessus : j'ai désormais intérêt à vitre trouver mon spot de bivouac ! Pour ce faire je dois d'abord trouver de l'eau, et alors que j'ai baigné dedans jusqu'à présent il suffit que je la cherche pour ne plus la voir, ou alors trop boueuse et teintée à mon goût. De toute façon les emplacements possibles au col me semblent inconfortables, et probablement trop exposés si le vent devait forcir.

la pluie est pour moi
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Ma carte indique des prés et une cabane en contrebas, et je m'imagine pouvoir éventuellement camper à côté de celle-ci. Je descends par un relativement bon chemin au milieu des broussailles, sans apercevoir d'emplacement où je pourrais planter. Une belle source limpide en travers du sentier me permet de faire le plein d'eau, et j'arrive à la cabane en traversant une prairie bien trop spongieuse pour espérer y camper. Les abords de la cabane ne sont ni plans ni propres, souillés par les moutons. La jolie petite cabine au toit végétalisé est verrouillée, mais il y a là une boîte à clé à code qui dit qu'elle pouvait se réserver à condition de savoir comment. Elle est toutefois dotée d'un petit porche sous un auvent, plutôt bien orienté par rapport au vent et, surtout, la pluie qui vient de commencer à tomber.

Il va être 20h et je n'ai pas l'envie de pousser plus loin : ce petit porche fera bien l'affaire pour que j'y étale mon couchage ! Je ne suis pas mécontent de me glisser dans le duvet protégé du sursac, et comme je sais pouvoir ravitailler demain matin, je peux m'appliquer à vider le fonds de mon sac de victuailles sans me rationner ...

Cette nuit, quand le ciel se dégage de la ligne d'averses qui défile, je peux pour la première fois voir un peu les étoiles ...

ma cabane en Norvège (au matin), au joli nom de Veslesætersætri
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bonne nuit !
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à suivre ...



Vidéo #53

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Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

Trombi, Récits & Liste(s)
l'ultralighter più estremo di sempre

Hors ligne

#428 28-12-2023 18:04:14

Hervé27
éMULe
Lieu : Normandie
Inscription : 01-11-2017
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

#54 lundi 14 août 2023
Veslesætersætri - Veodalen
50km +1198 -878 10h36 (+pauses 3h26)
Cumul 2182km D+44500m Marche 533h
Vidéo#54

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Si j'ai eu quelques averses dans la soirée tandis que mon couchage était installé sur le porche abrité d'une cabane, les nuages se sont déchirés et m'ont laissé voir quelques étoiles. La nuit se fait un peu plus sombre à chaque jour qui passe à aller vers le Sud, ainsi qu'à se rapprocher de l'équinoxe. Bientôt les 2/3 de l'été seront écoulés, et ici c'est déjà l'automne, mais sans les couleurs ...

Comme je pouvais m'y attendre la nébulosité de la veille a condensé dans une forte rosée, ce pour quoi j'ai utilisé mon sursac. En revanche la nuit n'était pas particulièrement froide (7°C si j'en crois le petit thermomètre fixé à la façade de la cabane), et dans un duvet 0°C confort enfermé dans un sursac, j'ai  eu trop chaud et transpiré. J'ai fini la nuit la moitié du corps en dehors de mon couchage pour sécher et m'aérer. Mon concept de sac de couchage sans zip va bien avec un duvet très léger à 5°C confort, mais pour un sac plus chargé (ici 350 g au lieu de 200), il faut un système d'ouverture si on veut rester un tant soi peu modulaire.

J'ai de jolies lumières rasantes ce matin, avec quelques nuages agrippés au sommet des montagnes, par-dessus une mer de brume accumulée dans la vallée.

Pas de temps perdu à remballer mon bivouac (presque) aux étoiles, je repars à 6h30. À travers les nuages qui s'accrochent sur les massifs, je parviens à entrevoir quelques cimes plus acérées et englacées, fugace aperçu des géants du Jotunheimen ...

au réveil ...
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Comme j'y suis désormais habitué, je dois planifier ma journée en tenant compte de la météo. La journée s'annonce pour une fois plutôt belle, mais il se confirme un temps pourri pour demain avec de fortes pluies, alors que ce doit être ma première journée dans le Jotunheimen ! Je ne peux pas décemment envisager de contourner ce parc national emblématique, mais il me faut un plan pour m'adapter aux conditions. Moyennant une grosse journée, je peux être ce soir à hauteur du refuge de Glitterheim, l'une des portes d'entrée du parc. Au besoin, je peux faire là un nouveau "zéro" imposé, et y attendre de meilleures conditions pour profiter des splendeurs du Jotunheimen. Pour accélérer le mouvement, je suis pratiquement déjà décidé à court-circuiter par le bord de route la section de petite montagne (gorgée d'eau ?) que j'avais prévu entre Heidal et Randsverk ...

déjà des plans pour raccourcir le trajet (en bleu par la montagne potentiellement spongieuse, en rouge par la route ...)
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Je dois aussi procéder au ravitaillement, avec 2 possibilités repérées sur mon trajet : une supérette à Heidal juste en bas devant moi dans la vallée, puis un second commerce alimentaire au camping de Randsverk ~15km plus loin, mais pour ce dernier j'ai le risque qu'il ne s'agisse que d'une petite épicerie d'appoint, et de n'y pas trouver tout le nécessaire à la constitution d'un menu d'itinérance ... Je décide donc de jouer la sécurité et de refaire le plein à Heidal,  quitte de là à porter un peu plus longtemps ma lourde charge de 5 à 6 jours de ravitaillement (à tempérer par les possibilités en refuge gardé et les épiceries en libre service dans les cabanes non gardées) : ce que je ne tirerai pas du sac devra sortir de mon portefeuille ...

Je reprends quelques instants mon sentier inondé, mais bien vite je trouve une agréable petite piste qui descend en longs lacets vers la vallée. J'entre bientôt dans la brume, et avec la lumière qui baisse revient l'appréhension d'une nouvelle journée de pluie ... Je descends dans la brouillasse entre forêt, prés, chalets d'estive, fermes ...

Plus je descends et plus je trouve des traces du ravinement de la semaine dernière. On voit que de gros engins à chenille ont pu passer, mais il est clair que les véhicules classiques sur roues doivent encore rester en bas ...

Un dernier sentier mouillé avant la piste. Droit devant, le Jotunheimen s'annonce
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alpages dans la brume
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Hans + 7 jours
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Je pourrais descendre jusqu'à la route principale et de là la suivre jusqu'à Heidal, mais je décide de m'octroyer un peu de rallonge de ces jolies ambiances fantomatiques de forêt embrumée. Je reprends une nouvelle vieille piste enherbée (j'y mouille mes chaussures, mais c'est leur état normal depuis 2 mois) et m'offre une nouvelle section de forêt dépourvue d'habitations. Je juge que la piste où je marche doit avoir été autrefois une petite route, car à un moment j'aperçois en contrebas la carcasse rouillée et démantibulée de ce qui me semble être une antique cantinière militaire ... De là à imaginer que, durant l'occupation allemande, des résistants norvégiens ont embusqué ici un convoi d'intendance des envahisseurs, mon esprit spéculatif ne fait qu'un pas ...

J'arrive à 8h30 à Heidal alors que la brume se déchire, dans un cadre plutôt sympathique avec de nombreux petits aménagements de pique-nique sous les arbres, entre une grande boulangerie-salon de thé et la petite zone commerciale. J'y trouve une bonne supérette avec tout le choix dont je peux rêver, jusqu'aux prises électriques que l'on m'autorise gentiment à utiliser pour faire le plein des batteries. Je fais là mes courses en prévoyant un bon supplément calorique que j'engloutis tranquillement assis sur un banc devant le magasin pendant que mon électronique reste branchée ... Comble du bonheur, il y a juste en face des sanitaires publics : je peux faire une toilette de chat au lavabo, et pour une fois m'hydrater avec de l'eau traitée ...

Un bon soleil s'est installé quand je finis ma pause à 10h. Juste 1h30 pour gros ravito + repos, c'est correct et je suis maintenant plein d'énergie. Résolu à arriver aussi près que possible du refuge de Glitterheim dès ce soir, j'exerce l'option envisagée ce matin du raccourci par la route pour monter jusqu'à Randsverk. Je gagne ainsi ~5 km et une opportunité de sécher un peu mes pieds, mais ce n'était pas l'option la plus bucolique d'autant qu'il fait beau. Si je m'en étais tenu à mon itinéraire de pistes et sentiers, Glitterheim était au bout d'une journée de 60 km pour une arrivée à la nuit. Avec une distance réduite à 55 km je ramène l'objectif plus près du champ des possibles. La météo m'annonce désormais de la pluie dès ce soir, s'intensifiant demain matin au petit jour ...

Au bord des routes norvégiennes, l'art de la boîte aux lettres. On en ferait un beau livre photographique ...
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je m'efforce de regarder les vallées et la campagne plutôt que la route
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Je veux faire la distance d'une seule traite, et ne pas faire de pause tant que je n'ai pas quitté le bitume. Cela raccourcit mon temps de présence sur l'asphalte, mais ce n'est pas forcément judicieux pour la bonne tenue des pieds qui chauffent. L'accumulation des kilomètres et de l'expérience ne rend pas forcément plus intelligent, et de ce fait je garde un souvenir échaudé de cette nouvelle marche sur route, pourtant dans un cadre pas si désagréable. Par-dessus la campagne norvégienne d'abord, puis à travers de jolies forêts non loin du torrent où j'aurais pu facilement m'éclipser pour fainéanter au bord de l'eau ... Je laisse passer ces opportunités, puis arrive à Randsverk, nom sur la carte mais que j'ai du mal à appeler un village.

Il y a là comme toujours d'innombrables "hytta"/cabines, et donc le camping que j'avais repéré et son commerce, qui s'avère être une bonne supérette en bonne et due forme ! Au temps pour moi et les 5kg + de ravitaillement lourdement tirés par mes épaules au longs de 13 km de bitume ...

Ici à 750m d'altitude (300 de plus qu'à Heidal) la vallée s'aplanit et je peux marcher à plat, et après encore 10mn au long de la route je peux enfin la quitter pour une piste de graviers, avec moults panneaux d'indication vers Glitterheim et le parking d'entrée du Jotunheimen ... à 24 km ! Je n'y marche que quelques centaines de mètres, jusqu'à une petite étendue de gazon et de sable en bord de rivière près d'un pont de bois, où d'épaisses planches servent de bancs. Excellent site de pause, et j'en profite enfin !

c'est farpait !
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Pendant que je fais relâche, je vois d'un œil inquiet passer à intervalle régulier sur la piste des camions de chantier chargés de terre. Comme ce sont les mêmes qui passent pleins dans un sens et vides dans l'autre, j'en déduis que leur lieu d'activité n'est pas trop éloigné (à la vitesse d'un camion supérieure à celle d'un marcheur). Cela augure cependant que je doive cohabiter sur la piste avec le passage des lourds véhicules ... De temps à autre une voiture ou un camping-car arrive à ma hauteur, stationne quelques instants puis fait demi-tour. Entre deux je profite du calme, mais tous ces passages ont quelque chose d'agaçant quand on veut profiter de ses vacances ...

Bien reposé, le plein de calories (re)fait, je m'offre un faux départ avec les douleurs multiples de mes orteils abîmés par les excès de bitume et l'espacement excessif des temps d'aération. Je dois me rassoir et déchausser à nouveau, pour reprendre les pansements existants et en ajouter d'autres ...

Le vrai départ est à 14h après 1h d'arrêt, et je comprends vite mieux le ballet des véhicules depuis tout-à-l'heure. Au niveau des ridicules barrières de péage de cette route payante, un message récemment peint sur une planche de contreplaqué indique (après traduction laborieuse) que la route est coupée et en travaux, interdite à tous véhicules jusqu'à nouvel ordre. Je ne suis pas un véhicule, mais je peux m'interroger sur l'ampleur desdits travaux, et si il n'y a pas là un obstacle infranchissable : pont emporté sur une rivière bien gonflée, par exemple ... Pas d'autre choix que d'aller voir pour le savoir, car je n'ai pas d'itinéraire alternatif ...

J'ai troqué l'asphalte pour le gravier et une très longue distance : 24 km jusqu'au parking terminal et peut-être 30 jusqu'à Glitterheim ! Si la piste permet d'avancer vite, mes 2 longues pauses rendent désormais improbable l'hypothèse d'arriver à Glitterheim à une heure raisonnable. Tout le reste de la journée, ma projection d'arrivée me fera espérer tantôt le refuge, tantôt un bivouac intermédiaire ...

Après une poignée de kilomètres, j'arrive sur le chantier qui occupait les camions. Effectivement, un profond sillon a emporté la route et franchir la ravine est malcommode même pour un piéton (j'y mouille une chaussure ...). Après cela, j'ai l'assurance de n'être plus dérangé par les véhicules à moteur, en tout cas dans la même direction que moi.

Vous ne passerez pas ! Mêêêhh pourquoi ?
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il y a un trou, là ...
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À la deuxième grosse ravine, c'est un motard allemand qui arrive d'en face et pousse sa lourde moto pour la franchir, et je lui livre mon avis qu'il lui sera impossible de franchir la suivante sans aide. Il y avait encore des ouvriers à mon passage, peut-être pourront-ils l'assister ? Il décide de tenter le coup et d'aller voir, je m'attends à le voir repasser. Un couple de cyclistes belges a quant à lui pu franchir les 2 obstacles (c'est amusant, au Cap Nord ou ici les seuls cyclistes avec qui j'ai eu l'occasion de discuter étaient à chaque fois belges ...), ils me rattrapent juste avant une troisième et dernière entaille dans la piste, cette fois franchissable sur des planches.

un motard allemand est péniblement passé ...
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bis repetita ... en plus net et plus petit
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Après 8 km presque sur le plat en fond de vallée (je ne suis remonté que de 120m D+ sur cette distance), ma route oblique et commence à remonter assez franchement dans la montagne. Cette fois c'est un van aménagé que je vois descendre à ma rencontre, et je leur fais signe pour qu'ils s'arrêtent et que je puisse dire à un jeune couple hollandais qu'il est inutile d'essayer de passer par là ... Ils décident eux aussi d'aller voir ou de chercher un endroit où faire demi-tour, je ne sais plus si j'ai bien compris ce qu'ils m'ont dit alors ...

À une bifurcation je retrouve mes 2 cyclistes belges qui font là une pause en hauteur, avant de poursuivre vers le Nord et redescendre vers la vallée suivante rattraper les routes d'asphalte. Nous discutons là sympathiquement, puis c'est le motard allemand qui revient, effectivement bloqué au niveau des travaux. Il n'était qu'à 10 mn de Randsverk où il doit dormir ce soir, et voilà qu'il lui faut faire demi-tour pour un immense contournement de 60 km ! Puis ce sont les hollandais, qui repassent, pour repartir par erreur en direction de Glitterheim (en impasse, forcément), au lieu comme les cyclistes de partir vers le Nord ... Je les verrai bientôt passer une 3ème et dernière fois quand ils auront compris leur erreur. Dans le jeu des traductions je crains qu'ils aient mal interprété mes informations sur les routes disponibles et me sens potentiellement fautif... Tous ces passages presque comiques des uns et des autres me font penser à la scène finale du 1er opus de la Panthère Rose (amusez-vous, c'est ici), la pire expérience jamais vécu par mes zygomatiques (mais j'étais jeune ...).

Tout le monde reparti, je me retrouve seul sur la piste montante, m'affranchissant des bouleaux nains puis renouant avec la toundra.

pas de carambolage à ce carrefour, tout le monde a repris son chemin ...
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La piste s'élève encore jusqu'à dépasser les 1300m, dans un paysage désolé qui n'est pas sans me rappeler l'Arctique et le Finnmark. Les graviers permettent d'aller vite avec relativement moins de fatigue que sur l'asphalte, mais dans le petit vent et le temps variable qui s'installent, je profite d'un moment de soleil pour ajouter une nouvelle et dernière pause au moment de pénétrer dans la vallée de Veodalen qui s'enfonce dans le parc du Jotunheimen. C'était indispensable, mais de là l'objectif du refuge pour ce soir devient déraisonnable, et je bascule définitivement vers l'idée d'un bivouac, sans doute sous la pluie qui semble inéluctable.

Tout autour les sommets restent plutôt arrondis mais commencent à toucher des altitudes respectables pour ce que j'ai vu jusqu'à présent de la Norvège, au-dessus des 2000m. Tout au fond (encore bien lointain !) du Veodalen se trouve le sommet du Glittertinden, à 2452m. Les glaciers enchâssent tous ces sommets, mais je ne m'en approcherait guère. J'avance vers le soleil couchant qui m'éblouit, mais derrière ce sont des nuages chargés en pluie qui se rapprochent.

Pause au soleil juste avant le Veodalen
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retour à la toundra, vue du bord de piste
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Le nouvel objectif est de basculer en mode bivouac une fois que j'aurai dépassé le parking terminal de la route d'accès. Ainsi je préserverai mieux ma tranquillité si mon bivouac reste près de la piste. Ceci dit, je n'ai vu passer que 2 voitures en tout et pour tout sur 15 km, une montante et une descendante ... Le Veodalen défile avec presque rien de changements d'altitude. Il y a ici et là des cabanes d'éleveurs de rennes qui ne me sont pas destinées : finalement l'idée d'un nouveau bivouac me permet de renouer avec l'esprit d'itinérance, moi qui ces derniers temps m'étais un peu trop laissé appâter par le confort des nuits abritées.

C'est à 20h que je passe à hauteur du parking : il y a là quelques voitures, peut-être une centaine de vélos à louer, des toilettes sèches, des conteneurs à poubelle ... L'esprit et le regard passent en recherche d'un espace plat, herbeux, hors de vue de la route et proche d'un cours d'eau. Je pensais trouver vite mais il est plus compliqué que prévu d'associer toutes les bonnes conditions, d'autant que la présence de vaches vient compliquer l'équation : il vaut mieux que je ne m'installe pas dans leur pâture ou leur passage, ni que le cours d'eau idoine ne soit souillé ... Rennes et bovins cohabitent dans l'immense vallée, où d'ailleurs il est possible d'apercevoir d'antiques enclos de pierre, ainsi que quelques abris dignes d'un bel orri ...

Glittertinden 2452m
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Terminus des motorisés non autorisés
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Les vues font envie, mais toutes ces belles pâtisseries sont hors d'atteinte derrière leur vitrine
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Après un dernier pont par-dessus un torrent transversal, j'avise une longue terrasse sur laquelle je peux trouver l'espace parfait, avec un accès relativement proche au torrent pour une bonne eau glacée et cristalline. Je ne traîne pas pour monter le Pioulou, car je peux voir des ondées commencer à masquer le fond de la vallée devant moi. L'une ou l'autre finira bien par être pour moi ...

À cette altitude et les températures fraîches, nul besoin de moustiquaire, les bestioles ont cessé depuis longtemps d'être une préoccupation ! Sauf erreur de ma part, ici à presque 1350m, je fais mon plus haut bivouac depuis le départ.

encore un pont et au dodo !
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demain, zéro ou Jotunheimen ?
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à suivre ...



Vidéo#54

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#429 29-12-2023 14:08:11

FrancoiseB38
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

bonnes fêtes de fin d'année je continue à admirer les ciels tourmentés et les grands espaces !

tes batteries se rechargent en 1 h 30 seulement c'est super ?

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#430 29-12-2023 17:00:37

Hervé27
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

FrancoiseB38 a écrit :

#696084bonnes fêtes de fin d'année je continue à admirer les ciels tourmentés et les grands espaces !

tes batteries se rechargent en 1 h 30 seulement c'est super ?

Merci wink

Pour les appareils c’est seulement du complément de charge. Je ne pars pas de zéro et je ne vais pas jusqu’à 100% si ça doit prendre trop de temps.

Pour le bonhomme une bonne pause dure 45mn. 1h30 est donc un luxe …


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#431 30-12-2023 15:45:36

Hervé27
éMULe
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

#55 mardi 15 août 2023
Veodalen - Memurubu
25km +637 -977 6h43 (+pauses 2h00)
Cumul 2207km D+45100m Marche 540h
Vidéo #55

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Des petites averses se sont succédées toutes la nuit. Le piquetis des gouttes sur le tambour de la toile de tente bien tendue amplifie la perception, et laisse croire à des précipitations plus violentes qu'elles ne le sont en réalité. Dans une accalmie je démonte et remballe une toile et un couchage bien humides, dans un vallon de Veodalen cette fois bien bouché : sommets et glaciers ne sont plus visibles, et avant que je ne parte il semble bien que de solides ondées m'attendent plus avant dans la vallée.

Je démarre à 6h35 en tenue pluie intégrale, de même que la polaire. Fort de mes informations météo de la veille, mon objectif est modeste, puisque je n'envisage que de marcher les 5 km de piste qui me restent jusqu'au refuge gardé de Glitterheim, a minima pour y faire le point, au besoin pour y faire halte jusqu'à demain en attendant que le temps s'arrange. J'entre en effet dans le parc national du Jotunheimen, avec des altitudes plus conséquentes à gérer. Juste après Glitterheim il y a un col à 1700m à franchir, nouveau plus haut de la traversée : à l'heure où je pars tout ce secteur est dans les nuages et la pluie, ça ne fait pas très envie ...

vallée de Veodalen bien bouchée après le démontage du Pioulou
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il faut faire avec ce que l'on a !
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Je n'ai pas long à marcher sur la piste avant que la pluie ne reprenne, et elle tient toujours quand au bout d'une heure j'arrive à Glitterheim. À 7h30 le refuge est en effervescence autour du démarrage du petit-déjeuner, je suis toujours aussi étonné de voir 10 fois plus de monde dans les refuges que je n'en croise sur les chemins. Est-ce à dire que les autres marcheurs y passent 90% de leur temps et ne marchent que 2 à 3 h par jour (ou 4 à 6 h un jour sur deux) ?

Arrivée à Glitterheim à l'heure du petit-déjeuner
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À me voir solidement harnaché dans le vestibule, d'aucuns me demandent si je suis déjà sur le départ, alors qu'en réalité j'arrive ... qui plus est avec la résolution de ne pas pousser plus loin aujourd'hui ... Les gardiens s'activent autour de la ruche du petit-déjeuner, et je vais me poser dans le séjour en attendant qu'ils ouvrent la réception. Rien ne presse ...

Je croise là Viktor, marcheur suédois avec qui je discute en même temps que je sèche et me réchauffe. Il a lui aussi décidé de rester là pour la journée et, au fil de la discussion et sous le feu roulant des questions, je ne suis plus très loin de me livrer à une nouvelle revue de sac ...

Avant d'aller m'inscrire pour passer ici le reste de la journée, je prends toutefois la peine de refaire un point complet des options d'itinéraires, de même que revenir sur les prévisions météo détaillées pour aujourd'hui et demain. C'est là que je constate qu'à un moment ou un autre depuis hier soir Meteoblue a pu s'actualiser, et le nouveau topo est le suivant :
- pluie régulière mais a priori pas violente jusqu'en milieu d'après-midi
- fortes pluies en fin d'après-midi et soirée ... se poursuivant demain alors que je croyais jusqu'ici au retour d'un ciel plus clément !

Bref, m'arrêter ici maintenant ne me fera pas bénéficier de meilleures conditions demain. Cela signifie que je ne pourrai pas faire sans la pluie à travers le Jotunheimen, et c'est bien dommage.

Si la pluie n'est pas trop forte avant cet après-midi, je peux peut-être essayer de progresser malgré tout un peu aujourd'hui et passer dès maintenant le col pour n'affronter le plus mauvais temps qu'à plus basse altitude ? En revanche il est clair qu'il n'y a plus grand intérêt à  faire le "grand tour" du Jotunheimen que j'avais prévu, et le plus rationnel est de tracer direct vers le refuge de Memurubu (voir carte), à ~20km et que je peux espérer atteindre avant la dégradation.

les plans : l'ancien (bleu) et le nouveau (rouge)
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Tout cela est rationnel sur le papier, mais il me faut tout de même aller puiser de la motivation pour me résoudre à me ré-engager sous la pluie pour aller passer le plus haut point du parcours à ce jour. Je ré-enfile mes affaires et en particulier mes chaussures mouillées et froides, quand repasse la même personne qui pensait tout-à-l'heure que j'étais sur le départ. Il inverse la question en me demandant si je me suis installé, pour lui répondre que cette fois je pars ... Ils sont fous ces français !

Comme d'autres se préparaient également, je me suis un peu pressé afin de pouvoir partir plus ou moins dans un "convoi". On ne sait jamais avec les incertitudes de la météo, et je préfère ne pas me retrouver seul au mauvais endroit et au mauvais moment si les conditions devaient être pires que ce que j'envisage ... Quand je décolle à 9h00, je sais qu'il y a des petits groupes avec un peu d'avance devant moi, et qu'il y en aura derrière ...

Je traverse le fond de vallée jusqu'à une belle passerelle par-dessus le torrent, et après un moment le sentier commence à remonter dans le vallon menant au col à franchir. Chaque pas est un nouveau record d'altitude, et dans cet environnement de plus en plus minéral et sous la pluie j'ai le sentiment d'avoir trouvé ici les conditions que je pensais avoir à affronter dans l'Arctique. Je revois des petits névés pour la première fois depuis longtemps, tout en m'élevant progressivement dans un immense pierrier.

Tant que je suis sous les nuages je peux apercevoir une belle langue glaciaire qui descend à l'extrémité du Veodalen dont je m'éloigne désormais. Quand je finis par rentrer dans la chape de brumes je commence à me faire tristement à l'idée que je ne verrai pas grand chose du Jotunheimen ...

langue glaciaire coupée des cimes
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Devant moi j'arrive à compter jusqu'à une dizaine de marcheurs visibles en simultané, que je rattrape et double les uns après les autres. Le col caillouteux à 1685m est atteint dans la brume et un vent froid, et sans aucune vue il n'y aucune raison de m'y attarder : je poursuis direct dans la descente de l'autre côté.

jamais vu autant de monde sur un chemin depuis 2 mois !
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circulez y a rien à voir !
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J'ai 500m D- à faire jusqu'aux rives du Russvatnet, grand lac glaciaire en contrebas. Je dois attendre de repasser sous la ligne des brumes pour entre-apercevoir sa surface entre la nébulosité et les accidents du relief, comme si je devais imaginer l'ensemble d'un panorama à partir de seulement quelques pièces d'un puzzle. À force de descendre l'air s'éclaircit un peu, et la vue du lac se dégage alors que les sommets restent masqués.

Plus loin devant moi je vois un randonneur momentanément arrêté, entouré de 3 moutons qu'il caresse. Quand j'arrive à mon tour à hauteur des 3 bestioles elles s'effarouchent et me tiennent à distance, me renvoyant à mon image de croquemitaine carnassier ...

Après un solide pont de bois j'oblique pour désormais suivre la rive du lac, d'abord par les hauteurs puis descendant lentement jusqu'au niveau de l'eau. Je ne sais si c'est son état normal ou la suite de la tempête, mais le sentier dans cette portion n'est que flaques et gadoue. Avec la pluie qui tombe toujours je goûte vraiment là toute la saveur de la randonnée en Norvège ... Il est midi quand j'atteins la rive, apercevant du coin de l'œil le démontage en cours d'une tente dans la pente détrempée, là où je n'aurai pas cru possible de s'installer. Est-ce moi qui suis trop sélectif ?

apparition du Russvatnet par étapes
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La pluie va très progressivement s'alléger et presque disparaitre et, oh miracle, le plafond nuageux se relève. Je découvre alors la majesté des falaises qui se jettent dans le lac, dominées par le sommet du Besshøe (2258m). C'est majestueux et incroyablement paisible, et après avoir galéré dans la gadoue les chemins sableux du bord de l'eau sont un peu plus confortables.

Quand la pluie s'arrête, je décide de saisir l'opportunité pour aller me poser sur une plage, chauffer un café et savourer le moment des papilles et du regard. Si par un temps bouché le Jotunheimen est aussi beau que ça, je n'ose imaginer ce à quoi cela peut ressembler sous le soleil ...

contemplation ...
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La pause est courte, limitée à 30 mn par le retour de la pluie. Je regrette vite de m'être posé sur le sable, car maintenant j'en retrouve partout, bien collant parce que mouillé !

Je dois maintenant finir de longer le Russvatnet, passer un nouveau col à 1400m puis descendre jusqu'à Memurubu, où il serait bon que j'arrive avant les fortes pluies qui me sont annoncées. L'eau ruisselle de toutes parts et le chemin est régulièrement inondé. J'ai la chance de passer un gros torrent sur une passerelle métallique très instable, juste derrière un trio de marcheurs qui vont gentiment la maintenir à mon passage, merci à eux !

encore un peu du Russvatnet à longer
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le poids des pierres ne suffit pas à maintenir la passerelle instable
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je ne peux pas vous communiquer le son, je laisse cela à votre imagination
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Je finis par quitter les bords du lac et m'engager dans la remontée d'un vallon. J'y croise un couple de jeunes marcheurs allemands, avec qui je fais un point météo. Ils en auraient encore pour trop longtemps avant d'atteindre Glitterheim, et je m'efforce de les tuyauter sur les possibilités de bivouac. Avec la forte pluie annoncée, je les invite à éviter certains des jolis creux herbeux en bord de ruisseau que j'ai pu apercevoir, et de privilégier des terrains bien drainés / surélevés ... Pour ma part je vise maintenant d'arriver à Memurubu qui n'est plus très loin.

Par un sentier de montagne plus tranquille et moins boueux que ce qui précédait, je remonte gentiment vers le col avant d'amorcer la descente vers le refuge et un nouveau grand lac.

Sur l'instant je me demande quels bandits de grand chemin nécessitent un affichage de police en pleine montagne. C'est juste pour intimer de tenir les chiens en laisse ...
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dernière vue arrière sur le lac du Russvatnet et le Besshøe (2258m)
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juste avant de descendre ...
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Du col j'ai 400m D- à descendre sur seulement 1,5 km : la pente est raide ! Il y a eu de nombreux efforts pour canaliser le chemin et empêcher l'abrasion des sols par la forte fréquentation, mais j'ai l'impression que les pluies de la semaine dernière ont bien endommagé le travail effectué. Nombreuses sont les pierres descellées et les ravines, les genoux sensibles doivent souffrir un peu dans ce raidillon.

J'ai maintenant une vue plongeante sur le lac de Gjende et les multiples sommets et glaciers à plus de 2300m qui le dominent, même s'ils jouent à cache-cache dans la nébulosité. C'est magique et impressionnant ! Bientôt c'est le refuge de Memurubu qui apparaît en bas, au débouché de la vallée du même nom. Il faut admettre que l'arrivée sur les lieux est spectaculaire, tant par les reliefs que les contrastes des couleurs minérales et végétales.

Memurubu en bas d'une raide descente
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J'arrive au refuge à 15h15 par temps calme, et pour aujourd'hui je peux m'estimer heureux d'avoir pu marcher cette distance sans être trop entravé par le mauvais temps. Je n'ai pas envie de forcer ma chance et d'affronter la dégradation, confirmée par l'actualisation que je peux faire ici grâce à un peu de réseau (qu'il faut aller chercher sur le perron du refuge ...). Abri et couchage n'ont pas eu l'opportunité de sécher aujourd'hui, et je prends ici une place en dortoir.

Il ne me reste plus qu'à tuer le temps, en partie par un peu de lessive et la mise au séchage d'un maximum d'affaires (tente et duvet compris) dans la salle chauffée ad-hoc (les odeurs y sont délicieuses !).

Le refuge est moderne, incroyablement confortable, et bien sûr cher ... Il y a longtemps que j'ai dépassé mon budget, alors je cesse de compter et la douche chaude efface les regrets.

Tandis que la fin de l'après-midi voit un déluge se déverser dehors dans les bourrasques, je fais la connaissance d'un couple de jeunes parisiens, dont le programme de randonnées norvégiennes a été bien perturbé depuis le passage de Hans. Ils auraient dû marcher dans le Døvrefjell lors de la tempête mais n'ont pas pu s'y rendre. Ils ont d'abord dû rester à Oslo avant de pouvoir rallier le Jotunheimen. Ils peuvent me renseigner sur mon itinéraire de demain, car il semble que la perturbation est passée plus vite que prévu et que je pourrais avoir un temps acceptable demain matin ... En tout cas, ça me fait tout drôle de pouvoir parler français, presque une préparation à mon retour qui se rapproche !

Les colocataires de mon dortoir sont moins sympas : je ne leur en veux pas de ne discuter qu'entre eux en oubliant ma présence, mais leur consommation répétée de bière dans l'après midi, au repas puis au bar me vaudra ensuite leur retour tardif et bruyant dans le dortoir alors que je dormais déjà. Les bouchons d'oreille n'y suffiront pas ...

Memurubu entre 2 averses
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relâche ...
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papa et maman troll veillent
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à suivre ...




Vidéo #55

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#432 31-12-2023 11:34:09

foxof
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

Toujours un plaisir de te lire! smile

Bon, vu les conditions 2023, été 2024, ce sera la même en sens inverse? Histoire de voir tous ces beaux paysages sous le soleil? big_smile


"Une fois là-haut, il n'y a plus qu'à continuer"

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#433 31-12-2023 12:09:54

WouinWouin
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Inscription : 30-03-2021

Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

foxof a écrit :

#696144Toujours un plaisir de te lire! smile

Bon, vu les conditions 2023, été 2024, ce sera la même en sens inverse? Histoire de voir tous ces beaux paysages sous le soleil? big_smile

Autant faire un yo yo pour multiplier les plaisirs !  lol

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#434 31-12-2023 12:27:20

Hervé27
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

WouinWouin a écrit :

#696147Autant faire un yo yo pour multiplier les plaisirs !  lol

Tout le contraire d'un MUL (40 kg !!!!) mais il y en a un qui vient juste de commencer la phase retour du Yoyo, certes en changeant de mode de déplacement :

Freeman's Way

Parti mi-juillet de Lindesnes avec peu ou pas d'expérience, et arrivé à pied au Cap Nord à Noël, fallait oser ...


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#435 31-12-2023 13:41:12

Shaiia
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

Hello

Ca m'a donné envie.
Je pensais aller dans Rondane cet été mais j'aime bien les itinéraires.
Y-a-t-il un tracé GPX fiable ? Où puis-je la télécharger, s'il-vous-plaît ?
Je ferais bien un bout du Norge Pa Langs durant un mois puis je le continuerais par section (vu mon rythme, jusqu'en 2029 lol )

Merci smile

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#436 31-12-2023 14:36:52

Hervé27
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

Shaiia a écrit :

#696151Hello

Ca m'a donné envie.
Je pensais aller dans Rondane cet été mais j'aime bien les itinéraires.
Y-a-t-il un tracé GPX fiable ? Où puis-je la télécharger, s'il-vous-plaît ?
Je ferais bien un bout du Norge Pa Langs durant un mois puis je le continuerais par section (vu mon rythme, jusqu'en 2029 lol )

Merci smile

Bonjour Shaiia,

Pas de tracé officiel, ni même de point d'arrivée / départ impératifs (même si Lindesnes au Sud et le Cap Nord dominent largement). C'est un peu comme la HRP, une philosophie d'itinéraire sans balisage spécifique sous ce nom.

La trace complète que je m'étais préparé est ici sur VisuGPX , mais évidemment je ne m'y suis pas toujours tenu.

J'ai beaucoup utilisé les fonds de carte norvégiens, ainsi que le site ut.no qui les utilise et s'efforce de recenser les abris disponibles (payants comme gratuits).

Mes passages réels sont à retrouver journée par journée dans ce récit (voir l'index en page 1).

Dans les 2/3 Nord de la traversée, l'itinéraire le plus simple est de suivre l'E1, lequel permet aussi de voir un peu de Suède et de Finlande. Il faut l'abandonner quand il vire définitivement vers la Suède. Après cela dans le Sud il y a une grande variété de tracés possibles : mon itinéraire y a été bâti pour aller vite, respecter une date d'arrivée max et faciliter le ravitaillement. Il y avait beaucoup plus exaltant à faire pour qui s'en donne le temps ...


Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

Trombi, Récits & Liste(s)
l'ultralighter più estremo di sempre

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#437 31-12-2023 19:25:29

Shaiia
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

Merci Hervé. Cela va m'être bien utile  smile
J'ai commencé à lire ton blog hier et également à regarder tes vidéos (celles avec Sophie pour l'instant). C'est magnifique smile

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#438 01-01-2024 18:01:09

Hervé27
éMULe
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

#56 mercredi 16 août 2023
Memurubu - Breikvam
40km +1472 -1334 11h09 (+pauses 2h23)
Cumul 2247km D+46600m Marche 551h
Vidéo #56

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Avec assez de réseau pour actualiser et affiner les données météo, j'ai pu voir hier soir que la perturbation passait plus vite et plus intensément que les prévisions initiales. Il semble que je puisse bénéficier d'un créneau de temps calme ce matin, avant le retour d'une pluie intermittente et modérée à la mi-journée.

Entre mes voisins de dortoir indélicats qui m'ont privé de sommeil en soirée et le besoin perpétuel de me lever tôt, ma nuit a été courte. Je ne me suis pas inscrit pour le petit-déjeuner, toujours trop tardif pour mes horaires, mais je prends cependant le temps de m'en octroyer un tiré de mon sac, n'utilisant qu'un peu d'eau chaude à disposition au comptoir du bar. Les tortillas tartinées au Nugatti et trempées dans le chocolat chaud restent mon délice de cet été !

J'ai récupéré toutes mes affaires parfaitement séchées dans la salle chauffée : mon sac s'est notablement allégé de toute l'humidité que je trimbalais après 3 jours de pluie et de bivouacs ... Je démarre le chrono à 7h10, sous un ciel d'éclaircie et alors que les autres occupants du refuge commence à peine à émerger. J'estime qu'il ne devait être qu'à moitié rempli avec toutes les annulations et perturbations post-tempête.

Niché au bord du lac au pied d'imposantes falaises, le refuge de Memurubu n'offre qu'une seule sortie facile par le fond de la vallée glaciaire du même nom. Les autres itinéraires sont plus exigeants, avec des départs sur des dénivelés relativement brutaux de 3 à 500m D+ pour gagner les fils de crête en surplomb au-dessus des vallées et des lacs. Je ne veux pas gâcher le créneau d'éclaircie dont je semble enfin pouvoir bénéficier, et je vise donc le trajet direct par les crêtes en direction du refuge suivant de Gjendebu : on m'y promet quelques passages scabreux équipés de chaînes sur le final, mais ça ne saurait être plus compliqué ou technique que la montagne pyrénéenne. Ma seule épée de Damoclès repose sur l'incertitude météorologique : je dois rallier Gjendebu sans me faire rattraper par du mauvais temps sur les hauteurs.

Je traverse la ferme proche du refuge, passe le pont sur le torrent furieux de la Memu, puis commence la raide montée vers la crête de Sjugurdtingen : 30% de pente sur 1 km de distance, la Norvège m'offre enfin un sentier de montagne !

je quitte Memurubu
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1ère montée vers la crête de Sjugurdtingen (à droite). L'image écrase la perspective, j'avais l'impression d'être devant un mur.
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À force de fréquentation il y a là un sentier impossible à manquer, plus ou moins encadré par quelques grosses pierres pour canaliser le passage et limiter l'abrasion des sols. Je prends mon souffle et m'élève plus facilement que ne le laissait croire mon impression première de faire face à une muraille. La vue derrière moi sur la longueur du lac de Gjende profondément enfermé entre les parois montagneuses se fait de plus en plus belle, augurant bien de ce que je vais découvrir depuis les crêtes.

Dans un virage du sentier une famille lagopède s'égaille devant moi. On voit que la saison a bien avancé car cette fois les poussins sont presque aussi gros que leurs parents. Encore une fois j'ai l'impression de croiser toujours la même famille, au fur et à mesure de la croissance de la couvée ...

les poussins lagopèdes ont bien grandi
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en prenant de la hauteur :
derrière ...

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... à ma gauche ...
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... à ma droite, le Surtningssue (2368m) perce les nuages
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Quand j'atteins la crête et que la pente s'adoucit, je découvre la perspective euphorisante des massifs qui m'entourent, toutefois tempérée par la vision des ondées qui les traversent. Je suis encadré à ma gauche et à ma droite par 2 profondes vallées glaciaires, l'une verdoyante avec son torrent, l'autre avec les eaux d'émeraude du lac de Gjende. Par-delà ces deux vallées les faces rocheuses s'élèvent jusqu'à révéler un peu des glaciers qui les enchâssent, tandis que les sommets vont se perdre dans les nuages ...

J'évolue maintenant par un bon sentier sur le fil de crête, un peu en yo-yo avec des creux et des bosses mais encore à l'ascension, cette fois plus progressivement.

Maintenant sur le fil de crête :
derrière ...

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...devant, côté lac de Gjende
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... devant, côté Memurudalen
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Autant dire que je suis aux anges, je goûte chaque pas que je fais au long de cette arête qui s'élargit jusqu'à devenir un plateau, et je suis maintenant aussi encadré par de beaux lacs de montagnes. Parfois passe un renne solitaire, ici plus farouche que ceux que l'on peut croiser dans les vallées agricoles ... À chaque passage d'une petite éminence se révèle une nouvelle vue, de nouvelles montagnes, de nouveaux glaciers ...

Je passe un premier plus haut à peine en-dessous de 1500m d'altitude (presque 500m au-dessus du lac), et avance paisiblement à pas mesuré. Clairement je m'efforce de faire durer ce passage, un œil toutefois sur le mouvement lent des masses nuageuses. Je me mets à prospecter pour un bel emplacement de pause, histoire d'y siroter le café le plus photogénique possible, mais le soleil qui se cache entrave les efforts. Sans lui et dans le petit vent frais, la pause serait tout de suite moins agréable.

Il me faut avancer encore un peu avant que le soleil ne revienne, pour finir par trouver un rocher parfaitement orienté sur lequel m'adosser, face à l'astre du jour et dos au vent. Face à moi les montagnes du Knutsholstinden (2342m) et leurs glaciers d'où s'écoulent des cascades glissant à toute vitesse dans le lac. Le moment est rare, précieux ... J'imprègne ma rétine et ma mémoire, en mets un peu de côté dans la caméra et le téléphone pour dégustation ultérieure ... Pendant quelques instants je suis le marcheur contemplatif qui prend son temps, et on s'en fout du programme et de la date d'arrivée !

tandis que j'avance en attendant le retour du soleil :
le Knutsholstinden (2342m) et multiples sommets alentour

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autour du Memurutinden (2367)
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contemplatif, pour une fois
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J'ai fait ma pause juste à proximité de la jonction des sentiers, et quand je repars à 10h je commence à obliquer pour me rapprocher des pentes abruptes qui doivent me faire chuter descendre jusqu'à Gjendebu. ll faut d'abord remonter un petit peu avant d'en atteindre le rebord, et depuis un nouveau point haut proche de 1500m, je peux découvrir le vertige des 500m qui me séparent de la surface du lac de Gjende vers laquelle je dois descendre. Derrière moi arrivent par le chemin de crête les premiers marcheurs ayant quitté Memurubu après le petit-déjeuner, et devant moi ceux qui arrivent dans l'autre sens de Gjendebu par le sentier accroché à la pente abrupte. Pendant plus de 3 heures de temps, j'ai eu tout ça pour moi seul !

avant de redescendre
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Les 1ers marcheurs que je croise sont un couple avec qui j'ai dîné hier soir à Memurubu ! De fait ils ont pris tôt ce matin le bateau qui relie les refuges au bord du vaste lac, pour traverser ce matin les crêtes en sens inverse du mien, avec le sac léger, et retrouver leur chambre et le reste de leurs affaires ce soir à Memurubu. Il y a de multiples combinaisons pour qui veut séjourner dans le secteur et s'offrir quelques beaux circuits ...

Les groupes montants se succèdent, d'abord dans l'étroit chemin qui descend lentement accrochés aux flancs abrupts. La descente prend ensuite la forme d'une dégringolade dans un dénivelé de plus en plus prononcé où il vaut mieux avoir de bons genoux. La perte d'altitude est si rapide que, quand je me retourne presque immédiatement après avoir croisé et discuté avec un groupe, il y a déjà 30m de dénivelé entre nous.

Je commence à trouver des chaînes qui sécurisent la descente par dessus quelques sections rocheuses glissantes, et permettent aux marcheurs montants de se hisser. Au bas de la plus longue section je trouve tout un groupe dont le leader / guide oblige tout son petit monde à faire une pause et à ingérer quelques sucres rapides avant de se lancer dans l'effort. Au vu de ma propre transpiration alors que je n'ai qu'à me laisser aider par la gravité, je n'envie pas ceux qui sont à l'ascension avec 20 kg sur le dos !

La descente est rapide si on l'exprime en temps mesuré, elle exige cependant de la concentration et le temps ressenti est beaucoup plus long tant qu'on n'a pas touché le fond et le petit sentier qui, ensuite, accompagne paisiblement la rive du lac dans la forêt au pied des falaises ... Je suis soulagé d'être en bas après avoir retraversé les étages de végétation, après tout de même 50mn pour 500m de D-. J'y retrouve la dense forêt de bouleaux, dans une luxuriance de jungle tropicale après les hauteurs minérales du plateau.

Ceux qui ont emprunté ce genre de passage savent que les photos ne sauraient en rendre une juste perspective
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Je ne rencontre plus personne au cours de la petite demie-heure qui me sépare du refuge de Gjendebu. Le petit sentier casse-pattes dans la végétation évolue ensuite en petite piste carrossable, bien reposante, quand il passe à hauteur d'un premier débarcadère. J'ai fait une bonne pause et pris mon temps sur les hauteurs, et mon réflexe premier est de vouloir bien marcher avant d'en envisager une autre. Toutefois je sens bien que le temps se couvre à nouveau, et quand juste avant le refuge je trouve une massive table de pique nique sous un auvent, je me dis que je n'aurai peut-être pas d'autre bonne occasion d'une pause abritée. J'anticipe donc ici confortablement l'arrêt du déjeuner en bord de lac et à 100m du refuge. Je suis passé à côté de plusieurs emplacement numérotés offrant de magnifiques spots de bivouacs sur les pelouses, à aller réserver auprès du refuge dans le périmètre duquel elles se trouvent.

débarcadère sur le lac de Gjende
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refuge de Gjendebu
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Quand je repars à 12h40, je n'ai même pas 11 km au compteur depuis ce matin, c'est-à-dire à peine la moitié de ce que j'ai l'habitude d'avoir fait avant la pause déjeuner. Aucun remords en tout cas de ce côté : j'ai pour une fois pris mon temps là où ça en valait la peine !

Le refuge est très calme quand j'y passe, je n'y vois que le gardien affairé à fendre un peu de bois. Une balance à suspension est accrochée à la façade du petit bâtiment, et le gardien viendra vers moi discuter quand je m'amuse à y accrocher mon sac : l'aiguille atteint à peine la graduation des 6 kg alors que j'ai encore 3 jours de vivres. Je m'amuse à l'idée d'attendre ici l'apparition d'un groupe pour me glisser au milieu de leur exercice de pesée, mais il n'y a aucun randonneur sur lequel ici exercer ma pulsion sadique ...

J'avais déjà une impression plutôt agréable du refuge de Memurubu, moderne et accueillant avec une équipe sympathique, mais le court aperçu que j'ai de Gjendebu et de la discussion avec le gardien est celui d'un lieu plus traditionnel, plus simple, plus chaleureux et humain. C'est d'ailleurs semble-t-il le plus ancien refuge norvégien, et on s'efforce d'y maintenir ce cachet plus authentique. Je suis content d'y être passé à une heure où les lieux étaient déserts, mon impression à l'heure de pointe n'aurait peut-être pas été aussi positive pour un misanthrope asocial comme moi ...

et vous venez d'où avec votre petit sac ?
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C'est avec encore des étoiles dans les yeux de ma belle matinée que je m'engage dans le sentier facile et reposant qui quitte les rives du lac de Gjende, pour remonter la jolie vallée de Veslådalen vers un col à 1378m (dixit mon GPS). La fenêtre de beau temps s'est refermée derrière moi, je vois mon parcours de ce matin disparaitre dans les nuages et une petite pluie me rattrape avant que je n'arrive au col. Les rennes, quant à eux, ignorent l'averse.

Je croise de temps à autre des marcheurs, dont ici un allemand à barbe blanche (tout comme moi, sauf que je ne suis pas allemand), qui passe tous ses étés en Norvège depuis des années, explorant les massifs au gré de ses envies.

La fenêtre de beau temps se referme derrière moi. J'ai bien visé !
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Toujours décalé et en retard de 20km, je n'enregistre qu'ici le selfie des 2200 km
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La pluie s'allège puis s'arrête, et j'ai même droit au retour d'un peu de soleil dans la large vallée en pentes douces et parsemée de lacs qui m'amène en direction du grand lac glaciaire suivant de Byggdin.

Avec cette dernière averse, les fortes pluies d'hier et bien sûr toujours les suites de la tempête, je renoue avec les sentiers détrempés. Au bout de cette longue vallée j'arrive à un décrochage, d'où la pente se fait plus forte avant de descendre vers le lac. J'y traverse le torrent sur une bonne passerelle et poursuis.

Quand je le découvre avec le soleil, le lac renvoie une belle couleur bleue-verte, laquelle passe quand le ciel s'assombrit à nouveau et que je navigue péniblement sur le sentier de gadoue en direction du village d'Eidsbugarden et du refuge de Fondsbu.

large vallée parsemée de lacs
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la belle couleur du Byggdin au soleil
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les couleurs s'estompent sous les grains. Au bout du lac, le refuge de Fondsbu
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Longer le lac et contourner son extrémité sur le mauvais sentier est interminable. Je ne trouve quelques planches pour aider dans les zones mauvaises que dans le dernier kilomètre, et bientôt j'évolue au milieu des traditionnelles cabines. Ici les odeurs de peinture à bois dominent, tant les uns et les autres s'activent aux travaux annuels d'entretien de leur petit trésor de planches ou de rondins.

Je passe devant la poignée de bâtiments du vieux village traditionnel, puis arrive aux structures plus modernes des différents établissements qui vivent ici du tourisme, dont le refuge.

Vieux village d'Eidsbugarden
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Il est 17h et il y a pas mal d'activité autour de ce refuge situé au terminus de la route et dans un village. Il est encore tôt et mon kilométrage un peu court, alors je me contente d'un long arrêt d'aération et sustentation à une table de pique-nique en extérieur. Après les ondées de l'après-midi le temps semble se mettre au beau, ou en tout cas cesse d'être menaçant : je voudrais ce soir pouvoir bivouaquer, pourvu de marcher encore assez longtemps pour aller chercher un environnement plus sauvage que ce secteur fréquenté.

Je repars à 17h40 pour une dernière session de marche, et d'abord quelques kilomètres de route de graviers par-dessus une colline avant encore un autre grand lac, celui de Tyin. Je l'atteins après 40 mn, passant à Tyinholmen devant un dernier grand gîte, et ensuite suivre une plus petite piste près des berges. Les lumières rasantes du soir sur les collines, le lac et la végétation basse sont très belles. Nous sommes encore à presque 1100m d'altitude, et cela fait 2 jours que je ne suis plus repassé sous le seuil des 1000m, une première qui va durer encore un peu.

Au long de la route je croise quelques campeurs près de leur voiture : l'un affairé à installer son énorme tente sous l'œil inquisiteur de son berger allemand, les autres déjà affairés à préparer le dîner près de leur van sur un bien joli spot au pied des montagnes, à 3 pas du torrent et à peine plus du lac.

Je suis à 2 doigts de me rapprocher un peu plus du lac pour m'y trouver moi aussi mon camping de luxe, mais j'opte plutôt pour attendre d'avoir retrouvé du sentier loin de la piste, espérant m'avancer encore avant de trouver un spot de rêve dans la solitude des collines.

je quitte Eidsbugarden et Fondsbu
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autour du lac de Tyin
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Dans un virage de la piste je retrouve des panneaux de randonnée et le marquage du sentier qui, par les collines, coupe la courbe du lac que je dois retrouver de l'autre côté. Comme j'ai bien avancé avec la route et la piste, j'en viens à me demander s'il ne me serait pas possible de m'offrir un joli trip tardif jusqu'à la prochaine cabine DNT, c'est non seulement utopique mais aussi très bête, car les conditions ce soir sont idéales pour le bivouac.

Le sentier est d'abord correct, zigzaguant sur les roches affleurantes pour éviter les creux occupés par tourbières, mares et petits lacs. Il se fait cependant de plus en plus tortueux, fait d'incessante montées / descentes, et souvent spongieux. Moi qui visais la zone pour le bivouac je suis refait : tout ce qui est raisonnablement plat dégorge, le reste est soit un chaos rocheux, soit totalement embroussaillé. Je scrute le terrain pour chercher le spot, mais en vain.

Je contourne un vaste lac (le Trollsjøen), et passe près d'une petite cabine (privée) de chasseurs ou pêcheurs. Elle est naturellement verrouillée et les abords ne se prêtent pas pus à planter la tente. Il y a un banc abrité accolé au mur, mais un peu court pour mes jambes, je passe là aussi mon chemin. Alors que les ondées menacent à nouveau, il faut que je pousse par-delà la colline et commencer à redescendre par un vallon vers le lac de Tyin que j'aperçois, pour enfin trouver des terrasses herbeuses au-dessus du torrent. Elles sont bien drainées et assez sèches malgré les journées de pluie qui ont précédé, que demander de plus ? Il est un peu plus de 20h30, j'ai finalement juste atteint mon "quota" de 40km, avec cette fois un dénivelé plus conséquent qu'à l'habitude.

Une nouvelle fois à cette altitude et avec la fraîcheur du soir je peux m'affranchir de la moustiquaire. Il y aura bien quelques kamikazes pas très vifs m'invitant à les trucider, mais les bestioles ne sont plus réellement mon souci.

Lac de Trollsjøen : tout ce qui est plat est spongieux, le reste n'est que broussaille et caillasse
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je ne suis pas encore au sec
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je ne peux plus compter sur le soleil de minuit, il se couche bientôt ...
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Ce fut une bien jolie journée que celle-ci ...
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à suivre ....

Très belle année 2024 à tous ! De belles randos légères, de beaux bivouacs, plein d'émotions et de rencontres ! Je vous souhaite le meilleur  calin


Vidéo #56

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Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

Trombi, Récits & Liste(s)
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#439 03-01-2024 16:14:37

Hervé27
éMULe
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Inscription : 01-11-2017
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

#57 jeudi 17 août 2023
Breikvam - Suleskaret (Filefjell)
36km +1176 -832 9h17 (+pauses 4h08)
Cumul 2282km D+47800m Marche 560h
Vidéo #57

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Le départ ce matin est à 7h00, sous une chape de brume ... Avec aussi peu de lumière depuis de nombreux jours, mes batteries s'anémient sans que le panneau solaire ne leur soit d'aucun secours. Pire, je viens de réaliser que le câble iPhone neuf récupéré lors du dernier rendez-vous familial n'est pas réellement compatible avec le panneau : si j'ai bien un indicateur de charge sur le téléphone, les % chargés sont dérisoires, souvent insuffisants pour compenser la consommation. Heureusement j'ai une autre combinaison fonctionnelle avec le câble USB-C de la caméra + un raccord lightning, mais en attendant j'ai perdu l'opportunité des moments ensoleillés de la journée d'hier ...

Je ne démarre pas particulièrement tôt et, sauf retour flamboyant du soleil, il me faudra faire au moins une longue halte pour recharger les appareils. J'estime vaguement sur la carte le secteur vers lequel je pourrai finir la journée, dans le massif du Filefjell, quelque part entre une cabine DNT un peu trop près et une autre un peu trop loin ... Si la météo le permet ce sera donc un bivouac d'altitude, sinon ... on verra bien !

Je n'ai qu'à suivre mon petit sentier jusqu'en bas du vallon où le torrent se jette dans le lac de Tyin, puis longer les berges jusqu'à la digue de retenue après laquelle je couperai une nouvelle route avant de repartir dans la montagne. Pour arriver jusque-là les berges du lac sont bien pénibles : je vais d'un marécage à une flaque de boue, dans une marche dé-structurée par tous les écarts qu'il faut faire pour ne pas glisser ou s'enfoncer. Je ne peux faire 2 pas égaux, et m'efforce de maintenir ma bonne humeur en envisageant de déposer un brevet de ces insolites pas de danse qu'il me faut inventer au fur et à mesure.

direction lac de Tyin, sous la brume qui se déchire
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bientôt au bout du lac, premières cabines
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Il me faut 1h30 assez fatigante pour atteindre la digue, tandis que la brume s'est déchirée et qu'un peu de soleil me parvient. J'y fais un court arrêt de reconfiguration pour retirer la polaire d'en-dessous du coupe-vent, et je poursuis sur 1500m par la piste et la route avant de descendre dans le fond du vallon, franchir le torrent sur un pont et commencer à remonter l'autre versant. Là je croise un marcheur bien harnaché qui arrive dans l'autre sens, un australien à l'accent prononcé et prénommé Alan, ici sur le Massiv Trail.

Je suis toujours au-dessus de 1000m d'altitude, et je dois maintenant franchir le massif du Slettningsegge, dont je n'ai pas la moindre idée de ce qu'il me réserve. Ce n'est ni un parc national ni une réserve naturelle (en tout cas rien ne le mentionne sur les cartes). De l'autre côté je dois y trouver un petit village et une autre route.

Je commence par m'élever entre les cabines, puis laisse peu à peu derrière moi les bruits des bricoleurs du mois d'août. Je renoue avec le sentier, cette fois bien sec et très agréable au marcheur, croisant d'abord de petits lacs tandis que je prends de la vue sur le massif que je laisse derrière moi. Il y a toujours plus de soleil ailleurs que sur moi, comme si le nuage tenace au-dessus de ma tête avait décidé que, non, mon panneau solaire ne chargera pas ...

villégiature norvégienne ...
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petit lac ...
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vue arrière
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Je passe un genre de col puis débouche désormais sur l'environnement des grands lacs qui parsèment le massif. Sur les berges du 1er se trouve le petit refuge DNT non gardé de Slettningsbu que je vise. La cabine offre un bel intérieur rustique, simple et fonctionnel, et j'y fais la rencontre d'une maman et de son fils de 8 ans qui randonnent ici d'un refuge à l'autre. Hélas pour moi, il n'y a pour une fois ici pas de panneaux solaires et donc pas de prises USB pour la recharge de mes appareils. Je ne m'arrête donc que peu de temps, juste de quoi profiter des toilettes sèches ...

arrivée à Slettningsbu
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... et déjà le départ
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Le chemin est propre et net et je le suis sans réfléchir, tant et si bien qu'en découvrant un nouveau grand lac je réalise que j'ai raté une bifurcation, et coupe à l'azimut pour retrouver mon itinéraire. Le soleil semble enfin s'installer, et c'est l'opportunité d'aller m'installer en bord de lac pour une pause au cours de laquelle je peux essayer d'optimiser l'orientation du panneau pour recharger. Encore hélas, à peine installé je suis à nouveau privé de soleil par les nuages obstinés qui ont décidé de m'accompagner. En repartant je suis contraint de passer en mode économique en cessant d'enregistrer ma trace. Ce n'est une complication qu'à l'heure de mesurer les kilométrages et dénivelés effectués, ainsi qu'à celle d'appuyer le récit avec une belle cartographie (il faut tout reprendre à la main)...

Je passe d'un lac à l'autre, le dernier immense que je dois longuement contourner avant de commencer à redescendre vers la vallée suivante. Dans toute cette section je passe au plus haut à 1400m d'altitude, dans une belle ambiance de moyenne montagne et sur un sentier pour une fois sans difficulté. L'ambiance est plus lumineuse, mais comme je marche vers le Sud le panneau n'est jamais très bien orienté ...

d'un lac l'autre
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Un vallon permet de descendre du plateau vers la vallée sur ~300m D-, et comme souvent les dernières centaines de mètres sont bien pénibles et spongieuses avant d'atteindre le village de Kyrkjestølane et le bord de route ... Il y a là 2 églises à côté l'une de l'autre, étape sur le Pilgrimveg et le Kongevegen. Il y a aussi une auberge / gîte, et toue ma volonté doit être mobilisée pour ne pas traduire du norvégien le panneau où il est écrit "pizza" ... Je franchis la route sur la petite piste du Kongevegen, avec en ligne de mire un banc que j'aperçois perché sur une éminence face au village : ce sera le spot idéal pour une nouvelle pause de plein air. J'y ai toutefois un petit vent désagréable dont je n'arrive pas à m'abriter, lequel empêche mon eau de chauffer suffisamment et me condamne à un café tiédasse ...

Kyrkjestølane, Kongevegen et pause ... Les distances ne sont plus qu'à 3 chiffres, la fin approche ...
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Je ne vois passer ici qu'une poignée de promeneurs et de cyclistes, pas de quoi utiliser ses deux mains pour les compter. Je suis passé ici très momentanément à peine sous les 1000m, et à 14h45 je repars pour traverser le Filefjell, avec un prochain refuge à seulement 8 km dont j'espère qu'il est doté en panneaux solaires ... Je suis un peu la piste, puis bifurque par le sentier qui remonte vite au-dessus de la maigre forêt de bouleaux, puis la pente s'assagit et je retrouve la toundra.

Là encore j'ai un bon sentier globalement sec et très roulant, sur lequel je progresse facilement et rapidement. Je peux saluer de loin un marcheur au repos installé en bord d'un lac, tandis que derrière moi les vues révèlent maintenant les cimes du Jotunheimen qui s'éloignent, mais dominent les reliefs plus bas franchis depuis hier. L'horizon est barré de cimes élancées et englacées, toujours un peu plus au fur et à mesure que je prends de l'altitude. Il fait plutôt beau aujourd'hui dans le Jotunheimen : il m'aurait fallu un ou deux jours de décalage pour pleinement en profiter ... Devant moi 2 sommets dominent le paysage, entre lesquels doit passer mon itinéraire.

vue arrière, quelques sommets du Jotunheimen commencent à se profiler
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Sulefjellet (g.) et Suletinden (dr.), tous deux à ~1780m et entre lesquels je dois passer
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J'arrive à 16h45 au refuge de Sulebu au bord d'un petit lac, heureux d'y voir de grands panneaux solaires sur sa façade Sud. Le cadenas est ouvert, et à l'intérieur je fais la rencontre de Sofia, marcheuse suédoise qui se pose là pour ce soir. En voyant mon sac elle se montre particulièrement intriguée et intéressée, et le feu roulant des questions commence tandis que je peux enfin brancher mes appareils. Sofia est très versée sur la rando légère en Suède, où la communauté dédiée est surtout active sur Facebook. Nous parlons donc chiffons avec passion, et ça ne va pas s'arranger quand vient nous rejoindre un couple franco-américain, Chloé et Pat, avec à leur actif les grands trails nord-américains (AT, GDT, PCT ...).

Le temps passe et je dois me faire violence pour ne pas céder au confort de la cabine et au bonheur de la socialisation. Pat et Chloé sont repartis bivouaquer vers le Nord, et je suis pour ma part court en kilomètres pour aujourd'hui et en manque de bivouac. Je fais donc mes adieux à Sofia un peu après 19h, non sans que nous ayions échangé nos adresses instagram respectives. Elle partagera la mienne sur le réseau Facebook MUL suédois, ce qui me vaudra les jours suivants un afflux supplémentaire massif d'une centaine de "followers"  sur Insta !

Instagram @ostrangens_aventyr
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Je repars reposé et requinqué, mais à cette heure je ne ferai plus une grosse distance. Je reporte mon ambition sur la recherche du bivouac le plus photogénique possible, et j'arrive vite à la conclusion que ce sera sur l'un ou l'autre versant du col entre les deux montagnes qui dominent ce plateau. À la montée les vues vers le Jotunheimen sont encore plus dégagées, et je ne sais pas où fixer mon regard pour voir les plus jolies choses.

Objectif bivouac d'un côté ou l'autre de ce col
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Un peu du Jotunheimen à l'ombre (vers le Nord)
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et un peu plus, cette fois au soleil (au Nord-Est)
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Les spots ne manquent pas avant la petite montée, mais psychologiquement je veux avoir passé l'obstacle. Le terrain est assez chaotique dans l'ascension, mais Pat et Chloé m'avaient indiqué que le secteur suivant se prêtait bien à monter la tente, donc je ne m'inquiète pas trop. Le col dépasse légèrement les 1500m, et après une ultime vue sur les montagnes au Nord et à l'Est, je découvre sur l'autre versant un joli lac et l'amorce de vallées encaissées.

Je dois dépasser le col et progresser en balcon au-dessus du lac et dans les grands blocs, explorant ici et là les terrasses qui pourraient accueillir le Pioulou. Je finis par trouver l'endroit  parfait, sur un sol de mousses sèches et face au couchant, à quelques enjambées d'un petit ruisseau glacé qui sourd des éboulis. À presque 1500m c'est mon bivouac le plus haut de ma traversée à ce jour, et je passe la soirée à contempler l'embrasement des nuages dans le couchant interminable.

Maintenant que le Jotunheimen est derrière, il ne me reste plus que l'Hardangervidda à franchir, et pour un peu je commencerais à sentir le parfum de l'océan. J'ai conscience que l'arrivée se rapproche, et que j'ai beaucoup plus de belles choses derrière moi qu'il n'en reste devant ... Alors je savoure. Lentement.

Catégories "mes plus beaux bivouacs" : au moins un accessit !
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le spectacle va commencer
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aux premières loges !
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à suivre ...


Vidéo #57

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Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

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#440 03-01-2024 19:38:41

Javah
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

Magnifiques journées!  cool Je te souhaite une année 2024 légère et pleine de trips du soir! rl

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#441 03-01-2024 21:46:27

courtils
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

Pour le brevet, les Monty ont mis la barre assez haute...
Merci pour le reportage et bon courage pour la fin !

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#442 03-01-2024 23:46:54

lignedefuite
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Inscription : 02-01-2024

Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

Je suis arrivé ici par ta chaine Youtube sur laquelle j'ai pu laisser quelques divers messages.
J'ai découvert ici un passionné de marche légère, de partage et d'écriture.

Coté marche légère, du haut de ma 50aine bien passée, je ne peux qu'agréer pour que la marche puisse rester un plaisir sans l'énergie que j'avais il y a 22 ans de faire le GR20 avec 22 kg au départ et une quinzaine à l'arrivée.

Je ne tenterais même pas en rêve de jouer dans la même cour que toi et si il y avait un championnat dans cette catégorie tu serais bien placé au même titre que ta capacité à relativiser les difficultés rencontrées.
Comme tu le dis souvent, à chacun d'adapter le poids de son sac à sa manière de randonner.

Dans le même temps que j'accompagne le récit de ce Norge, je découvre ceux de tes précédentes "traversées"

Merci pour ces récits.

Dernière modification par lignedefuite (03-01-2024 23:48:15)


le plus lourd dans mon sac à dos est le confort qui est dans ma tête...
Si j'étais un marcheur, je serais John Muir.

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#443 05-01-2024 19:43:03

Hervé27
éMULe
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

#58 vendredi 18 août 2023
Suleskaret - Iungsdalshytta
44km +1331 -1707 11h13 (+pauses 3h13)
Cumul 2326km D+49100m 572h
Vidéo #58

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J'ai remballé et suis prêt à repartir à 6h30, laissant mon plus haut bivouac de la traversée sous un ciel mitigé avec quelques brumes éparses chatouillant les sommets. J'ai en tête une météo correcte pour aujourd'hui, pas spécialement lumineuse mais a priori pas pluvieuse. C'est en revanche pour demain que j'ai des inquiétudes, avec des prévisions bien arrosées et fraîches. Idéalement il me faudrait pour ce soir un point de chute qui me permette le cas échéant une échappatoire, histoire de ne pas rester coincé sur les hauteurs en attendant que ça passe ... Mon prochain ravitaillement est prévu à Finse, au pied du glacier de l'Hardangerjøkulen, et où je pourrais parvenir demain soir si la météo le permet : pas forcément de commerces ad-hoc sur place, mais la possibilité d'y prendre le train pour un aller-retour vers les magasins ... Bref, j'ai un créneau aujourd'hui pour m'avancer le plus loin possible, et essayer de limiter demain mon exposition au mauvais temps annoncé.

mon spot à l'heure du départ
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Je dois ce matin finir de traverser le massif, et vise de faire ma pause lorsque j'aurai à redescendre dans une vallée traversée par une route, où se trouvent au moins un gîte ainsi qu'un refuge DNT. Il me reste longtemps à marcher dans cette belle montagne d'abord minérale puis plus herbeuse, décorée par les restants de neige et, bien sûr, la succession des lacs. Il s'avère que dans la vallée adjacente passait une piste que j'aurais pu aller chercher pour m'accélérer, mais il m'aurait fallu ensuite suivre la route sur une poignée de km et je m'en tiens au joli sentier.

Il s'avère vite que j'ai mal évalué les distances pour cette matinée, me contentant d'une appréciation au jugé. Naviguer dans le réseau de vallées de ce plateau d'altitude est bien plus long que mon estimation, et ce n'est qu'au bout de 3 heures de marche que je peux enfin décrocher en direction de la vallée ... Le plafond nuageux est haut et pas menaçant, mais bloque obstinément le soleil : encore une fois, je ne dois pas négliger le ravitaillement électrique si l'opportunité s'en présente, surtout avec le risque d'être bloqué demain par les fortes pluies ... Toutes les cabines n'ont pas le courant !

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Le chemin n'est pas difficile, mais à force de creux, de bosses et de rochers saillants, il est moins roulant que celui que j'avais hier soir. Avant de redescendre je n'ai croisé qu'une unique randonneuse sur le Massiv Trail. Une fois dans la descente et alors que le chemin se fait plus spongieux, les rencontres se multiplient, et en particulier celle de Yannis, marcheur allemand lui aussi sur le Massiv. Nous restons 20 mn au bord du chemin à parler philosophie de la randonnée et poids du sac, le sien particulièrement chargé ... Après cette discussion je redémarre refroidi et un peu endolori, et les dernières centaines de mètres avant la route révèlent un chemin inondé où il est vain de chercher à échapper aux flaques profondes et à la gadoue ...

descente vers Breisdalen
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Je finis enfin par toucher le bord de route, qu'il me faut remonter sur quelques centaines de mètres jusqu'au refuge DNT de Skarvheim, négligeant le bâtiment bien plus imposant du gîte de Breisdalen. Je suis au refuge passé 10h30 après 4h de marche, et décide de m'y octroyer une grosse pause de 2h en y anticipant le déjeuner. Cela me permet également de recharger les batteries au maximum sur le 220V, la cabine étant reliée au réseau. Il y a là 2 autres jeunes marcheurs, l'un peu causant et de nationalité indéterminée qui vaque à ses occupations, l'autre espagnol qui attend ici un copain qui doit le rejoindre par bus et avec qui j'échange un peu.

J'actualise ma météo : la pluie s'annonce pour demain soir mais la journée pourrait rester correcte : peut-être après tout pourrai-je m'avancer suffisamment par la montagne vers Finse, pourvu que je démarre très tôt ?

refuge de Skarvheim, alt.1038m
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Les lignes de niveau des cartes norvégiennes sont parfois difficiles à lire, et en particulier sur le petit écran de mon téléphone. En repartant un peu avant 12h30, je n'ai en réalité que la notion des distances et pas beaucoup celle des dénivelés et des altitudes dans lesquels je m'engage. Le prochain refuge est à Bjordalsbu à 13km et je compte y être pour 16h. Le suivant est à 15km de plus, et à cette heure par la montagne c'est peut-être beaucoup, d'autant que je n'ai pas la pêche aujourd'hui ...

Je refais à l'envers le petit bout de bord de route par lequel je suis arrivé, puis commence à m'élever dans un vallon par une piste qui devient ensuite sentier. Pas de difficulté particulière, mais un relief marqué avec 400m D+ avant que je ne parvienne aux rives d'un premier grand lac. Dans la vallée le temps est un peu plus lumineux mais le soleil direct n'est jamais pour moi : mon nuage sombre personnel m'accompagne où que j'aille ! Une fois revenu sur le plateau d'altitude l'ambiance redevient sinistre ...

1er grand lac
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Je dois remonter un vallon où le torrent a profondément creusé son lit et entaillé ses berges de graviers, emportant partiellement le chemin qui le longeait. Le marquage a été renouvelé pour contourner le problème, et c'est là que je réalise que j'ai sous-évalué les dénivelés. Me voilà maintenant à 1550 m, à suivre une vallée minérale qui monte encore en direction du refuge de Bjordalsbu.

détour
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vue arrière à l'ascension
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longue vallée minérale
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J'arrive au refuge à 15h40, donc plus tôt que prévu mais avec les jambes bien fatiguées, décidément pas au plein d'énergie pour aujourd'hui. Ce n'est que la seconde pause de la journée, et je décide là encore de la faire plutôt longue. Je m'y donne jusqu'à 17h pour me décider à y passer la nuit, ou bien à tenter un trip du soir pour rallier la cabane suivante de Iungsdalshytta.

Plusieurs marcheurs à Bjordalsbu, tous sur le Massiv mais dans des directions diffférentes : 2 allemandes en binôme, une 3ème en solo et un américain. Discussion sympa pendant que je m'installe à un coin de table et de banquette pour grignoter, ainsi que siroter des boissons chaudes. Au cas où je serais retardé pour rejoindre Finse, j'achète dans l'épicerie libre service des biscuits et des dosettes de chocolat : cela me donne un petit-déjeuner supplémentaire si je dois passer une nuit de plus que prévue dans la montagne.

refuge de Bjordalsbu 1580m : le plus haut de la traversée
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Pour la section jusqu'à Iungsdalshytta, les 2 allemandes venues de cette direction m'annoncent de la caillasse interminable d'abord, 2 névés très raides et beaucoup de gadoue sur la fin. Chaque fois que l'on me donne des informations ou préconisations sur le chemin, j'essaye de jauger le niveau d'expérience de mes interlocuteurs. Ici je ne sais pas trop quoi en penser, mais me dit qu'il ne doit pas y avoir là quoi que ce soit de plus difficile que ce dont j'ai déjà l'expérience.

Je pèse le pour et le contre de dormir ici ou de poursuivre, mais une fois bien reposé, rassasié et réchauffé par le poêle, le moral remonte et je me sens d'attaque. Iungsdalshytta est annoncé à 17km, ce que je dois savoir faire en 5h max, soit une arrivée à 22h dans la pénombre. Au pire je peux de toute façon bivouaquer un peu avant, donc pas d'inquiétude particulière à me lancer dans un trip du soir : la perspective du confort du refuge me servira de motivation pour pousser les kilomètres.

Je quitte donc Bjordalsbu à 17h, alors qu'un vent bien frais s'est levé. Je supporte très bien polaire, coupe-vent et bonnet. Je longe le lac par ses flancs rocheux, le gris minéral répondant à celui des nuages bas. Les derniers névés ont ici disparu assez récemment, et en début de saison l'ambiance devait être bien hivernale.

Pas mécontent du sens Nord-Sud et de passer ce massif bien après la fonte des neiges
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Passé le lac ma mauvaise lecture des lignes de niveau continue de me surprendre : je m'élève encore dans la caillasse, passe un autre beau lac sinistre, puis arrondis les flancs d'une montagne couverte de pierriers. Au plus haut le GPS enregistre 1717m, nouveau plus haut inattendu de la traversée ! L'ambiance est désolée, avec une vue vers le Sud qui porte très loin sous le plafond nuageux. J'ai un temps 2 marcheurs chargés devant moi, mais que je ne rattrape pas. Ils finissent par disparaître, ayant sans doute bifurqué de l'itinéraire que je suis pour aller chercher leur bivouac près d'un lac.

je monte encore, les névés ressemblent furieusement à des glaciers en fin de vie
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1717m. La forme des cairns n'est pas pour le plaisir de l'art : c'est pour la tenue au vent
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Je commence maintenant à redescendre mais je suis loin d'en avoir fini, avec des cuvettes à traverser et de l'autre côté desquelles il faut bien remonter. La perte d'altitude est lente et l'heure avance, le plafond nuageux descend ...

Peut-être en lien avec mon manque d'énergie, je suis pris d'un léger saignement de nez, en fait lié aux cachets vitaminés que je prends chaque matin avec mon eau. Au-delà d'un certain dosage la vitamine C me provoque ce genre de désagrément, rien de trop problématique mais à force de réduire les doses sans arriver à y remédier, je vais arrêter là la prise des comprimés effervescents ...

Pour ajouter au plaisir un peu de pluie s'en mêle, qui heureusement ne dépasse pas le niveau des gouttes éparses.

Encore quelques lacs, puis dans une nouvelle montée je rencontre enfin un névé en travers du chemin. Il n'est pas bien large, la neige est molle et les traces du jour profondes. De la gnognotte, et j'ai la réponse à la question que je me posais tout-à-l'heure relativement aux conseils que l'on me prodiguait ...

névé de rien du tout après franchissement
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le plafond descend, des ondées circulent
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Avec des passages d'averses légères l'ambiance dans le soir se fait de plus en plus sombre, comme si j'allais me faire rattraper par la nuit alors qu'il n'est que 19h ... Après une  nouvelle cuvette franchie je remonte sur une crête où la brume me rattrape, histoire de donner un tour intéressant à ce trip du soir. Je dispose certes de mon GPS, mais pour la navigation de détail apercevoir un cairn et une marque de peinture rouge est tout de même rassurant. Les trouver à travers le brouillard devient compliqué, j'espère qu'une grosse averse ne viendra pas me compliquer l'existence ... Encore un névé cette fois peu pentu à remonter, je passe encore un col dans la brume et descend enfin plus franchement.

La lumière revient un peu, et je repasse sous la chape de brouillasse dans un environnement de plus en plus herbeux. Encore et toujours de grands lacs à longer, cette fois avec le tintement des clochettes des moutons que j'aperçois parfois. Dans les pelouses le sentier pourrait se faire boueux, mais ce n'est rien par rapport à ce que j'ai connu, j'y porte finalement à peine attention.

Les jambes tirent et je suis pressé d'arriver, la lourde humidité ambiante m'ôtant l'envie d'un bivouac alors que je n'ai plus qu'une poignée de kilomètres avant un abri en dur. Dans l'axe de la vallée je finis par apercevoir la bâtisse de Iungsdalshytta à l'extrémité du (très) grand lac de Stølsvatnet, mais quelque chose cloche : la baraque me parait bien trop grande pour une cabine DNT, et en revenant à ma carte je réalise que c'est un refuge gardé !

2300km ! Fatigué, moi ? Non ...
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la rumeur de la cascade amplit la vallée
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là au bout, Iungsdalshytta
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Je franchis par le pont le torrent rugissant, et à 21h je me présente dans l'enceinte du refuge gardé. J'y suis accueilli par les aboiements apeurés du border-collie des gardiens, à qui j'ai sans doute fait peur en arrivant ainsi presque à la nuit et sombrement vêtu. La gardienne me dit que c'est incompréhensible, son chien est gentil avec tout le monde ... mais pas ce soir avec moi ! J'essaie tous mes trucs pour m'en faire un ami mais rien n'y fait, la gardienne devra le mettre à l'écart (et ça recommencera chaque fois que je mettrai le nez dehors ...).

Je n'avais pas prévu de payer un hébergement en refuge gardé ce soir, mais il est trop tard pour changer d'avis. Je quémande une place en dortoir, et me voit surclasser en chambre individuelle pour le prix du premier, et en prime on me dit que si je fait vite pour m'installer, on peut remettre pour moi le couvert du dîner qui venait de se terminer ! Me voilà donc à table pas encore douché, alors que les derniers convives se sont retirés dans le séjour à boire des infusions, pour certaines maltées et fermentées. Le garçon qui fait le service rien que pour moi vient aussi discuter rando : il est italien et est venu bosser cet été dans ce refuge, mais son idéal est de crapahuter ...

J'irai ensuite me traîner prendre une douche, et enfin remonter dans ma chambre et m'écrouler. L'accueil sympathique m'a fait du bien, et la sombre grisaille du dehors me confirme qu'un bivouac aurait été ce soir bien triste et humide ...

Iungsdalshytta (au matin)
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à suivre ...

@lignedefuite : merci du passage ! Si tu remontes dans le temps et mes toutes premières contributions sur le forum pour mon bout de GTA, tu verras que je viens de loin et de fait, je suis le premier surpris à être capable de faire à 54 ans ce que je pensais impossible à 25 ... Bon, pas sûr que la pente reste ascendante avec le temps qui passe ...


Vidéo #58

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Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

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#444 06-01-2024 09:15:38

brons07
Membre
Inscription : 27-06-2015

Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

supprimé

Dernière modification par brons07 (06-01-2024 09:17:25)

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#445 06-01-2024 09:20:44

brons07
Membre
Inscription : 27-06-2015

Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

Peut-être en lien avec mon manque d'énergie, je suis pris d'un léger saignement de nez, en fait lié aux cachets vitaminés que je prends chaque matin avec mon eau.


Voilà enfin l'explication.....du dopage!! lol

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#446 06-01-2024 10:13:51

FrancoiseB38
Membre
Inscription : 17-04-2023

Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

Bonjour Hervé
Même fatigué je te trouve très performant !
Tu t'es entrainé pour retenir les noms des lieux ? (aussi les prononcer et les écrire )
Je les trouve aussi beaux que complexes un peu mystérieux ....

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#447 06-01-2024 11:54:33

Matt81
Membre
Inscription : 22-02-2008
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

Hello,
je rattrape le retard.
Je suis très impressionné par la gestion de l'humidité, en logistique certes, mais mentalement aussi. C'est vrai que le confort des cabines DNT est un moyen fantastique d'atténuer cette problématique, mais quand même. Il y a aussi l'objectif de finir qui doit être un super moteur à avancer.
Allé, courage, bientôt la fin du récit. merci encore.

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#448 06-01-2024 18:57:56

Hervé27
éMULe
Lieu : Normandie
Inscription : 01-11-2017
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

brons07 a écrit :

#696455Voilà enfin l'explication.....du dopage!! lol

Après analyse, aucune trace d'urine dans le whisky ...


FrancoiseB38 a écrit :

#696455Tu t'es entrainé pour retenir les noms des lieux ? (aussi les prononcer et les écrire )
Je les trouve aussi beaux que complexes un peu mystérieux ....

Les prononcer, même pas en rêve ...

Je n'ai cherché à mémoriser que les points d'étape importants, rarement plus de 3 ou 4 sur une journée, puisqu'ils servaient de base à la communication avec les autres marcheurs ("tu viens d'où, tu vas où?). C'était donc fortement centré sur les noms des refuges et villes/villages, passages obligés des marcheurs et points de référence du marquage / balisage.

En revanche, s'agissant de langues germaniques j'y retrouve des racines et logiques communes avec l'allemand que j'ai pratiqué, surtout dans la toponymie dont l'origine peut être particulièrement ancienne. L'affaire est compliquée par les versions multiples du norvégien en usage dans le pays (2 langues officielles et une pléthore de parlers locaux), tous ces suffixes étant écrits de manières très différentes selon l'éditeur de la carte, les règles en usage dans la région etc. Avec les langues Sames (10 variantes recensées) en plus des norvégiennes , sur certaines cartes un même lieu pouvait être libellé avec 3 noms différents ...

"hytta", "bua" ou "tunet" signifient qu'on a affaire à un abri / refuge, "fjellstue" ou "fjellsgård" à un gîte de montagne
"johka" se rattache à un nom de rivière
"dalen" à une vallée
"fjell" à une montagne
"vatnet" à un lac
etc...

Par exemple à la fin de cet épisode, Jungsdalshytta signifie "le refuge de la vallée de Jungs" ("des jeunes ?"). En décomposant ainsi les noms, il est plus facile de les comprendre et les mémoriser.


Matt81 a écrit :

#696455je rattrape le retard.
Je suis très impressionné par la gestion de l'humidité, en logistique certes, mais mentalement aussi. C'est vrai que le confort des cabines DNT est un moyen fantastique d'atténuer cette problématique, mais quand même. Il y a aussi l'objectif de finir qui doit être un super moteur à avancer.

Pour ma part je suis très impressionné par ceux qui suivent cool !

Pour l'humidité, j'ai comme beaucoup été formaté par mon enfance dans laquelle se faire mouiller était un interdit : j'allais crotter et gâcher mes vêtements et chaussures, attraper la "crève", causer bien des soucis à ma Maman etc. Les balades étaient vite interrompues ou annulées à la première menace de pluie, et je rentrais à la maison en pleurant et honteux si j'avais marché dans une flaque. On emportait toujours des K-Ways qui ne servaient qu'extrêmement rarement parce qu'on avait préventivement couru à l'abri bien avant d'avoir à les enfiler.

Il en reste toujours quelque chose, mais aujourd'hui si je suis mouillé je me dis d'abord "et alors ?". On peut marcher les pieds mouillés pourvu d'en aérer l'épiderme toutes les 2 ou 3 heures. On peut cumuler un peu d'humidité dans son couchage, pourvu qu'au-delà d'un seuil critique il existe des solutions abritées pour le séchage. On peut porter des affaires mouillées si la couche chaude reste efficace, et si on s'assure de pouvoir les remplacer par des affaires sèches dans les bivouacs et les longues pauses. Le vrai risque à éviter est celui d'avoir froid.


Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

Trombi, Récits & Liste(s)
l'ultralighter più estremo di sempre

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#449 06-01-2024 22:56:51

Etimul
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

Pour ma part je suis très impressionné par ceux qui suivent cool !

L'art de la saga, peut-être ?

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#450 08-01-2024 09:25:21

Hervé27
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Inscription : 01-11-2017
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Re : [Récit + liste] Nuits du Sud : Norge På Langs été 2023 - 2822km - 70j

#59 samedi 19 août 2023
Iungsdalshytta - Hovet
32km +214 -680 6h37 (+pauses 0h00 !)
Cumul 2359km D+49300m Marche 578h
Vidéo #59

8byw1VuvZ.IntroJ59.s.jpeg

Après ma nuit au refuge gardé de Jungsdalshytta, la vue de ma fenêtre ce matin me fait instantanément comprendre que les plans d'avancer aujourd'hui sur l'itinéraire sont à l'eau. L'atmosphère est très sombre, il pleut et les vues sont bouchées. La dernière météo dont je dispose m'annonce de fortes précipitations pour ce soir et demain, et je dois donc choisir entre 3 options :
- attendre ici que ça passe
- avancer dans la montagne vaille que vaille, et viser la sécurité de l'un des 2 refuges intermédiaires entre ici et Finse qui était mon objectif de ce soir
- contourner l'obstacle et redescendre vers les vallées, au prix d'un grand détour de 3 jours et une traversée en diagonale Nord-Est / Sud-Ouest de l'Hardangervidda plutôt que Nord-Sud.

Je ne peux me résoudre à rester bloqué encore une voire 2 nuits dans un refuge gardé trop onéreux à mon goût, et y perdre autant de journées de marche compromettrait mon arrivée d'ici au 31 août. Je dois avancer.

Par la montagne je dois remonter à 1500m pour aller chercher le 1er refuge à une douzaine de kilomètres, et la motivation n'y est pas pour m'engager dans la pluie et le risque d'une dégradation dont tout indique qu'elle arrive plus vite que prévu. Encore autant jusqu'au deuxième refuge, et sur la 3ème section jusqu'à Finse j'ai des passages à 1700m : dans un référentiel "norvégien", ça vaut un 3000m alpin ... Bref, pas engageant dans le temps bouché de ce matin. En plus de cela il y a la question du ravitaillement : atteindre Finse avec 24 ou 48h de retard épuiserait mes réserves, sachant qu'en plus je prévoyais de sacrifier 1/2 journée à faire un aller-retour en train jusqu'à Flåm (au fond d'un fjord sur la côte) pour ravitailler. Tout cela risque de faire beaucoup de temps perdu.

La facilité et la raison sont donc de me détourner vers les vallées : je peux aller chercher une route de graviers de l'autre côté du lac, et m'y laisser descendre sans risques excessifs sous la pluie. Je repère une première localité à Hovet à ~30km, et 10 de plus jusqu'à la ville plus substantielle de Geilo. De quoi ravitailler d'une part, prendre abri pendant le plus gros de la perturbation d'autre part ... Le lâche soulagement de ne pas affronter le mauvais temps sur mon parcours initialement prévu me fait négliger le fait que je court-circuite ainsi la partie la plus sauvage et montagneuse de l'Hardangervidda, et en particulier les abords du grand glacier de l'Hardangerjøkulen ... C'est ainsi !

profond changement de plan. Temps estimé du détour en rouge : 3 jours ...
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Le temps des atermoiements et d'établir mon nouvel itinéraire, je quitte Jungsdalshytta à 7h20 sous la pluie fine. Je dois contourner l'extrémité Nord du lac de retenue du Stølsvatnet, puis quitter mon itinéraire pour emprunter un vague sentier mentionné par la carte le long de la rive Ouest du lac, avant d'y rattraper une piste qui me mènera droit au fond des vallées. Il semble y avoir un peu plus de lumière vers le Sud du Stølsvatnet, ce qui me conforte dans mon choix de direction. Je n'avais pas pris le temps de mettre mes chaussures à sécher au refuge, et au fond qu'importe puisqu'elles se réimbibent immédiatement ce matin.

La sente que j'essaye de suivre est parfois visible au sol, jamais balisée, et je dois souvent m'en remettre au GPS chaque fois que je la perds. Toujours sous la pluie, j'y alterne gadoue, rochers glissants, herbes et buissons détrempés, tourbières où je vais parfois me perdre. Entre la rive du lac à ma gauche et les pentes abruptes à ma droite, peu de risque d'errer longtemps hors de la trace, mais progresser est énergivore.

La lumière que je voyais au Sud à l'heure du départ a disparu, il pleut désormais autant devant moi que derrière. Le moral n'est pas bien haut, mais au moins je ne suis pas en train de lutter dans la montagne pour franchir un col ... L'ambiance a quelque chose d'un loch écossais, sûrement plaisante sous le soleil. Je croise une bâtisse magnifiquement entretenue, accessible seulement par mon mauvais sentier ou par le lac. Je vois l'emplacement de quelques autres, dont ils ne restent que les fondations. Parfois je dérange les moutons qui paissent les herbes épaisses ...

Au bout de 2 heures d'effort j'arrive enfin à une ferme, près de laquelle une voiture garée me confirme la présence, enfin, de la piste.

je quitte Jungsdalshytta, avec un espoir de lumière au Sud
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la direction de la montagne est quant à elle sans espoir
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un amour de hytta
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Route carrossable, habitat et grands espaces dégagés autour du lac signifient qu'il y a du réseau. Je bataille contre la pluie pour parvenir à utiliser mon téléphone, en premier lieu pour actualiser ma météo. Le plus fort des précipitations est maintenant annoncé à partir de 16h et doit durer toute la nuit. Sur la piste de graviers je peux marcher sur le pilote automatique, et je calcule que si je tiens la cadence sans pause je peux être à Hovet pour 14h. Toujours sur le téléphone, j'explore les hébergements possibles et en aperçoit plusieurs mentionnés par ma carte. Avec cette météo je me dis qu'il n'y aura pas foule, et n'essaye pas d'appeler pour réserver, je verrai bien sur place ... Je vois bien une offre alléchante et très bon marché un peu plus proche, mais elle suppose que je me réengage dans les sentiers détrempés pour franchir une crête boisée vers une vallée parallèle, qui plus est à contre-sens de ma direction. Je n'en ai plus le courage, et bourrine sur la piste.

bientôt au bout du lac
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au long de la piste
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Il passe une voiture de temps à autre, des motards, un bus, un camion ... Cette route n'est pas un terminus et fait partie de tout un maillage qui relient entre eux les grands lacs sur le plateau, parsemés de villégiatures. Quand la descente s'amorce après le bout du lac, la route s'accroche aux flancs boisés d'une jolie gorge, au fond de laquelle le torrent semble offrir de belles vasques de baignade ... mais pas aujourd'hui ! La pluie est alors trop forte pour que je me permette d'exposer mes appareils pour imager cette portion.

Le nombre de mots employés n'est pas proportionnel aux distances parcourues, et c'est à 13h30 après 6h de marche ininterrompue et déjà 30km que je rejoins enfin le fond de vallée et la route nationale. Je peux la longer sur les 2 derniers kilomètres qui me restent par une piste cyclable, à l'abri du trafic des voitures et camping cars.

une image pour résumer 20 km
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bientôt à l'abri
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La pluie s'est calmée quand je peux bifurquer et aller chercher le luxe d'un genre de motel au fond des bois et au bord de la rivière. Il n'y a pas foule, au point que la réception est fermée, mais un n° de tél est à disposition pour les arrivées inopinées. La patronne est là en 3 mn, et me voilà confortablement installé dans un bungalow.

Il est 14h et les fortes pluies ne devraient plus tarder. Nous sommes samedi et je ne veux pas risquer de me casser le nez demain matin à la supérette du village. Elle est à 500m, et malgré mon impérieux besoin de repos je n'attends pas pour m'y rendre et y faire un confortable ravitaillement, autant pour le temps mort à passer dans mon bungalow que pour les jours qui suivent. Il ne fait que bruinasser durant cet aller-retour, mais après cela la pluie battante va s'installer. Elle tambourinera toute la nuit sur la toiture, pendant que le grondement du torrent tout proche ne cessera de s'amplifier ...

home sweet home
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si le motel a survécu à Hans, je ne devrais pas être trop embêté cette nuit
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à suivre ...


Vidéo #59

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Sans peurs à surmonter, l'aventure n'est que promenade

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